La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2025 | FRANCE | N°24PA04595

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 19 juin 2025, 24PA04595


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2023 par lequel le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2302122 du 7 octobre 2024 le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 12 novem

bre 2024, M. A..., représenté par Me Braun, demande à la cour :



1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2023 par lequel le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2302122 du 7 octobre 2024 le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 novembre 2024, M. A..., représenté par Me Braun, demande à la cour :

1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler le jugement n° 2302122 du 7 octobre 2024 du tribunal administratif de Melun ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 30 janvier 2023 ;

4°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- cette décision a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le préfet a omis de saisir pour avis la commission du titre de séjour ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- cette décision a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision a été signée par une autorité incompétente ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

- cette décision doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la mesure d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2025, le préfet du Val-de-Marne conclut au rejet de la requête de M. A....

Il soutient que :

- la requête d'appel présentée par M. A... est irrecevable dès lors qu'elle n'a pas été présentée dans le délai d'un mois ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre de la mesure d'éloignement ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 8 janvier 2025.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Zeudmi Sahraoui,

- et les observations de Me Braun, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant malien né le 1er janvier 1978, est entré en France le 8 décembre 2001 muni d'un visa de court séjour. Par un jugement du 26 mai 2015, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 30 juin 2014 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français et a enjoint au préfet de réexaminer la situation de l'intéressé après avoir saisi la commission du titre de séjour. Par un arrêté du 30 janvier 2023, pris après avis favorable de la commission du titre de séjour du 14 avril 2016, le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office. M. A... relève appel du jugement du 7 octobre 2024 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Par une décision du 8 janvier 2025, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a accordé à M. A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Les conclusions du requérant tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont ainsi sans objet et doivent être rejetées.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

3. Il ressort des pièces du dossier que le pli contenant le jugement du tribunal administratif de Melun a été expédié par le greffe de ce tribunal à l'adresse déclarée par M. A... et a été retourné à l'expéditeur avec la mention " défaut d'accès ou d'adressage ". Toutefois, l'adresse indiquée par le greffe du tribunal sur la liasse postale était lisible et ne comportait aucune erreur de libellé. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que M. A..., qui réside à cette adresse depuis au moins l'année 2014, a reçu de nombreux courriers à cette adresse. Dès lors, le jugement attaqué ne peut être regardé comme ayant été régulièrement notifié à M. A... de sorte que le délai d'appel ne lui est pas opposable. La fin de non-recevoir soulevée en défense par le préfet du Val-de-Marne ne peut qu'être écartée.

Sur la régularité du jugement :

4. Il résulte des mentions du jugement attaqué qu'alors qu'ils ont visé le moyen soulevé par M. A... et qui n'était pas inopérant, tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, les premiers juges ont omis d'y répondre. Le requérant est ainsi fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier en tant qu'il statue sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour et à en demander, dans cette mesure, l'annulation.

5. Il appartient à la cour de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions de la requête de M. A....

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... :

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France le 8 décembre 2001, muni d'un visa de court séjour et qu'il réside depuis cette date de manière continue sur le territoire français, soit depuis plus de 21 ans à la date de la décision litigieuse. Le requérant a occupé dès l'année 2003 un emploi en qualité d'agent de propreté auprès de l'association Accueil et formation et a ensuite occupé divers emplois notamment auprès de l'association Insertion Service et de la société Le Chevalier blanc, puis en 2017 et 2018 auprès de la société de construction performante et écologique. Enfin, M. A... a occupé de 2020 à 2022 un emploi d'aide à domicile, auprès d'un même particulier, rémunéré par chèque emploi universel. L'intéressé a également engagé des démarches, dès l'année 2006, auprès de l'agence nationale pour l'emploi et suivi une formation en linguistique. Les pièces versées au dossier démontrent la volonté de M. A... de s'insérer, notamment par le travail, dans la société française. Dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu notamment de l'ancienneté du séjour en France de l'intéressé, celui-ci est fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour le préfet du Val-de-Marne a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur les autres conclusions de la requête :

7. La décision obligeant M. A... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et la décision fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2023 du préfet du Val-de-Marne et à demander l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet du Val-de-Marne délivre à M. A... un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale. Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

10. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Braun, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me Braun.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Melun n° 2302122 du 7 octobre 2024 et l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 30 janvier 2023 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Braun, avocat de M. A..., une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, au préfet du Val-de-Marne et Me Braun.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 juin 2025

La rapporteure,

N. Zeudmi SahraouiLa présidente,

V. Chevalier-Aubert

La greffière,

C. BuotLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA04595


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA04595
Date de la décision : 19/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : BRAUN

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-19;24pa04595 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award