Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2015 et 2016 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2015 au 31 octobre 2017.
Par un jugement n° 1908668 du 22 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 21 juillet 2023, 15 janvier, 15 février et 22 février 2024, M. A..., représenté par Me Planchat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 juin 2023 ;
2°) de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, de ces impositions supplémentaires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce que, par leur réponse apportée au moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'évaluation d'office suivie en matière de bénéfices industriels et commerciaux, les premiers juges ont méconnu le principe du respect du contradictoire ;
- la procédure d'évaluation d'office suivie en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre des années 2015 et 2016 est irrégulière dès lors qu'il n'a reçu aucune mise en demeure préalable ;
- il a été privé du bénéfice des garanties s'attachant à la procédure de rectification contradictoire dès lors que la proposition de rectification n° 3924 du 7 mars 2018 et la réponse aux observations du contribuable n° 3926 du 27 avril 2018 ne sont pas motivées et qu'il n'a pas pu solliciter l'intervention de l'interlocuteur départemental, ni celle de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;
- le service a méconnu les dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales dès lors que la réponse aux observations du contribuable du 27 avril 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ne précise pas les modalités de détermination des montants de la taxe sur la valeur ajoutée déductible retenus ;
- le montant des frais retenus et de la taxe sur la valeur ajoutée déductible n'a pas été explicité, ni justifié par le service ;
- l'abattement de 50 % prévu à l'article 50-0 du code général des impôts aurait dû être appliqué aux bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2015 ;
- la majoration de 25 % prévue au 1° du 7 de l'article 158 du code général des impôts n'est pas applicable aux bénéfices industriels et commerciaux des années 2015 et 2016 dès lors que cette majoration est contraire à l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts méconnaît les stipulations de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- à titre subsidiaire, si la cour devait considérer qu'il a bénéficié des garanties de la procédure de rectification contradictoire, la décharge des majorations doit être prononcée sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales, cet article étant en outre contraire aux stipulations des articles 7 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention en ce qu'il donne au juge de l'impôt une simple faculté de prononcer la décharge des majorations.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 octobre 2023 et 29 mars 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement partiel accordé à raison d'une somme globale de 47 274 euros au titre des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge du requérant, en droits et pénalités, au titre des années 2015 et 2016, et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que :
- par une décision du 3 avril 2024, il a accordé un dégrèvement partiel de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. A... a été assujetti au titre de l'année 2015 correspondant à une somme de 14 791 euros en droits et à une somme de 7 070 euros en pénalités, ainsi qu'un dégrèvement partiel de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2016 correspondant à une somme de 17 771 euros en droits et à une somme de 7 642 euros en pénalités ;
- il demande que, s'agissant de l'année 2016, la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales soit substituée à la procédure d'évaluation d'office suivie à l'encontre de M. A... en matière de bénéfices industriels et commerciaux ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par deux ordonnances n° 23PA03276 des 19 février et 16 avril 2024, le président de la 7ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a décidé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat les deux questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,
- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Planchat, avocat de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... exerce, à titre individuel, une activité d'artisan couvreur. A l'issue, d'une part, d'une vérification de comptabilité de cette activité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée jusqu'au 31 octobre 2017, et, d'autre part, d'un contrôle sur pièces portant sur les déclarations d'impôt souscrites par M. A... au titre des années 2015 et 2016, l'administration fiscale a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2015 et 2016 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 octobre 2017. M. A... fait appel du jugement du 22 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, de ces impositions.
Sur l'étendue du litige en appel :
2. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 3 avril 2024 postérieure à l'introduction de la requête, la directrice départementale des finances publiques de Seine-et-Marne a prononcé le dégrèvement partiel des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A... a été assujetti au titre des années 2015 et 2016 à hauteur, en droits et pénalités, d'une somme globale de 47 274 euros, cette somme correspondant à l'application de la majoration de 25 % alors prévue par les dispositions du 1° du 7 de l'article 158 du code général des impôts que la cour européenne des droits de l'homme a jugé, par un arrêt Waldner c/ France (n° 26604/16) du 7 décembre 2023, contraire à l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Pour écarter le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'évaluation d'office suivie à l'encontre de M. A... en matière de bénéfices industriels et commerciaux, le tribunal administratif de Melun a relevé que l'intéressé avait, dans les faits, bénéficié de toutes les garanties se rattachant à la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales. La circonstance, invoquée par M. A..., que les premiers juges ont répondu à ce moyen alors que l'administration fiscale n'avait présenté aucune observation sur celui-ci dans son mémoire en défense, est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué, le juge étant tenu de répondre à tous les moyens invoqués devant lui alors même que le défendeur n'y répondrait pas. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient, pour ce motif, méconnu le principe du respect du contradictoire et, par suite, qu'ils auraient entaché leur jugement d'irrégularité.
Sur le fond :
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
S'agissant de la régularité de la procédure d'imposition :
4. En premier lieu, aux termes, d'une part, de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " Peuvent être évalués d'office : / (...) / 1° bis Les résultats imposables selon le régime d'imposition défini à l'article 50-0 du code général des impôts dès lors : / (...) / b. (...) que la différence entre le montant du chiffre d'affaires déclaré et celui du chiffre d'affaires réel est supérieure à 10 % du premier chiffre / (...) / Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° ". Aux termes de l'article L. 68 de ce livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " La procédure de taxation d'office (...) n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure / (...) ". Il résulte ainsi du dernier alinéa de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales que l'article L. 68 du même livre n'est pas applicable aux contribuables relevant du régime des micro-entreprises prévu à l'article 50-0 du code général des impôts.
5. D'autre part, aux termes du 1 de l'article 50-0 du code général des impôts, alors applicable : " Sont soumises au régime défini au présent article pour l'imposition de leurs bénéfices les entreprises dont le chiffre d'affaires hors taxes (...) respecte les limites mentionnées au 1° du I de l'article 293 B, s'il s'agit d'entreprises relevant de la première catégorie définie au dernier alinéa du présent 1, ou les limites mentionnées au 2° du même I, s'il s'agit d'entreprises relevant de la deuxième catégorie / (...) / Le résultat imposable (...) est égal au montant du chiffre d'affaires hors taxes diminué d'un abattement de 71 % pour le chiffre d'affaires provenant d'activités de la 1re catégorie et d'un abattement de 50 % pour le chiffre d'affaires provenant d'activités de la 2e catégorie (...) / (...) / Le régime défini au présent article continue de s'appliquer jusqu'au 31 décembre de l'année au cours de laquelle le chiffre d'affaires hors taxes dépasse le montant mentionné au b du 1° du I de l'article 293 B, s'il s'agit d'entreprises relevant de la première catégorie définie au dernier alinéa du présent 1, ou le montant mentionné au b du 2° du même I, s'il s'agit d'entreprises relevant de la deuxième catégorie (...) / Pour l'application du présent 1, les entreprises relevant de la première catégorie sont celles dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, à l'exclusion de la location, directe ou indirecte, de locaux d'habitation meublés ou destinés à être loués meublés, autres que ceux mentionnés aux 1° à 3° du III de l'article 1407. Les entreprises relevant de la deuxième catégorie sont celles qui ne relèvent pas de la première catégorie ". Pour les années 2015 et 2016, le montant du chiffre d'affaires hors taxes fixé à l'article 50-0 du code général des impôts est, en vertu des dispositions du I de l'article 293 B du même code alors applicable, de 82 200 euros ou 32 900 euros selon que l'entreprise relève de la première ou de la deuxième catégorie.
6. Il résulte de l'instruction que M. A..., dont l'activité professionnelle relève de la deuxième catégorie d'entreprises définie au dernier alinéa du 1 de l'article 50-0 du code général des impôts, a déclaré, sous le régime des micro-entreprises, des revenus industriels et commerciaux de 4 950 euros au titre de l'année 2015 et de 8 940 euros au titre de l'année 2016. Après avoir reconstitué, à partir, notamment, des encaissements constatés sur les comptes bancaires ouverts à son nom, le chiffre d'affaires de l'activité professionnelle du requérant qui a été évalué, au stade de la proposition de rectification, à hauteur de 221 000 euros pour l'année 2015 et de 339 565 euros pour l'année 2016, le service a relevé que ce chiffre d'affaires était supérieure de plus de 10 % au chiffre d'affaires déclaré et, par suite, a évalué d'office les bénéfices industriels et commerciaux résultant de l'activité de M. A... sur le fondement des dispositions précitées du b du 1° bis de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales. Si la rectification de ce chiffre d'affaires est sans incidence sur le régime d'imposition initialement appliqué à M. A... en ce qui concerne l'année 2015, qui est réputée être la première année au cours de laquelle le seuil de chiffre d'affaires prévu par l'article 50-0 du code général des impôts précité avait été franchi et qui pouvait, pour ce motif, donner lieu à la poursuite de l'imposition des résultats de l'activité du requérant selon le régime des micro-entreprises, elle emporte en revanche comme conséquence que M. A... n'entrait plus, en ce qui concerne l'année 2016, dans le cadre du régime des micro-entreprises, mais dans celui du régime réel normal ou simplifié. Dans ces conditions, l'administration fiscale ne pouvait, comme le ministre l'admet d'ailleurs, procéder à une évaluation d'office des résultats imposables du requérant, en ce qui concerne l'année 2016, sur le fondement des dispositions du b du 1° bis de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales qui ne trouvaient pas à s'appliquer, ni d'ailleurs sur celui des dispositions du 1° du même article dès lors que le service n'a pas adressé au requérant une mise en demeure préalable. En revanche, contrairement à ce que soutient le requérant, le service était en droit de procéder à l'évaluation d'office de ses résultats imposables au titre de l'année 2015 sans procéder à l'envoi d'une mise en demeure préalable dès lors que l'intéressé était réputé relever du régime des micro-entreprises cette année-là.
7. Aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " (...) lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts (...), les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A / Cette procédure s'applique également lorsque l'administration effectue la reconstitution du montant déclaré du bénéfice industriel ou commercial (...) ou du chiffre d'affaires déterminé selon un mode réel d'imposition ".
8. Le ministre demande en appel que, s'agissant de l'année 2016, la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales soit substituée à la procédure d'évaluation d'office prévue par les dispositions de l'article L. 73 du même livre, au motif que la procédure de rectification contradictoire a été suivie en fait à l'encontre de M. A... et que celui-ci a ainsi bénéficié des garanties se rattachant à cette procédure d'imposition, ce que le requérant conteste.
9. De première part, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation / (...) / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".
10. M. A... soutient, tout d'abord, que la proposition de rectification qui lui a été adressée le 7 mars 2018 au titre de la vérification de comptabilité de son activité professionnelle n'était pas suffisamment motivée s'agissant de la détermination des charges retenues par le service. Toutefois, il résulte des énonciations de cette proposition de rectification qu'un taux de charges forfaitaire de 10 % du chiffre d'affaires a été retenu dans un souci de réalisme économique, le contribuable n'ayant produit au cours du contrôle fiscal que des factures de ventes émises au titre de la période vérifiée. En exposant ainsi la nature du taux retenu aux fins de la déduction de charges, l'administration fiscale a, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, suffisamment motivé sa proposition de rectification, de sorte à permettre à M. A... d'en contester utilement le bien-fondé, ce qu'il a d'ailleurs fait.
11. Le requérant soutient, ensuite, que la réponse à ses observations sur cette proposition de rectification qui lui a été adressée le 27 avril 2018 n'était pas non plus suffisamment motivée s'agissant du montant des frais retenus à ce stade par le service. Toutefois, il résulte des énonciations de la réponse aux observations du contribuable que le service a fixé le montant des charges à hauteur de 32 942 euros hors taxes au titre de l'année 2015 et de 110 001 euros hors taxes au titre de l'année 2016 en se basant sur les factures d'achats de matériaux et de frais généraux qui ont été produites par le contribuable à l'appui de ses observations sur la proposition de rectification. Par ailleurs, si M. A... indique, en invoquant le bénéfice des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, que le supérieur hiérarchique n'a pas explicité dans sa réponse du 6 août 2018 les motifs pour lesquels il a admis un taux de charges forfaitaire de 10 % du chiffre d'affaires pour les frais d'essence et de nourriture, l'intéressé ne peut utilement s'en plaindre dès lors que ces dispositions ne s'appliquent pas aux réponses apportées par le supérieur hiérarchique. Dans ces conditions, la réponse aux observations du contribuable du 27 avril 2018 satisfait à l'exigence de motivation posée par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.
12. De deuxième part, M. A... soutient qu'il n'a pas été mis en mesure de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Or, il résulte de l'instruction que les deux réponses aux observations du contribuable des 27 avril 2018 et 5 juin 2018, dont le requérant a accusé réception respectivement les 14 mai 2018 et 13 juin 2018, comportent la mention de la possibilité qu'avait celui-ci de saisir cette commission en cas de désaccord persistant avec l'administration, de sorte que l'intéressé n'a pas été privé, en l'espèce, de la garantie tenant à la possibilité de la saisir.
13. De dernière part, le requérant soutient qu'il a été privé de la faculté de saisir l'interlocuteur départemental. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'avis de vérification de comptabilité, dont M. A... a accusé réception le 28 novembre 2017, était accompagné de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié (millésime mai 2017), celle-ci assurant au contribuable faisant l'objet d'une procédure de rectification contradictoire, après la réponse faite par l'administration fiscale à ses observations sur la proposition de rectification, une garantie substantielle consistant à pouvoir, avant la mise en recouvrement, saisir le supérieur hiérarchique du vérificateur et, le cas échéant, l'interlocuteur départemental de divergences subsistant au sujet du bien-fondé des rectifications envisagées. Ainsi, le requérant n'a pas été privé, en l'espèce, de la garantie tenant à la possibilité de saisir l'interlocuteur départemental.
14. Compte tenu de ce qui est dit aux points 8 à 13, il y a lieu d'admettre la substitution de base légale demandée par le ministre en matière d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2016.
S'agissant du bien-fondé des impositions :
15. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a retenu, en dernier lieu, un montant de charges de 51 924 euros hors taxes au titre de l'année 2015 et 115 156 euros hors taxes au titre de l'année 2016 en se basant sur les factures produites par M. A... à l'appui de ses observations sur la proposition de rectification du 7 mars 2018 puis lors de son recours hiérarchique exercé le 31 juillet 2018, ainsi que, dans un souci de réalisme économique, un taux de charges forfaitaire de 10 % du chiffre d'affaires pour les frais d'essence et de nourriture. Si le requérant critique le montant des charges et le taux de charges forfaitaire ainsi retenus, il n'apporte toutefois aucun élément de nature à démontrer qu'il aurait supporté, au titre de son activité professionnelle, un montant et un taux de charges supérieurs.
16. En second lieu, aux termes du troisième alinéa du 1 de l'article 50-0 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2015 d'imposition en litige : " Le résultat imposable (...) est égal au montant du chiffre d'affaires hors taxes diminué d'un abattement de 71 % pour le chiffre d'affaires provenant d'activités de la 1re catégorie et d'un abattement de 50 % pour le chiffre d'affaires provenant d'activités de la 2e catégorie (...) ".
17. M. A... soutient, pour la première fois en appel, que l'administration fiscale n'a pas appliqué l'abattement de 50 % prévu au 1 de l'article 50-0 du code général des impôts au chiffre d'affaires hors taxes reconstitué au titre de l'année 2015. Il résulte de l'instruction qu'en dernier lieu, le service a évalué ce chiffre d'affaires à hauteur de 209 618 euros hors taxes, puis a déduit du chiffre d'affaires des charges pour un montant de 51 924 euros hors taxes ainsi qu'un taux de charges forfaitaire de 10 % du chiffre d'affaires correspondant aux frais d'essence et de nourriture, soit une somme de 20 962 euros hors taxes. Dès lors que l'activité professionnelle de M. A... continuait de relever du régime des micro-entreprises au titre de l'année 2015, le seuil de chiffres d'affaires fixé à l'article 50-0 du code général des impôts étant présumé avoir été dépassé cette année-là pour la première fois, qu'il est constant que son activité relève de la deuxième catégorie d'entreprises et que le service n'a appliqué qu'un abattement de 72 886 euros, alors que l'intéressé avait droit à un abattement de 50 % correspondant, en l'espèce, à une somme de 104 809 euros, le requérant est seulement fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, à demander le bénéfice d'un abattement complémentaire de 31 923 euros sur les bénéfices industriels et commerciaux reconstitués au titre de l'année 2015.
S'agissant des pénalités :
18. D'une part, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré / (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". La majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir ce manquement délibéré, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations souscrites par le contribuable et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.
19. D'autre part, aux termes de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard / (...) ".
20. En premier lieu, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui appliquant la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale méconnaîtrait les stipulations de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui pose le principe de légalité des délits et des peines, dès lors que les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts définissent de façon suffisamment précise, à la date des faits litigieux, les éléments constitutifs du manquement délibéré que sont, d'une part, l'insuffisance d'imposition et, d'autre part, l'intention d'éluder l'impôt, et que l'administration fiscale établit, en droit et en fait, le caractère intentionnel du manquement du contribuable à ses obligations déclaratives au titre des années 2015 et 2016.
21. En deuxième lieu, dès lors que la procédure de rectification contradictoire suivie à l'encontre de M. A... en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre de l'année 2016 n'est entachée d'aucune erreur compte tenu de ce qui est jugé aux points 8 à 13, le requérant n'est pas fondé à demander à la cour, à titre subsidiaire, de prononcer, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales, la décharge de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts dont était assortie la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2016.
22. En dernier lieu, compte tenu de ce qui est dit au point 20, le moyen tiré de ce que l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales serait contraire aux stipulations des articles 7 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui, pour le premier, pose le principe de légalité des délits et des peines et qui, pour le second, interdit toute discrimination dans l'exercice des droits et libertés, et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, qui garantit la protection de la propriété, ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
S'agissant de la régularité de la procédure d'imposition :
23. Aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions (...) ".
24. Il résulte de l'instruction que les bases d'impositions contestées par M. A... ont été établies selon la procédure de taxation d'office prévue au 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, dont la régularité n'est pas contestée. Ainsi, le caractère suffisant de la motivation de la proposition de rectification du 7 mars 2018 qui a été adressée au requérant en matière de taxe sur la valeur ajoutée doit être apprécié au regard des dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales. Si le requérant soutient que l'administration fiscale n'aurait pas explicité, dans sa réponse aux observations du contribuable adressée le 27 avril 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, les modalités l'ayant conduit à retenir un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 5 867 euros en 2015, de 26 991 euros en 2016 et de 8 935 euros en 2017, cette circonstance est sans incidence dès lors que le service n'était pas tenu, compte tenu de la mise en œuvre de la procédure de taxation d'office, de répondre aux observations de M. A..., étant par ailleurs relevé que la proposition de rectification du 7 mars 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée précise que le service n'a retenu aucune taxe sur la valeur ajoutée déductible en l'absence de présentation de factures ou de pièces justificatives pour en attester. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales doit être écarté.
S'agissant du bien-fondé des impositions :
25. M. A... soutient que les montants de la taxe sur la valeur ajoutée collectée et déductible n'ont pas été explicités et qu'il ignore le montant des encaissements bancaires retenus, le taux de taxe sur la valeur ajoutée collectée retenu au titre de l'année 2017 ainsi que la liste des factures dont la taxe sur la valeur ajoutée déductible a été admise. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'au stade de la proposition de rectification du 7 mars 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le service a indiqué le montant des encaissements bancaires qu'elle a retenus, les annexes à la proposition de rectification détaillant les sommes encaissées au cours des années 2015, 2016 et 2017 en précisant, par compte bancaire, la date d'encaissement, le libellé du relevé bancaire et le montant encaissé. Le service a également précisé que la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée étant constituée du prix convenu entre les parties diminué du montant de la taxe exigible, les montants encaissés sont de ce fait présumés toutes taxes comprises et qu'en retenant le taux de taxe sur la valeur ajoutée de droit commun de 20 %, il a calculé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 36 867 euros au titre de l'année 2015, de 56 594 euros au titre de l'année 2016 et de 45 357 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 octobre 2017, après avoir relevé qu'aucune taxe sur la valeur ajoutée déductible n'avait été retenue en l'absence de présentation de factures ou de pièces justificatives pour en attester. Par ailleurs, au stade de la réponse aux observations du contribuable du 27 avril 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le service a admis en déduction de la taxe sur la valeur ajoutée collectée, sur la base des factures annexées aux observations de M. A... reçues le 30 mars 2018, des sommes de 5 862 euros en 2015, 26 991 euros en 2016 et 8 935 euros en 2017, ainsi qu'une somme de 227 euros en 2015 au titre d'un taux de taxe sur la valeur ajoutée réduit à 10 % suite à la prise en compte d'une attestation. Le service précise, enfin, les montants de taxe sur la valeur ajoutée nette qui en résultent, à savoir 30 778 euros en 2015, 29 603 euros en 2016 et 36 422 euros en 2017. En retour, le requérant n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'éléments comptables de nature à justifier en quoi le montant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible retenu par le service serait insuffisant, ni ne précise d'ailleurs le montant de cette taxe déductible qu'il aurait fallu retenir selon lui. Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient M. A..., l'administration fiscale a fait connaître au contribuable la méthode adoptée par elle pour la reconstitution du chiffre d'affaires et des bénéfices, ainsi que les calculs précis effectués selon cette méthode et qui ont abouti aux chiffres retenus s'agissant des modalités de détermination de la taxe sur la valeur ajoutée.
26. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun ne lui a pas accordé la réduction de la base d'imposition à l'impôt sur le revenu à raison d'une somme de 31 923 euros au titre de l'année 2015.
Sur les frais liés au litige :
27. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2015 à hauteur des montants dégrevés, en cours d'instance, de 14 791 euros en droits et de 7 070 euros en pénalités.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2016 à hauteur des montants dégrevés, en cours d'instance, de 17 771 euros en droits et de 7 642 euros en pénalités.
Article 3 : La base d'imposition à l'impôt sur le revenu est réduite de 31 923 euros au titre de l'année 2015.
Article 4 : M. A... est déchargé, en droits, pénalités et intérêts de retard, du supplément d'impôt sur le revenu correspondant à la réduction de base fixée à l'article 3 du présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions d'appel de M. A... est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris et à la directrice départementale des finances publiques de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 4 février 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2025.
Le rapporteur,
M. Desvigne-Repusseau
La présidente,
V. Chevalier-Aubert
La greffière,
C. Buot
La République mande et ordonne à la ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA03276