Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris, par deux requêtes distinctes, d'annuler la décision du 16 juillet 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande de paiement d'heures supplémentaires.
Par un jugement n° 2116080, 2204812 du 16 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 janvier 2024 et le 21 février 2025, M. B..., représenté par Me Dumont, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision contestée ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur le paiement des heures supplémentaires en litige pour un montant de 45 817 euros ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 13 euros en application des articles L. 723-3 et R. 723-26-1 et 2 du code de la sécurité sociale.
Il soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- la note de cadrage du 15 octobre 2020 excluant les agents en détachement de la campagne d'indemnisation des heures supplémentaires est postérieure à son détachement ;
- cette note de cadrage fixe une règle nouvelle, non prévue par les dispositions législatives ou règlementaires ;
- n'ayant pas fait l'objet d'une publication, l'administration ne peut s'en prévaloir ; une circulaire qui n'est pas publiée dans un délai de quatre mois suivant sa signature est réputée abrogée ;
- l'exclusion des agents en situation de détachement du dispositif d'indemnisation des heures supplémentaires méconnaît le principe d'égalité de traitement des fonctionnaires appartenant à un même corps.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2025, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- M. B... n'entrait pas dans le champ d'application du dispositif exceptionnel d'indemnisation dont il se prévaut, lequel ne concerne que les heures supplémentaires postérieures au 1er janvier 2019 ;
- les autres moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Une note en délibéré, présentée pour M. B..., a été enregistrée le 12 juin 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- le décret n° 2000-194 du 3 mars 2000 ;
- l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lellig ;
- les conclusions de Mme de Phily, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Dumont, pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., brigadier-chef de police, a été placé en position de détachement, à compter du 1er mai 2016, auprès de la Commission européenne puis, à compter du 1er juin 2019, du Parlement européen. Par courrier du 24 mars 2021 adressé au ministre de l'intérieur, il a sollicité le paiement de 3 674 heures supplémentaires. Par une décision du 16 juillet 2021, le ministre de l'intérieur a refusé de faire droit à sa demande. M. B... relève appel du jugement du 16 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. En premier lieu, la décision contestée mentionne la note de cadrage du 15 octobre 2019 sur laquelle elle se fonde et précise que le dispositif mis en place exclut les agents placés en situation de détachement. Dans ces conditions, alors même que cette note de cadrage n'était pas jointe à la décision, cette dernière doit être regardée comme suffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, aux termes du second alinéa de l'article 22 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " Les services accomplis au-delà de la durée hebdomadaire normale du travail sont compensés par des repos égaux ou équivalents qui doivent être accordés dans les plus courts délais compatibles avec les besoins du service, ou dans des conditions définies par décret, par un régime indemnitaire adapté ". Aux termes de l'article 1er du décret du 3 mars 2000 fixant les conditions d'attribution d'une indemnité pour services supplémentaires aux fonctionnaires actifs de la police nationale : " Les fonctionnaires actifs de la police nationale, à l'exclusion des fonctionnaires du corps de conception et de direction et du corps de commandement, peuvent, lorsqu'ils sont amenés à effectuer des services supplémentaires non susceptibles de donner lieu à récupération, bénéficier d'une indemnité pour services supplémentaires ". L'article 3 de ce décret précise les modalités de calcul de cette indemnité. Enfin, aux termes de l'article 113-34 de l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale : " Les services supplémentaires (permanences, astreintes, rappels au service, dépassements horaires de la journée de travail ou de la vacation) effectués au-delà de la durée réglementaire de travail ouvrent droit : / 1. Après prise en compte temps pour temps, à des repos égaux ou équivalents dans des conditions précisées par l'instruction générale relative à l'organisation du travail dans la police nationale. / (...) / 2. Ou à une indemnisation forfaitaire dans des conditions fixées par décret. / Le paiement, en application des dispositions du décret n° 2000-194 du 3 mars 2000 modifié, d'indemnités pour services supplémentaires effectués sur une période donnée, exclut toute compensation horaire au titre de cette même période (...) ". Il résulte de ces dispositions que les fonctionnaires actifs de la police nationale appartenant au corps d'encadrement et d'application peuvent prétendre, lorsque les services supplémentaires qu'ils ont effectués ne sont pas susceptibles de donner lieu à récupération sous forme de repos égaux ou équivalents, au versement d'une indemnité calculée selon les modalités prévues par le décret du 3 mars 2000. L'impossibilité de récupérer de tels services supplémentaires peut être la conséquence d'une décision de l'administration, prise pour les besoins du service, ou résulter de la situation du fonctionnaire concerné, notamment de son état de santé.
4. Par ailleurs, une note du directeur général de la police nationale du 15 octobre 2019 a prévu de procéder à l'indemnisation exceptionnelle, au titre de l'année 2019 de tout ou partie des heures supplémentaires excédant le seuil de 160 heures pour les agents ayant accumulé jusqu'au 30 septembre 2019 un nombre d'heures supplémentaires non indemnisées et non récupérées excédant ce même seuil, et ce dans la limite d'un montant maximal de 5 000 euros. La note du 15 octobre 2020 qui reconduit ce dispositif exceptionnel d'indemnisation précise que ces dispositions ne sont valables que pour les heures supplémentaires réalisées postérieurement au 1er janvier 2019.
5. En l'espèce, M. B... a demandé, par courrier du 24 mars 2021, l'indemnisation de 3 674 heures supplémentaires en invoquant expressément la communication du ministre de l'intérieur du 29 octobre 2019, accompagnant la diffusion de la note du 15 octobre 2019, dont le requérant doit dès lors être regardé comme sollicitant le bénéfice. Toutefois, il est constant que les heures supplémentaires dont M. B..., placé en position de détachement depuis le 1er mai 2016, sollicite l'indemnisation ont été réalisées antérieurement au 1er janvier 2019. Dans ces conditions, M. B... n'est en tout état de cause pas fondé à solliciter le bénéfice du dispositif exceptionnel d'indemnisation mis en place au titre des années 2019, 2020 et 2021 pour obtenir l'indemnisation des heures supplémentaires réalisées avant son placement en détachement. La décision litigieuse précise au demeurant à cet égard que l'état des compteurs d'heures supplémentaires de M. B... est gelé durant la durée de son détachement mais qu'il lui sera loisible d'en disposer conformément à la règlementation en vigueur lors de son éventuelle réintégration. Par ailleurs, si M. B... conteste également la légalité ainsi que l'opposabilité de la note du 15 octobre 2019 qui ne pourrait dès lors constituer le fondement du refus qui lui a été opposé, il ne se prévaut en tout état de cause d'aucune disposition législative ou règlementaire susceptible de lui ouvrir droit au paiement sollicité, en dehors de ce dispositif exceptionnel d'indemnisation.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, de l'article L. 723-3 du code de la sécurité sociale doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 12 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Barthez, président de chambre,
- Mme Milon, présidente assesseure,
- Mme Lellig, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2025.
La rapporteure,
W. LELLIG
Le président,
A. BARTHEZ
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA00248