Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision par laquelle le préfet de police a refusé d'abroger l'arrêté du 20 août 2022 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par une ordonnance n° 2309958 du 22 décembre 2023, la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté la requête sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Procédure devant la Cour : Par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés les 12 février, 18 mai et 21 septembre 2024, M. B..., représenté par Me Bertrand, demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 2309958 du 22 décembre 2023 par laquelle la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de police refusant d'abroger son arrêté du 20 août 2022 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant son pays de renvoi ; 2°) d'annuler cette décision ; 3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer le titre de séjour sollicité, ou à défaut, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de trois mois ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - sa requête est recevable ; - sa situation de salarié est susceptible de remettre en cause l'obligation de quitter le territoire qui a été prise à son encontre ; - la décision rejetant sa demande d'abrogation ne présente pas un caractère purement confirmatif d'une décision devenue définitive, d'autant plus qu'il a été répondu à cette demande par le préfet de police ; - en l'absence de communication des motifs du rejet de la demande d'abrogation d'une obligation de quitter le territoire dans le délai d'un mois, la décision implicite se trouve entachée d'illégalité. Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de justice administrative. Le président de la formation de jugement a décidé de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Boizot, - et les observations de Me Bertrand pour M. B....
Considérant ce qui suit : 1. Par un arrêté du 20 août 2022, le préfet de police a obligé M. B... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit. Par un courrier du 9 juin 2023, réceptionné le 23 juin 2023, M. B... a demandé au préfet l'abrogation de cet arrêté. Par une ordonnance n° 2309958 du 22 décembre 2023 dont M. B... interjette régulièrement appel, la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Sur la régularité de l'ordonnance : 2. Aux termes de l'article L. 243-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Un acte réglementaire ou un acte non réglementaire non créateur de droits peut, pour tout motif et sans condition de délai, être modifié ou abrogé sous réserve, le cas échéant, de l'édiction de mesures transitoires dans les conditions prévues à l'article L. 221-6 ". Aux termes de l'article L. 231-4 du même code : " Par dérogation à l'article L. 231-1, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : 1° Lorsque la demande ne tend pas à l'adoption d'une décision présentant le caractère d'une décision individuelle ; ". 3. Il résulte de ces dispositions que le silence gardé par le préfet de police, sur la demande qu'il a reçue le 23 juin 2023 et tendant à l'abrogation de la décision portant obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre le 20 août 2022, revêt le caractère d'une décision non réglementaire et non créatrice de droit, et ne tend pas à titre principal à l'adoption d'une décision individuelle. Dès lors que l'absence de réponse du préfet de police a fait naître une décision implicite de rejet, cette décision présente un objet différent de l'arrêté du 20 août 2022 et ne revêt pas, ainsi, le caractère d'une décision confirmative. M. B... était donc recevable à demander l'annulation de ce refus d'abroger en tant qu'il se prononce sur l'obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, le président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil ne pouvait rejeter par ordonnance la demande de M. B... sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Dès lors, cette ordonnance est irrégulière et doit être annulée. 4. Il y a lieu pour la Cour de se prononcer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Montreuil. Sur le bien-fondé de la décision refusant l'abrogation de l'arrêté du 20 août 2022 : 5. Quand bien même ni le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni aucun autre texte législatif ou réglementaire, ne le prévoit explicitement, il est loisible à un étranger en séjour irrégulier sur le territoire, s'il s'y croit fondé, et s'il y a modification dans les circonstances de fait ou dans la réglementation applicable, de demander à l'autorité administrative l'abrogation d'une décision de refus de séjour, le cas échéant assortie d'une obligation de quitter le territoire français, devenue définitive.
6. D'une part, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " et aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Enfin, aux termes de l'article L. 232-4 de ce code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande ". 7. D'autre part, l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration impose à l'administration d'abroger " un acte non réglementaire non créateur de droits devenu illégal (...) en raison de circonstances de droit ou de fait postérieures à son édiction ". 8. Tout d'abord, il résulte des dispositions citées au point 6 qu'il est loisible à l'étranger auquel est opposé implicitement, après deux mois, un rejet de sa demande d'abrogation d'une obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre, de demander, dans le délai du recours contentieux, les motifs de cette décision implicite de rejet. En l'absence de communication de ces motifs dans le délai d'un mois, la décision implicite se trouve entachée d'illégalité. 9. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a sollicité, par lettre du 9 juin 2023, reçue le 23 juin 2023 par le préfet de police, l'abrogation de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours prononcée à son encontre le 20 août 2022. Il est constant que le préfet de police n'a pas répondu à cette demande et qu'il doit être regardé comme ayant ainsi opposé un refus implicite au requérant. A supposer qu'il ait entendu soulever un moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision lui refusant l'abrogation de l'arrêté du 20 août 2023, le requérant ne produit aucun élément permettant de démontrer qu'il aurait sollicité la communication des motifs de cette décision. Par suite, le moyen doit être écarté. 10. Par ailleurs, pour soutenir que la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration, M. B... se prévaut de la signature d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de peintre en date du 31 décembre 2022 au sein de la SAS BSH Rénovation. Si l'intéressé produit une copie de son contrat de travail, il ne verse au dossier aucun bulletin de paie attestant de l'effectivité du contrat de travail. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle circonstance pourrait avoir une incidence sur l'appréciation portée par le préfet, en tant qu'elle pourrait être regardée comme justifiant d'un changement de circonstance de fait de nature à emporter des conséquences sur l'appréciation de la situation du requérant au regard de son droit au séjour sur le territoire français. Notamment, la demande d'admission au séjour à titre exceptionnel présentée le 19 août 2022, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait donné lieu à délivrance d'un récépissé de demande de titre, est sans incidence sur la situation du requérant, entré irrégulièrement en France et demeuré en situation irrégulière, qui justifiait légalement l'édiction de l'obligation de quitter le territoire en litige. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E :Article 1er : L'ordonnance n° 2309958 du 22 décembre 2023 de la présidente de la 11ème chambre du tribunal administratif de Montreuil est annulée.Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.Copie en sera adressée au préfet de police.Délibéré après l'audience du 14 mars 2025 à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Lemaire, président assesseur ;- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 mars 2025.La rapporteure,S. BOIZOTLe président,S. CARRERELa greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 24PA00663 2