La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2025 | FRANCE | N°24PA01260

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 14 mars 2025, 24PA01260


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision n° 20-275-7/VP/DCA du 7 décembre 2022 par laquelle le ministre du logement et de l'aménagement de la Polynésie française a accordé à la SCI Victoria un permis de construire modificatif, et la décision du 10 mars 2023 portant rejet de son recours gracieux.



Par un jugement n° 2300166 du 16 janvier 2024, le tribunal administratif de la Polynésie fra

nçaise a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requête et des pièces...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision n° 20-275-7/VP/DCA du 7 décembre 2022 par laquelle le ministre du logement et de l'aménagement de la Polynésie française a accordé à la SCI Victoria un permis de construire modificatif, et la décision du 10 mars 2023 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 2300166 du 16 janvier 2024, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées le 16 mars 2024 et le 20 avril 2024 et un mémoire récapitulatif enregistré le 1er février 2025 qui n'a pas été communiqué, M. B... représenté par Me Dumas, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 janvier 2024 du tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'annuler la décision n° 20-275-7/VP/DCA du 7 décembre 2022 par laquelle le ministre du logement et de l'aménagement de la Polynésie française a accordé à la SCI Victoria un permis de construire modificatif, et la décision du 10 mars 2023 portant rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française et de la SCI Victoria une somme de 350 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- son intérêt à agir est établi en sa qualité de voisin de l'immeuble en cause ;

- la décision attaquée méconnaît l'article UC-b 3 du plan général d'aménagement (PGA) de la commune de Papeete dès lors que l'accès au projet comportant une dizaine de logements n'est pas adapté à ses caractéristiques et l'emprise minimale de 6 mètres n'est pas respectée, et qu'au sein même de la parcelle d'assiette du projet (DT 2), l'accès est très compliqué, voire impossible, pour des véhicules imposants tels que les engins de construction ou de secours ;

- l'article UC-b 7.1 du PGA est également méconnu dès lors que le recul de l'immeuble par rapport à la limite séparative réglementaire restée à 6 mètres est insuffisant alors que le permis de construire modificatif prévoit de porter la hauteur de la construction à la cote de 15,86 mètres, et qu'en tout état de cause, il doit être tenu compte de la façade jusqu'au garde-corps qui porte la hauteur de la façade au-delà de 12 mètres ;

- l'article UC-b 8.2 du PGA est méconnu en ce que le projet en litige, contigu au bâtiment existant, consiste en réalité en une nouvelle construction, et qu'un recul d'une distance minimale de 10 mètres doit donc être prévu entre les constructions sur la même parcelle d'assiette ;

- l'article UC-b 11 du PGA est méconnu, le nouvel immeuble projeté ne bénéficiant pas d'un traitement architectural de qualité porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants ;

- l'article UC-b 13 du PGA est méconnu, le permis modificatif ne comportant pas de plan de masse et le minimum de 50 % de surface végétalisée à prévoir n'étant pas respecté.

Par un mémoire enregistré le 25 juin 2024, la SCI Victoria, représentée par Me Lau, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2024, la Polynésie française, représentée par Me Marchand, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, à titre principal que la requête est irrecevable et à titre subsidiaire que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- le code de l'aménagement de la Polynésie française ;

- le plan général d'aménagement de la commune de Papeete ;

- le code de justice administrative

La présidente de la Cour a désigné Mme Claudine Briançon, présidente honoraire, pour exercer les fonctions de rapporteure au sein de la 1ère chambre en application de l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Briançon, rapporteure,

- et les conclusions de M. Gobeill, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une demande enregistrée le 24 février 2022 par la direction de la construction et de l'aménagement de la Polynésie française, la SCI Victoria a sollicité un permis de construire modificatif pour des travaux d'extension d'un immeuble existant et l'ajout de 6 logements sur la parcelle cadastrée n° 2, section DT (terre domaine de Fautaua ou domaine B... lot V partie du lot 3A) située à Papeete. Par un jugement du 16 janvier 2024, dont M.B... demande l'annulation, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 décembre 2022 par laquelle le ministre du logement et de l'aménagement de la Polynésie française a autorisé ce projet.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article UC-b 3-1 du plan général d'aménagement (PGA) de la commune de Papeete : " Les emprises des voies principales et secondaires sont définies sur le document graphique du P.G.A. En dehors de ces voies, tous les immeubles doivent être correctement desservis, les voies de desserte ne pouvant avoir une emprise inférieure à 6 mètres. / Les voies en impasse doivent être aménagées pour permettre de faire facilement demi-tour sans rentrer dans les propriétés privées (sauf disposition particulière effectivement prise à cet effet). / Toutes les voies doivent être réalisées, en fonction de leur destination, suivant les règles de l'art, tant au point de vue du confort que de la sécurité et de l'hygiène. ". L'article UC-b 3-2 de ce document réglementaire dispose que " le permis de construire peut être refusé pour les terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance et à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles qui y sont édifiés ou doivent y être édifiés, en ce qui concerne la commodité de la circulation et des accès (pompiers, ramassage des ordures...). ".

3. Le terrain d'assiette du projet est accessible depuis l'allée Pierre Loti puis par une servitude privée. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'acte notarié versé aux débats, que l'allée Pierre Loti, cadastrée DT 42, a une largeur de 6 mètres. Si le constat d'huissier établi le 27 avril 2023 relève deux points situés l'un à 30 mètres de l'accès au portail de la propriété, où la largeur est de l'ordre de 3,70 mètres et un second situé à 25 mètres où la largeur est de l'ordre de 3,30 mètres, il ressort du plan cadastral que ces points se situent sur la servitude donnant accès à la parcelle et non sur la voie de desserte. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'augmentation du nombre de logements prévus par le projet présente des risques pour la sécurité publique. Enfin, si le requérant fait valoir que l'accès très angulaire et étroit de la parcelle présente des difficultés d'accès pour des véhicules tels que les engins de secours, les dispositions susmentionnées ne sont pas applicables à la configuration des voies internes du terrain d'assiette du projet autorisé, pour lequel la direction de la protection civile a au demeurant donné un avis favorable le 4 mai 2022.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC-B 7.1 du PGA de la commune de Papeete : " Par rapport à une limite de propriété, le plan vertical de toute façade doit respecter en fonction de sa hauteur (H), un recul (D) suivant la formule : D : H/2 avec un minimum de 6 mètres " et aux termes des définitions précisées au chapitre 1er des dispositions générales du règlement d'urbanisme, la " hauteur de façade " est la " dimension verticale d'une façade mesurée depuis le sol aménagé (...) jusqu'à son sommet, épaisseur de toiture dans ce plan vertical comprise ". Le " plan de façade " y est défini comme étant le " plan vertical d'une face d'un bâtiment, matérialisé par le nu extérieur des murs porteurs ou de parement, hors saillies et débords ". La " hauteur (pour une construction) " est définie comme la " hauteur mesurée entre le niveau altimétrique du sol extérieur au pied de la façade de référence et celui du faîtage ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le projet initial était d'une hauteur de 10,40 mètres, implanté à 6 mètres de la limite séparative de la parcelle DT 1, dont il ne ressort pas des pièces du dossier que la délimitation cadastrale serait erronée. Le permis modificatif en litige a autorisé deux niveaux supplémentaires dont le quatrième et dernier niveau est en retrait. Ainsi, le plan vertical de la façade, " matérialisé par le nu extérieur des murs porteurs ou de parement " qui doit être pris en compte, est celui qui est mesuré du sol aménagé au sommet du 3ème niveau, sans prise en compte du garde-corps, soit une hauteur maximale de 12 mètres. Dès lors, au regard des dispositions et définitions réglementaires applicables, le projet de construction respecte le recul fixé par les dispositions de l'article UC-b.7-1 du PGA de Papeete.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article UC-B 8.2 du PGA de la commune de Papeete : " Sur un terrain qui n'est pas destiné à être morcelé ultérieurement, des bâtiments principaux, dès lors qu'une des façades en cause est percée de baies servant à l'éclairement de locaux habitables, doivent respecter entre eux, en fonction de la hauteur H de leur façade, une distance de recul minimal D déterminée comme suit : Hauteur H des constructions (...) H supérieur à 10 mètres Distance D à respecter (...) D égal 10 mètres. / C'est la façade d'immeuble la plus élevée qui détermine la valeur de la distance minimale à respecter ".

7. Il ressort des pièces du dossier que le permis de construire modificatif accordé porte sur la surélévation, par la création d'un troisième et d'un quatrième niveau et d'une toiture technique, d'un projet en cours de construction comportant déjà deux niveaux. Par suite, les dispositions précitées de l'article UC-B 8.2 du PGA de la commune de Papeete ne sont pas applicables au permis modificatif contesté, nonobstant la circonstance que le projet initial autorisé par le permis de construire délivré le 7 octobre 2020 qui jouxte une construction plus ancienne présenterait les caractéristiques d'un bâtiment distinct pouvant être qualifié de " construction nouvelle ".

8. En quatrième lieu, l'article UC-B 11 du PGA de la commune de Papeete dispose que : " Les constructions doivent faire l'objet d'un traitement architectural de qualité. (...) ". Le même PGA précise que la zone urbaine UC-B, dans laquelle se trouve implanté le projet litigieux, est " destinée à recevoir des habitations individuelles et éventuellement collectives, des commerces et services et les installations destinées aux activités qui sont le complément naturel de l'habitat. (...). ".

9. D'une part, le projet litigieux se situe dans un environnement mixte où se trouve tous types de commerce industriel, comme des ateliers de mécanique à l'entrée de la servitude, ainsi que des habitations collectives en hauteur. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les caractéristiques architecturales du projet porteraient atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article UC-B 13-1 du PGA de la commune de Papeete : " Les parcelles doivent être aménagées de telle façon qu'une superficie représentant 50 % de celle du terrain soit constituée par un sol végétalisé et planté. " et aux termes de l'article UC-b.13-2 : " Le long des voies, l'espace situé devant une construction doit être traité en espace vert. Si cet espace est aménagé en aire de stationnement, il doit être planté d'un arbre de haute tige par 4 emplacements. D'une façon générale, les parkings sont obligatoirement plantés d'arbres d'ombrage ou disposent de dispositifs végétalisés permettant leur ombrage. ".

11. Le requérant soutient que le permis modificatif, qui ne comporte pas de plan de masse, ne respecte pas le minimum de 50 % de surface végétalisée. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le permis modificatif aurait modifié la surface végétalisée appréciée lors de la délivrance du permis de construire initial et que la création de 17 places de stationnement aurait eu pour effet de réduire la superficie réservée à un sol végétalisé et planté.

12. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense tirée du non-respect des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, au demeurant non fondée, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française et de la SCI Victoria, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 000 euros à verser à la Polynésie française et de la même somme à la SCI Victoria sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera la somme de 1000 euros à la Polynésie française et la somme de 1000 euros à la SCI Victoria au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la SCI Victoria et à la Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 6 février 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- M. Stéphane Diémert, président-assesseur,

- Mme Claudine Briançon, présidente honoraire désignée en application de l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mars 2025.

La rapporteure,

C. BRIANÇON

Le président,

I. LUBEN

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA01260


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01260
Date de la décision : 14/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Claudine BRIANÇON
Rapporteur public ?: M. GOBEILL
Avocat(s) : DUMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-14;24pa01260 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award