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19/03/2025 | FRANCE | N°23PA03767

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 19 mars 2025, 23PA03767


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015 et 2016.



Par un jugement n° 1908158/2 du 22 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête enreg

istrée le 20 août 2023, M. B..., représenté par Me Labetoule, demande à la Cour :



1°) d'annuler le jugement du 22...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1908158/2 du 22 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 août 2023, M. B..., représenté par Me Labetoule, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 juin 2023 du tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la proposition de rectification du 5 décembre 2017 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne comporte ni le montant, ni les motifs des cotisations sociales supplémentaires mises à sa charge ;

- la doctrine référencée BOI-CF-10-40-2012-0912 confirme cette obligation de motivation ;

- le service l'a imposé de manière erronée sur des rémunérations ou avantages ayant un caractère occulte ;

- les premiers juges se sont mépris sur la teneur de ce moyen ;

- la doctrine référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40-8-9-2014 qualifie d'occultes les rémunérations versées à un bénéficiaire dont l'identité n'est pas révélée ;

- le bénéficiaire des sommes versées par l'association Football Club de Bois-le-Roi était clairement identifié ;

- la doctrine référencée BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 n°50 et 60, 12/09/2012 prévoit que les organismes à but non lucratif dont la gestion est désintéressée ne sont pas soumis aux impôts commerciaux ;

- les remboursements de frais ne sont pas des avantages occultes ;

- ils sont justifiés ;

- la doctrine référencée BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 n°140, 12/09/2012 ne les qualifie d'avantages que s'ils ne sont pas justifiés ;

- le chèque de 815 euros du 31 juillet 2015 ne lui a pas été versé ;

- l'administration aurait dû mettre en œuvre la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de l'appréhension des sommes litigieuses ;

- l'identité du bénéficiaire n'est pas établie ;

- les pénalités sont contestées pour les mêmes motifs.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement intervenu en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que les moyens présentés par M. B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 janvier 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Perroy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Football Club de Bois-le-Roi a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016. A l'issue de ce contrôle, le principe de gestion désintéressée de l'association a été remis en cause par le service, et une proposition de rectification en date du 5 décembre 2017 a été adressée à M. B... en sa qualité de membre bénévole de l'association, portant sur des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2014, 2015 et 2016. Par courrier du 31 janvier 2018, M. B... a formulé des observations sur cette proposition de rectification, auxquelles l'administration fiscale a répondu le 1er mars 2018. Les droits et pénalités en découlant ont été mis en recouvrement le 31 juillet 2018. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui ont été mises à sa charge au titre des années 2014, 2015 et 2016 à l'issue de cette procédure.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 17 novembre 2023, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur du pôle gestion fiscale de la direction départementale des finances publiques de

Seine-et-Marne a prononcé le dégrèvement d'une somme de 493 euros au titre de l'impôt sur le revenu mis à la charge de M. B... pour l'année 2015. Les conclusions de la requête relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il résulte de l'examen du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé que " les avantages personnels dissimulés sous couvert de remboursements de frais constituent des avantages occultes au sens du c. de l'article 111 du code général des impôts, imposables comme revenus distribués ". Ils ont ainsi statué sur le moyen tiré de ce que les versements effectués auprès d'une personne identifiée ne sauraient avoir de caractère occulte. Le moyen tiré de ce qu'ils se seraient mépris sur la teneur de ce moyen ne peut par suite qu'être écarté.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.

5. La proposition de rectification adressée le 5 décembre 2017 au contribuable, après avoir indiqué les motifs et les montants des rehaussements des bases imposables de l'intéressé à l'impôt sur le revenu, mentionne également, s'agissant des contributions sociales auxquelles sont soumis les revenus de capitaux mobiliers, la nature de ces contributions, les dispositions légales dont elles procèdent, les taux applicables ainsi que les bases de calcul par année d'imposition. Elle indique notamment, en ce qui concerne les conséquences financières du rehaussement, pour chaque année d'imposition, les montants dus par l'intéressé au titre du prélèvement social, de la CSG et de la CRDS. Le moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 5 décembre 2017 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne comporte ni le montant, ni les motifs des cotisations sociales supplémentaires mises à la charge de l'intéressé ne peut dès lors qu'être écarté. La doctrine référencée BOI-CF-10-40-2012-0912 est relative à la procédure d'imposition et n'est en tout état de cause pour ce motif pas invocable sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

6. Il résulte des dispositions combinées des articles 117 et 1759 du code général des impôts que, si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir ladite personne morale à l'amende égale, selon les cas, à 100 % ou 75 % des sommes versées ou distribuées. Une telle abstention est dès lors sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques que l'administration estime pouvoir considérer, compte tenu des renseignements dont elle dispose, comme bénéficiaires des distributions. Le requérant n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il aurait été imposé selon une procédure irrégulière au motif que l'administration n'a pas invité, conformément aux dispositions de l'article 117 du code général des impôts, l'association Football Club de Bois-le-Roi à lui fournir des indications sur les bénéficiaires des sommes qu'elle regardait comme des revenus distribués.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

7. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

8. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'association Football Club de

Bois-le-Roi a versé à l'intéressé des sommes forfaitaires. Les dates, numéros et montants des chèques émis par l'association Football Club de Bois-le-Roi et encaissés par M. B... ne font l'objet d'aucune contestation sérieuse. Au demeurant, il résulte des termes du courrier que l'intéressé a adressé le 31 janvier 2018 au service en réponse à cette proposition de rectification, ainsi que de ceux de sa réclamation préalable en date du 29 janvier 2019 et de ceux de ses écritures tant en appel qu'en première instance que M. B... a fait valoir que ces sommes correspondaient à des remboursements forfaitaires de ses déplacements pour le compte de l'association, et a donc nécessairement admis les avoir appréhendées. Si le requérant produit un tableau par année d'imposition, énumérant des frais sous l'intitulé "indemnisation kilométrique" et mentionnant, outre son nom et ses coordonnées, des dates, des motifs de déplacement et des distances exprimées en kilomètres, les seules mentions de ce tableau ne peuvent suffire à établir la réalité des dépenses correspondant aux remboursements en cause, en l'absence de production, notamment, de tickets de péage ou d'achat de carburant, et à tout le moins de justification de l'utilisation par M. B... de son véhicule personnel. L'administration doit ainsi être regardée comme démontrant que les sommes versées par l'association Football Club de Bois-le-Roi à M. B... au titre de remboursements de frais kilométriques sont constitutives d'un avantage en nature. Les versements en cause n'ayant pas été explicitement inscrits dans la comptabilité de l'association dans des conditions permettant d'identifier leur caractère d'avantage consenti sans contrepartie, c'est à bon droit que l'administration fiscale les a imposés en tant que rémunérations et avantages occultes, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts.

9. En deuxième lieu, si le requérant fait valoir que les organismes à but non lucratif dont la gestion est désintéressée ne sont pas soumis aux impôts commerciaux, ce qui impliquerait qu'ils ne sauraient être à l'origine de distributions taxables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'association Football Club de Bois-le-Roi a versé au requérant des remboursements de frais non justifiés. Sa gestion ne peut par suite être regardée comme désintéressée.

10. Enfin, si la doctrine référencée BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40-8-9-2014, ainsi que le fait valoir le requérant, qualifie d'occultes les rémunérations versées à un bénéficiaire dont l'identité n'est pas révélée, elle qualifie également d'occultes les distributions qui ne sont pas destinées à rémunérer un quelconque service et qui sont constituées par des sommes ou valeurs qui peuvent ou non se retrouver en comptabilité. Les doctrines référencées BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 n°50 et 60, 12/09/2012 et BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20 n°140, 12/09/2012 ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède. Les trois doctrines susmentionnées ne peuvent par suite être valablement invoquées sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 5 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Bories, présidente,

- M. Magnard, premier conseiller,

- M. Segretain, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2025.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLa présidente,

C. BORIES

La greffière,

C. ABDI-OUAMRANE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

N° 23PA03767 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03767
Date de la décision : 19/03/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BORIES
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. PERROY
Avocat(s) : LABETOULE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-19;23pa03767 ?
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