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25/06/2025 | FRANCE | N°24PA02516

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 25 juin 2025, 24PA02516


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par une requête enregistrée sous le n° 2104177, Mme I... B..., née E..., a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 9 novembre 2020 par laquelle le président du conseil départemental du Val-de-Marne a refusé de reconnaître le caractère professionnel des soins et arrêts de travail à compter du 13 juillet 2019 et l'a placée, par voie de conséquence, en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019 et d'enjoindre au département du

Val-de-Marne de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie à compter du 13 juille...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 2104177, Mme I... B..., née E..., a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 9 novembre 2020 par laquelle le président du conseil départemental du Val-de-Marne a refusé de reconnaître le caractère professionnel des soins et arrêts de travail à compter du 13 juillet 2019 et l'a placée, par voie de conséquence, en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019 et d'enjoindre au département du Val-de-Marne de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie à compter du 13 juillet 2019 ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation.

Par une requête enregistrée sous le n° 2105527, Mme I... B..., née E..., a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler les titres de recette en date du 6 avril 2021 en vue du recouvrement des sommes respectives de 4 993,92 euros et 809,40 euros et de la décharger de l'obligation de payer les sommes correspondantes.

Par un jugement nos 2104177 et 2105527 du 9 avril 2024, le tribunal administratif de Montreuil a, d'une part, annulé la décision du 9 novembre 2020 par laquelle le président du conseil départemental du Val-de-Marne a refusé de reconnaître le caractère professionnel de la maladie de Mme B... à compter du l3 juillet 2019 et a, par voie de conséquence, refusé de prendre en charge les soins médicaux correspondants et a placé l'intéressée en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019. D'autre part, le tribunal administratif a annulé les titres de recette attaqués et déchargé Mme B... de l'obligation de payer les sommes respectives de

4 993,92 euros et 809,40 euros. Enfin, il a enjoint au président du conseil départemental du Val-de-Marne de réexaminer la situation de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. En outre, il a mis à la charge du département du Val-de-Marne une somme de 1 500 euros au titre des deux requêtes susvisées en application de l'article L. 761-l du code de justice administrative et a rejeté le surplus des requêtes ainsi que les conclusions présentées par le département tendant au versement d'une somme en application de l'article L. 761-1 précité.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif enregistrés les 11 juin et 2 juillet 2024, le département du Val-de-Marne, représenté par son président en exercice, et ayant pour avocat Me Abbal, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 2104177 et 2105527 du 9 avril 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de rejeter les conclusions de première instance de Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité pour défaut de signature de la minute ;

- il est entaché d'erreur de fait et d'erreur de droit dès lors que l'avis de la commission de réforme du 7 septembre 2020 n'est pas intervenu au terme d'une procédure irrégulière ;

- il est entaché d'erreur de droit et d'appréciation au motif qu'il considère à tort que l'absence de rapport du médecin de prévention a privé l'agent d'une garantie ;

- il est entaché d'erreur de qualification juridique dès lors que les titres exécutoires ne sont pas dépourvus de base légale ;

- aucun des moyens soulevés par Mme B... dans les deux instances ne sont fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 mars 2025, Mme B..., représentée par Me Arvis, conclut au rejet de la requête.

Elle oppose l'irrecevabilité de la requête au motif que le jugement attaqué n'est pas produit, fait valoir que les moyens présentés par le département du Val-de-Marne ne sont pas fondés et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge du département du Val-de-Marne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le département du Val-de-Marne a produit un mémoire en réplique enregistré le 14 mai 2025 qui n'a pas été communiqué.

Par une ordonnance du 29 avril 2025, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mai 2025.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Breillon,

- les conclusions de M. Perroy, rapporteur public,

- les observations de Me Verger-Giambelluco, représentant le département du Val-de-Marne,

- et les observations de Me Arvis, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., rédactrice territoriale principale de première classe exerçait les fonctions de gestionnaire foncier pour le compte du département du Val-de-Marne. Par un arrêté du 9 novembre 2018, le département du Val-de-Marne a reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée par Mme B... à compter du 13 octobre 2017. Celle-ci a été placée en congé de maladie jusqu'au 24 févier 2020. Par décision du 9 novembre 2020, le département du Val-de-Marne a refusé de reconnaître imputables au service les arrêts de maladie et soins postérieurs au 13 juillet 2019 et a, en conséquence, placé Mme B... en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019. Par ailleurs, Mme B... a été destinataire de deux titres de recette en date du 6 avril 2021 en vue du recouvrement des sommes respectives de 4 993,92 euros et 809, 40 euros au motif de la perception d'un " trop-perçu ". Par la présente requête, le département du Val-de-Marne relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a, d'une part, annulé la décision du 9 novembre 2020 et, d'autre part, annulé les titres de recette et prononcé la décharge des sommes litigieuses.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

2. Aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. / Cet acte ou cette pièce doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagné d'une copie ". Ces dispositions sont rendues applicables à l'introduction d'une instance devant le juge d'appel par les dispositions de l'article R. 811-13 du code de justice administrative.

3. Il ressort des pièces du dossier que le département du Val-de-Marne a joint à sa requête une copie du jugement attaqué. Par suite, la requête n'est pas entachée d'irrecevabilité. La fin de non-recevoir soulevée en ce sens par Mme B... doit, dès lors, être écartée.

Sur la régularité du jugement :

4. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ". En l'espèce, il ressort de l'examen de la copie de la minute du jugement contesté qu'elle comporte les signatures du président, du rapporteur et du greffier. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article manque en fait. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à se prévaloir d'une irrégularité du jugement attaqué sur ce point.

5. En second lieu, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. L'appelant ne peut donc utilement soutenir que le jugement serait entaché de plusieurs erreurs de droit, de fait et d'appréciation.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. Aux termes de l'article 16 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987, dans sa version applicable au litige : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, la commission de réforme (...) est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2e alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui lui est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive compétent à l'égard du fonctionnaire concerné. / Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé. / (...). ".

7. Il résulte de ces dispositions que la consultation du médecin du service de médecine préventive est constitutive d'une garantie pour le fonctionnaire demandant le bénéfice des dispositions du 2ème alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984. Dans ce cadre, le médecin de prévention doit remettre à la commission de réforme un rapport écrit et peut, s'il le demande, obtenir communication du dossier de l'intéressé, présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion. En revanche, le médecin de prévention n'est pas tenu de remettre un rapport à la commission de réforme lorsqu'elle doit seulement statuer sur la date de consolidation de l'état de santé de l'agent, et non sur l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie.

8. En l'espèce, pour annuler la décision du 9 novembre 2020 refusant de reconnaître imputables au service les arrêts de maladie et soins postérieurs au 13 juillet 2019 et plaçant Mme B... en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019, les premiers juges se sont fondés sur l'absence de transmission à la commission de réforme d'un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive entachant ainsi la procédure d'un vice. Toutefois, l'objet de la séance de la commission de réforme en date du 7 septembre 2020 n'était pas de déterminer l'imputabilité au service de la pathologie de Mme B... dès lors que cette imputabilité avait déjà été reconnue par arrêté du 9 novembre 2018 du président du conseil départemental du Val-de-Marne. Ainsi, conformément à l'avis en date du 17 juin 2019 de la commission de réforme, Mme B... a été examinée par un médecin agréé psychiatre en vue de déterminer la date de consolidation et le taux d'incapacité permanente partielle (IPP). Dans son rapport d'expertise du 17 septembre 2019, ce dernier a proposé une date de consolidation fixée au 13 juillet 2019 et l'absence de taux d'IPP. Dans l'avis litigieux du 7 septembre 2020, la commission de réforme a retenu la date de consolidation ainsi proposée et a, en conséquence, précisé que les arrêts et soins prescrits au-delà de cette date ne sont plus à prendre en charge au titre de la maladie professionnelle. La circonstance que l'avis précité indique dans les motifs de présentation " imputabilité au service d'une maladie non désignée dans un tableau et/ou de ses conséquences " sans préciser que l'objet de la séance était la détermination d'une date de consolidation et d'un taux d'IPP n'est pas de nature à remettre en cause l'objet de la séance de la commission de réforme du 7 septembre 2020 au vu de l'ensemble des éléments précités.

9. Il résulte de ce qui précède que le département du Val-de-Marne est fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement contesté a considéré que l'avis de la commission de réforme du 7 septembre 2020 est intervenu au terme d'une procédure irrégulière. Pour ce motif, le jugement est annulé.

10. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Montreuil.

En ce qui concerne les moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Montreuil à l'encontre de la décision du 9 novembre 2020 :

11. En premier lieu, la décision attaquée du 9 novembre 2020 a été signée par

M. K..., directeur adjoint des ressources humaines, lequel disposait d'une délégation du président du conseil départemental du Val-de-Marne pour signer, notamment, les arrêtés relatifs aux accidents et maladies professionnelles en vertu d'un arrêté n° 15-384 du 9 juillet 2015 du président du conseil départemental du Val-de-Marne, publié au Recueil des actes administratifs du département le 20 juillet 2015. En outre, contrairement à ce que soutient Mme B..., la décision attaquée n'abroge pas l'arrêté du 9 novembre 2018 portant reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte sera écarté comme manquant en fait.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, la commission de réforme comprend " 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes ; 2. Deux représentants de l'administration ; 3. Deux représentants du personnel. (...) ". Aux termes de l'article 17 du même arrêté : " La commission ne peut délibérer valablement que si au moins quatre de ses membres ayant voix délibérative assistent à la séance. Deux praticiens, titulaires ou suppléants, doivent obligatoirement être présents. (...) "

13. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, que la commission de réforme, qui s'est réunie le 7 septembre 2020, était composée notamment de la présidente, Mme D..., de deux médecins généralistes, les docteurs Droux et Le Bourdon, le docteur A... H..., médecin spécialiste, et de deux représentants du personnel M. C... et Mme J.... Dès lors, le moyen tiré de ce que la commission de réforme était irrégulièrement composée en l'absence d'un médecin spécialiste et de deux représentants du personnel sera écarté comme manquant en fait.

14. En troisième lieu, si Mme B... soulève un vice de procédure tiré de l'absence de convocation à la séance de la commission de réforme, il ressort des pièces du dossier que, par courrier en date du 20 août 2020 régulièrement notifié le 1er septembre suivant, l'intéressée a été informée que son dossier serait examiné à la séance du 7 septembre 2020, qu'elle avait la possibilité de présenter toutes observations écrites et pièces médicales, de demander la communication de son dossier, de se faire entendre par ladite commission et d'y être assistée. Le moyen sera donc écarté comme manquant en fait.

15. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que la procédure suivie devant la commission de réforme lors de la séance du 7 septembre 2020 est irrégulière en l'absence d''un rapport écrit du médecin du service de médecine de prévention est écarté comme inopérant pour les motifs indiqués aux points 6 à 9 du présent arrêt.

16. En cinquième lieu, aux termes de l'article 19 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) L'avis de la commission de réforme est communiqué au fonctionnaire sur sa demande ; (...) ".

17. En l'espèce, d'une part, Mme B... soutient que la décision attaquée du 9 novembre 2020 méconnaît les droits de la défense et le principe du contradictoire dès lors qu'elle n'a pas été mise à même d'obtenir la communication de son dossier administratif avant que ne soit prise ladite décision. Toutefois, ainsi qu'indiqué au point 14 ci-dessus, l'intéressée a été régulièrement informée de ses droits et notamment de la possibilité que son dossier lui soit communiqué. Or, il n'est ni établi, ni même allégué, qu'elle aurait sollicité en vain sa transmission. D'autre part, si elle oppose que l'avis de la commission de réforme du 7 septembre 2020 ne lui a pas été communiqué, elle n'établit pas, ni même n'allègue, qu'elle aurait conformément aux dispositions précitées de l'article 19, demandé que l'avis lui soit transmis. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que les droits de la défense et le principe du contradictoire auraient été méconnus.

18. En sixième lieu, Mme B... soutient que la décision attaquée du 9 novembre 2020 est entachée d'une erreur de droit dès lors que le département du Val-de-Mame s'est estimé à tort en situation de compétence liée par l'avis de la commission de réforme du 7 septembre 2020. Toutefois, il ne ressort pas des termes de la décision attaquée qui fait référence à l'ensemble des éléments du dossier médical de l'intéressée, tels que notamment les procès-verbaux de la commission de réforme et les expertises médicales, que l'employeur de Mme B... se serait cru lié par l'avis de la commission de réforme. Le moyen sera donc écarté.

19. En septième lieu, Mme B... soutient que la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit au motif que son employeur n'a pas préalablement vérifié son aptitude à exercer ses fonctions. Toutefois, dès lors que l'objet de la décision litigieuse était de déterminer si les arrêts de travail postérieurs au 13 juillet 2019 relevaient de la maladie ordinaire ou pas, l'aptitude de l'exercice aux fonctions de l'agent n'était pas susceptible d'avoir une incidence sur la décision litigieuse. En tout état de cause, la décision qui précise que Mme B... a été examinée le 17 septembre 2019 par le Dr G..., lequel préconisait une date de consolidation au 13 juillet 2019 et indiquait que les soins post consolidation sont à prendre en charge au titre de la maladie ordinaire ou du congé longue maladie, n'avait pas pour effet d'empêcher l'intéressée de bénéficier d'arrêts maladie. Par suite, le moyen sera écarté.

20. En dernier lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : /.../ 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. /.../ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

21. Il résulte de ces dispositions qu'un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. Il résulte par ailleurs de ces dispositions que doivent être pris en charge au titre de l'accident de service les arrêts de travail et les frais médicaux présentant un lien direct et certain avec l'accident initial y compris, le cas échéant, s'ils interviennent postérieurement à la date de consolidation constatée par l'autorité compétente.

22. En outre, la date de consolidation correspond au moment où les lésions se fixent et acquièrent un caractère permanent, ce qui permet alors d'apprécier un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) qui a résulté d'une pathologie ou d'un accident. La consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cette pathologie ou cet accident.

23. Il ressort des pièces du dossier que la pathologie déclarée par Mme B... à compter du 13 octobre 2017 a été reconnue, par un arrêté du 9 novembre 2018, d'origine professionnelle et qu'elle a été placée en congé de maladie jusqu'au 24 févier 2020. Par la décision attaquée du 9 novembre 2020, le département du Val-de-Marne a refusé de reconnaître imputables au service les arrêts de maladie et soins postérieurs au 13 juillet 2019 dès lors que son état de santé était considéré comme guéri avec retour à l'état antérieur à la date du 13 juillet 2019 et a, en conséquence, placé Mme B... en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019. Si l'intéressée conteste la date de consolidation retenue du 13 juillet 2019 et soutient que son inaptitude nécessitait de reconnaître ses arrêts de travail et les soins imputables au service, elle n'établit pas le lien direct et certain entre les arrêts de travail et soins postérieurs au 13 juillet 2019 et son accident de service en se bornant à produire deux certificats d'un psychiatre datés des 11 octobre 2023 et 13 mars 2024 indiquant le suivi hebdomadaire de l'intéressée et la prescription d'un psychotrope. En outre, la circonstance invoquée par la requérante que son maintien en arrêt maladie professionnelle jusqu'au 24 février 2020 avait pour conséquence que les arrêts postérieurs au 13 juillet 2019 devaient nécessairement être reconnus comme imputables au service, est sans incidence dès lors que l'employeur est tenu de placer ses agents dans une situation administrative régulière. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le département du Val-de-Marne a entaché la décision attaquée d'une erreur d'appréciation.

24. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée du 9 novembre 2020 par laquelle le président du conseil départemental du Val-de-Marne a refusé de reconnaître le caractère professionnel des soins et arrêts de travail à compter du 13 juillet 2019 et l'a placée, par voie de conséquence, en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019.

En ce qui concerne les moyens soulevés par Mme B... devant le tribunal administratif de Montreuil à l'encontre des titres de recette :

25. L'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. Il en résulte que, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions tendant à l'annulation d'un titre exécutoire, des conclusions aux fins de décharge de la somme correspondant à la créance de l'administration, il incombe au juge administratif d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de la décharge.

26. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens qui seraient de nature à justifier le prononcé de la décharge mais retient un moyen mettant en cause la régularité formelle du titre exécutoire, le juge n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler le titre. Statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande de décharge de la somme litigieuse.

27. En premier lieu, aux termes de l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation. (...) ".

28. Un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

29. En l'espèce, les deux titres exécutoires mentionnent un " trop perçu ". Ces titres ont été précédés de deux courriers en date du 22 février 2021 détaillant la nature des trop perçus et les motifs pour lesquelles les sommes feraient l'objet de titres de recette. Les courriers se réfèrent ainsi à la décision du 9 novembre 2020 refusant de reconnaître l'imputabilité des suites de l'accident de service à compter du 13 juillet 2019 dans la mesure où Mme B... est considérée comme guérie avec retour à l'état antérieur à cette date. Les courriers précisent également que la somme de 4 993,92 euros correspond au versement indu de l'intégralité du traitement et celle de 809,40 euros aux frais médicaux pris en charge par la collectivité depuis le 14 juillet 2019. Si lesdits courriers indiquent qu'ils sont adressés sous pli recommandé et par envoi simple, le département du Val-de-Marne ne produit pas les accusés de réception permettant d'établir leur notification. Dès lors, Mme B... est fondée à soutenir que les courriers ne lui ont pas été notifiés. Les titres de recette sont donc entachés d'insuffisance de motivation.

30. En second lieu, aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) 4° Quelle que soit sa forme, une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressée au redevable. (...) / En application de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation. (...) ".

31. L'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées (...) ". L'article L. 212-1 du même code précise que : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci (...) ".

32. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un titre de recettes doit mentionner les nom, prénom et qualité de la personne qui l'a émis, et que seul le bordereau de titres de recettes doit être signé.

33. En l'espèce, les titres de recette litigieux mentionnent les nom, prénom et qualité de la personne qui les a émis, à savoir M. L..., Directeur adjoint des Finances et des Marchés. Toutefois, le département du Val-de-Marne ne produit pas le bordereau journal des titres de recettes, sur lequel devraient être mentionnés les titres de recette litigieux et un signataire. Le moyen tiré du défaut de signature est donc fondé.

34. Par suite, compte tenu des irrégularités formelles dont sont entachés les titres de recette litigieux, Mme B... est seulement fondée à en demander l'annulation.

35. Il résulte de tout ce qui précède que le département du Val-de-Marne est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 9 novembre 2020 portant refus de reconnaître le caractère professionnel des soins et arrêts de travail à compter du 13 juillet 2019 et plaçant Mme B... en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juillet 2019. De même, il est fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué décharge Mme B... de l'obligation de payer les sommes de 4 993,92 euros et 809,40 euros. En revanche, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué annule les titres de recette du 6 avril 2021 en vue du recouvrement des sommes précitées. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions présentées par le département du Val-de-Marne et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement nos 2104177 et 2105527 du tribunal administratif de Montreuil en date du 9 avril 2024 est annulé.

Article 2 : Les titres de recette du 6 avril 2021 émis en vue du recouvrement des sommes respectives de 4 993,92 euros et 809,40 euros sont annulés.

Article 3 : Le surplus des conclusions de première instance et d'appel du département du Val-de-Marne est rejeté.

Article 4 : Le surplus des conclusions de première instance et d'appel de Mme B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au département du Val-de-Marne et à Mme I... B..., née E....

Délibéré après l'audience du 11 juin 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Vidal, présidente de chambre,

- Mme Bories, présidente assesseure,

- Mme Breillon, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2025.

La rapporteure,

A. BREILLONLa présidente,

S. VIDAL

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

N° 24PA02516 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA02516
Date de la décision : 25/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: Mme Anne BREILLON
Rapporteur public ?: M. PERROY
Avocat(s) : SEBAN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-25;24pa02516 ?
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