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20/09/2022 | FRANCE | N°22TL00294

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 20 septembre 2022, 22TL00294


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel la préfète du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2101930 du 30 septembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2022 sous le n° 2

2MA00294 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel la préfète du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2101930 du 30 septembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2022 sous le n° 22MA00294 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL0029 et un mémoire enregistré le 10 mars 2022, Mme D..., représentée par Me Hamza, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2101930 du 30 septembre 2021 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète du Gard du 26 mars 2021 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Gard de lui délivrer un titre de séjour assorti d'une autorisation de travail dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et, dans l'attente, de lui délivrer d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dès la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de fait entachant la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

En ce qui concerne le bien fondé du jugement attaqué :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été précédée de la saisine de la commission du titre de séjour en méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'inexactitude matérielle des faits quant à la durée de son pacte civil de solidarité et à l'effectivité de sa vie commune ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2022, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 11 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 12 avril 2022 à 12 heures.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille du 17 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme A... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante camerounaise née le 2 décembre 1998, déclare être entrée en France le 11 juillet 2017. Le 13 mai 2020, l'intéressée a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions alors codifiées au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme D... relève appel du jugement du 30 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel la préfète du Gard lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient Mme D..., les premiers juges ont répondu, au point 3 du jugement attaqué, au moyen tiré de l'erreur de fait. Il suit de là que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'une omission à statuer sur ce moyen.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, il est constant qu'à la date de l'arrêté litigieux, Mme D... justifiait de la conclusion d'un pacte civil de solidarité avec un ressortissant français depuis le 11 avril 2019 et vivait avec celui-ci. Toutefois, il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux, qui mentionne au demeurant la date exacte de conclusion de ce pacte civil de solidarité, que l'autorité préfectorale a également tenu compte de l'ancienneté des liens privés et familiaux de l'appelante en France. Par suite, et indépendamment de l'effectivité de la vie commune dont se prévalait l'intéressée, les motifs tirés de ce que Mme D... ne disposait pas d'une ancienneté suffisante sur le territoire français, où elle déclare être entrée en vue d'y poursuivre des études, et qu'elle ne justifiait pas de liens stables et anciens en France au regard des liens conservés dans son pays d'origine suffisaient, à eux seuls, à lui refuser la délivrance d'un titre de séjour au titre de ses liens privés et familiaux en France. Par suite, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la préfète du Gard a entaché sa décision d'inexactitude matérielle en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale.

4. En deuxième lieu, aux termes du 7° de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa codification applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme D... fait valoir qu'elle est entrée régulièrement en France sous couvert d'un visa, qu'elle y a été scolarisée entre septembre 2017 jusqu'à l'année 2019-2020 sans parvenir à obtenir son baccalauréat, et se prévaut d'être pacsée avec un ressortissant français, rencontré au cours de l'année 2018, depuis le 11 avril 2019. Elle indique, en outre, avoir arrêté ses études, qu'elle souhaite reprendre ultérieurement, et disposer d'une promesse d'embauche en qualité de serveuse polyvalente tandis qu'elle ne souhaite pas quitter son concubin ni regagner son pays d'origine où elle déclare avoir subi des abus sexuels dans le cercle familial. Toutefois, par ces seuls éléments, elle ne peut être regardée comme ayant tissé en France des liens privés, familiaux et professionnels tels qu'elle aurait vocation à y rester alors, d'une part, qu'elle s'y maintient depuis l'année 2017 et n'a sollicité un titre de séjour que le 14 mai 2020 et, d'autre part, qu'elle ne fait pas état d'éléments permettant de caractériser l'ancienneté, la stabilité et l'intensité des liens développés en France où elle vit de manière précaire avec son concubin, lui-même étudiant, au regard de ceux conservés dans son pays d'origine. Dès lors, la préfète du Gard n'a ni fait une inexacte application des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ni porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, pas davantage méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. En troisième lieu et pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la préfète du Gard aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.

7. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa codification applicable au litige : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ". Le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour, lorsqu'il envisage de refuser un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que du cas des étrangers qui remplissent effectivement l'ensemble des conditions de procédure et de fond auxquelles est subordonnée la délivrance d'un tel titre et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Par suite, et compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, Mme D... n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour, elle n'est pas fondée à soutenir que la préfète du Gard était tenue de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'emporte la décision en litige sur la situation personnelle de Mme D... doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 5 du présent arrêt.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1 : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Gard.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2022.

La rapporteure,

N. El C...Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL00294


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL00294
Date de la décision : 20/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Nadia EL GANI-LACLAUTRE
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : HAMZA

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-09-20;22tl00294 ?
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