Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 14 juin 2024 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2417440 du 31 octobre 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, des pièces et un mémoire complémentaires enregistrés les 6 janvier, 4 avril, 20 mai et 4 juin 2025, Mme B..., représentée par Me Metton, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 31 octobre 2024 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 juin 2024 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur le jugement attaqué :
- il est entaché d'une erreur de fait ;
Sur l'arrêté pris dans son ensemble :
- il a été signé par une autorité incompétente ;
- il est entaché d'un défaut de motivation et d'examen de sa situation personnelle ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du même code ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale par exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale par exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 avril 2025, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 janvier 2025 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les observations de Me Metton pour Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., ressortissante marocaine née le 22 novembre 1982, est entrée en France le 10 novembre 2017 selon ses déclarations. Le 9 juin 2023, elle a sollicité un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 14 juin 2024, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 31 octobre 2024 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si Mme B... soutient que le tribunal a commis une erreur de fait en indiquant à tort qu'elle n'aurait pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette erreur n'affecte que le bien-fondé du jugement et non sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'arrêté contesté dans son ensemble :
3. En premier lieu, par un arrêté n° 2024-00598 du 7 mai 2024 produit en appel par le préfet de police et régulièrement publié au recueil des actes administratifs spéciaux de la préfecture de Paris du même jour, M. C..., sous-directeur du séjour et de l'accès à la nationalité, a reçu délégation à l'effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, dont relèvent les décisions contestées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être écarté.
4. En deuxième lieu, l'arrêté contesté vise l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il mentionne les éléments de fait sur lesquels s'est fondé le préfet pour refuser d'admettre Mme B... au séjour et l'obliger à quitter le territoire français. Cet arrêté, qui n'était pas tenu de mentionner tous les éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressée, comporte ainsi l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et démontre en outre que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de la requérante. Par suite, doivent être écartés les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". En outre, aux termes l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
6. Mme B... se prévaut de sa présence en France depuis 2017, avec ses deux fils nés en 2005 et en 2013, ainsi que de son intégration sociale et professionnelle. Elle fait valoir que ses enfants ont effectué toute leur scolarité en France et que l'aîné est titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle. Toutefois, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue dans le pays d'origine ni à ce que l'enfant mineur de la requérante y poursuive sa scolarité. Si Mme B... soutient à cet égard qu'elle n'aurait pas les moyens financiers de scolariser son fils, qui ne parle pas la langue arabe, dans un établissement français au Maroc, elle n'établit pas qu'elle ne pourrait bénéficier d'aucune forme d'aide familiale ou sociale pour subvenir, au moins temporairement, à ses besoins. Par ailleurs, si l'intéressée fait valoir qu'elle est divorcée et qu'elle est hébergée par sa sœur en France, elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et le reste de sa fratrie. Enfin, l'insertion professionnelle dont se prévaut Mme B... se limite à un emploi de femme de ménage occupé entre mars et décembre 2022 et à des promesses d'embauche sous réserve de la régularisation de situation administrative. Dans ces conditions, les décisions contestées ne portent pas au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et ne portent pas davantage atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant de Mme B.... Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
7. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ".
8. Les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par Mme B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
10. En premier lieu, la décision contestée vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précise la nationalité de Mme B... et indique que cette dernière n'établit pas être exposée dans son pays d'origine à des peines ou traitements contraires à ces stipulations. Par suite, cette décision est suffisamment motivée.
11. En deuxième lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par Mme B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
12. En dernier lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, qui n'est au demeurant assorti d'aucune précision s'agissant de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 31 octobre 2024 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2024 du préfet de police. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation, d'injonction sous astreinte et d'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- M. Stéphane Diémert, président assesseur,
- Mme Hélène Brémeau-Manesme, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 juillet 2025.
La rapporteure,
H. BREMEAU-MANESME
Le président,
I. LUBEN
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 25PA00041 2