Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société Green City Immobilier a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 4 mai 2017 par lequel le maire de La Salvetat-Saint-Gilles lui a refusé le permis de construire sur un terrain situé 41 avenue des Pyrénées un ensemble de trente-trois logements composé de cinq maisons individuelles et de trois bâtiments de vingt-huit logements.
Par jugement n° 1702966 du 13 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision précitée.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 21 février 2020 sous le n° 2000623 à la cour administrative d'appel de Bordeaux puis sous le n° 2020623 à la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 22 janvier 2021, la commune de La Salvetat-Saint-Gilles, représentée par Me Thibaud, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société Green City Immobilier devant le tribunal administratif de Toulouse ;
3°) de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de la société Green City Immobilier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le refus de permis de construire est bien justifié, en application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, par le risque à la sécurité publique occasionné aux usagers de la voie publique comme aux agents collecteurs des ordures ménagères en raison de la localisation et de la superficie limitée à 33 m² de l'aire destinée à accueillir les huit bacs d'ordures ménagères qui obligera le camion de collecte à stationner sur l'avenue des Pyrénées très passante en occultant le feu tricolore situé à 20 mètres alors que la ligne discontinue de dissuasion n'interdit pas le dépassement de véhicules lents ou arrêtés ;
- en outre, le projet crée un risque plus global pour la sécurité routière en contribuant à une augmentation du trafic d'au minimum 25 véhicules devant s'insérer sur l'avenue au niveau du feu tricolore.
Par un mémoire enregistré le 7 juillet 2020, la société Green City Immobilier, représentée par Me Courrech, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune requérante d'une somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir notamment que le risque allégué n'est pas établi alors qu'un usager de la voie ne saurait doubler en franchissant la ligne de dissuasion présente.
Par ordonnance du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la commune de La Salvetat-Saint-Gilles.
Vu le jugement attaqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la route ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fabien, présidente assesseure ;
- les conclusions de Mme Torelli, rapporteur publique ;
- les observations de Me Thibaud, représentant la commune de La Salvetat-Saint-Gilles ;
- et les observations de Me Courrech, représentant la société Green City Immobilier.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 4 mai 2017, le maire de La Salvetat-Saint-Gilles a rejeté la demande de permis de construire, sur un terrain situé 41 avenue des Pyrénées, un ensemble de trente-trois logements, composé de cinq maisons individuelles et de trois bâtiments, présentée par la société Green City Immobilier, en se fondant sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et les risques présentés par ce projet pour les usagers de la voie publique et les agents collecteurs des ordures ménagères compte tenu de la nécessité pour le camion de ramassage de stationner sur la voie en occultant la vue du feu tricolore situé à proximité. La commune de La Salvetat-Saint-Gilles fait appel du jugement du 13 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté.
2. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Pour apprécier si les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, il appartient à l'autorité compétente en matière d'urbanisme, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent. Les risques d'atteinte à la sécurité publique visés par ce texte sont aussi bien les risques auxquels peuvent être exposés les occupants de la construction pour laquelle le permis est sollicité que ceux que l'opération projetée peut engendrer pour des tiers. Lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.
Sur le bien-fondé du motif d'annulation retenu par le jugement attaqué :
3. Il résulte des dispositions de l'article R. 412-18 du code de la route que le franchissement de lignes discontinues longitudinales apposées sur la chaussée, y compris de celles dites de dissuasion matérialisées par des lignes de 3 mètres séparées par des espaces de 1,33 mètre, est autorisé sous réserve du respect des consignes de dépassement, et en premier lieu de prudence, énoncées par les articles R. 414-4 à 17 du même code.
4. Il est constant que le projet de construction en litige prévoit une aire de 33 m² sur laquelle il est prévu de recevoir huit bennes à ordures ménagères, la situation et la configuration de cette aire imposant au camion de ramassage de stationner sur l'avenue des Pyrénées pendant la collecte des déchets contenus dans ces bennes en occultant la vue du feu tricolore situé à environ 20 mètres. Par ailleurs, il ressort de ce qui a été dit au point précédent que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif de Toulouse, les automobilistes sont autorisés à franchir les lignes discontinues dites de dissuasion figurant sur la chaussée. Dans ces conditions et compte tenu de l'impossibilité pour les usagers de cette voie d'apercevoir le feu tricolore précédant le camion de ramassage pendant tout le temps nécessaire à la collecte des ordures ménagères des immeubles projetés et de la possibilité de dépassement à gauche des véhicules lents ou arrêtés sur cette voie départementale constituant l'axe principal de la commune et recevant environ 10 000 véhicules par jour, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le maire de La Salvetat-Saint-Gilles a estimé que le projet comportait des risques d'une probabilité et d'une gravité suffisantes pour mettre en danger la sécurité des usagers de la voie publique comme celle des agents collecteurs, la circonstance, à la supposer établie, que la collecte des ordures ménagères des habitations situées à proximité serait déjà de nature à perturber le trafic n'étant pas de nature à amoindrir la probabilité et la gravité de ce risque. Dès lors, la commune de La Salvetat-Saint-Gilles est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a, pour annuler l'arrêté du 4 mai 2017, estimé que le projet n'induisait pas un risque pour la sécurité publique suffisant.
5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Green City Immobilier devant le tribunal administratif de Toulouse.
Sur les autres moyens soulevés en première instance :
6. La société Green City Immobilier a soulevé en première instance le moyen subsidiaire tiré de ce que le maire ne pouvait se borner à rejeter sa demande de permis de construire dès lors qu'à le supposer établi, le risque d'atteinte à la sécurité publique pouvait être prévenu par une prescription spéciale. Il ressort en effet de l'avis émis le 2 mai 2017 par la communauté de communes de la Save-au-Touch, en sa qualité de gestionnaire de la voierie communale et de responsable de la collecte des ordures ménagères, que la réalisation de colonnes enterrées est envisageable et il n'est pas contesté par la commune de La Salvetat-Saint-Gilles qu'elle serait de nature à pallier le risque d'atteinte à la sécurité publique en permettant le stationnement du camion de ramassage sur l'aire d'une superficie limitée à 33 m² réservée par le projet au dépôt et à la collecte des ordures ménagères sans imposer en conséquence une modification substantielle du projet. Par suite, et compte tenu de ce qui été dit point 2, ce moyen était de nature à fonder l'annulation de l'arrêté du 4 mai 2017.
7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature, en l'état de l'instruction, à entraîner l'annulation de la décision en litige.
8. Il résulte de ce qui précède que la commune de La Salvetat-Saint-Gilles n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 4 mai 2017 rejetant la demande de permis de construire de la société Green City Immobilier.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de La Salvetat-Saint-Gilles demande sur leur fondement soit mise à la charge de la société Green City Immobilier qui n'est pas partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions du même article, de mettre à la charge de la commune de La Salvetat-Saint-Gilles le versement à la société Green City Immobilier d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés à l'occasion du litige.
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par la commune de La Salvetat-Saint-Gilles est rejetée.
Article 2 : La commune de La Salvetat-Saint-Gilles versera à la société Green City Immobilier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Salvetat-Saint-Gilles et à la société Green City Immobilier.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président de chambre,
Mme Fabien, présidente assesseure,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.
La rapporteure,
M. Fabien
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au préfet du département de la Haute-Garonne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20TL20623