Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), devenue la société Relyens Mutual Insurance, en sa qualité d'assureur du grand hôpital de l'Est francilien, venant aux droits du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, à lui verser la somme totale de 620 147,43 euros en réparation des préjudices résultant de sa prise en charge, après l'accident dont il a été victime le 19 mai 2013, par le centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, déduction faite de la provision qu'il a reçue à hauteur de 10 000 euros.
Par un jugement n° 1911550 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a condamné la société Relyens Mutual Insurance à verser, d'une part, à M. C... la somme de 271 765,13 euros, d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 22 986,53 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2020, et la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, et, enfin, a mis à la charge de la société Relyens Mutual Insurance la somme de 2 500 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 août 2023, M. C..., représenté par Me Guerreau, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à ses prétentions indemnitaires ;
2°) de condamner la société Relyens Mutual Insurance à lui verser la somme globale de 646 377,51 euros, avant déduction de la provision de 10 000 euros déjà versée ;
3°) de mettre à la charge de la société Relyens Mutual Insurance la somme de 8 000 euros au titre de ses frais liés à la première instance et la somme de 5 000 euros au titre de ses frais liés à l'appel, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement doit être confirmé s'agissant tant de la responsabilité du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny que du taux de perte de chance fixé à 50 % de récupérer l'usage complet du membre supérieur droit et de ne pas conserver de séquelles d'aspects psycho-traumatiques ;
- il doit être réformé s'agissant du quantum de l'indemnisation accordée :
- par la production de l'attestation de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne du 13 juillet 2023, il établit ne pas avoir bénéficié d'une prise en charge par un organisme de mutuelle des dépenses de santé restées à sa charge, c'est-à-dire des frais de transport en ambulance d'un montant total de 132,19 euros, des honoraires de kinésithérapie de 58,57 euros, des honoraires de psychiatre de 240 euros ;
- les frais d'expertise et les frais d'assistance par un médecin conseil d'un montant total de 3 850 euros doivent être mis à la charge de l'assureur du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny ;
- ses pertes de gains professionnels actuels doivent être évaluées à la somme de 26 230,08 euros à laquelle s'ajoutent les sommes de 23 980,08 euros et de 13 115,04 euros en sa qualité de sapeur-pompier pour la période du 1er août 2013 au 9 février 2016 ;
- le jugement doit être confirmé s'agissant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance par tierce-personne, avant la consolidation de son état de santé ;
- en l'absence de prise en charge des dépenses de santé futures liées à des suivis psychiatrique et psychologique par une mutuelle, l'indemnité de 960 euros, après application du taux de perte de chance, doit lui être allouée à ce titre ;
- l'indemnité allouée au titre de l'assistance permanente par tierce-personne, à raison d'une heure d'assistance quotidienne au taux horaire de 25 euros, doit être évaluée à la somme globale de 221 424, 79 euros, après application du taux de perte de chance, et doit être versée sous la forme d'une capitalisation viagère ;
- les frais d'équipement de son véhicule doivent être évalués à 12 867,30 euros, après application du taux de perte de chance ;
- la perte de gains professionnels futurs doit être évaluée à 144 516 euros, après application du taux de perte de chance ;
- l'incidence professionnelle de la faute commise par les médecins du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, qualifiée de majeure par l'expert judiciaire, doit être évaluée à une somme qui ne saurait être inférieure à 100 000 euros, après application du taux de perte de chance ;
- le déficit fonctionnel temporaire, pour la période allant du 19 mai 2013 au 9 février 2016, doit être évalué à 4 834,37 euros, après application du taux de perte de chance ;
- les souffrances endurées ne peuvent être évaluées à une somme inférieure à 15 000 euros, après application du taux de perte de chance ;
- le préjudice esthétique temporaire doit être évalué à 1 500 euros, après application du taux de perte de chance ;
- le déficit fonctionnel permanent doit être évalué à 43 500 euros, après application du taux de perte de chance ;
- le préjudice d'agrément doit être évalué à 15 000 euros, après application du taux de perte de chance ;
- le préjudice esthétique permanent doit être évalué à 2 000 euros, après application du taux de perte de chance ;
- le préjudice d'établissement doit être évalué à 10 000 euros, après application du taux de perte de chance ;
- le préjudice sexuel doit être évalué à 15 000 euros, après application du taux de perte de chance.
Par un mémoire enregistré le 28 juin 2024, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, représentée par Me Archambault, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a limité à la somme de 22 986,53 euros le montant de ses débours mis à la charge de la société Relyens Mutual Insurance ;
2°) de condamner la société Relyens Mutual Insurance à lui verser la somme de 33 413,05 euros au titre de ses débours, assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2020 ;
3°) de condamner la société Relyens Mutual Insurance à lui verser la somme de 1 191 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
4°) de mettre à la charge de la société Relyens Mutual Insurance la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement doit être confirmé s'agissant tant de la responsabilité du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny que du taux de perte de chance fixé à 50 % de récupérer l'usage complet du membre supérieur droit et de ne pas conserver de séquelles d'aspects psycho-traumatiques ;
- le recours subrogatoire de la caisse au titre des indemnités journalières servies par elle s'exerçant sur le seul poste indemnitaire réparant la perte de revenus supportée par la victime, elle a droit au remboursement des indemnités journalières versées à son assuré, soit 9 259,96 euros après application du taux de perte de chance fixé à 50 % ;
- les prestations versées pour le compte de M. C..., imputables aux fautes commises par le centre hospitalier, s'élèvent à la somme provisoire de 66 826,11 euros, selon le relevé de prestations du 5 mars 2019 et l'attestation d'imputabilité du 28 janvier 2017, soit à la somme de 33 413,05 euros après application du taux de perte de chance fixé à 50 % ;
- en vertu de l'arrêté du 18 décembre 2024 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2024, elle est fondée à solliciter le versement de la somme de 1 191 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Par des mémoires en défense et d'appel incident, enregistrés les 2 juillet et 20 août 2024, la société Relyens Mutual Insurance, représentée par le cabinet Le Prado et Gilbert, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de M. C... ;
2°) de rejeter les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne ;
et, par la voie de l'appel incident,
3°) de réformer le jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Melun en ramenant les sommes allouées à M. C... à de plus justes proportions.
Elle soutient que :
- M. C... ne justifie pas que les dépenses de santé actuelles restées à sa charge n'auraient pas été prises en charge par une mutuelle ; sa demande tendant au remboursement des sommes de 120 euros et 95,38 euros au titre des frais de santé restés à sa charge doit être rejetée ;
- le tribunal a fait droit à sa demande tendant au remboursement des frais d'assistance à expertise ;
- la demande du requérant au titre de la perte de gains professionnels doit être rejetée ; le montant alloué à ce titre est excessif dès lors que le tribunal aurait dû évaluer la perte de gains professionnels sur la base d'une activité rémunérée sur la base de la durée légale du travail, à savoir 35 heures hebdomadaires et non 48 heures ; M. C... ne justifie pas de ses activités de sapeur-pompier volontaire et des éventuelles indemnités qu'il pouvait percevoir ;
- M. C... ne justifie pas que les dépenses de santé exposées après la consolidation de son état de santé restées à sa charge n'auraient pas été prises en charge par un organisme de mutuelle ;
- s'agissant des frais d'assistance par une tierce personne, c'est à bon droit que le tribunal a évalué les débours exposés jusqu'à la date du jugement, puis évalué les frais futurs ; les besoins annuels du requérant s'élèvent à 412 heures et non 413 ; le taux horaire pour une aide non spécialisée, en 2016, doit être fixé à 15 euros ;
- M. C... n'établit pas que, préalablement à l'intervention litigieuse, il ne disposait pas d'une voiture munie d'une boîte automatique ; les frais d'adaptation du véhicule ne sauraient donc être mis à sa charge ; en tout état de cause, la somme sollicitée de 3 000 euros n'est pas justifiée ; à titre subsidiaire, la périodicité de renouvellement du véhicule ne saurait être inférieure à sept ans ;
- la somme de 21 817,20 euros allouée en première instance au titre de la perte des gains futurs sera confirmée ;
- l'évaluation forfaitaire par M. C... de la perte de droits à la retraite n'est pas étayée par des données chiffrées ; par ailleurs, ce poste de préjudice est, en l'état, éventuel, M. C... ayant la possibilité d'évoluer dans sa carrière professionnelle ;
- la somme de 15 000 euros allouée par les premiers juges au titre de l'incidence professionnelle est conforme à la jurisprudence ;
- la somme de 2 100 euros allouée par les premiers juges au titre du déficit fonctionnel temporaire, après application de la perte de chance, est conforme à la jurisprudence ; M. C... n'est pas fondé à demander qu'un taux journalier de 35 euros soit retenu ;
- les premiers juges ont fait une appréciation excessive des souffrances endurées par M. C... en lui allouant la somme de 15 000 euros, avant application du taux de perte de chance, alors que la somme accordée ne saurait excéder 7 500 euros ;
- la somme de 400 euros allouée en première instance au titre du préjudice esthétique temporaire sera confirmée ;
- la somme de 62 000 euros allouée par les premiers juges, avant application du taux de perte de chance, au titre du déficit fonctionnel permanent de 25 % est conforme à la jurisprudence ;
- M. C... ne justifie pas avoir subi un préjudice d'agrément ;
- la somme de 2 000 euros allouée par les premiers juges, avant application du taux de perte de chance, au titre du préjudice esthétique permanent est conforme à la jurisprudence ;
- M. C... étant père de trois enfants, dont l'un est né postérieurement aux faits litigieux, il n'est pas fondé à demander réparation du préjudice d'établissement ;
- la somme de 2 000 euros allouée en première instance au titre du préjudice sexuel sera confirmée ;
- les préjudices étant évalués poste par poste, et en cas de partage de responsabilité ou de perte de chance, priorité étant donnée à la victime, aucun solde de l'indemnité mise à sa charge au titre des pertes de gains professionnels et des frais de transport ne peut être accordé à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- et les observations de Me Guerreau, avocat de M. C....
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'une chute de vélo survenue le 19 mai 2013, M. C..., alors âgé de trente-cinq ans et droitier, s'est blessé au membre supérieur droit et a été transporté par les pompiers au centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny. Les résultats de l'examen radiographique ont montré une fracture déplacée de la tête radiale avec un fragment antérieur, qui a été immobilisée par attelle. Revu en consultation le 18 juin 2013 et présentant alors une raideur du coude droit, M. C... a subi, le lendemain, une mobilisation de son coude sous anesthésie générale, dont les suites immédiates ont été marquées par une douleur intense et un très volumineux hématome. Lors de la consultation du 10 septembre 2013, constatant des paresthésies des quatrième et cinquième doigts de la main de M. C..., les médecins du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny l'ont adressé en consultation à l'hôpital européen Georges Pompidou. Dans cet établissement, un arthroscanner a été réalisé le 7 novembre 2013 et a mis en évidence un cal vicieux de la fracture de la tête radiale ainsi qu'une pseudarthrose de la pointe de l'apophyse coronoïde. Le 18 février 2014, M. C... a dû subir une nouvelle intervention chirurgicale consistant en une arthrolyse du coude, une neurolyse avec transposition du nerf ulnaire et une résection de la tête radiale. Il a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux d'Ile-de-France qui a ordonné une mesure d'expertise. Le docteur B... a déposé son rapport le 7 août 2014. La commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux d'Ile-de-France a rendu un avis le 4 novembre 2014. Après l'apparition d'ossification articulaire et d'un enraidissement du coude, M. C... a été hospitalisé du 7 au 15 septembre 2015 pour une chirurgie d'excision des calcifications articulaires et une nouvelle arthrolyse. Le 25 janvier 2016, M. C... a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Melun qui a, par une ordonnance du 25 mars 2016, ordonné une nouvelle expertise médicale. Les deux experts désignés, le professeur E..., chirurgien orthopédique, et le docteur F..., psychiatre, ont remis leurs rapports les 9 août et 7 juillet 2017. Par un courrier du 24 août 2019, reçu le 29 août suivant, M. C... a formé auprès de la SHAM, devenue la société Relyens Mutual Insurance, en sa qualité d'assureur du grand hôpital de l'Est francilien venant aux droits du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, une demande indemnitaire préalable au titre des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa prise en charge par ce centre hospitalier. Cette demande a été implicitement rejetée. Par un jugement du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a condamné la société Relyens Mutual Insurance à verser, d'une part, à M. C... une somme de 271 765,13 euros et, d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 22 986,53 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2020, ainsi que la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. M. C... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande indemnitaire. La société Relyens Mutual Insurance demande à la cour de réformer ce jugement en ramenant les sommes allouées à M. C... à de plus justes proportions. La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne demande à la cour de réformer le jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande.
Sur la responsabilité du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny :
2. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) ".
3. Il résulte de l'instruction, et notamment des rapports d'expertise du docteur B... et du professeur E..., que le traitement d'une fracture de la tête radiale déplacée accompagnée d'un arrachement de l'apophyse coronoïde consiste en une immobilisation du coude, soit dans une attelle coude au corps, soit dans une attelle plâtrée pendant huit à dix jours au maximum afin de permettre une mobilisation la plus précoce possible, sous traitement anti-inflammatoire et antalgique, en raison du risque d'enraidissement du coude parfaitement connu. Le coude de M. C... a cependant été immobilisé pendant trois semaines, soit bien plus longtemps que le traitement recommandé pour ce type de fracture, ce qui a causé une importante raideur du membre supérieur accompagnée de douleurs. En outre, selon les experts, du fait de cette raideur post-traumatique, la mobilisation du coude de M. C... réalisée sous anesthésie générale le 19 juin 2013 n'était pas recommandée en raison des risques de lésions ligamentaires, de lésions cartilagineuses et des ossifications péri-articulaires secondaires. Dans ces conditions, le traitement, par les médecins du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, de la fracture de la tête radiale déplacée et de l'arrachement de l'apophyse coronoïde dont a été victime M. C... n'a pas été conforme aux règles de l'art et aux données acquises de la science, ce manquement étant constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier, ce qui, au demeurant, n'est pas contesté en appel par la société Relyens Mutual Insurance, son assureur.
Sur l'application d'un taux de perte de chance :
4. Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou du traitement d'un patient a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé, n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.
5. Il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertises du docteur B... et du professeur E... que la faute commise par les médecins du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny a, compte tenu de la nature de la lésion initiale, qualifiée de " traumatisme très grave du coude droit ", qui limitait les chances de récupération complète de M. C..., seulement entraîné pour lui une perte de chance de récupérer l'usage complet du membre supérieur droit et de ne pas conserver de séquelles d'aspects psycho-traumatiques, perte de chance qui doit être fixée à 50 %, ce qui n'est pas contesté en appel par les parties.
Sur l'évaluation des préjudices :
6. Il ressort du rapport d'expertise du docteur F..., psychiatre, que cet expert a fixé la date de consolidation de l'état de santé psychique de M. C... au 12 octobre 2016, date de l'arrêt de la prescription d'antidépresseurs et de l'absence d'évolution de ses lésions psychiatriques imputables à la prise en charge par le centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny de l'accident du 19 mai 2013. Toutefois, la date de consolidation de l'état physique de M. C... a été fixée par le professeur E... au 9 février 2016, date à laquelle il a été mis fin à tous les traitements de rééducation et d'immobilisation par attelle. Au vu de l'ensemble des préjudices subis par M. C... en cause en l'espèce, il y a lieu de retenir cette dernière date comme étant celle de la consolidation de son état de santé.
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
S'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires :
Quant aux dépenses de santé actuelles :
7. D'une part, le poste de dépenses de santé actuelles vise à indemniser l'ensemble des dépenses de santé, incluant les frais d'hospitalisation, médicaux, pharmaceutiques, d'appareillage et de transport médicalisé exposés par M. C... et la CPAM de Seine-et-Marne pour le compte de son assuré, avant la date de consolidation de l'état de santé de l'intéressé.
8. D'autre part, dans le cas où la réparation, fondée sur un pourcentage représentatif d'une perte de chance, est partielle, la somme que doit réparer le tiers responsable au titre d'un poste de préjudice doit être attribuée par préférence à la victime, le solde étant, le cas échéant, attribué aux tiers subrogés.
9. Il ne résulte pas de l'instruction, alors qu'il ressort de l'attestation de la CPAM de Seine-et-Marne du 13 juillet 2023 qu'il a bénéficié de la couverture maladie universelle complémentaire du 1er avril 2012 au 31 mars 2015, que M. C..., qui était sans emploi à la date de l'accident du 19 mai 2013, disposait d'une mutuelle. Il ressort de la facture de la société Ambulances du Verger du 13 janvier 2016, que M. C... s'est acquitté de la somme de 132,19 euros, au titre de son transport au centre de rééducation de Pontault-Combault pour la période du 29 septembre au 16 octobre 2015. En outre, il ressort de la facture d'un masseur-kinésithérapeute que M. C... a versé la somme de 58,57 euros au titre des séances de kinésithérapie pour la période du 3 novembre au 8 décembre 2015. Il ressort des factures d'un psychiatre du 9 novembre 2015 qu'au titre des consultations des 12 octobre, 9 novembre et 14 décembre 2015 d'un montant total de 240 euros, le montant " Assurance maladie obligatoire " (AMO) s'est élevé à 25,90 euros par séance, soit 77,70 euros pour les trois séances. Dans ces conditions, la somme restée à la charge de M. C... au titre de ces trois consultations s'élève à 162,30 euros. Par suite, les dépenses de santé restées à la charge de M. C... s'élèvent à la somme totale de 353,06 euros.
10. Il ressort de la notification des débours du 28 novembre 2017 et de l'attestation d'imputabilité du médecin conseil du 16 novembre 2017 que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne justifie avoir exposé pour son assuré, en lien avec la faute commise par le centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, des frais d'hospitalisation du 17 février au 25 février 2014 à l'hôpital européen Georges Pompidou, du 26 février au 28 mars 2014 au centre de rééducation de Pontault-Combault, du 31 mars au 20 juin 2014 pour une hospitalisation en hôpital de jour trois jours par semaine, du 7 septembre au 15 septembre 2015 à l'hôpital européen Georges Pompidou et du 16 septembre au 16 octobre 2015 au centre de rééducation de Pontault-Combault, qui s'élèvent à 44 918,81 euros. Elle a également pris en charge des frais médicaux pour un montant de 993,19 euros, des frais pharmaceutiques pour un montant de 60,98 euros et des frais de transports pour un montant de 2 333,21 euros. Par suite, la CPAM de Seine-et-Marne justifie avoir pris en charge la somme totale de 48 306,19 euros.
11. Le montant total des dépenses de santé actuelle s'élève ainsi à 48 659,25 euros et celui de l'indemnité susceptible d'être mise à la charge de la société Relyens Mutual Insurance, après application du taux de perte de chance fixé à 50 %, à 24 329,25 euros. Par suite, la société Relyens Mutual Insurance doit être condamnée à verser à ce titre à M. C... la somme de 353,06 euros et à la CPAM de Seine-et-Marne la somme de 23 976,19 euros. Le jugement doit donc être réformé sur ce point.
Quant aux frais divers :
12. Si M. C... demande à la cour de condamner la société Relyens Mutual Insurance à lui rembourser les frais d'assistance par un médecin conseil lors des opérations d'expertise d'un montant total de 3 850 euros, il ressort du point 36 du jugement que le tribunal a déjà mis ces frais à la charge de la société Relyens Mutual Insurance. Ce point n'est pas contesté en appel par la société.
Quant aux frais d'assistance par une tierce personne :
13. M. C... et la société Relyens Mutual Insurance ne contestent pas l'évaluation par les premiers juges des frais liés au handicap dans lesquels ils ont inclus, selon les points 14 à 16 du jugement, les frais d'assistance par une tierce personne avant la consolidation de l'état de santé de M. C... et les frais de transport médicalisé pris en charge par la CPAM de Seine-et-Marne. Ces frais ont été évalués, après application du taux de perte de chance, à une somme de 19 674,09 euros qui a été allouée intégralement à M. C.... Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 7 du présent arrêt, les frais de transport médicalisé de M. C... pris en charge par la caisse se rattachent au poste des dépenses de santé actuelles et non à celui des frais liés au handicap. Par suite, il y a lieu pour la cour d'évaluer, à nouveau, le poste des frais liés au handicap après avoir soustrait les frais de transport médicalisé pris en charge par la caisse, c'est-à-dire d'évaluer les frais d'assistance par une tierce personne.
14. Il résulte de l'instruction que, même si aucun manquement aux règles de l'art n'avait été commis dans sa prise en charge, en raison de la gravité de la fracture initiale dont il a été victime, la période de convalescence de M. C... aurait été de trois mois, prenant fin le 19 août 2013. Il ressort du rapport d'expertise du professeur E... que l'état de santé de M. C... a nécessité l'aide d'une tierce personne pour les besoins de la vie quotidienne à raison de 2 heures 30 par jour, et non par semaine comme mentionné par erreur par le tribunal, pendant la période du 19 août 2013 au 9 février 2016 (905 jours), à l'exclusion des périodes pendant lesquelles il a été hospitalisé, soit du 17 février au 25 février 2014 (9 jours) à l'hôpital européen Georges Pompidou et du 26 février au 28 mars 2014 (31 jours) au centre de rééducation de Pontault-Combault, du 7 septembre au 15 septembre 2015 (9 jours) à l'hôpital européen Georges Pompidou et du 16 septembre 2015 au 28 septembre 2015 (14 jours) pour bénéficier d'une rééducation à temps complet. En revanche, il n'y a pas lieu de déduire les périodes du 31 mars au 20 juin 2014 et du 29 septembre au 16 octobre 2015 pendant lesquelles M. C... a été admis seulement en hôpital de jour. La période à indemniser est ainsi de 842 jours. Sur la base d'un taux horaire de l'assistance par une tierce personne non spécialisée évalué à 18 euros et proratisé pour prendre en compte les congés payés et les jours fériés sur une base annuelle de 412 jours, la réparation de ce chef de préjudice peut être fixée à 42 770 euros, soit après application du taux de perte de chance fixé à 50 %, à 21 385 euros. Toutefois, M. C... ne conteste pas en appel, ainsi qu'il a déjà été dit, le montant de l'indemnité de 19 674,09 euros mis à la charge de la société Relyens Mutual Insurance par le tribunal, qu'il n'y a, dès lors, pas lieu de réévaluer.
Quant aux pertes de gains professionnels actuels :
15. Il résulte de l'instruction que même si les médecins du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny n'avaient commis aucune faute, la gravité de la fracture initiale de la tête radiale avec traumatisme ligamentaire de M. C... aurait, ainsi qu'il a déjà été dit, nécessité des soins et une convalescence pendant trois mois, entre le 19 mai et le 19 août 2013. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à solliciter une indemnité au titre de la perte de l'allocation d'aide au retour à l'emploi pendant cette période. Si M. C... était sans emploi à la date de l'accident du 19 mai 2013, il verse aux débats une promesse d'embauche datée du 29 avril 2013, émanant de la société Ambulances Daumesnil, par contrat à durée indéterminée, pour un emploi d'auxiliaire ambulancier, prévoyant un salaire de 2 300 euros brut mensuel, pour une durée de travail hebdomadaire fixée à 48 heures travaillées en fonction des heures supplémentaires accomplies, et une date d'entrée en fonction fixée au 1er août 2013. Il produit une seconde promesse d'embauche datée du 17 mai 2013, émanant de la société Calypso Services, par contrat à durée indéterminée pour un emploi d'agent de sécurité, prévoyant un salaire de 1 462,10 euros brut mensuel, pour une durée de travail hebdomadaire fixée à 35 heures et une date d'entrée en fonction fixée au 3 juin 2013. Il résulte de l'instruction que l'intéressé avait les qualifications requises pour occuper ces emplois. Dans ces conditions, M. C... établit qu'il avait une chance sérieuse d'occuper de tels emplois, ce qui au demeurant n'est pas contesté par la société Relyens Mutual Insurance. Au vu de l'ensemble de ces éléments, en se fondant sur un salaire moyen de 1 700 euros nets par mois, correspondant au montant du salaire prévu par la promesse d'embauche de la société Ambulances Daumesnil pour 48 heures de travail hebdomadaire dont une partie payée en heures supplémentaires, les premiers juges ont procédé à une juste appréciation des pertes de gains professionnels de M. C... à compter du 19 août 2013 jusqu'au 3 septembre 2015, date de sa reprise d'un emploi, soit un montant total de 41 650 euros.
16. A partir du 3 septembre 2015, M. C... a été recruté par la société Calypso Services sur un emploi d'agent d'exploitation à temps partiel, soit une durée de travail de 80 heures par mois, pour un salaire mensuel brut de 794,39 euros. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur E... que la limitation du temps de travail de M. C... est imputable aux fautes commises par le centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny. Dans ces conditions, les premiers juges ont procédé à une juste appréciation des pertes de gains professionnels de M. C... pour la période du 3 septembre 2015 au 9 février 2016, date de consolidation de son état de santé, en l'évaluant à 600 euros par mois, soit à 3 150 euros pour la période en cause.
17. En revanche, si M. C... soutient qu'il percevait une indemnité mensuelle du fait de son activité de sapeur-pompier volontaire, il ne produit pas plus qu'en première instance d'éléments permettant d'étayer le versement de cette indemnité. Dans ces conditions, cette indemnité ne peut être retenue pour l'évaluation des pertes de gains professionnels de l'intéressé.
18. Ainsi, pour la période du 19 août 2013 au 9 février 2016, date de consolidation de l'état de santé de M. C..., les pertes de gains professionnels de l'intéressé s'élèvent à la somme globale de 44 800 euros. L'indemnité susceptible d'être mise à la charge de la société Relyens Mutual Insurance en réparation de ce poste de préjudice doit ainsi être fixée à la somme de 22 400 euros après application du taux de perte de chance fixé à 50 %. Il ressort de la notification des débours du 28 novembre 2017 et de l'attestation d'imputabilité du médecin conseil du 16 novembre 2017 que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne justifie avoir versé à son assuré des indemnités journalières, entre le 10 septembre 2013 et le 3 septembre 2015, pour un montant total de 18 519,22 euros. Le préjudice résiduel de M. C... étant, dans ces conditions, supérieur à la somme de 22 400 euros, celle-ci doit lui être versée en totalité. En l'absence de reliquat, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne n'est pas fondée à obtenir le remboursement des indemnités journalières qu'elle a versées à son assuré.
S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents :
Quant aux dépenses de santé futures :
19. Il ne résulte pas de l'instruction que M. C... disposerait, ainsi qu'il a déjà été dit, d'une mutuelle. Il ressort du rapport d'expertise du docteur F..., psychiatre, que postérieurement à la date de consolidation de son état de santé, M. C... a bénéficié d'une consultation chez un psychiatre tous les deux mois en 2017, soit six consultations. Il ressort du point 9 que pour une consultation de 80 euros, le montant AMO s'élève à 25,90 euros et que la somme de 54,10 euros reste à la charge de M. C.... Dans ces conditions, les dépenses de santé futures s'élèvent à la somme de 324,60 euros, soit après application du taux de perte de chance à 162,30 euros.
Quant aux frais d'assistance par une tierce personne :
20. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur E..., que l'expert a évalué l'aide humaine non spécialisée qui doit être apportée à M. C... tous les jours de l'année à une heure par jour. En outre, il y a lieu, pour indemniser ce poste de préjudice, de distinguer, contrairement à ce que soutient le requérant, d'une part, la période comprise entre la date de consolidation de l'état de santé de M. C... fixée au 9 février 2016 et la date de lecture du l'arrêt, soit le 22 juillet 2025, et, d'autre part, la période postérieure à la date de lecture de l'arrêt.
21. Pour la période comprise entre le 9 février 2016 et le 22 juillet 2025, date de lecture du présent arrêt, c'est-à-dire 3 451 jours, sur la base d'un taux horaire de 18 euros correspondant à une aide non spécialisée et d'une année de 412 jours afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 3133-1 du code du travail, à hauteur d'une heure par jour, tous les jours de la semaine, il sera fait une juste appréciation du préjudice de M. C... à ce titre en le fixant, après application du taux de perte de chance de 50 %, à 35 055 euros.
22. Pour la période postérieure au 22 juillet 2025, date de lecture du présent arrêt, sur la base d'un taux horaire de 18 euros correspondant à une aide non spécialisée et d'une année de 412 jours afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 3133-1 du code du travail, à hauteur d'une heure par jour, tous les jours de la semaine, les frais futurs liés à l'assistance de M. C... par une tierce personne pour les besoins de la vie courante doivent être évalués, après application du taux de perte de chance de 50 %, à la somme de 3 710 euros par an. Ainsi, sur la base du coefficient de capitalisation de 30,559 prévu, pour la conversion d'une rente viagère allouée à un homme de 47 ans, selon la table stationnaire de capitalisation publiée par la Gazette du Palais dans son édition de 2025, il sera fait une juste appréciation du préjudice futur subi en fixant son montant à la somme de 113 374 euros. Il y a lieu, en conséquence, de réformer le jugement sur ce point.
Quant aux frais d'adaptation du véhicule :
23. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur E... que la conduite automobile, pour M. C..., est difficile au-delà d'une demi-heure en raison des séquelles invalidantes et douloureuses au niveau du coude et de l'épaule droite et qu'un aménagement du véhicule est nécessaire, consistant en une boîte automatique et une boule au volant. Dans ces conditions, le besoin d'aménagement du véhicule de M. C... est établi. Il résulte de l'instruction que le coût des aménagements peut être évalué à 3 000 euros, soit après application du taux de perte de chance de 50 %, à 1 500 euros. Compte tenu d'une fréquence de renouvellement du véhicule tous les cinq ans, le coût annuel peut être ainsi estimé à 300 euros. Eu égard à l'âge de M. C... à la date de l'arrêt, il sera fait une juste appréciation du préjudice sur toute la vie en l'évaluant à la somme de 12 600 euros.
Quant aux pertes de gains professionnels futurs et à l'incidence sur les droits à la retraite :
24. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 17, M. C... n'est pas fondé à se prévaloir de la perte d'une indemnité mensuelle du fait de son activité de sapeur-pompier volontaire au titre des pertes de gains professionnels futurs.
25. Il résulte de l'instruction que M. C... occupe, depuis le 3 septembre 2015, ainsi qu'il a déjà été dit, un emploi d'agent d'exploitation à temps partiel, pour une durée de travail de 80 heures par mois, pour un salaire mensuel brut de 794,39 euros, et que l'exercice à temps partiel de ses fonctions est dû à la perte de mobilité de son membre supérieur droit et à un syndrome douloureux du coude à l'épaule. Par un avis du 26 novembre 2015, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de M. C... à la manutention de charges lourdes. Pour la période comprise entre le 9 février 2016 et le 22 juillet 2025, date de lecture du présent arrêt, c'est-à-dire 104 mois, il sera fait une juste appréciation des pertes de revenus occasionnées par son état de santé en les évaluant à la somme de 560 euros par mois, soit 280 euros après application de la perte de chance de 50 %. En conséquence, pour la période en cause, la réparation due par la société Relyens au titre des pertes de gains professionnels de M. C... doit être fixée à 29 120 euros.
26. Pour la période postérieure au 22 juillet 2025, date de lecture du présent arrêt, sur la base du coefficient de capitalisation de 17,964 prévu, pour la conversion d'une rente viagère allouée à un homme de 47 ans jusqu'à l'âge de 67 ans, date à laquelle il peut prétendre à partir à la retraite avec une pension à taux plein, la perte de gains professionnels s'élève, après application du taux de perte de chance, à 60 360 euros. Il résulte de l'instruction que M. C... ne perçoit pas l'allocation aux adultes handicapés ni de pension d'invalidité. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation des pertes de revenus subies par M. C..., y compris des pertes de droits à la retraite, en les évaluant à 70 360 euros, après application du taux de perte de chance.
Quant à l'incidence professionnelle :
27. Il résulte de l'instruction qu'à la date de consolidation de son état de santé, M. C... demeurait atteint d'un déficit fonctionnel permanent d'au moins 25 % en raison notamment d'une raideur du coude en flexion, extension et rotation associée à des répercussions douloureuses au niveau du coude et au niveau des épaules. M. C... s'est vu reconnaître le statut de travailleur handicapé par une décision du 7 janvier 2016 de la maison départementale des handicapés de Seine-et-Marne. Par un avis du 26 novembre 2015, le médecin du travail a, ainsi qu'il a déjà été dit, conclu à l'inaptitude de M. C... à la manutention de charges lourdes. Du fait de son handicap, M. C... ne pourra pas exercer les emplois pour lesquels il était qualifié, c'est-à-dire les emplois d'auxiliaire ambulancier et d'agent de sécurité. En outre, il connaît ainsi une pénibilité accrue lors de la réalisation des tâches d'agent d'exploitation qui a justifié un travail à temps partiel limité à 80 heures par mois, comme l'atteste encore son bulletin de salaire de décembre 2020. Au vu de ces éléments, les premiers juges ont fait, contrairement à ce que soutient M. C..., une juste évaluation du préjudice d'incidence professionnelle en le fixant, après application du taux de perte de chance de 50 %, à la somme de 7 500 euros.
En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :
S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux temporaires :
Quant au déficit fonctionnel temporaire :
28. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur E..., que M. C... a subi, en raison de sa prise en charge fautive par le centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, un déficit fonctionnel temporaire total du 17 au 27 février 2014 et du 7 au 28 septembre 2015, un déficit fonctionnel temporaire de 50 % du 28 février au 28 mars 2014 et du 29 septembre au 16 octobre 2015, et un déficit fonctionnel temporaire de 25 % du 19 août 2013 au 16 février 2014, du 29 mars 2014 au 7 septembre 2015 et du 17 octobre 2015 au 9 février 2016. M. C... sollicite une indemnité journalière de 35 euros, en se prévalant notamment de ses fonctions de sapeur-pompier et des activités sportives qu'il ne pouvait plus exercer pendant ces périodes. Cependant, les premiers juges ont procédé à une juste évaluation de ce poste de préjudice en allouant à M. C..., après application du taux de perte de chance de 50 %, une somme de 2 100 euros.
Quant aux souffrances endurées :
29. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur E..., que M. C... a subi quatre interventions chirurgicales, une période de rééducation très longue, en hospitalisation complète, en hospitalisation de jour puis, en kinésithérapie de ville, associée à une prise d'antalgiques, ainsi que des immobilisations en attelle de positionnement, en lien avec les fautes médicales commises lors de sa prise en charge. L'expert a évalué les souffrances endurées par M. C... à 5 sur une échelle de 1 à 7. En outre, il ressort du rapport d'expertise du docteur F..., psychiatre, que M. C... a présenté un état anxio-dépressif réactionnel imputable aux soins inadaptés de ses lésions initiales et que ses souffrances psychiques ont été évaluées à 3 sur une échelle de 7. Les premiers juges ont procédé à une juste évaluation des souffrances endurées par M. C... en lui allouant la somme de 7 500 euros, après application du taux de perte de chance de 50 %.
Quant au préjudice esthétique :
30. Il résulte de l'instruction que M. C... a subi un préjudice esthétique temporaire résultant de l'impossibilité d'utiliser le membre dominant, d'un défaut de flexion, d'extension et de port d'attelles qui a été évalué par l'expert à 3 sur une échelle de 1 à 7. Au vu de ces éléments, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant, après application du taux de perte de chance de 50 %, à 400 euros. Par suite, il y a lieu de réformer ce jugement sur ce point.
S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux permanents :
Quant au déficit fonctionnel permanent :
31. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du professeur E... que M. C... reste atteint, en raison de la prise en charge fautive du centre hospitalier de Marne-la-vallée Jossigny d'une raideur du coude en flexion, extension et en pronosupination en secteur utile associée à des répercussions douloureuses au niveau du coude et au niveau des épaules. L'expert a évalué le déficit fonctionnel permanent du requérant à 25 %. En outre, il ressort de l'expertise du docteur F... que M. C... présente un symptôme stress post-traumatique avec des aspects anxieux et des troubles de l'humeur et que cet expert a évalué le déficit fonctionnel permanent en résultant à 4 %. Eu égard à ces éléments et à l'âge de M. C... à la date de consolidation de son état de santé, soit 37 ans, les premiers juges ont fait une juste appréciation de la réparation due au titre de ce préjudice en l'évaluant, après application du taux de perte de chance, à 31 000 euros.
Quant au préjudice esthétique :
32. Il résulte de l'instruction que M. C... subit un préjudice esthétique permanent résultant de l'absence d'autonomie du membre supérieur droit, avec la nécessité de marcher en permanence avec la main dans la poche, qui peut être évalué à 2 sur une échelle de 1 à 7. Au vu de ces éléments, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant à l'intéressé la somme de 1 000 euros, après application du taux de perte de chance fixé à 50 %.
Quant au préjudice d'agrément :
33. M. C... soutient qu'il subit un préjudice d'agrément, dès lors qu'il ne peut plus pratiquer ses activités antérieures de sport et de loisirs qui mobilisaient son membre supérieur. Il produit une attestation d'un centre de remise en forme du 1er mars 2018 selon laquelle il disposait dans ce centre d'un abonnement annuel en 2011 et 2012. Toutefois, il ne ressort pas de ce document, ni d'aucune autre pièce qu'il disposait d'un abonnement ou d'une licence dans un club sportif à la date de l'accident. Il verse également aux débats une attestation de son voisin mentionnant que le requérant avait effectué d'importants travaux dans son jardin, notamment des travaux de terrassement et d'abattages d'arbres, et que désormais, il lui était impossible de jardiner seul. Cependant, la diminution de l'activité physique, de loisir et sociale de M. C... ou encore de la conduite automobile a déjà été prise en considération au titre du déficit fonctionnel permanent. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, M. C... n'est pas fondé à demander réparation au titre d'un préjudice d'agrément.
Quant au préjudice d'établissement :
34. Il résulte de l'instruction que M. C... est marié, a deux enfants, nés en 2008 et en 2011 ainsi qu'un troisième enfant, né le 26 novembre 2017, soit après sa prise en charge par le centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny. Il n'est pas ainsi privé de la possibilité d'avoir d'autres enfants. Dans ces conditions, et même si l'expert judiciaire a retenu un préjudice d'établissement en raison d'une vie de famille très perturbée tout en relevant au demeurant que M. C... a poursuivi sa vie de famille de façon proche de la normale, et alors qu'en tout état de cause, le juge n'est pas lié par les conclusions de l'expert, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la demande en réparation d'un préjudice d'établissement.
Quant au préjudice sexuel :
35. Il résulte de l'instruction que les premiers juges n'ont pas, contrairement à ce que soutient M. C..., insuffisamment évalué son préjudice sexuel en lui accordant, après application du taux de perte de chance de 50 %, la somme de 1 000 euros.
36. Il résulte de tout ce qui précède que le montant total des indemnités que la société Relyens Mutual Insurance en sa qualité d'assureur du grand hôpital de l'Est francilien, venant aux droits du centre hospitalier de Marne-la-Vallée Jossigny, doit être condamnée à verser à M. C... en réparation de ses préjudices s'élève à 357 448,45 euros dont il y a lieu de déduire la provision de 10 000 euros déjà versée à M. C..., soit 347 448, 45 euros. Ce dernier est ainsi fondé à demander que l'indemnité que le tribunal administratif a condamné la société Relyens Mutual Insurance à lui verser, soit portée à cette somme. La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, pour sa part, seulement fondée à demander que la somme qui lui a été allouée soit portée à 23 976,19 euros. La société n'est, pour sa part, pas fondée à demander que le montant des condamnations prononcées par le tribunal soit minoré.
Sur les intérêts :
37. La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne a droit à ce que la somme de 23 976,19 euros soit assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2020, date à laquelle son mémoire a été enregistré.
Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :
38. Aux termes du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en fonction du taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 23 décembre 2024 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376 1 et L. 454 1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2025 : " Les montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 120 euros et 1 212 euros au titre des remboursements effectués au cours de l'année 2025 ".
39. Il résulte de ces dispositions que le montant de l'indemnité forfaitaire qu'elles instituent est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un plafond dont le montant est révisé chaque année par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. Lorsque le plafond de l'indemnité forfaitaire de gestion est relevé entre le moment où la caisse présente ses conclusions tendant à ce qu'elle lui soit attribuée et le moment où le juge statue, la caisse n'a pas à actualiser le montant de ses conclusions, le droit à cette indemnité étant en outre attaché à l'action par laquelle la caisse obtient une indemnisation de ses débours, et non comme attaché à chaque instance juridictionnelle. Il y a lieu par suite de porter de 1 162 euros à 1 212 euros, en application de l'arrêté interministériel du 23 décembre 2024 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2024, la somme au paiement de laquelle les premiers juges ont condamné la société Relyens Mutual Insurance à ce titre.
Sur les frais d'instance :
40. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Relyens Mutual Insurance le paiement à M. C... et à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne de la somme de 2 000 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La somme que la société Relyens Mutual Insurance a été condamnée à verser à M. C... par l'article 1er du jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Melun est portée à la somme de 347 448,45 euros, après déduction de la provision de 10 000 euros.
Article 2 : La somme que la société Relyens Mutual Insurance a été condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne par l'article 2 du jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Melun est portée à la somme de 23 976,19 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 2020.
Article 3 : La somme que la société Relyens Mutual Insurance a été condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne par l'article 3 du jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Melun est portée à la somme de 1 212 euros.
Article 4 : Le jugement n° 1911550 du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : La société Relyens Mutual Insurance versera à M. C... et à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 2 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la société Relyens Mutual Insurance et à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Menasseyre, présidente de chambre,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- Mme Larsonnier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juillet 2025.
La rapporteure,
V. Larsonnier La présidente,
A. Menasseyre
La greffière,
N. Couty
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA03765 2