Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Ville de Paris a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'ordre de reversement émis par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris en date du 11 avril 2022, ensemble la décision du 18 mai 2022 rejetant son recours gracieux et de prononcer la décharge des droits de mutation à titre onéreux auxquels elle a été assujettie à hauteur de 798 000 euros.
Par une ordonnance n° 2215259 du 27 septembre 2022, la présidente de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 novembre 2022 et 26 mai 2023, la Ville de Paris, représentée par Me Falala, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2215259 du 27 septembre 2022 ;
2°) d'annuler l'ordre de reversement émis par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris pour un montant de 798 000 euros et la décision du 18 mai 2022 rejetant son recours gracieux ;
3°) de la décharger du paiement de la somme de 798 000 euros ;
4°) d'enjoindre à l'Etat de lui restituer cette somme ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance contestée est irrégulière, faute d'avoir été signée conformément à l'article R. 742-5 du code de justice administrative ;
- cette ordonnance est entachée d'une erreur de droit ;
- c'est à tort que la juge de première instance a considéré que l'acte de reversement n'était pas détachable des opérations d'assiette des droits de mutation à titre onéreux et par conséquent que le litige relevait de la seule compétence de la juridiction judiciaire ;
- l'ordre de reversement est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière, faute d'information préalable de la Ville de Paris et de mandatement préalable de l'ordonnateur compétent ;
- en l'absence d'information préalable de la Ville de Paris, le prélèvement en litige a été effectué sur un compte insuffisamment doté induisant un déséquilibre budgétaire en méconnaissance de l'obligation de vote d'un budget à l'équilibre ;
- l'ordre de reversement est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dès lors que le dégrèvement concédé à la SNC Plaine Monceau ne répond pas aux exigences du code général des impôts ; le dégrèvement en litige procède d'un acte complémentaire à l'acte d'acquisition initial dont la recevabilité au regard des dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales n'est pas établie ; il n'est pas justifié que la SNC Plaine Monceau est située dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée ; il n'est pas démontré que la demande d'exonération de la SNC Plaine Monceau réponde aux conditions cumulatives fixées par les dispositions du I du A de l'article 1594-0 G du code général des impôts et appliquées conformément à l'instruction référencée " ENR - Mutation de propriété à titre onéreux d'immeubles - mutations autres que les échanges - opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles ".
Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 avril 2023 et 22 juin 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut à l'annulation de l'ordonnance de la présidente de la 1ère section du tribunal administratif de Paris du 27 septembre 2022 et au rejet du surplus des conclusions de la requête présentée par la Ville de Paris.
Il soutient que :
- le recours contentieux dirigé contre un ordre de paiement émanant d'un comptable public et adressé à une collectivité suite au prononcé d'un dégrèvement au profit d'un contribuable relève de la compétence du juge administratif, la notion d'acte détachable ou non de la procédure d'imposition étant inopérante ;
- c'est donc à tort que la juge de première instance a retenu que la requête était portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
- l'ordonnance contestée est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit ;
- les moyens soulevés par la Ville de Paris ne sont pas fondés.
Par un arrêt du 18 octobre 2024, la Cour a sursis à statuer sur la requête dont elle était saisie jusqu'à ce que le tribunal des conflits ait tranché la question de savoir si le litige né de l'action de la Ville de Paris tendant à contester la validité d'un titre de reversement relatif à des droits de mutation à titre onéreux relève ou non de la compétence de la juridiction administrative.
Par une décision n° 4333 du 10 février 2025, le tribunal des conflits a déclaré la juridiction administrative compétente pour statuer sur le litige opposant la Ville de Paris à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.
Par une lettre du 17 février 2025, la Cour a invité les parties à produire des observations dans un délai d'un mois.
Par une ordonnance du 17 février 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 avril 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- l'arrêté du 16 février 2015 fixant les dépenses des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des établissements publics de santé pouvant être payées sans ordonnancement, sans ordonnancement préalable ou avant service fait ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lorin,
- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,
- et les observations de Me Falala représentant la Ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Lokalis Venture, devenue la SNC Plaine-Monceau, a acquis par un acte du 26 février 2019 un bien immobilier situé dans le 17ème arrondissement de Paris pour un prix de 14 millions d'euros. Cette vente a été soumise aux droits de mutation à titre onéreux prévus à l'article 1594 D du code général des impôts et à la taxe additionnelle relative aux mutations à titre onéreux de locaux à usage de bureaux, de locaux commerciaux et de locaux de stockage situés en région Ile-de-France prévue à l'article 1599 sexies du même code. Cette taxation a généré un produit de 833 633 euros perçu au titre de la taxe de publicité foncière et de la taxe additionnelle à la publicité foncière à concurrence de 798 000 euros au pro't de la Ville de Paris en application des articles 1584, 1594 A et 1595 de ce code. Par un acte notarié rectificatif du 12 octobre 2021 et pour bénéficier de l'exonération des droits de mutation prévue par le I du A de l'article 1594-0G du code général des impôts, la SNC Plaine-Monceau a déclaré placer rétroactivement l'acquisition de cet immeuble sous le régime de ce texte et s'est engagée, à ce titre, à réaliser et achever, dans un délai de quatre ans, des travaux concourant à rendre à l'état neuf un immeuble au sens du d) du 2° du 2 du I de l'article 257 du même code. Par une décision du 22 mars 2022, la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris a fait droit à la demande présentée par la société en prononçant en sa faveur un dégrèvement ou une restitution d'un montant de 816 633 euros. En conséquence, la somme de 798 000 euros a été prélevée sur la trésorerie de la Ville de Paris le 11 avril 2022 par un titre de perception valant ordre de reversement. Le 21 avril 2022, la Ville de Paris a contesté le prélèvement ainsi opéré, sollicitant le reversement de la somme prélevée. Le 18 mai 2022, l'administration fiscale a rejeté le recours de la Ville de Paris. Par la présente requête, la Ville de Paris relève régulièrement appel de l'ordonnance du 27 septembre 2022 par laquelle la présidente de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'ordre de reversement émis par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris, comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Ainsi que l'a jugé le tribunal des conflits dans sa décision susvisée du 10 février 2025, les créances que l'Etat, qui assure l'établissement et le recouvrement des impôts, contributions, droits et taxes est susceptible, à la suite d'une décision de restitution de droits et taxes acquittés par un contribuable, de détenir sur une collectivité territoriale bénéficiaire des sommes recouvrées ne constituent pas elles-mêmes des créances de nature fiscale. Les litiges relatifs à de telles créances opposant l'Etat à une collectivité territoriale relèvent de la compétence de la juridiction administrative, alors même que seraient en cause des droits et taxes dont le contentieux d'assiette relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire en application de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales.
3. En l'espèce, la demande de la Ville de Paris a pour objet la contestation de l'ordre de reversement de 798 000 euros émis le 11 avril 2022 par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris et confirmé le 18 mai 2022 sur recours gracieux, en vue du recouvrement de la créance que l'Etat détient sur la collectivité territoriale à la suite de la décision de restitution de droits et taxes acquittés par la SNC Plaine-Monceau en matière de droits d'enregistrement, de taxes de publicité foncière et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, prise sur le fondement de l'article 1594 0-G, A du code général des impôts. Eu égard à sa nature, le litige opposant la Ville de Paris à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris relève de la compétence de la juridiction administrative. C'est donc à tort que la présidente de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a décliné la compétence de la juridiction administrative. Il y a lieu en conséquence d'annuler l'ordonnance contestée sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'irrégularité soulevés par la collectivité et de statuer par la voie de l'évocation sur la demande présentée par la Ville de Paris.
Sur la légalité de l'ordre de reversement :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 11 du décret du 7 novembre 2012 visé
ci-dessus : " Les ordonnateurs constatent les droits et les obligations, liquident les recettes et émettent les ordres de recouvrer. Ils engagent, liquident et ordonnancent les dépenses. / (...) / Ils transmettent au comptable public compétent les ordres de recouvrer et de payer assortis des pièces justificatives requises, ainsi que les certifications qu'ils délivrent. / Ils établissent les documents nécessaires à la tenue, par les comptables publics, des comptabilités dont la charge incombe à ces derniers ". Aux termes de l'article 32 de ce décret : " L'ordonnancement est l'ordre, quelle qu'en soit la forme, donné par l'ordonnateur au comptable de payer une dépense. / Par dérogation à l'article 11, certaines dépenses peuvent, eu égard à leur nature ou à leur montant, selon les besoins propres à chaque catégorie de personnes morales, être payées sans ordonnancement ou avec ordonnancement sans que celui-ci soit préalable au paiement. Le ministre chargé du budget arrête la liste de ces dépenses. (...) ". L'article 2 de l'arrêté du 16 février 2015 dispose que : " Les dépenses des organismes mentionnés à l'article 1er qui peuvent être payées sans ordonnancement sont : / - les excédents de versement. (...) ". Enfin, l'article 3 de cet arrêté énonce que : " Les dépenses des organismes mentionnés à l'article 1er qui peuvent être payées sans ordonnancement préalable sont : / 1° Les dépenses payées par l'intermédiaire d'une régie d'avances ; / 2° Le remboursement d'emprunts ; / 3° Le remboursement de lignes de trésorerie ; / 4° Les abonnements et consommations de carburant ainsi que les péages autoroutiers ; / 5° Les abonnements et consommations d'eau ; / 6° Les abonnements et consommations d'électricité ; / 7° Les abonnements et consommations de gaz ; / 8° Les abonnements et consommations de téléphone fixe, de téléphone mobile, de télévision et d'internet ; / 9° Les abonnements et consommations de chauffage urbain ; / 10° Les frais d'affranchissement postal et autres prestations de services relatives au courrier ; / 11° Les prestations d'action sociale ; / 12° Les prestations au bénéfice des enfants scolarisés, des étudiants et apprentis ; / 13° Les prestations d'aide sociale et de secours ; / 14° Les aides au développement économique ; / 15° Les dépenses qui sont réglées par prélèvement bancaire en application de l'arrêté du 24 décembre 2012 susvisé ".
5. Il résulte de l'instruction que l'ordre de paiement émis le 11 avril 2022 n'entre dans aucune des catégories des dépenses énumérées à l'article 3 de l'arrêté du 16 février 2015 qui peuvent intervenir sans ordonnancement préalable. En revanche, dès lors que la SNC
Plaine-Monceau a obtenu de l'administration fiscale, sur le fondement de l'article 1594-0 G, A du code général des impôts, l'exonération et la restitution des taxes initialement acquittées par elle, la Ville de Paris devient redevable des sommes qu'elle avait légalement perçues au titre des droits de mutation à titre onéreux. Les taxes communale et départementale constituent, par suite de leur restitution, des excédents de versement au sens de l'article 2 de l'arrêté du 16 février 2015 susvisé tels que définis au chapitre 1 de la partie 1 de l'instruction du 14 août 2020 " section gestion comptable publique n° 20-006 ". Cette dépense générée par le remboursement de trop-perçus pouvait ainsi être payée sans ordonnancement par ordre de paiement comptable. A ce titre, si la Ville de Paris a établi un mandat de paiement le 29 septembre 2022 se rapportant à la somme de 798 000 euros prélevée le 11 avril 2022 en réponse à une demande de régularisation adressée par l'administration fiscale, cette demande ne devait pas s'entendre comme une régularisation a posteriori d'une dépense nécessitant un ordonnancement préalable et correspondant aux catégories de dépenses figurant à l'article 3 de l'arrêté du 16 février 2015. Par ailleurs, la Ville de Paris étant tenue de liquider la dépense dont elle devenait redevable, la circonstance que le prélèvement de cette somme n'ait fait l'objet d'aucune information préalable reste sans incidence sur la régularité de l'ordre de paiement.
6. En deuxième lieu, si la Ville de Paris soutient que le prélèvement de la somme de
798 000 euros a été opéré sur un compte insuffisamment doté et a eu pour conséquence un déséquilibre budgétaire en méconnaissance de l'obligation de vote du budget à l'équilibre, cette opération comptable, qui porte sur la restitution d'un produit déjà reçu, ne constitue toutefois pas une dépense qui entre dans le vote à l'équilibre du budget de la collectivité et est dans cette mesure sans incidence sur les comptes budgétaires.
7. En troisième lieu, l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales dispose que : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation. Ne constitue pas un tel événement une décision juridictionnelle ou un avis mentionné aux troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190 (...) ".
8. Il est constant que société Lokalis Venture devenue la SNC Plaine-Monceau s'est acquittée des droits de mutation à titre onéreux afférents à l'acquisition le 26 février 2019 de l'immeuble situé 90 rue Jouffroy d'Abbans dans le 17ème arrondissement de Paris. Par un acte notarié rectificatif du 12 octobre 2021, elle a déclaré placer rétroactivement l'acquisition de cet immeuble sous le régime de l'exonération des droits de mutation prévue par les dispositions du I du A de l'article 1594-0 et s'est engagée, à ce titre, à réaliser et achever, dans un délai de quatre ans, des travaux concourant à rendre à l'état neuf cet immeuble au sens du d) du 2° du 2 du I de l'article 257 du même code. Il résulte de l'instruction que sa réclamation, présentée le 15 novembre 2021 consécutivement à cet acte rectificatif et complétée le 9 décembre suivant, a été introduite dans le délai de deux ans suivant le versement de l'impôt fixé par les dispositions du b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales qui prenait fin le 31 décembre 2021. Cette réclamation était par suite recevable contrairement à ce que soutient la Ville de Paris, sans qu'il y ait lieu de rechercher si cet acte rectificatif était susceptible de constituer un événement au sens du c) du même article dont les dispositions n'étaient en l'espèce pas applicables.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 256 A de ce code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence ".
10. Il résulte de l'instruction que la SNC Plaine-Monceau, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris depuis le mois de janvier 2019, a pour activité l'acquisition, la détention, la gestion, l'exploitation, la construction et la location de tous biens immobiliers. Compte tenu de son objet social, la SNC Plaine-Monceau est, dans le cadre de son activité économique, assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et cette qualité n'est pas sérieusement remise en cause par sa date de création.
11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 1594-0-G du code général des impôts : " Sous réserve de l'article 691 bis, sont exonérés de taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement : / A. I. - Les acquisitions d'immeubles réalisées par une personne assujettie au sens de l'article 256 A, lorsque l'acte d'acquisition contient l'engagement, pris par l'acquéreur, d'effectuer dans un délai de quatre ans les travaux conduisant à la production d'un immeuble neuf au sens du 2° du 2 du I de l'article 257, ou nécessaires pour terminer un immeuble inachevé. / II. - Cette exonération est subordonnée à la condition que l'acquéreur justifie à l'expiration du délai de quatre ans, sauf application du IV, de l'exécution des travaux prévus au I (...) ". Aux termes de l'article 257 du même code : " I. Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions qui suivent. (...). 2. Sont considérés : (...) 2° comme immeubles neufs, les immeubles qui ne sont pas achevés depuis plus de cinq années, qu'ils résultent d'une construction nouvelle ou de travaux (...) qui ont rendu à l'état neuf : a. soit la majorité des fondations ; b. soit la majorité de la consistance des façades hors fondations déterminant la résistance et la rigidité de l'ouvrage ; c. soit la majorité de la consistance des façades hors ravalement ; d. soit l'ensemble des éléments de second œuvre tels qu'énumérés par décret en Conseil d'Etat, dans une proportion fixée par ce décret qui ne peut être inférieure à la moitié pour chacun d'entre eux. (...) ". Aux termes de l'article 245 A de l'annexe II au même code : " I. - Pour l'application du d du 2° du 2 du I de l'article 257 du code général des impôts, les éléments de second œuvre à prendre en compte sont les suivants : a. les planchers ne déterminant pas la résistance ou la rigidité de l'ouvrage ; b. les huisseries extérieures ; c. les cloisons intérieures ; d. les installations sanitaires et de plomberie ; e. les installations électriques ; f. et, pour les opérations réalisées en métropole, le système de chauffage. II. - La proportion prévue au d du 2° du 2 du I de l'article 257 du code général des impôts est fixée à deux tiers pour chacun des éléments mentionnés au I ".
12. Il résulte de ces dispositions que sont exonérées de taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement les acquisitions d'immeubles réalisées par une personne assujettie au sens de l'article 256 A du code général des impôts, lorsque l'acte d'acquisition contient l'engagement, pris par l'acquéreur, d'effectuer, dans un délai de quatre ans, les travaux conduisant à la production d'un immeuble neuf au sens du 2° du 2 du I de l'article 257, ou nécessaires pour terminer un immeuble inachevé. Cette exonération est subordonnée à la condition que l'acquéreur justifie, à l'expiration du délai de quatre ans, sauf prolongation de ce délai à sa demande, de l'exécution des travaux.
13. Il résulte de l'instruction que la SNC Plaine-Monceau, qui a succédé à la société Lokalis Venture, s'est engagée par un acte complémentaire du 12 octobre 2021, à réaliser dans un délai de quatre ans des travaux conduisant à la production d'un immeuble neuf au sens des dispositions du 2° du 2 du I de l'article 257 du code général des impôts sur le bien immobilier acquis le 26 février 2019. Contrairement à ce soutient la Ville de Paris, l'exonération des droits d'enregistrement qui pouvait figurer dans cet acte complémentaire à défaut de mention dans l'acte d'acquisition, était acquise dès lors que la SNC Plaine-Monceau, assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, prenait cet engagement et cette exonération ne pouvait être remise en cause qu'à défaut de justification de leur réalisation à l'expiration de ce délai. L'administration fiscale n'était ainsi pas tenue de contrôler la faisabilité des travaux envisagés dans le délai restant à courir jusqu'à cette échéance. Par suite, l'administration fiscale a pu, sans commettre d'erreur de droit et d'appréciation, prononcer en faveur de la SNC Plaine-Monceau le dégrèvement ou la restitution de la somme de 816 633 euros et ordonner par voie de conséquence le prélèvement de la somme de 798 000 euros sur la trésorerie de la Ville de Paris.
14. Il résulte de tout ce qui précède que la Ville de Paris n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordre de reversement émis par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris et de la décision confirmative du 18 mai 2022 ainsi que la décharge de l'obligation de payer la somme prélevée sur sa trésorerie. Les dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la Ville de Paris et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 2215259 du 27 septembre 2022 du tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : Les conclusions de la Ville de Paris présentées devant le tribunal administratif de Paris ainsi que le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Ville de Paris et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- M. Lemaire, président assesseur,
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 10 juillet 2025.
La rapporteure,
C. LORIN
Le président,
S. CARRERELa greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA05057