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17/07/2025 | FRANCE | N°23PA03914

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 17 juillet 2025, 23PA03914


Vu la procédure suivante :



Procédures contentieuses antérieures :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun, par deux requêtes distinctes, d'annuler la décision du 12 octobre 2020 par laquelle le directeur du centre hospitalier interdépartemental de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée a mis fin à l'accueil de l'enfant C... Gagey-Lauret à son domicile à compter du 16 novembre 2020 et la décision du 18 février 2021 par laquelle le directeur de ce centre l'a licenciée pour insuffisance professionnelle

à compter du 4 mai 2021.



Par un jugement n° 2008521 et 2103585 du 22 juin ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun, par deux requêtes distinctes, d'annuler la décision du 12 octobre 2020 par laquelle le directeur du centre hospitalier interdépartemental de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée a mis fin à l'accueil de l'enfant C... Gagey-Lauret à son domicile à compter du 16 novembre 2020 et la décision du 18 février 2021 par laquelle le directeur de ce centre l'a licenciée pour insuffisance professionnelle à compter du 4 mai 2021.

Par un jugement n° 2008521 et 2103585 du 22 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a, après les avoir jointes, rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 septembre 2023, Mme A..., représentée par Me Glorieux-Kergall demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 juin 2023 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler les décisions du 19 février 2021 et 18 février 2021 du directeur du centre hospitalier interdépartemental de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée mettant fin à l'accueil à son domicile de l'enfant C... et prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle ;

3°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier interdépartemental de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée de maintenir l'accueil de l'enfant C... à son domicile dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de procéder à sa réintégration dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier interdépartemental de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision du 19 février 2021 :

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que :

- en application des dispositions de l'article L. 223-3 du code de l'action sociale et des familles le juge des enfants devait être saisi un mois avant que la décision modifiant le lieu de placement de l'enfant ne soit prise ;

- elle aurait dû être consultée préalablement à l'édiction de cette décision en application de l'article L. 421-16 du même code ;

- cette décision est insuffisamment motivée en droit ;

- elle est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle indique qu'il a été constaté une souffrance chez l'enfant induite par le placement ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles ;

- elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant protégé par les articles 9 et 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir ;

En ce qui concerne la légalité de la décision de licenciement pour insuffisance professionnelle :

- la décision de la licencier avait été prise avant même sa convocation à l'entretien préalable au licenciement ;

- elle n'a pas été convoquée à la réunion de la commission administrative paritaire chargée de rendre un avis sur son licenciement ;

- l'avis de cette commission ne lui a pas été notifié ;

- elle n'a pas été informée de la possibilité de consulter son dossier individuel ;

- la lettre de convocation à l'entretien préalable ne mentionne pas clairement la perspective d'un licenciement ;

- les membres de la commission administrative paritaire n'ont pas eu connaissance des observations écrites qu'elle avait transmises ;

- les dispositions relatives à la composition de cette commission n'ont pas été respectées ;

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée ;

- les principes des droits de la défense et du contradictoire ont été méconnus dès lors qu'elle n'a pas été convoquée à la réunion de la commission administrative paritaire ;

- la décision de licenciement est entachée d'une erreur de fait ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2024, le Groupe hospitalier Fondation Vallée - Paul Guiraud venant aux droits du centre hospitalier de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée conclut au rejet de la requête de Mme A... et à ce que soit mise à la charge de celle-ci la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Zeudmi Sahraoui,

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Glorieux-Kergall représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., qui exerce la profession d'assistante familiale, a été recrutée par le centre hospitalier interdépartemental de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent " Fondation Vallée ", aux droits duquel vient le Groupe Hospitalier Fondation Vallée - Paul Guiraud, à compter du 4 mai 2017, d'abord pour l'accueil d'un enfant de façon intermittente, puis à compter du 17 novembre 2017, pour l'accueil continu d'un enfant à compter de cette même date. C'est ainsi que Mme A... a accueilli de manière continue, à compter du 17 novembre 2017, la jeune C..., alors âgée de 4 ans et qui présentait d'importants troubles psychiatriques. Par deux décisions des 12 octobre 2020 et 19 février 2021, le directeur du centre hospitalier a décidé de mettre fin à l'accueil, au domicile de Mme A..., de l'enfant à compter du 19 mars 2021. Par une décision du 18 février 2021, le directeur du centre a prononcé le licenciement pour insuffisance professionnelle de l'intéressée à compter du 4 mai 2021. Mme A... relève appel du jugement du 22 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions mettant fin à l'accueil de la jeune C... et prononçant son licenciement.

Sur la légalité de la décision du 19 février 2021 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 223-3 du code de l'action sociale et des familles : " Pour l'application des décisions judiciaires prises en vertu du troisième alinéa de l'article L. 323-1 du code de la justice pénale des mineurs, du 3° de l'article 375-3 et des articles 377 à 380 du code civil, le représentant légal du mineur donne son avis par écrit préalablement au choix du mode et du lieu de placement et à toute modification apportée à cette décision. / Lorsque le service départemental de l'aide sociale à l'enfance auquel est confié un enfant en application de l'article 375-3 du code civil envisage de modifier le lieu de placement de cet enfant, il en informe le juge compétent au moins un mois avant la mise en œuvre de sa décision. Cette disposition ne s'applique ni en cas d'urgence ni, pour l'enfant de deux ans révolus confié à une même personne ou à un même établissement pendant moins de deux années, en cas de modification prévue dans le projet pour l'enfant ".

3. Mme A... soutient qu'en application de ces dispositions le juge pour enfants aurait dû être informé de la modification envisagée du lieu d'accueil de la jeune C.... Toutefois la requérante ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions qui ont vocation à régir les droits des familles dans leurs relations avec l'aide sociale à l'enfance. Par ailleurs, le centre hospitalier fait valoir en défense que cette information a été réalisée et produit à l'appui de ses allégations le courriel du 29 octobre 2020, dont le contenu n'est pas critiqué par la requérante, par lequel la responsable de l'aide sociale à l'enfance informait le directeur délégué du centre que les notes du service d'accueil familial et thérapeutique (SAFT) avaient été transmises au magistrat. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 223-1 du code de l'action sociale et des familles doit, en tout état de cause, être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 421-16 du code de l'action sociale et des familles : " (...) / Sauf situation d'urgence mettant en cause la sécurité de l'enfant, l'assistant familial est consulté préalablement sur toute décision prise par la personne morale qui l'emploie concernant le mineur qu'elle accueille à titre permanent ; elle participe à l'évaluation de la situation de ce mineur ".

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été informée de l'intention de l'administration de mettre un terme à l'accueil de la jeune C... au cours d'un entretien qui a eu lieu le 27 mai 2020, soit plusieurs mois avant que la décision ne soit prise par le directeur de l'établissement. Elle a par ailleurs été reçue à un nouvel entretien le 11 septembre 2020 et a pu présenter des observations sur la mesure envisagée. Contrairement à ce que soutient la requérante, celle-ci doit ainsi être regardée comme ayant été consultée préalablement à la décision du 19 février 2021 mettant fin à l'accueil à son domicile de l'enfant C....

6. En troisième lieu, la décision litigieuse, qui a pour objet de mettre fin à l'accueil, par Mme A..., de l'enfant C... n'est pas au nombre des décisions soumises à l'obligation de motivation en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et n'avait donc pas à être motivée. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en droit de cette décision est inopérant et doit être écarté.

7. En quatrième lieu, pour décider de mettre un terme à l'accueil de l'enfant par Mme A... le directeur du centre hospitalier a relevé que celle-ci rencontrait des difficultés d'ajustement et de contenance de l'enfant lors d'épisodes clastiques et contestait régulièrement certaines préconisations médicales prises par l'équipe de soins dans l'intérêt du bon développement thérapeutique de l'enfant. Il a également constaté un manque d'adhésion et de collaboration de Mme A... dans le cadre du suivi thérapeutique de l'enfant.

8. Il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions des rapports des 3 et 18 septembre 2020 établis par l'équipe du Service d'accueil familial et thérapeutique du centre hospitalier, composé de deux pédopsychiatres, d'un psychologue et d'un cadre socio-éducatif, que Mme A... a rencontré des difficultés à assumer les responsabilités et obligations qui s'imposaient à elle en sa qualité d'assistante familiale thérapeutique accueillant de manière continue un enfant présentant des troubles importants. L'intéressée a en effet, dès les premiers mois de son activité auprès du SAFT, informé celui-ci qu'elle supportait mal le fait d'accueillir l'enfant de manière continue et, à chaque visite à domicile, celle-ci indiquait aux intervenants du SAFT regretter l'absence de relais les week-ends " pour souffler ". Mme A... s'était également plainte auprès du service des trop nombreux rendez-vous auxquels elle devait accompagner l'enfant notamment au centre d'accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) et au centre médico-psychologique (CMP). Compte tenu des difficultés rencontrées par Mme A..., des temps d'accueil ont été mis en place par le SAFT, 2 à 3 fois par semaine, d'abord en 2018, puis au mois de mars et avril 2020 pendant la période de confinement liée à la pandémie de Covid-19. Contrairement à ce que soutient la requérante, les fais relevés à son encontre ne sont pas liés à ses demandes de congés annuels mais à sa capacité à assumer une prise en charge à titre permanent d'un enfant atteint de troubles importants. L'intéressée avait également des difficultés à gérer les crises clastiques de l'enfant et avait menacé à deux reprises le service de la " ramener avec sa valise au SAFT si ça continue ". Le rapport du 18 septembre 2020 relève également qu'il est arrivé à plusieurs reprises à Mme A... d'exprimer ses difficultés, notamment lors de visites au domicile de l'assistante sociale, avec les propos suivants : " elle me pompe l'air ", " elle me vampirise ", " je vais la déposer devant le SAFT si vous ne l'hospitalisez pas ". Ce rapport relève également que Mme A... a pu contester certaines indications thérapeutiques, comme ne pas hospitaliser l'enfant à certains moments et avait sollicité un internement à temps plein alors que le profil de l'enfant ne correspond pas à cette indication. Contrairement à ce que soutient la requérante, le changement de lieu d'accueil décidé par le directeur du centre hospitalier le 19 février 2021 alors que le projet était étudié depuis le mois de mai 2020, n'est pas intervenu de manière précipitée. La circonstance, au demeurant non établie, que l'exécution de la décision litigieuse a eu des conséquences négatives pour l'enfant est sans incidence sur la légalité de cette décision qui s'apprécie au regard des circonstances de droit et de fait à la date de son édiction. Ainsi, et alors même que l'enfant et Mme A... n'auraient manqué aucun rendez-vous et que l'enfant aurait réalisé des progrès au domicile de l'intéressée, l'administration a pu, au regard des seuls motifs exposés précédemment, et compte tenu notamment de l'incapacité de Mme A... à se représenter son métier d'assistante familiale thérapeutique et à assumer les contraintes liées à ces missions, mettre fin à l'accueil de la jeune C.... Dès lors, les moyens tirés de ce que le directeur du centre hospitalier aurait entaché sa décision d'une erreur de fait, d'une erreur d'appréciation et d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles : " Le service de l'aide sociale à l'enfance est un service non personnalisé du département chargé des missions suivantes : (...) / 6° Veiller à ce que les liens d'attachement noués par l'enfant avec d'autres personnes que ses parents soient maintenus, voire développés, dans son intérêt supérieur ; / 7° Veiller à la stabilité du parcours de l'enfant confié et à l'adaptation de son statut sur le long terme ; (...) ".

10. Mme A... ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées qui n'ont vocation à s'appliquer qu'aux services de l'aide sociale à l'enfance et non à l'employeur de l'assistant familial. Par ailleurs et en tout état de cause, ses dispositions ne faisaient pas obstacle à ce que le directeur du centre hospitalier mette fin à l'accueil de l'enfant par Mme A... compte tenu des carences relevées à son égard et la circonstance que l'employeur de l'intéressée n'ait pas veillé à maintenir les liens avec l'enfant est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse.

11. En cinquième lieu, Mme A... ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant qui concernent les liens entre l'enfant et ses parents. Si par ailleurs la requérante soutient que l'administration a porté atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant protégé par l'article 3 de cette convention, il résulte au contraire des constations relevés au point 8 du présent arrêt, que l'intérêt de cet enfant impliquait qu'une décision de changement de lieu d'accueil soit prise.

12. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

Sur la légalité de la décision du 18 février 2021 prononçant le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme A... :

13. En premier lieu, aux termes de l'article 43 du décret du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. L'intéressé est convoqué à l'entretien préalable par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. / L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. / L'agent peut se faire accompagner par la ou les personnes de son choix. / Au cours de l'entretien préalable, l'administration indique à l'agent les motifs du licenciement et le cas échéant le délai pendant lequel l'agent doit présenter sa demande écrite de reclassement ainsi que les conditions dans lesquelles les offres de reclassement sont présentées ".

14. D'une part, il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été convoquée par un courrier du 19 août 2020 à un premier entretien préalable au licenciement fixé au 4 septembre 2020, puis par un courrier du 6 octobre 2020 a été convoquée à un second entretien préalable au licenciement fixé au 27 octobre 2020. Contrairement à ce que soutient la requérante, si l'administration a envisagé son licenciement dès le mois de mai 2020, la décision n'a été prise que le 18 février 2021, soit bien après la tenue des deux entretiens préalables au licenciement. Dès lors, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'administration avait pris la décision de la licencier avant l'entretien préalable visé à l'article 43 du décret précité.

15. D'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'au cours du premier entretien préalable au licenciement du 4 septembre 2020, la requérante a été informée, notamment par la remise au cours de l'entretien d'un rapport du 3 septembre 2020, des motifs du licenciement envisagé. Au cours du second entretien du 27 octobre 2020, il a notamment été reproché à Mme A... un " manque de professionnalisme ". Ainsi, l'intéressée doit être regardée comme ayant été informée au cours de ces entretiens des motifs du licenciement alors même que les comptes-rendus de ces entretiens n'indiquent pas précisément que le licenciement est envisagé pour " insuffisance professionnelle " de l'agent.

16. Enfin, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

17. Ainsi que le soutient Mme A..., le courrier du 19 août 2020 la convoquant à l'entretien préalable du 4 septembre 2020 ne mentionnait pas l'objet de la convocation dès lors que ce courrier se bornait à indiquer " convocation à un entretien préalable à une fin d'activité ". Toutefois, cette irrégularité au regard des dispositions précitées de l'article 43 du décret du 6 février 1991, qui n'a pas été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision de licenciement, n'a pas privé la requérante d'une garantie dès lors qu'elle a été convoquée par un courrier du 6 octobre 2020 à un second entretien préalable qui a eu lieu le 27 octobre suivant et que ce courrier de convocation mentionnait bien qu'il avait pour objet de la convoquer à un " entretien préalable à un licenciement ". Dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière.

18. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2-1 du décret du 6 février 1991 précité : " I.-Une commission consultative paritaire compétente à l'égard des agents contractuels mentionnés à l'article 1er est instituée, dans chaque département, par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé agissant au nom de l'Etat. Il en confie la gestion à l'un des établissements publics de santé dont le siège se trouve dans le département. (...) / Les commissions consultatives paritaires comprennent, en nombre égal, des représentants de l'administration et des représentants des personnels mentionnés à l'article 1er. Leur composition et leur fonctionnement sont fixés par arrêté du ministre chargé de la santé. / (...) / II.-Ces commissions sont obligatoirement consultées dans les cas prévus aux articles 17-1,17-2, 41-5 et 41-6 ainsi que sur les décisions individuelles relatives : / 1° Aux licenciements intervenant postérieurement à la période d'essai ; (...) ".

19. D'une part, si Mme A... soutient qu'elle n'a pas été régulièrement convoquée à la réunion de la commission consultative paritaire chargée de rendre un avis sur le licenciement envisagé par le centre hospitalier, aucune disposition législative ou règlementaire n'imposait sa convocation devant cette commission.

20. D'autre part, aucun texte ne prévoit la possibilité pour l'agent contractuel dont le licenciement est envisagé de transmettre à la commission consultative paritaire des observations écrites. Mme A... ne peut ainsi utilement soutenir que ses observations n'ont pas été transmises aux membres de la commission chargée de rendre un avis sur son licenciement.

21. Par ailleurs, en l'absence de toute disposition prévoyant la transmission de l'avis de la commission consultative paritaire à l'agent, Mme A... ne peut davantage soutenir que l'avis du 7 décembre 2020 lui a été transmis plus de trois mois après la réunion de cette commission.

22. Enfin, une commission administrative paritaire ne peut valablement délibérer qu'à la condition qu'aient été régulièrement convoqués, en nombre égal, les représentants de l'administration et les représentants du personnel, membres de la commission, habilités à siéger dans chacune de ces formations, et eux seuls, et que le quorum ait été atteint. S'il résulte des dispositions précitées que la règle de la parité s'impose pour la composition de la commission consultative paritaire départementale, en revanche, la présence effective en séance d'un nombre égal de représentants du département et de représentants des assistants maternels et familiaux agréés résidant dans le département ne conditionne pas la régularité de la consultation de cette commission, dès lors que ni les dispositions citées ci-dessus, ni aucune autre règle, ni enfin aucun principe ne subordonnent la régularité des délibérations de la commission consultative paritaire départementale à la présence en nombre égal de représentants du département et de représentants des assistants maternels et familiaux agréés. Dès lors, Mme A... ne peut utilement soutenir qu'au cours de la réunion de la commission consultative paritaire du 7 décembre 2020 siégeaient 3 représentants du personnel et 4 représentants de l'administration. Par ailleurs, et en tout état de cause, il résulte du compte-rendu de cette séance que le nombre de représentants de l'administration a été réduit à 3. Le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission doit être écarté.

23. En troisième lieu, aux termes de l'article 44 du décret du 6 février 1991 : " Lorsqu'à l'issue de la consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 2-1, et de l'entretien prévu à l'article 43, l'administration décide de licencier un agent, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement, ainsi que la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis ".

24. Mme A... soutient que son employeur a méconnu ses dispositions. Ce moyen n'est toutefois pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

25. En quatrième lieu, aux termes de l'article 41-2 du décret du 6 février 1991 précité : " L'agent contractuel peut être licencié pour un motif d'insuffisance professionnelle. / Il doit préalablement être mis à même de demander la communication de l'intégralité de toute pièce figurant dans son dossier individuel, dans un délai suffisant d'au moins cinq jours permettant à l'intéressé d'en prendre connaissance. Le droit à communication concerne également toute pièce sur laquelle l'administration entend fonder sa décision ".

26. Il ressort des pièces du dossier que par le courrier du 6 octobre 2020 la convoquant à un entretien préalable fixé au 27 octobre 2020, Mme A... a été informée de son droit à la communication de son dossier individuel et qu'elle a obtenu la communication de ce dossier le 12 octobre 2020, soit plusieurs mois avant la décision de licenciement qui a été prise le 18 février 2021. Contrairement à ce que soutient la requérante, les dispositions précitées n'imposent pas que cette communication soit faite avant la tenue de l'entretien préalable. Enfin, si la requérante soutient que de nouvelles pièces ont été versées à son dossier postérieurement au 12 octobre 2020, il ressort cependant des pièces du dossier que par un courrier du 9 novembre 2020 le directeur délégué du centre hospitalier a communiqué à Mme A... ces nouvelles pièces.

27. En cinquième lieu, la décision de licenciement litigieuse vise les articles L. 421-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles, les articles L. 1232-2 et suivants du code du travail et le décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. Elle indique par ailleurs que le Service d'accueil familial et thérapeutique a constaté une dégradation progressive et constante de ses relations avec Mme A..., au détriment du bon suivi thérapeutique de l'enfant, comme exposé dans le rapport du 3 septembre 2020, que l'intéressée a admis avoir rencontré des difficultés organisationnelles, notamment personnelles, qui ont pu être source de rapports conflictuels avec les équipes du service et la cause d'une certaine régression de l'enfant, que les efforts importants réalisés par les équipes du SAFT afin de faciliter la prise en charge et le suivi thérapeutique de l'enfant notamment pendant la crise sanitaire, n'ont pas suffi à apaiser les relations de travail avec l'intéressée, que celle-ci ne conteste pas avoir rencontré de manière régulière des difficultés d'ajustement et de contenance de l'enfant lors d'épisodes clastiques à son domicile et a fait état d'une souffrance induite par le placement, impactant la prise en charge de l'enfant, qu'elle a insisté pour obtenir des mesures d'éloignement visant à la soulager contre l'avis médical et thérapeutique des équipes du SAFT, faisant ainsi obstacle à l'objet même du placement à temps plein prononcé dans l'intérêt de l'enfant. La décision relève également qu'une pétition intitulée " contre le retrait d'une petite fille de 7 ans placée en famille d'accueil " dans laquelle Mme A... est nommément et physiquement identifiée et contenant des propos diffamatoires à l'égard du centre hospitalier a été diffusée sur le site change.org, et que la remise en cause du travail institutionnel et du suivi thérapeutique de l'enfant par Mme A... démontre de réelles difficultés d'adhésion au mode de fonctionnement du centre hospitalier. Alors même que la décision de licenciement ne fait pas référence à des faits précis et datés, les griefs formulés étaient suffisamment circonstanciés pour permettre à l'assistante familiale de comprendre les faits qui lui sont reprochés. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en droit et en fait de la décision litigieuse doit être écarté.

28. En sixième lieu, Mme A... indique que l'absence de convocation à la commission consultative paritaire l'a privée de la possibilité d'être entendue équitablement et que ses droits de la défense et le principe du contradictoire ont été méconnus. Toutefois, d'une part, la requérante ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que la commission consultative paritaire ne disposant d'aucun pouvoir de décision et se bornant à émettre un avis destiné à l'autorité compétente sur le licenciement envisagé, elle ne constitue ni une juridiction, ni un tribunal au sens des stipulations de cet article 6, paragraphe 1. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 19 du présent arrêt, aucun texte n'impose la convocation de l'agent devant la commission consultative chargée de rendre un avis sur le licenciement envisagé par son employeur public. Enfin, Mme A... a été mise à même de présenter ses observations au cours des deux entretiens préalables des 4 septembre et 27 octobre 2020. Dès lors, les moyens tirés de l'atteinte aux droits de la défense et au principe du contradictoire doivent en tout état de cause être écartés.

29. En septième lieu, si Mme A... indique que la décision est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle indique qu'elle " a été convoquée à la suite de difficultés régulières rencontrées par le SAFT avec cette dernière dans le cadre de ses échanges et interactions pour la prise en charge et le suivi thérapeutique de l'enfant confié " il est cependant constant que le 27 mai 2020 Mme A... a été reçue par les équipes du SAFT et qu'au cours de cet entretien le service l'a informée de son intention de mettre fin à l'accueil de la jeune C... à son domicile. Dès lors le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

30. En huitième lieu, pour prononcer le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme A..., le directeur du centre hospitalier a d'abord relevé que celle-ci avait des difficultés à adhérer au mode de fonctionnement du SAFT et avait tendance à remettre en cause le travail institutionnel et le suivi thérapeutique de l'enfant. Il ressort en effet des pièces du dossier, notamment du rapport du 3 septembre 2020, que l'intéressée avait indiqué à plusieurs reprises que le dispositif du SAFT était trop lourd et sollicitant et qu'il y avait trop de rendez-vous pour elle et pour l'enfant. Le compte-rendu d'évaluation au titre de l'année 2019 de l'intéressée indique également que celle-ci a des " liens difficiles avec le service et l'organisation des soins ". Par ailleurs, alors que Mme A... accueillait la jeune C... à titre permanent, le service d'accueil familial et thérapeutique a dû organiser des temps d'accueil au sein du service, 2 à 3 fois par semaine, afin de soulager l'assistante familiale, notamment en 2018 puis, contrairement à ce que soutient la requérante, en mars et avril 2020, pendant la période de confinement. L'enfant a par ailleurs été hospitalisée, à la demande de Mme A..., à compter du 17 avril 2020, au sein de l'unité Dolto alors qu'il résulte du rapport du 18 septembre 2020 que l'hospitalisation de l'enfant n'était pas justifiée cliniquement. Ce rapport indique également que Mme A... avait pu faire la demande d'un internat à temps plein pour l'enfant afin d'être soulagée la semaine alors que le profil de l'enfant ne correspond pas à cette indication, et qu'il était difficile de le faire entendre à l'intéressée. La décision de licenciement relève également que Mme A... avait des difficultés à contenir C... pendant ses épisodes clastiques. La requérante qui ne conteste pas ses difficultés à gérer l'enfant pendant ses crises, soutient ne pas avoir été aidée par le SAFT. Il ressort cependant du rapport du 18 septembre 2020 que l'intéressée a, à ces occasions, bénéficié d'une guidance téléphonique par la cadre de l'unité et parfois d'une intervention du SAFT à son domicile. Les faits relevés par la décision litigieuse sont de nature à établir l'incapacité de Mme A... à assumer les contraintes liées à l'accueil à temps plein d'un enfant confié par le SAFT et les difficultés rencontrées par celle-ci pour respecter le cadre imposé par ce service. Dès lors, au regard de ces seuls faits, le directeur du centre hospitalier pouvait, sans entacher sa décision ni d'une erreur d'appréciation ni d'une erreur manifeste d'appréciation, prononcer le licenciement de Mme A... pour insuffisance professionnelle.

31. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

32. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 19 février 2021 et 18 février 2021 du directeur du centre hospitalier de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée.

Sur les frais liés au litige :

33. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par le centre hospitalier de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent Fondation Vallée en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au Groupe Hospitalier Fondation Vallée - Paul Guiraud.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2025

La rapporteure,

N. Zeudmi SahraouiLa présidente,

V. Chevalier-Aubert

La greffière,

C. BuotLa République mande et ordonne au ministre de la santé et de l'accès aux soins en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA03914


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03914
Date de la décision : 17/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : CACCIAPAGLIA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-17;23pa03914 ?
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