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11/04/2025 | FRANCE | N°24PA02389

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 11 avril 2025, 24PA02389


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B..., administrateur de la société anonyme (SA) Société Générale du Textile Balsan, a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle cette société a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2017 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant l'année 2015 et de la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 20

18, d'autre part, d'ordonner la restitution des sommes versées au titre de l'impôt sur les socié...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B..., administrateur de la société anonyme (SA) Société Générale du Textile Balsan, a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle cette société a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2017 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant l'année 2015 et de la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2018, d'autre part, d'ordonner la restitution des sommes versées au titre de l'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2017 et 2018 et de la retenue à la source en janvier 2020 et février 2020, et, enfin, d'ordonner le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 552 245 euros au titre de la période du 1er août 2018 au 30 juin 2021.

Par un jugement nos 2120508, 2120524 du 3 avril 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2024, M. B..., administrateur de la SA Société Générale du Textile Balsan, représenté par la SCP Nataf et Planchat, avocats, demande à la Cour :

1°) d' annuler le jugement nos 2120508, 2120524 du tribunal administratif de Paris en date du 3 avril 2024 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la SA Société Générale du Textile Balsan a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2017 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant l'année 2015 et de la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2018 ;

3°) d'ordonner la restitution des sommes versées au titre de l'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2017 et 2018 et de la retenue à la source en janvier 2020 et février 2020 ;

4°) d'ordonner le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 552 245 euros au titre de la période du 1er août 2018 au 30 juin 2021 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le principe d'annualité de l'impôt fait obstacle à ce que l'administration établisse des impositions au titre d'un exercice postérieur à celui constatant la clôture de la liquidation de la société, cette clôture étant le fait générateur de l'impôt dû à raison de la cessation de l'activité ; le service devait ainsi établir l'impôt à la date de clôture de la procédure collective, le 28 octobre 2015, conformément à l'article 201 du code général des impôts, et les déclarations souscrites postérieurement sont nulles et non avenues ;

- l'imposition des résultats à la clôture de la procédure collective n'a pas été établie avant l'expiration du délai de reprise, qui a eu lieu le 31 décembre 2018 ;

- les motifs du jugement sont contradictoires, le tribunal ayant estimé, d'une part, que la SA Société Générale du Textile Balsan ne déclarait plus de chiffre d'affaires imposable depuis au moins le 1er janvier 2008 et ne disposait plus de biens, stocks ou éléments d'actif immobilisé, et, d'autre part, que cette société ne pouvait pas être regardée comme ayant effectivement cessé toute activité après cette date ;

- il entend se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations des commentaires publiés au bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-BIC-CESS-30-10-10 ;

- la taxe sur la valeur ajoutée grevant les charges liées à l'activité, telles que les prestations juridiques relatives à des litiges nés avant la cessation de l'activité économique, est déductible, même si elle est réglée postérieurement à cette cessation ;

- le tribunal n'a pas respecté les règles régissant la dévolution de la charge de la preuve en considérant qu'il n'avait pas établi que les dépenses engagées avaient un lien direct et immédiat avec l'activité économique que la SA Société Générale du Textile Balsan avait exercée ;

- le tribunal a commis une erreur en considérant que la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à la période du 1er janvier 2015 au 1er juillet 2018 avait fait l'objet d'une demande de remboursement alors que la déduction de cette taxe avait été rejetée dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la SA Société Générale du Textile Balsan avait fait l'objet ;

- le jugement attaqué, qui a remis en cause le jugement du tribunal de commerce de Châteauroux du 28 octobre 2015, a méconnu le principe de sécurité juridique et le droit à un procès équitable, au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2024, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions sont dépourvues d'objet et, par suite, irrecevables, en tant qu'elles portent sur les acomptes d'impôt sur les sociétés acquittés au titre de l'exercice clos en 2018, qui ont été, en août 2020, pour partie imputés sur un reste à payer correspondant à des majorations et intérêts de retard se rapportant à la cotisation d'impôt sur les sociétés mise à la charge de la SA Société Générale du Textile Balsan au titre de l'exercice clos en 2017, et, pour le surplus, remboursés ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 28 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 décembre 2024.

En application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, l'instruction a été rouverte pour les éléments demandés en vue de compléter l'instruction par lettre du 14 février 2025.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lemaire,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Planchat, représentant M. B..., administrateur de la SA Société Générale du Textile Balsan.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme (SA) Société Générale du Textile Balsan (SGTB), qui avait pour activité la vente de tapis et de moquettes, a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par un jugement du tribunal de commerce de Châteauroux du 24 octobre 2000. Par un jugement du 10 janvier 2001, cette juridiction a arrêté le plan de redressement organisant la cession de l'entreprise, dont la dissolution anticipée a été décidée le 21 mai 2013.

2. Au cours des années 2018 et 2019, la SA SGTB a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période couvrant les années 2015 à 2017 en matière d'impôt sur les sociétés, étendue jusqu'au 31 juillet 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. A l'issue de ce contrôle, le service a, d'une part, estimé qu'elle avait perdu la qualité de redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au plus tard le 1er janvier 2008 et, par suite, remis en cause les remboursements de taxe dont elle avait bénéficié et mis à sa charge des droits au titre de la période couvrant l'année 2015 et de la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2018. Le service a, d'autre part, remis en cause la déduction de charges du résultat imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2017 et assujetti la SA SGTB à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de cet exercice.

3. Par deux demandes, M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris, en sa qualité d'administrateur de la SA SGTB, d'une part, de prononcer la décharge des impositions mentionnées au point précédent et la restitution des sommes dont cette société s'était spontanément acquittée au titre de l'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2017 et 2018 et de la retenue à la source en janvier 2020 et février 2020, et, d'autre part, d'ordonner le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 552 245 euros au titre de la période du 1er août 2018 au 30 juin 2021. Par un jugement du 3 avril 2024, dont M. B... relève régulièrement appel, le tribunal a rejeté ces demandes.

Sur la régularité du jugement :

4. En premier lieu, la circonstance, à la supposer établie, que le jugement attaqué soit entaché d'une contradiction de motifs est par elle-même sans incidence sur sa régularité.

5. En second lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., en considérant que les opérations de liquidation de la SA SGTB n'ont pas été closes par le jugement du 28 octobre 2015, par lequel le tribunal de commerce de Châteauroux a déclaré clore les opérations du plan de cession de cette société, le tribunal administratif de Paris n'a pas remis en cause ce jugement. Le requérant n'est, dès lors et en tout état de cause, pas fondé à soutenir que, pour ce motif, le tribunal a méconnu le principe de sécurité juridique et le droit à un procès équitable, garanti par les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la recevabilité des conclusions de la demande de première instance tendant à la restitution des acomptes versés au titre de l'impôt sur les sociétés de l'exercice clos en 2018 :

6. Si M. B... a saisi le tribunal administratif de Paris de conclusions tendant à la restitution des sommes dont la SA SGTB s'était spontanément acquittée au titre de l'impôt sur les sociétés de l'exercice clos en 2018, ainsi qu'il a été dit au point 3, il résulte de l'instruction que cette société a déclaré un résultat déficitaire au titre de cet exercice et que, au mois d'août 2020, soit avant la saisine du tribunal, la somme de 398 460 euros qu'elle avait versée au titre des acomptes d'impôt sur les sociétés a été imputée, à concurrence d'un montant de 113 486 euros, sur un reste à payer correspondant aux pénalités et intérêts de retard mis en recouvrement à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle avait fait l'objet, mentionnée au point 2, et remboursée, à concurrence d'un montant de 284 974 euros. Il s'ensuit que les conclusions à fin de restitution de la somme de 398 460 euros présentées par M. B... étaient dépourvues d'objet et, pour ce motif, irrecevables. M. B... n'est dès lors pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ces conclusions.

En ce qui concerne le surplus des conclusions :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

7. En premier lieu, dans le cadre de l'effet dévolutif, le juge d'appel, qui est saisi du litige, se prononce non sur les motifs du jugement de première instance mais directement sur les moyens mettant en cause le bien-fondé des impositions en litige. M. B... ne peut par suite utilement soutenir, pour en obtenir l'annulation, que, par le jugement attaqué, le tribunal a méconnu les règles régissant la dévolution de la charge de la preuve, a commis une erreur de fait et a entaché d'une contradiction les motifs de ce jugement.

8. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 201 du code général des impôts : " 1. Dans le cas de cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale (...), l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi (...). (...) / Les contribuables doivent, dans un délai de quarante-cinq jours déterminé comme il est indiqué ci-après, aviser l'administration de la cession ou de la cessation et lui faire connaître la date à laquelle elle a été ou sera effective (...). / (...) / 3. Les contribuables assujettis à un régime réel d'imposition sont tenus de faire parvenir à l'administration, dans un délai de soixante jours déterminé comme indiqué au 1, la déclaration de leur bénéfice réel accompagnée d'un résumé de leur compte de résultat. / (...) ". Aux termes de l'article 221 de ce code : " (...) / 2. En cas de dissolution, (...) l'impôt sur les sociétés est établi dans les conditions prévues aux 1 et 3 de l'article 201. / (...) ".

9. D'autre part, aux termes de l'article 1844-7 du code civil : " La société prend fin : / (...) / 4° Par la dissolution anticipée décidée par les associés ; / (...) ". Aux termes de l'article 1844-8 de ce code : " La dissolution de la société entraîne sa liquidation. (...) / (...) / La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci. / (...) ". Aux termes de l'article L. 237-2 du code de commerce : " La société est en liquidation dès l'instant de sa dissolution pour quelque cause que ce soit (...). / La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation, jusqu'à la clôture de celle-ci. / (...) ".

10. Il résulte des principes applicables en cas de dissolution de sociétés et notamment des dispositions précitées du code de commerce qu'une société qui est placée en liquidation judiciaire ne doit pas déposer la déclaration prévue par l'article 201 du code général des impôts en cas de cessation d'entreprise avant que les comptes définitifs du liquidateur ne soient approuvés dans les conditions prévues par la loi. Elle n'est ainsi tenue ni de clôturer par anticipation l'exercice en cours à la date à laquelle le jugement de liquidation judiciaire est prononcé, ni d'établir à cette date les déclarations fiscales relatives à cet exercice.

11. Il résulte de l'instruction que, par un jugement du 28 octobre 2015, le tribunal de commerce de Châteauroux a constaté " la fin des opérations relevant du strict mandat de commissaire au plan [de cession] " de la SA SGTB, qui avait été confié à Me Peres par un jugement du 10 janvier 2001, et la poursuite de la mission de mandataire ad hoc qui lui avait été confiée par une ordonnance de la présidente de cette juridiction du 1er octobre 2010, nécessaire à la poursuite des actions contentieuses qui avaient été engagées dans l'intérêt des créanciers de cette société. Il est constant qu'un liquidateur amiable a été désigné le 25 octobre 2008 par le même tribunal, mandat réitéré le 21 mai 2013, et qu'aucune clôture des comptes définitifs de liquidation n'est intervenue en 2015, la SA SGTB ayant d'ailleurs continué, postérieurement à ce jugement, à tenir sa comptabilité, à souscrire des déclarations de résultats faisant apparaître des charges et des produits financiers, ainsi que des déclarations mensuelles de chiffre d'affaires, à s'acquitter de l'impôt sur les sociétés et à demander et obtenir des remboursements de crédits de taxe sur la valeur ajoutée. Si M. B... fait valoir que la SA SGTB a été radiée du registre du commerce et des sociétés de Paris le 16 novembre 2015, il résulte de l'extrait Kbis du 23 mai 2018 qu'il a lui-même versé au dossier que cette société était par ailleurs immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Châteauroux. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que, par le jugement du 28 octobre 2015, le tribunal de commerce de Châteauroux a déclaré la clôture des opérations de liquidation, fait générateur des impositions dues à raison de la cessation de l'activité, et, par suite, que l'administration ne pouvait pas légalement mettre en recouvrement des impositions au titre de périodes ou d'exercices ultérieurs sans méconnaître le principe d'annualité de l'impôt.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour (...) l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / (...) ". Aux termes de l'article L. 176 de ce livre : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible (...) ". Aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...) ".

13. M. B..., qui ne saurait utilement faire valoir que le fait générateur des impositions en litige est le jugement du tribunal de commerce de Châteauroux du 28 octobre 2015, ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit au point 11, soutient que les impositions auxquelles la SA SGTB a été assujettie par l'administration fiscale ont été mises en recouvrement après l'expiration du délai de reprise prévu par les dispositions précitées des articles L. 169 et L. 176 du livre des procédures fiscales. Il résulte toutefois de l'instruction que les propositions de rectification des 19 décembre 2018, s'agissant des droits de taxe sur la valeur ajoutée établis au titre de la période couvrant l'année 2015, et 29 avril 2019, s'agissant des autres impositions, qui étaient suffisamment motivées, ont été régulièrement notifiées avant l'expiration du délai de reprise dont disposait le service vérificateur. Ces propositions ont eu pour effet d'interrompre ce délai, en application de l'article L. 189 du livre des procédures fiscales. Les impositions litigieuses ont été mises en recouvrement par un avis émis et rendu exécutoire le 15 décembre 2019, régulièrement notifié avant l'expiration du délai de reprise, la société requérante ayant présenté une réclamation pour contester ces impositions le 31 janvier 2020. Par suite, le moyen tiré de l'expiration du délai de prescription du droit de reprise doit être écarté.

14. En dernier lieu, aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée (...) les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / (...) ". Aux termes de l'article 269 de ce code : " (...) / 2. La taxe est exigible : / (...) / c) Pour les prestations de services (...), lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. / (...) ". Aux termes de l'article 271 du même code : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 (...) ".

15. M. B... soutient que la taxe dont la déduction au titre de la période couvrant l'année 2015 et de la période du 1er janvier 2016 au 31 juillet 2018 a été remise en cause à l'issue de la vérification de comptabilité dont la SA SGTB a fait l'objet, et la taxe dont cette société a demandé le remboursement au titre de la période du 1er août 2018 au 30 juin 2021 correspondent à des prestations présentant un lien direct et immédiat avec l'activité qu'elle avait exercée.

16. Toutefois, d'une part, M. B... n'a versé au dossier aucune preuve de paiement des factures établies les 30 novembre 2017, 25 octobre 2018, 19 décembre 2018, 13 février 2019, 23 avril 2019, 6 mai 2019, 15, 21 et 30 juin 2019, 5 juillet 2019, 14 novembre 2019, 28 novembre 2019, 12 décembre 2019 et 21 décembre 2019. S'agissant de l'année 2020, il n'a produit que la preuve de paiement de la facture du 25 juin 2020. Et il n'a produit aucune preuve de paiement des factures se rapportant à l'année 2021. M. B... n'est, dès lors et en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la taxe figurant sur ces factures était déductible.

17. D'autre part, il est constant que la SA SGTB a, avant le 1er janvier 2008, cessé d'exercer son activité de vente de tapis et de moquettes, cédé ses marchandises, cessé de disposer de biens, de stocks et d'éléments d'actif immobilisé et cessé de réaliser des opérations donnant lieu à collecte de la taxe sur la valeur ajoutée et de déclarer un chiffre d'affaires imposable à la taxe. Alors que cette société a ainsi cessé d'être redevable de la taxe avant 2008, il est constant que les montants de taxe en litige dont le paiement est établi correspondent à des prestations réalisées pour les besoins de contentieux engagés plusieurs années après la perte de cette qualité, dans le cadre de l'engagement de la responsabilité de l'Etat, d'une banque et de son ancien administrateur judiciaire. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que ces prestations présentaient un lien direct et immédiat avec l'activité exercée par la SA SGTB avant 2008. M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la taxe s'y rapportant était déductible.

S'agissant de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

18. M. B... n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des commentaires publiés au bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-BIC-CESS-30-10-10, qui ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt.

19. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 18 que M. B..., en sa qualité d'administrateur de la SA SGTB, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais qu'il a exposés.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B..., agissant en qualité d'administrateur de la SA SGTB, est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., agissant en qualité d'administrateur de la société anonyme Société Générale du Textile Balsan, et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à l'administrateur des finances publiques chargé de la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).

Délibéré après l'audience du 28 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Lemaire, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 11 avril 2025.

Le rapporteur,

O. LEMAIRE

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA02389


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA02389
Date de la décision : 11/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Olivier LEMAIRE
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : CABINET NATAF & PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-11;24pa02389 ?
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