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23/06/2022 | FRANCE | N°21TL01910

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 23 juin 2022, 21TL01910


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 9 février 2018 par laquelle le maire de F... a accordé un permis de construire à M. A... C....

Par un jugement n° 1800757 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 21MA01910 puis au greffe de la cour administrative d'appel d

e Toulouse sous le n° 21TL01910, le 20 mai 2021, le 23 juillet 2021 et le 20 décembre 2021, M....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme G... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 9 février 2018 par laquelle le maire de F... a accordé un permis de construire à M. A... C....

Par un jugement n° 1800757 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 21MA01910 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL01910, le 20 mai 2021, le 23 juillet 2021 et le 20 décembre 2021, M. et Mme C..., représentés par Me Champauzac, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 9 février 2018 par laquelle le maire de la commune de F... a accordé un permis de construire à M. A... C... ;

3°) de mettre à la charge de la commune de F... une somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut d'information des conseillers municipaux en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;

- le permis de construire ne pouvait légalement être délivré sur le fondement du plan local d'urbanisme approuvé le 29 novembre 2017 dès lors qu'il méconnaît des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales et qu'il méconnaît l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme en autorisant une zone urbaine dans un secteur agricole en méconnaissance des axes majeurs du projet d'aménagement et de développement durables ;

- le plan local d'urbanisme est également illégal dès lors que le classement de la parcelle en litige en zone U méconnaît les orientations du projet d'aménagement et de développement durables et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir ;

- l'arrêté en litige méconnaît l'article 3 du règlement de la zone UC du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît l'article 4 du même règlement de zone dès lors qu'il n'est pas à moins de 150 mètres d'une borne à incendie ;

- il méconnaît aussi l'article 4 du même règlement de zone dès lors que le dossier ne fait apparaître aucun aménagement dédié aux eaux pluviales alors que le projet se situe dans une zone à risque d'inondation ;

- il méconnaît l'article 11 du même règlement de zone dès lors que les tuiles sont de type romane et non canal ;

- le dossier de demande de permis de construire comporte une insincérité dès lors qu'il n'évoque pas l'arrachage des vignes effectué sur la parcelle.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 octobre 2021 et le 10 janvier 2022, la commune de F..., représentée par la SELARL Landot et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme C... une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'insincérité du dossier de demande de permis de construire qui n'a été soulevé ni en première instance, ni dans la requête d'appel est irrecevable ;

- les autres moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 mars 2022 prise en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée au 17 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Barette, représentant M. et Mme C..., et D..., représentant la commune de F....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 27 juin 2013, le maire de F... a délivré à M. A... C... un permis de construire une maison d'habitation avec hangar. Cette autorisation a toutefois été annulée par jugement du tribunal administratif de Nîmes en raison de l'illégalité du document d'urbanisme sur le fondement duquel il avait été délivré. Par un nouvel arrêté du 9 février 2018, le maire de F... a accordé un permis de régularisation à M. A... C... sur le fondement du nouveau plan local d'urbanisme adopté le 29 novembre 2017. M. et Mme C..., en leur qualité de propriétaires riverains du projet, font appel du jugement du 23 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ce second permis de construire.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort de la lecture du jugement attaqué que, contrairement à ce qu'affirment M. et Mme C..., le tribunal administratif de Nîmes a statué sur le moyen tiré du défaut de convocation régulière des conseillers municipaux en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales dans son point 5. Par suite, ce moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les moyens soulevés, par voie d'exception, à l'encontre du plan local d'urbanisme :

3. Si un permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation. Par suite, un requérant demandant l'annulation d'un permis de construire ou d'un permis d'aménager ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut. Cependant, il résulte de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme que la déclaration d'illégalité d'un document d'urbanisme a, au même titre que son annulation pour excès de pouvoir, pour effet de remettre en vigueur le document d'urbanisme immédiatement antérieur. Dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu'un permis de construire ou un permis d'aménager a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

4. Dès lors que M. et Mme C... ne soutiennent pas que le permis de construire en litige méconnaîtrait les dispositions pertinentes du document d'urbanisme de la commune antérieur à son plan local d'urbanisme adopté le 29 novembre 2017, ils ne peuvent utilement soutenir, par la voie de l'exception devant le juge, que le permis de construire en litige a été délivré sous l'empire d'un plan local d'urbanisme illégal, aux motifs selon eux que le classement en zone UC du terrain d'assiette en litige serait incohérent avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables et serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'un détournement de pouvoir.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'insincérité de la demande de permis de construire :

5. Si M. et Mme C... soutiennent que M. A... C... a omis d'indiquer, dans son dossier de demande de permis de construire, avoir procédé à l'arrachage de vignes sur son terrain afin que ce dernier puisse être considéré comme constructible, la notice descriptive jointe à la demande indique que " le terrain est plat et à l'origine planté de vignes ". Ainsi, nonobstant la circonstance que M. A... C... n'ait pas indiqué que cet arrachage préalable aurait été illégal au regard des dispositions du code rural et de la pêche maritime, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier de demande aurait comporté des inexactitudes de nature à exercer une influence sur le sens de la décision prise par la commune de F... ou que la décision aurait été obtenue au moyen de manœuvres frauduleuses.

En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du plan local d'urbanisme :

6. En premier lieu, aux termes de l'article UC-3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de F... : " Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée présentant les caractéristiques techniques adaptées aux usages qu'elle supporte et aux opérations qu'elle dessert (défense contre l'incendie (...) ". Si les requérants soutiennent que le chemin rural permettant l'accès au projet aurait dû être pourvu d'une borne incendie, les dispositions précitées n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer un tel dispositif sur ce chemin. En outre, il ressort des pièces du dossier que le chemin d'accès à la construction du pétitionnaire a une largeur de plus de 3,5 mètres ce qui permet le passage des véhicules de lutte contre les incendies. Les requérants, qui ne se prévalent de la violation d'aucune disposition législative ou réglementaire à ce titre, ne sont pas davantage fondés à soulever un moyen tiré du défaut de consultation du service départemental d'incendie et de secours. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UC-3 du plan local d'urbanisme de la commune de F... doit donc être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes du 3 de l'article UC-4 du plan local d'urbanisme de la commune de F... : " si le réseau existe, les aménagements devront être tels qu'ils garantissent l'écoulement des eaux pluviales dans le réseau collecteur. En absence de réseau, les aménagements nécessaires au libre écoulement des eaux pluviales sont à la charge exclusive des propriétaires ". La circonstance que le pétitionnaire n'a prévu aucun aménagement particulier en matière d'assainissement des eaux pluviales est sans incidence sur la légalité de l'arrêté délivrant le permis de construire dès lors que ce dernier indique que les aménagements nécessaires au libre écoulement des eaux pluviales seront à la charge exclusive de ce dernier.

8. En troisième lieu, aux termes du 5 de l'article UC-4 du plan local d'urbanisme de la commune de F... : " les futurs projets devront respecter les règles précisées au titre VIII du présent règlement (dispositions issues du Règlement Départemental de Défense Extérieure Contre l'Incendie - RDDECI) ". En application du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie adopté par arrêté du préfet de Vaucluse en date du 10 janvier 2017, les constructions d'une surface totale de plancher comprise entre 50 m² et 250 m² devront se situer à moins de 150 m d'un poteau d'incendie, cette distance pouvant être portée à 200 m maximum si le poteau incendie est supérieur à 60 m3/h pendant une heure ou à moins de 100 m d'un point d'eau artificiel ou naturel. Aux termes de l'article 1.2.3. de ce même règlement : " La distance maximale mentionnée dans le présent document se mesure entre chaque PEI et l'entrée principale - ou tout autre accès pertinent - d'un bâtiment, d'une installation ou d'un aménagement (tente...), en suivant une voie engin ou à défaut un cheminement praticable en permanence aux " dévidoirs à roues ".

9. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de présentation du plan local d'urbanisme de la commune de F..., que la zone UC, qui est réduite " à son enveloppe bâtie ", comprend le terrain d'assiette de la construction en litige. Ainsi, les auteurs de ce plan ont entendu reconnaître l'existence de la construction de M. C... laquelle ne peut dès lors pas être regardée comme un futur projet au sens de l'article UC-4 du plan local d'urbanisme de la commune de F.... Dans ces conditions, M. et Mme C... ne peuvent pas utilement se prévaloir de ces dispositions à l'encontre du permis de régularisation accordé à M. A... C... le 9 février 2018. Au demeurant, si les requérants font valoir que la distance entre le poteau d'incendie dont le débit est de 60 m3/h pendant une heure et la construction du pétitionnaire s'établit à 276,78 mètres en passant par les voies carrossables, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette distance serait supérieure à 200 mètres en empruntant un cheminement praticable en permanence aux dévidoirs à roues. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UC-4 du plan local d'urbanisme de la commune de F... doit être écarté.

10. En dernier lieu, l'article UC-11 du plan local d'urbanisme de la commune de F..., relatif à l'aspect extérieur des constructions, dispose que : " Les matériaux de couverture seront de type tuile canal en terre cuite. Ils s'harmoniseront avec ceux des constructions avoisinantes ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que les tuiles romanes en terre cuite figurant dans la notice descriptive du projet, qui sont des tuiles grand moule galbées sur leur partie supérieure, à l'instar d'une tuile canal, mais plate sur leur partie inférieure cachée, à la différence de ces mêmes tuiles, ne s'harmoniseraient pas avec les tuiles des constructions avoisinantes. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article UC-11 du plan local d'urbanisme de la commune de F... doit être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de F..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à M. et Mme C... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme C... la somme de 1 500 euros à verser à la commune de F... au titre de ces mêmes frais.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme C... verseront à la commune de F... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... et B... C..., à la commune de F... et à M. A... C....

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Barthez, président,

Mme Restino, première conseillère,

Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

A. BarthezLe greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse en ce qui le concerne ou à tous

huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties

privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°21TL01910


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21TL01910
Date de la décision : 23/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme CHERRIER
Avocat(s) : SELARL LANDOT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-06-23;21tl01910 ?
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