Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner la province Nord à lui verser une somme de 1 536 000 francs CFP, correspondant au montant de l'indemnité de sujétion afférente à ses fonctions de chargé de mission qui lui est due pour la période allant de septembre 2018 à avril 2021, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable.
Par un jugement n° 2200416 du 22 juin 2023, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a, d'une part, condamné la province Nord de la Nouvelle-Calédonie à verser à M. B... la somme correspondant au montant de l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission, égale à 1/12ème de la valeur de 48 points INM, qui lui est due pour les mois de septembre 2018 à avril 2021, sur les bases définies au point 4 de ce jugement et, d'autre part, a renvoyé M. B... devant la province Nord de la Nouvelle-Calédonie afin qu'il soit procédé à la liquidation de la somme mentionnée.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 août et 15 décembre 2023, la province Nord, représentée par Me Million, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 22 juin 2023 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 200 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son appel est recevable ;
- la délibération du 30 janvier 2009 ne prévoit pas une indemnité de chargé de mission telle qu'envisagée à l'article 7 de la délibération du 25 juin 2008 mais seulement une indemnité de sujétion en fonction du positionnement hiérarchique ;
- M. B... n'a droit à aucune indemnité, dès lors qu'il n'occupe ni les fonctions de chargé de mission auprès du secrétaire général et des secrétaires généraux adjoints de la province et qu'il n'encadre pas du personnel.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 novembre et 28 décembre 2023, M. B..., représenté par la SELARL Reuter-de Raissac-Patet demande à la cour de rejeter la requête présentée par la province Nord de la Nouvelle-Calédonie et de mettre à la charge de la requérante une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable dès lors que l'appelante n'a pas produit le jugement attaqué ;
- les moyens soulevés par la province Nord de la Nouvelle-Calédonie ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;
- la délibération n° 393 du 25 juin 2008 ;
- la délibération n° 2009-03/APN du 30 janvier 2009 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laforêt, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été titularisé par un arrêté 24 avril 2017 dans le corps des ingénieurs des personnels techniques de la Nouvelle-Calédonie, au deuxième échelon du grade 1 de son corps. La demande du 15 septembre 2022 par laquelle il a sollicité le versement d'une indemnité mensuelle de sujétion à raison des fonctions de chargé de mission qu'il a exercé sur la période de septembre 2018 à avril 2021 au sein de la direction de l'aménagement et du foncier (DAF) de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, a été implicitement rejetée. La province Nord de la Nouvelle-Calédonie fait appel du jugement du 22 juin 2023 en tant que le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a fait droit à la demande de M. B....
En ce qui concerne la demande d'indemnisation :
2. Aux termes de l'article 1er de la délibération du congrès n° 393 du 25 juin 2008 relative au régime indemnitaire des personnels d'encadrement et assimilés : " Les agents exerçant dans les services et directions (...) des provinces (...) des fonctions entraînant une sujétion spécifique liée à l'encadrement de personnels, peuvent bénéficier d'indemnités, telles que prévues par la présente délibération, dans la limite des montants prévus par la présente délibération en fonction de leur niveau hiérarchique / (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette délibération : " Chacune des indemnités prévues aux articles suivants peut être versée, dans la limite des montants prévus par la présente délibération, dans chaque collectivité ou établissement public, visés par l'article 1er, en application : / (...) / - d'une délibération de l'assemblée délibérante, s'agissant (...) des assemblées de province / (...) ". Aux termes de l'article 4 de la même délibération : " Les personnels visés à l'article 1er peuvent bénéficier d'une indemnité mensuelle de sujétion dans la limite des plafonds suivants : / Niveaux hiérarchiques : / (...) / N-2 / Indemnité [Le montant maximal de l'indemnité mensuelle de sujétion est égal au 1/12ème de la valeur du nombre de points d'indice nouveau majoré de la grille locale des traitements convertie en monnaie locale et affectée d'un coefficient de majoration applicable aux fonctionnaires territoriaux] : / (...) / 48 / (...) / Le niveau hiérarchique N correspond : / - pour (...) les provinces (...) : aux agents responsables d'une entité organisationnelle réglementairement constituée, placés sous l'autorité directe du secrétaire général, du secrétaire général adjoint, du directeur général des services de la collectivité / (...). ". Aux termes de l'article 5 de la même délibération : " Chaque collectivité (...) définit, dans les limites posées par la présente délibération : / - la correspondance entre le niveau hiérarchique et la dénomination des fonctions / - le montant de l'indemnité attribué à chaque niveau hiérarchique ". Aux termes de son article 7 : " Les personnels exerçant les fonctions de chargé de mission : / (...) / 2- auprès d'un responsable classé au niveau N peuvent bénéficier d'une indemnité dans la limite du montant versé pour un agent placé au niveau hiérarchique N-2. ".
3. Aux termes de l'article 2 de la délibération n° 2009-03/APN du 30 janvier 2009 portant application au sein de la province Nord de la délibération précitée du 25 juin 2008 et de la délibération n° 64/CP du 17 novembre 2008 relative au régime indemnitaire lié à l'exercice de certains emplois fonctionnels de la Nouvelle-Calédonie : " En application de l'article 2 de la délibération du 25 juin 2008 susvisée, le montant de l'indemnité de sujétion est égal à 1/12e de la valeur du nombre de points d'indice nouveau majoré de la grille locale des traitements converti en monnaie locale, fixé pour chaque niveau hiérarchique, et affecté d'un coefficient de majoration applicable aux fonctionnaires territoriaux : (...) - N - 2 : 48 / (...) ". L'article 3 de cette délibération dispose que : " En application de l'article 5 de la délibération du 25 juin 2008 susvisée, la correspondance entre les niveaux hiérarchiques est définie de la manière suivante : / - N : directeur ; / - N - 1 : directeur adjoint et chargé de mission auprès du secrétaire général et des secrétaires généraux adjoints ; / - N - 2 : chef de service. (...) ".
4. D'une part, la délibération n° 393 du 25 juin 2008, citée au point 2, crée une indemnité de sujétions particulières en principe réservée, selon son article 1er, aux agents exerçant des fonctions entraînant une sujétion spécifique liée à l'encadrement de personnels et prévoit que les agents mentionnés à l'article 4 de cette délibération, comme ceux qui peuvent leur être assimilés, conformément à son article 8, exercent nécessairement des fonctions entraînant de telles sujétions. Toutefois tel n'est pas obligatoirement le cas des chargés de mission mentionnés au titre III de la délibération, composé de son seul article 7 qui prévoit qu'ils peuvent bénéficier d'une indemnité de sujétion particulière lorsqu'ils exercent leurs fonctions auprès de certains des agents.
5. D'autre part, il résulte de la combinaison des dispositions mentionnées aux points 2 et 3, qu'au sein de l'administration de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, les chargés de mission placés sous l'autorité directe du secrétaire général, du secrétaire général adjoint ou du directeur général des services de la collectivité, ou exerçant leurs fonctions auprès d'un directeur, bénéficient de l'indemnité mensuelle de sujétion.
6. Il résulte de ce qui précède que la province Nord de la Nouvelle-Calédonie n'est pas fondée à soutenir que la délibération du 25 juin 2008 aurait entendu réserver l'indemnité aux seuls agents exerçant un encadrement de personnels, ni qu'en ne prévoyant pas un renvoi exprès à l'article 7 de cette délibération du 25 juin 2008, la délibération du 30 janvier 2009 aurait entendu exclure les chargés de mission autres que ceux placés auprès du secrétaire général et des secrétaires généraux adjoints et qui sont mentionnés à cet article 7.
7. Il résulte de l'instruction et est admis par la province Nord de la Nouvelle-Calédonie, que M. B... exerçait entre septembre 2018 et avril 2021 des fonctions de chargé de mission auprès du directeur de l'aménagement et du foncier de la province. Par suite, quand bien même il n'exerçait pas des fonctions d'encadrement de personnels, il était en droit de bénéficier d'une indemnité de sujétion dont le montant est égal à 1/12ème de la valeur de 48 points d'indice nouveau majoré (INM) de la grille locale des traitements converti en monnaie locale.
8. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par M. B..., la province Nord de la Nouvelle-Calédonie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie l'a condamnée à verser à M. B... l'indemnité de sujétion afférente aux fonctions de chargé de mission.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la province Nord de la Nouvelle-Calédonie demande au titre des frais de l'instance. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie une somme de 1 500 euros à verser à M. B... sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie est rejetée.
Article 2 : La province Nord versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la province Nord de la Nouvelle-Calédonie et à M. A... B....
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,
- Mme Hamon, présidente assesseure,
- M. Laforêt, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 juin 2025.
Le rapporteur,
E. Laforêt La présidente,
V. Chevalier-Aubert
La greffière,
C. Buot
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA03792