Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Perrenx Audit et Conseils a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos de 2012 à 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2015.
Par un jugement n° 2006101/3 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 décembre 2023 et le 25 avril 2024, la SARL Perrenx Audit et Conseils, représentée par Me Luneau, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2006101/3 du 5 octobre 2023 du tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le service n'a irrégulièrement pas tiré les conséquences du rejet de la comptabilité en s'abstenant de procéder à une reconstitution de recettes et en utilisant les données de la comptabilité rejetée pour établir les rehaussements en matière de taxe sur la valeur ajoutée ;
- les encaissements bancaires regardés comme un chiffre d'affaires non déclaré correspondent au paiement de prestations réalisées par sa filiale la société Perrenx et Compagnie fiduciaire ;
- des inondations survenues en 2016 ont détruit les justificatifs du caractère irrécouvrable des créances pour lesquelles des pertes ont été déduites ;
- la réintégration d'intérêts d'emprunt résulte de la prise en compte d'un document présentant un montant de créance inférieur et ne peut en tout état de cause dépasser le montant de 11 816,77 euros correspondant à la différence entre les charges comptabilisées et le montant figurant sur l'attestation Interfimo ;
- les cotisations sociales relatives aux rémunérations de la gérance sont déductibles ;
- les pénalités ne sont pas fondées dès lors que la société procédait à l'époque à une reprogrammation de logiciels et à une nouvelle mise au point du système comptable expliquant le retard déclaratif.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 27 juin 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 juillet 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Segretain,
- et les conclusions de M. Perroy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Perrenx Audit et Conseils est un cabinet d'expertise comptable. A la suite de la vérification de sa comptabilité, elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos de 2012 à 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2015. La société Perrenx Audit et Conseils relève appel du jugement du 5 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige, en droits et pénalités.
Sur la régularité de la procédure :
2. La circonstance que la comptabilité de la société Perrenx Audit et Conseils ait été rejetée dans la proposition de rectification du 31 août 2016 comme dépourvue de valeur probante et insincère en raison d'anomalies et manquements ne faisait pas obstacle à ce que le service s'y réfère, ainsi qu'aux relevés bancaires de la société obtenus après l'exercice d'un droit de communication, pour constater des insuffisances déclaratives en matière de taxe sur la valeur ajoutée, dont les rectifications sont ainsi régulièrement motivées. Elle n'imposait pas plus au service de procéder à une reconstitution de recettes alors que les rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés sont fondés sur une insuffisance déclarative ressortant d'encaissements bancaires constatés en vertu de l'exercice du droit de communication, ayant fait l'objet d'une taxation d'office dont la régularité n'est plus contestée. Par suite, les moyens tirés de ce que l'administration n'aurait pas tiré les conséquences du rejet de la comptabilité de la société et, à le supposer soulevé, qu'elle aurait entaché d'irrégularité la procédure de taxation d'office, doivent être écartés.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
3. En premier lieu, si la société requérante fait valoir que les encaissements effectués sur son compte bancaire et regardés par le service comme un chiffre d'affaires non déclaré correspondent en réalité au paiement de prestations réalisées par sa filiale la société Perrenx et Compagnie fiduciaire, elle ne produit aucun élément de nature à justifier d'une telle pratique, dont elle ne donne au demeurant aucune explication, les écritures comptables entre les deux sociétés ne l'établissant pas plus contrairement à ce qui est allégué.
4. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ".
5. En deuxième lieu, la société requérante ne conteste pas n'être pas en mesure de justifier, comme il lui appartient, du caractère irrécouvrable des créances pour lesquelles elle a déduit le 1er juin 2013 des pertes d'un montant de 13 619 euros. Si elle fait valoir que les inondations survenues en mai 2016 ont détruit les justificatifs, d'une part, elle ne les avait pas plus produits lors de la vérification de comptabilité, engagée antérieurement aux inondations invoquées, et d'autre part, elle n'avance en tout état de cause aucun élément précisant la nature de ces pièces et les motifs pour lesquelles les créances seraient irrécouvrables et susceptibles de justifier la déduction en litige. Le moyen doit dès lors être écarté.
6. En troisième lieu, l'administration a réduit, au titre des exercices clos en 2013 et 2015, le montant des intérêts déductibles correspondant à un emprunt souscrit auprès de l'établissement Interfimo, à concurrence de respectivement 6 670 euros et 47 905 euros, après avoir pris en compte le montant des intérêts dus au 21 février 2012, en vertu d'un jugement du tribunal de commerce de Créteil, ressortant d'une lettre d'Interfimo de juin 2016, et avoir déterminé les montants d'intérêts dus au titre de la période correspondant aux exercices clos en 2013 et 2015. Si la requérante soutient d'une part que le montant du capital alors dû s'élevait, en vertu d'une lettre d'huissier du 15 mai 2015, à 355 976,13 euros et non 351 563,78 euros, elle n'établit pas pourquoi ce montant devrait être retenu plutôt que celui qui a été déterminé par le tribunal de commerce et repris dans la lettre d'Interfimo de juin 2016, et ne le conteste pas sérieusement en réplique. D'autre part, si elle soutient que le rehaussement ne devrait en tout état de cause pas dépasser la différence entre ce qu'elle avait comptabilisé sur la période, s'élevant à 118 023,26 euros, et l'ensemble des frais et intérêts compris attestés, s'élevant à 106 186,49 euros, soit 11 816,77 euros, elle ne procède pas utilement à une globalisation du rehaussement alors que les rectifications ont été établies par exercice, et que le montant déduit pour ce motif a d'ailleurs été au contraire augmenté, à l'issue du contrôle, de 18 768 euros au titre de l'exercice clos en 2014, et elle n'étaye en tout état de cause son calcul d'aucune précision ni justification. Le moyen doit donc être écarté.
7. Enfin, il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause la déduction de sommes de 25 000 euros et 15 000 euros au titre, respectivement, des exercices clos en 2014 et 2015, présentées comme des cotisations sociales relatives à la rémunération du gérant prises en charge par la société, débitées du compte correspondant dans le journal des opérations diverses, et créditées au compte " organismes charges à payer ", au motif qu'elle ne justifiait pas avoir déclaré ces sommes auprès des organismes concernés ni les avoir engagées au titre de ces exercices. La requérante ne l'établit pas en se bornant à produire deux relevés de compte d'huissier du 15 novembre 2018 réclamant à son gérant pour le compte de la caisse d'assurance vieillesse des experts-comptables une somme de 27 974 euros au titre de 2014 et de 32 330 euros au titre de 2015, la circonstance qu'elle produise des copies, qu'elle certifie conformes, de procès-verbaux non signés et non datés d'assemblée générale autorisant la prise en charge de cotisations pour les montants remis en cause n'y suffisant pas.
Sur les pénalités :
8. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; (...). "
9. Il est constant que les déclarations en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015 ont été remises en mains propres au vérificateur le 4 mai 2016 après l'expiration du délai de trente jours qui était imparti à la société à la suite de la réception de mises en demeure lui ayant été notifiées par courrier recommandé le 24 octobre 2013, pour la première, et le 20 novembre 2015, pour les deux autres. Par suite, l'administration était fondée à mettre à sa charge la pénalité de 40 % prévue par les dispositions précitées du b) de l'article 1728 du code général des impôts, la circonstance alléguée que la société procédait à l'époque à une reprogrammation de logiciels et à une nouvelle mise au point du système comptable étant, en tout état de cause, dépourvue de précision et de toute justification.
10. Il résulte de ce qui précède que la société Perrenx Audit et Conseil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Perrenx Audit et Conseils est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Perrenx Audit et Conseils et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.
Délibéré après l'audience du 19 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- Mme Bories, présidente assesseure,
- M. Segretain, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2025.
Le rapporteur,
A. SEGRETAINLa présidente,
S. VIDAL
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA05115 2