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29/04/2025 | FRANCE | N°24PA03066

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 29 avril 2025, 24PA03066


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui accorder un titre de séjour.



Par un jugement n° 2304142 du 19 juin 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2024, Mme B..., représentée par Me Lebriquir, dem

ande à la cour :



1°) d'annuler le jugement du 19 juin 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;



2°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui accorder un titre de séjour.

Par un jugement n° 2304142 du 19 juin 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2024, Mme B..., représentée par Me Lebriquir, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 juin 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier faute d'avoir répondu au moyen tiré du non-respect du délai raisonnable et de l'exigence de personnalisation ;

- la décision portant refus de séjour méconnait le délai raisonnable, tel que prévu par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entaché d'un défaut d'examen ;

- la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, en méconnaissance des articles L. 611-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'absence de menace à l'ordre public, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du principe constitutionnel de fraternité, de la circulaire du 28 novembre 2012 et des articles L. 423-7 et L. 423-8 du code précité.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Laforêt, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante camerounaise, née le 19 mai 1995 à Douala (Cameroun) a sollicité le 9 novembre 2020 une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 13 février 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Mme B... relève appel du jugement du 11 juillet 2024 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". D'une part, le tribunal a visé le moyen de ce que la décision attaquée " a été prise au terme d'un délai déraisonnable, en méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " sans y répondre dans les motifs du jugement. Toutefois, le moyen tiré de la méconnaissance d'un délai raisonnable est inopérant à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour. Ainsi, les premiers juges n'étaient pas tenus d'y répondre et n'ont donc pas entaché leur jugement d'omission à statuer sur ce point. D'autre part, contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal a répondu au moyen tiré de " l'exigence de personnalisation " en écartant tant un moyen tiré du défaut de motivation que celui du défaut d'examen de sa demande. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. En premier lieu, Mme B... reprend en appel les moyens tirés du " non respect du délai raisonnable et de l'exigence de personnalisation " qu'elle avait invoqués en première instance. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré du non-respect du délai raisonnable est inopérant et il y a lieu d'écarter le moyen de l'exigence de personnalisation par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Montreuil aux points 2, 3 et 12 de son jugement.

4. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre d'une décision portant refus de séjour. Si la requérante cite l'article L. 435-1 du même code ainsi que la circulaire du 28 novembre 2012, il est constant qu'elle n'a pas demandé une admission exceptionnelle au séjour en application de cet article et par suite les moyens sont également inopérants. Mme B... invoque l'absence de menace à l'ordre public alors qu'il est constant que le préfet n'a pas opposé une telle circonstance à l'encontre de l'intéressé. Si elle se prévaut de la jurisprudence du Conseil constitutionnel au regard du principe de fraternité, elle n'assortit son moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article L. 423-8 du code précité : " Pour la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7, lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, doit justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil, ou produire une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. / Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ".

6. Mme B... soutient qu'elle est mère d'un enfant français né le 26 décembre 2019 en France et reconnu le 23 décembre 2019 par son père, M. C..., de nationalité française. Dans la décision attaquée le préfet a indiqué que les transferts d'argent datés du 24 août 2020, 19 septembre 2020 et 24 octobre 2020 ne sauraient justifier de la contribution à l'entretien et à l'éduction de l'enfant par le père français depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans et que la requérante n'a pas répondu à la demande de pièces complémentaires adressée par courriel le 2 juin 2022. Si Mme B... soutient que le père de l'enfant contribue à l'entretien de l'enfant, elle ne produit que cinq mandats de transferts d'argent d'une valeur de 100 euros chacun entre le 13 juin 2022 et le 20 mars 2023 qui sont insuffisants et au demeurant tous datés après le courriel précité. Les factures produites ne sauraient pas non plus établir la contribution du père à l'entretien de l'enfant et il n'est pas démontré que M. C... aurait des relations avec son fils, quand bien même les parents vivraient séparément, Mme B... étant hébergé en centre d'urgence avec son fils. Par suite, le préfet a pu rejeter la demande de titre sans méconnaitre les dispositions précitées ni entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Mme B... soutient qu'elle vit en France depuis le 16 septembre 2017, avec son fils né le 23 décembre 2019 qui est scolarisé depuis septembre 2022 et qu'elle travaille depuis août 2021 en qualité d'assistante ménagère. Toutefois, eu égard à la durée de sa présence en France, à l'absence de relation entre son fils et le père de celui-ci, au caractère récent de la scolarisation et à sa faible intégration professionnelle la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée du 13 février 2023 portant refus de titre de séjour porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention précitée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par la requérante doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Laforêt, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025.

Le rapporteur,

E. Laforêt La présidente,

V. Chevalier-Aubert

La greffière,

C. Buot

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA03066


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA03066
Date de la décision : 29/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur ?: M. Emmanuel LAFORÊT
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : LEBRIQUIR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-29;24pa03066 ?
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