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21/02/2025 | FRANCE | N°24PA00645

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 4ème chambre, 21 février 2025, 24PA00645


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Autolib' a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner le syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole (SMAVM) à lui verser la somme de

235 503 866,45 euros en indemnisation de la résiliation de la convention de délégation de service public conclue le 25 février 2011.



Par un jugement n° 1919348 du 12 décembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



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Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 février et 5 juillet 2024 et un mémoire récapitulatif produit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Autolib' a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner le syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole (SMAVM) à lui verser la somme de

235 503 866,45 euros en indemnisation de la résiliation de la convention de délégation de service public conclue le 25 février 2011.

Par un jugement n° 1919348 du 12 décembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 février et 5 juillet 2024 et un mémoire récapitulatif produit en application de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, enregistré le 1er août 2024, la société Autolib', représentée par la SCP Piwnica et Molinié, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ;

2°) à titre principal, de condamner le syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole à lui verser la somme de 235 528 363,10 euros au titre de la résiliation de la convention de délégation de service public conclue le 25 février 2011, assortie des intérêts moratoires et de la capitalisation des intérêts échus ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner le syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole à lui verser la somme de 301 935 019,15 euros au titre de sa responsabilité quasi-contractuelle et quasi-délictuelle, assortie des intérêts moratoires et de la capitalisation des intérêts échus ;

4°) de mettre à la charge du syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole une somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a retenu la nullité du contrat au motif que certaines de ses stipulations caractérisaient une libéralité et qu'il a retenu l'absence de risque du concessionnaire, cette dernière circonstance étant, au demeurant, à la supposer fondée, sans incidence sur la validité du contrat ;

- sa demande est recevable dès lors qu'elle s'est engagée dans la procédure de conciliation et a procédé à toutes les diligences nécessaires ;

- le service Utilib' entrant dans le périmètre de la concession, les bornes de recharge Utilib' sont des biens de retour ;

- selon les règles comptables applicables, les frais d'études portant sur des emplacements qui n'ont finalement pas été retenus pouvaient être pris en compte dans le calcul du coût de production des bornes ;

- les équipements liés à l'intelligence des bornes sont des biens de retour : ils ont été remis au syndicat mixte avec les bornes et ils étaient nécessaires au service public Autolib' ;

- les factures n° 221, 223, 224, 225, 231 et 232 ont été éclatées sur plusieurs lignes de dépense et le fait qu'elles ne précisent pas les stations auxquelles elles se rattachent n'empêche pas de les prendre en compte au titre des biens de retour ;

- les factures n° 222 ne sont pas comptées deux fois ;

- les factures n° 233 se rapportent à des investissements ;

- la seule lecture des intitulés et descriptifs des factures dont le SMAVM soutient qu'elles ne peuvent être rattachées à un bien de retour permet de constater qu'elles se rattachent aux bornes, stations Autolib', espaces Autolib' ou travaux de génie civil sur ces espaces et stations Autolib' ;

- l'écart entre la date de facturation et la date de mise en service retenue pour calculer la valeur nette comptable des biens de retour concernés s'explique par leur mise en service différée ;

- l'effectivité du paiement des sommes demandées au titre des coûts raisonnables de résiliation des contrats en cours n'a pas à être démontrée ;

- elle peut prétendre à l'indemnisation de ses coûts sociaux, liés à la résiliation des contrats de travail en cours, à hauteur de 10 020 645 euros, qui sont raisonnables, sans qu'il soit besoin de produire les contrats de travail concernés ;

- elle peut prétendre à la somme de 725 165,50 euros au titre des loyers et charges dus d'août 2018 à juillet 2019 et de 71 499,06 euros au titre des travaux de remise en état pour la résiliation du contrat conclu avec la société Geodis Logistics Ile-de-France ;

- elle peut prétendre au paiement de la somme de 560 243,23 euros au titre loyers et aux charges locatives dues jusqu'au 30 avril 2023 inclus, pour la résiliation du contrat conclu avec la société Portfolio Investissements, sa renonciation à la résiliation du contrat à l'issue de la première période triennale étant un élément de négociation du contrat ;

- elle peut prétendre à la somme de 55 207,53 euros pour les loyers d'août à décembre 2018 et de 20 991,67 euros pour les charges du service de navette pour la résiliation des contrats conclus avec la société Mount Vernon ;

- elle peut prétendre à une somme de 6 417 608,33 euros au titre des loyers restants dus sur les véhicules, 165 228,56 euros au titre des frais de transport des véhicules jusqu'à leur lieu de restitution, 2 705 772,32 euros au titre de la remise en état et des frais de transport sur le lieu de remise en état des véhicules et 3 855 314,93 euros au titre de la brutalité de la rupture des relations commerciales, au titre de la résiliation du contrat conclu avec la société Bluecar ;

- s'agissant de la résiliation des contrats passés avec la société IER, elle peut prétendre à une somme de 1 297 230 euros au titre des licenciements auxquels a dû procéder la société sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales ou subsidiairement sur le fondement de ces contrats, de 37 938,69 euros au titre de la valeur nette comptable des actifs de la société IER dédiés à la maintenance Autolib' sur le fondement de l'article 14.1 du contrat-cadre n° 2011/AUTOLIB/001, ou subsidiairement de la brutalité de la rupture des relations commerciales, de 1 737 647,12 euros au titre de la valeur des stocks des pièces détachées, de 289 155,75 euros au titre du bénéfice non perçu au titre des commandes de bornes non appelées, de 91 124 euros au titre du coût pour la société IER de l'arrêt des contrats pour les véhicules des techniciens de maintenance, de 34 873,05 euros au titre du coût supporté par la société IER s'agissant des licences OFCS et de 546 889,53 euros au titre du bénéfice non perçu au titre de la maintenance, enfin de 533 353 euros au titre des prestations postérieures au 31 juillet 2018 ;

- elle peut prétendre à une somme de 134 111 euros au titre de la résiliation des contrats passés avec la société Wifirst, cette somme ne correspondant qu'à trois mois de prestations ;

- elle peut prétendre à une somme de 19 750 euros au titre de la résiliation de son contrat avec la société Polyconseil, soit six mois de prestations, ce qui correspond à une durée de préavis normal ; ces dépenses ont en outre été utiles et ont été engagées avec l'assentiment du SMAVM ;

- s'agissant de la résiliation des contrats conclus avec la société Bluecarsharing, elle peut prétendre à une somme de 4 107 217 euros au titre des coûts sociaux supportés par cette société s'agissant de la convention d'assistance technique, de 2 127 168 euros au titre du respect du préavis de cette convention, de 319 784 euros au titre du respect du préavis relatif aux prestations de support de l'infrastructure informatique et télécom, et de 275 175 euros au titre des prestations liées à l'arrêt du système ;

- elle peut prétendre à une somme de 69 600 euros qu'elle a provisionnée au titre de la résiliation du contrat conclu avec la société Whaller, ce qui correspond à un an de prestations ;

- elle peut prétendre à une somme de 128 418 euros au titre de la résiliation du contrat conclu avec la société Direct énergie, correspondant à l'abonnement et aux consommations d'électricité des stations Autolib' aux mois d'août et septembre 2018 ;

- elle peut prétendre à une somme de 258 913 euros, correspondant à six mois de facturation, au titre de la résiliation du contrat conclu avec la société Bidel services et de

5 125 euros pour les prestations de remorquage de véhicules rendues nécessaires par la brutalité de la rupture de la concession ;

- s'agissant de la résiliation du contrat conclu avec la société BRS France, elle peut prétendre à une somme de 592 232 euros au titre de la perte d'excédent brut d'exploitation sur deux années de cette société, de 72 645 euros au titre de la valeur non amortie des immobilisations dédiées à l'activité Autolib'de cette société et de 11 777,34 euros au titre du stock des pièces de rechange de cette société ;

- elle peut prétendre à une somme de 54 240 euros au titre de l'indemnité de rupture anticipée des deux contrats conclus avec la société Bureau Veritas, correspondant à six mois de prestations, et de 8 724 euros au titre des prestations de vérification des installations électriques en station réalisées au mois d'août 2018 ;

- s'agissant des contrats avec les sociétés Indigo, Saemes, Levaparc, Spie Autocité, Interparking, et Effia stationnement, elle peut prétendre à une somme de 97 547 euros au titre de la location de places de parking où sont localisées les stations Autolib', pour un montant de 61 675 euros pour les prestations du mois d'aout 2018, et de 35 873 euros pour les prestations du mois de septembre 2018 ;

- elle peut prétendre à une somme de 308 722 euros au titre des charges d'exploitation liées à l'arrêt du service Autolib' ;

- elle peut prétendre à une somme de 100 000 euros au titre des honoraires d'avocats nécessaires pour se défendre dans le cadre d'éventuels litiges avec ses fournisseurs ;

- elle peut prétendre à une somme de 1 608 361 euros au titre des impayés de ses clients, qui ont été générés par la résiliation brutale de la délégation de service public ;

- elle peut prétendre au paiement d'une somme de 4 097 268 euros pour la valeur nette comptable des immobilisations hors biens de retour, ce poste de préjudice se rapportant à des contrats fournisseurs non entièrement amortis en raison de la résiliation de la concession et, en tout état de cause, pouvant également être intégré à son déficit d'exploitation indemnisable au titre du (vi) de l'article 61 de la convention du 25 février 2011 ;

- la compensation prévue par le (vi) de l'article 61 de la convention implique que le SMAVM lui verse une compensation au titre du déficit cumulé constaté à la date de résiliation de la convention, excédant le seuil de 60 millions d'euros de pertes ;

- elle n'a commis aucun manquement ayant contribué à l'aggravation du déficit de la concession ou relatif à la notification tardive du défaut d'intérêt économique de la concession ;

- le SMAVM a lui-même contribué au ralentissement de la notification du défaut d'intérêt économique de la concession ;

- elle n'a pas imputé à la concession des charges étrangères au service et, notamment, la société Bluecarsharing ne s'est pas enrichie en faisant financer des biens propres par la délégation ;

- le bilan de clôture de la concession faisant apparaître un déficit cumulé de

235 014 738 euros, elle peut prétendre à être indemnisée d'une somme de 175 014 738 euros en application de l'article 61 (vi) de la convention ;

- elle a droit au paiement des intérêts moratoires et de leur capitalisation à compter du 25 juillet 2018, à l'issue du délai d'un mois prévu par l'article 61 de la convention ;

- si l'application de la convention du 25 février 2011 était écartée, elle pourrait prétendre à être indemnisée sur le fondement de l'enrichissement sans cause à hauteur de 301 935 019,15 euros au titre des dépenses qui ont été utiles au SMAVM ou, à défaut, sur le fondement de sa responsabilité quasi-délictuelle, et un expert pourrait être désigné pour évaluer son préjudice.

Par des mémoires en défense enregistrés les 7 mai et 2 octobre 2024, le syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole, représenté par Me Amblard et Me Lohmann, conclut au rejet de la requête, subsidiairement, à la limitation de sa condamnation à la somme de

12 334 747,17 euros, et à ce que soit mise à la charge de la société Autolib' une somme de

15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a retenu la nullité du contrat au motif que certaines de ses stipulations caractérisaient une libéralité ;

- la demande de la société Autolib' est irrecevable dès lors qu'elle a manifesté son refus de donner une chance d'aboutir à la procédure de conciliation prévue à l'article 70 de la convention ;

- les bornes de charge dédiées au service Utilib' ne constituent pas des biens de retour dès lors que le service Utilib', qui a été unilatéralement proposé par la société Autolib', n'est pas dans le périmètre de la concession ;

- les coûts d'études se rapportant aux emplacements de bornes non retenus ne sont pas nécessaires au projet final d'installation des bornes de recharge, et ne font pas partie des biens de retour ;

- les équipements liés à l'intelligence des bornes ne sont pas des équipements qu'il peut réutiliser et qui pouvaient être considérés comme nécessaires au service public et ne constituent dès lors pas des biens de retour ;

- les factures 222 sont déjà comptées au titre des affectations directes liées à la station 78646-04, et les factures 233 sont relatives à des charges de fonctionnement ;

- plusieurs factures se rapportent à des dépenses générales qui ne peuvent pas être rattachées avec certitude aux stations Autolib' ;

- il existe pour plusieurs biens un écart non expliqué entre la date de facturation et la date de mise en service comptable retenue ;

- seuls les coûts raisonnables de résiliation des contrats en cours dont le paiement est établi peuvent donner lieu à indemnisation ;

- aucune indemnité n'est due lorsque les coûts auraient de toute façon été dus au terme normal de la concession ;

- les coûts de résiliation ayant un lien avec le service Utilib' ou avec les concessions de Lyon et de Bordeaux ne peuvent donner lieu à indemnisation ;

- la société Autolib' n'avait pas à indemniser ses co-contractants en raison de la brutalité de la rupture de leurs relations commerciales dès lors qu'elle pouvait se prévaloir d'un fait de force majeure ; elle a en tout état de cause commis une faute en refusant la prolongation de la concession ;

- les coûts sociaux ne peuvent donner droit à indemnisation en l'absence de production des contrats en cours ;

- subsidiairement ils ne présentent un caractère raisonnable qu'à hauteur de 1 972 829,64 euros ;

- seule la somme correspondant aux loyers présente un lien avec la résiliation du contrat avec la société Geodis Logistics Ile-de-France ;

- la société Autolib' a commis une faute en renonçant à pouvoir résilier à l'issue de la première période triennale le contrat conclu avec la société Portfolio Investissements ;

- les dépenses correspondant au service de navette sont dépourvues de lien avec la résiliation du bail commercial conclu avec la société Mount Vernon ;

- le contrat conclu avec la société Bluecar pouvait être résilié à tout moment, les frais de transport des véhicules en location jusqu'à leur lieu de restitution et de remise en état et frais de transport sur le lieu de remise en état ne sont pas liés à la résiliation du contrat et les préjudices de la société Bluecar invoqués ne sont pas justifiés ;

- s'agissant des coûts raisonnables de résiliation des contrats conclus avec la

société IER, la réalité des coûts sociaux subis par cette société n'est pas établie et la société Autolib' ne les a pas vérifiés, il n'est pas établi que les bornes commandées et non livrées étaient fabriquées ou en cours de fabrication et il conviendrait en outre de déduire du montant demandé les 30 % d'acomptes versés, les contrats de la société IER avec ses loueurs de véhicules et avec la société Oracle pour les licences Soft OFSC n'étant pas produits, il n'est pas possible de vérifier la teneur des obligations de cette société à l'égard de ses loueurs, l'article 14.1 des contrats conclus avec la société IER n'envisage pas l'indemnisation de la valeur nette comptable des actifs, la justification de l'existence de coûts non amortis n'est pas rapportée, l'extrapolation du chiffre d'affaires réalisé au premier semestre 2018 n'est pas pertinente pour apprécier le chiffre d'affaires sur une année complète, et les dépenses relatives aux prestations réalisées postérieurement au 31 juillet 2018 sont couvertes par le protocole de sortie ;

- les factures produites au titre de la résiliation du contrat passé avec la société Wifirst n'ouvrent pas droit à indemnisation ou correspondent à des prestations réalisées au mois

d'août 2018 par la société Wifirst qui sont couvertes par le protocole de sortie ;

- le contrat avec la société Polyconseil n'est pas produit, il n'a pas donné son assentiment pour les prestations réalisées par cette société jusqu'au mois de décembre 2018 et à supposer qu'elles découlent du protocole de sortie du 25 juin 2018, les dépenses correspondantes seraient couvertes par ce protocole ;

- la société Bluecarsharing ne pouvait pas être indemnisée au titre de ses coûts sociaux et le montant de ces coûts n'est en outre pas établi, le coût des prestations d'assistance technique sur la base d'un préavis de cinq mois n'est pas établi et le coût de la prestation spécifique liée à l'arrêt des systèmes d'information opérationnels de l'activité Autolib' ne constitue pas un coût de résiliation d'un contrat passé avec la société Bluecarsharing et ce coût est couvert par le protocole de sortie ;

- la convention passée avec la société Bolloré n'a pas été résiliée ;

- la société Wheller n'a pas demandé à être indemnisée au titre de la résiliation de son contrat ;

- la somme demandée au titre de la résiliation du contrat conclu avec la société

Direct énergie est couverte par le protocole de sortie et ne correspond en outre pas aux deux factures produites ;

- la société Autolib' ne peut demander à être indemnisée au titre du contrat conclu avec la société Bidel services qui n'est ni daté ni signé, cette société n'a en outre demandé aucune indemnisation et la balance analytique produite ne permet pas d'estimer le montant demandé par la requérante ;

- s'agissant du contrat conclu avec la société BRS, la société Autolib' a fait preuve de négligence en signant un contrat pour trois ans sans possibilité de résiliation anticipée, la durée de deux ans d'excédent brut d'exploitation est excessive et les modalités de calcul du taux de 21,28 % ne sont pas explicitées, la société Autolib' n'avait pas à indemniser la valeur non amortie des immobilisations et aucun justificatif n'est produit quant aux sommes demandées, enfin il n'est pas démontré que les pièces de rechange étaient spécifiquement dédiées à l'activité Autolib' et non utilisables à d'autres fins ;

- la société Bureau Veritas n'a demandé aucune indemnisation au titre du respect du préavis, et la réalité des prestations réalisées au mois d'août 2018 n'est pas établie et serait en tout état de cause couverte par le protocole de sortie ;

- la somme demandée par la société Autolib' au titre de la location de places de parking est dépourvue de lien avec la résiliation des contrats concernés, et elle est en outre couverte par le protocole de sortie, étant liée au délai d'enlèvement des bornes et des stations implantées dans les parkings ;

- la somme demandée par la société Autolib' au titre de ses charges d'exploitation liées à l'arrêt d'Autolib' n'est pas liée à la résiliation de contrats et sont couvertes par le protocole de sortie ;

- les honoraires d'avocat demandés ne correspondent pas à des indemnités de résiliation de sous-contrats, accessoirement les contrats concernés ne sont pas produits, et le préjudice n'est pas établi ;

- il ne peut être condamné à indemniser la société Autolib' au titre de la valeur nette comptable d'actifs ne constituant pas des biens de retour et qu'il n'a jamais souhaité acheter ;

- les stipulations de l'article 61 (vi) de la convention n'impliquent le versement d'une compensation pour défaut d'intérêt économique de la concession que dans l'hypothèse où le concédant, après avoir accepté de verser la compensation prévue à l'article 63.2.2, résilie, pour un motif d'intérêt général, la concession ;

- en tout état de cause, la société Autolib' ne peut se prévaloir de ces stipulations dès lors qu'elle a commis des manquements graves à l'origine du défaut d'intérêt économique de la concession de nature à exonérer le syndicat de toute responsabilité, tenant à la notification tardive du défaut d'intérêt économique de la concession et à des choix de gestion injustifiés ;

- si les intérêts moratoires et leur capitalisation étaient dus, ils ne le seraient qu'à compter de leur demande, soit le 9 septembre 2019 ;

- si la convention du 25 février 2011 devait être écartée, il conviendrait de désigner un expert pour évaluer l'indemnisation à laquelle la société Autolib' pourrait prétendre sur un terrain quasi-contractuel et apprécier, notamment, les externalités positives liées aux entités du groupe Bolloré ;

- aucune indemnisation ne pourra être versée sur un fondement quasi-délictuel.

Les communes de Bagneux, Cachan, Gennevilliers, Malakoff, Montreuil et Villejuif ont présenté des observations, enregistrées les 5 juin et 3 octobre 2024 et demandent que soit mise à la charge de la société Autolib' une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La Ville de Paris a présenté des observations, enregistrées les 5 juillet et

3 octobre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Saint-Macary,

- les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique,

- et les observations de Me Piwnica et Me Bensusan, représentant la société Autolib', Me Amblard représentant le syndicat mixte Autolib' et Vélib' Métropole, Me Farrugia représentant les communes de Montreuil, de Cachan, de Villejuif, de Gennevilliers et de Bagneux, et Me Froger représentant la Ville de Paris.

Une note en délibéré, présentée par la Ville de Paris, a été enregistrée

le 21 janvier 2025.

Une note en délibéré, présentée par le SMAVM, a été enregistrée le 22 janvier 2025.

Une note en délibéré, présentée par la société Autolib', a été enregistrée le

24 janvier 2025.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat mixte Autolib', créé le 9 juillet 2009, et devenu le syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole (SMAVM), regroupe plusieurs communes franciliennes, dont la Ville de Paris. Il a conclu le 25 février 2011 avec la société Autolib' une convention de délégation de service public d'une durée de douze ans pour la mise en place, la gestion et l'entretien d'un service d'automobiles électriques en libre-service et d'une infrastructure de recharge de véhicules électriques. Par une lettre du 25 mai 2018, la société Autolib' a notifié au syndicat le défaut d'intérêt économique de la concession et lui a demandé, en application de l'article 63.2.2 de la convention, le versement de la compensation financière prévue à cet article, estimée à 233,7 millions d'euros, soit 46,74 millions d'euros par an jusqu'à l'issue de la délégation. Par une lettre du 23 juin 2018, le SMAVM a notifié au concessionnaire son refus de lui verser cette compensation et la résiliation de la concession avec effet au 25 juin 2018, en application de l'article 63.3 de la convention. Par une lettre du

25 septembre 2018, la société Autolib' a adressé au syndicat mixte une demande d'indemnisation d'un montant total de 235 243 366 euros. A la suite du refus du syndicat de lui verser cette somme, elle a initié, par une lettre du 29 novembre 2018, une procédure de conciliation, qui été interrompue le 24 avril 2019. La société Autolib' relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation du SMAVM à lui verser la somme de 235 503 866,45 euros au titre de la résiliation de la concession.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le tribunal a exposé de manière suffisamment motivée, au point 6 du jugement attaqué, les motifs pour lesquels il estimait que les stipulations de la convention conclue le

25 février 2011 étaient constitutives d'une libéralité.

Sur la nullité du contrat :

3. Aux termes de l'article 63 de la convention de délégation de service public conclue le 25 février 2011, relatif à la résiliation pour absence d'intérêt économique : " 63.1 Principe / Si malgré tous les efforts du Concessionnaire qui assure le Service Public Autolib' conformément aux dispositions de la Convention, et en l'absence de manquement grave de ce dernier, les comptes du Concessionnaire font apparaître, en raison notamment de l'aléa commercial, des pertes d'une ampleur exceptionnelle sans que le Plan d'Affaire Actualisé ne prévoit de perspective d'amélioration, la Concession sera considérée comme ne présentant pas d'intérêt économique. / 63.2 Application du principe / 63.2.1 Définition du défaut d'intérêt économique / Les Parties conviennent que la Concession ne présente pas d'intérêt économique lorsque le Plan d'Affaires Actualisé ne permet pas de constater le retour à un montant de pertes inférieur à soixante (60) millions d'euros au terme de la Concession. / 63.2.2 Notification d'un défaut d'intérêt économique / Le Concessionnaire notifiera cette situation au Concédant. Ce dernier s'engage alors à procéder, dans un délai de trois (3) mois à compter de ladite notification, au versement d'une compensation financière correspondant à la différence entre le résultat net cumulé négatif jusqu'au terme de la Concession tel que prévu dans le Plan d'Affaires Actualisé et le montant de soixante (60) millions d'euros de pertes, le solde de cette différence étant divisé par le nombre d'années de la Concession restant à courir et versé chaque année au Concessionnaire par le Concédant (...). / 63.3 Conséquences du non versement de la compensation / Si le Concédant ne souhaite pas verser les compensations spécifiées à l'article 63.2.2, et après un délai d'un mois à compter de la réception par le Concédant de la notification prévue à l'article 63.2.2 faite par le Concessionnaire ou, le cas échéant, de l'avis du Comité de Conciliation prévu à l'article 63.2.5, les Parties conviennent que la Concession sera résiliée à cette date, et le régime d'indemnisation de l'article 61 s'appliquera ". L'article 61 (vi) de la convention prévoit le versement, le cas échéant, de la compensation due au dépassement du seuil prévu à l'article 63.

4. D'une part, l'article 63.2.2 de la convention de délégation de service public du

25 février 2011 prévoit, en cas de défaut d'intérêt économique de la concession, la prise en charge, par le concédant, à savoir le SMAVM, des pertes d'exploitation prévues excédant

60 millions d'euros au terme de la concession. En vertu des articles 63.2.3 et 63.2.4 de ladite convention, le montant de cette compensation financière a vocation à être remboursé par le concessionnaire, ou à être réévalué, afin que le montant effectivement versé par le concédant à l'issue de la concession corresponde aux pertes réellement subies par le concessionnaire au-delà de 60 millions d'euros. Ces stipulations n'instaurent ainsi pas une indemnisation excédant le montant du préjudice subi par le concessionnaire.

5. D'autre part, il résulte des stipulations de l'article 63.3 de la convention que la résiliation de la concession pour défaut d'intérêt économique a pour effet de priver le concessionnaire du versement de la compensation financière prévue à l'article 63.2.2. Dans ces conditions, l'indemnisation, prévue par le (vi) de l'article 61 de la convention, des pertes d'exploitation de la concession supérieures à 60 millions d'euros à la date de la résiliation n'excède pas le montant du préjudice subi par le concessionnaire, correspondant, en l'espèce, aux dépenses qu'il a exposées pour la concession et qui n'ont pas été couvertes par la compensation qui lui aurait été versée si le contrat n'avait pas été résilié.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Autolib' et le SMAVM sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a retenu que ces clauses caractérisaient une libéralité et étaient de nature à entacher de nullité la convention.

Sur la recevabilité contractuelle de la demande de la société Autolib' :

7. Le titre XIX de la convention de délégation de service public du 25 février 2011 prévoit que les parties s'engagent à participer à un comité de suivi et à soumettre tout litige éventuel à un comité de conciliation préalablement à toute autre forme d'instance chargée de trancher le litige. Aux termes de l'article 70 de cette convention, relatif au comité de conciliation : " 70.1 Constitution du Comité de Conciliation / Le Comité de Conciliation est composé de trois (3) membres dont les qualités personnelles et morales et l'expérience dans les relations public-privé pour des projets complexes comparables est notoire. / Dans un délai de quinze (15) jours calendaires suivant la demande de saisine du Comité de Conciliation, chaque Partie désignera un (1) membre et le troisième membre, qui sera le Président du Comité de Conciliation, sera choisi d'un commun accord entre les deux (2) membres ainsi désignés. A défaut d'accord dans un délai de quinze (15) jours calendaires, le Président du Comité de Conciliation sera désigné par le Président du Tribunal Administratif de Paris à la requête de la Partie la plus diligente (...). / 70.2 Procédure / 70.2.1 (...) L'acte de mission de la Conciliation devra proposer une procédure rapide et adaptée qui ne pourra en aucun cas dépasser quatre-vingt-dix (90) jours calendaires (...). 70.2.2 (...) En cas de conciliation les Parties signeront sous l'égide du Comité de Conciliation un accord qui mettra un terme définitif à leur différend et dont elles s'engagent à en être irrévocablement liées. / En cas de non conciliation à l'issue de la période de 90 jours, le Comité de Conciliation indiquera aux Parties par notification écrite la solution de conciliation qu'il préconise assortie d'un argumentaire succinct. / Les Parties disposeront alors de 15 jours pour accepter ou refuser cette proposition ou s'entendre pour toute autre solution acceptable par elles. / En cas de désaccord persistant à l'issue de cette période de 15 jours, les Parties soumettront le litige à la juridiction compétente dans les délais prévus par la réglementation en vigueur ". Aux termes de l'article 71 de la même convention, relatif à l'attribution de juridiction : " Tout litige ou différend qui n'aurait pu faire l'objet d'une solution amiable ou d'une conciliation sera soumis au Tribunal administratif de Paris. / Le litige sera réputé avoir été constitué à l'issue de la période de 15 jours suivant la proposition de conciliation faite par le Comité de Conciliation ou à compter de la date à laquelle la conciliation a définitivement échoué ".

8. Il résulte de l'instruction que la société Autolib' a notifié au SMAVM, le

29 novembre 2018, sa saisine du comité de conciliation, que la société Autolib' et le SMAVM ont chacun désigné un membre de ce comité les 11 et 12 décembre 2018, que ces deux membres ne sont pas parvenus à s'accorder sur la désignation du président de ce comité à l'issue du délai de quinze jours qui leur était imparti, que la société Autolib' a alors saisi la présidente du tribunal administratif de Paris afin qu'elle désigne le président de ce comité, et que par une lettre du 15 février 2019, celle-ci a indiqué qu'elle n'entendait pas procéder à cette désignation, tout en encourageant les deux parties à s'engager dans un processus de conciliation en invitant les deux conciliateurs à s'accorder sur le profil du président ou en désignant, chacune, un nouveau conciliateur. Il résulte également de l'instruction qu'à la suite de cette réponse, la société Autolib' a proposé au SMAVM d'accorder aux deux conciliateurs un délai supplémentaire d'un mois pour choisir le président du comité de conciliation, soit jusqu'au

20 mars 2019, puis, aucun accord n'ayant été trouvé à l'expiration de ce délai, qu'elle a désigné, le 22 mars 2019, un nouveau conciliateur et a invité le SMAVM à faire de même, ce qu'il n'a pas fait, malgré plusieurs relances de la société, jusqu'à ce qu'elle constate que la procédure de conciliation était impossible à mettre en œuvre le 24 avril 2019. La société Autolib' s'est ainsi pleinement inscrite dans le processus de conciliation, et a même, afin de lui donner une chance d'aboutir, été au-delà de ce que la convention prévoyait. Par suite, le SMAVM n'est pas fondé à soutenir que la saisine du tribunal par la société Autolib' était irrecevable en vertu des stipulations précitées de l'article 71 de la convention de délégation de service public.

Sur la demande d'indemnisation présentée par la société Autolib' :

9. L'article 61 de la convention de délégation de service public prévoit qu' " en cas de résiliation anticipée de la Concession pour motif d'intérêt général, le Concédant versera au Concessionnaire dans le mois suivant la résiliation : / (i) une indemnité calculée sur la base de la valeur nette comptable des investissements ayant le caractère de Biens de Retour identifiés en Annexe A3-15, qui ne sont pas encore amortis à la date de prise d'effet de la résiliation et déduction faite des subventions non encore amorties (...) / (v) une indemnité équivalente aux coûts raisonnables de résiliation des contrats en cours conclus par le Concessionnaire pour l'exécution de la Concession et non transférés au Concédant ou au nouvel exploitant, et sous réserve de la communication au Concédant des contrats souscrits / (vi) le cas échéant, les indemnités et compensations dues par le Concédant au Concessionnaire au titre du rétablissement de l'équilibre économique de la Concession prévues aux articles 4.5.2.1, 4.5.2.2, 14.1.4, 14.4, et 56 ou 58 ou de celles dues au dépassement du seuil prévue à l'article 63 ". Ces stipulations sont applicables à la résiliation pour absence d'intérêt économique, en vertu de l'article 63.3 de la convention.

En ce qui concerne les biens de retour :

10. Lorsque la personne publique résilie une concession de service public avant son terme normal, le concessionnaire est fondé à demander l'indemnisation du préjudice qu'il subit à raison du retour des biens nécessaires au fonctionnement du service public à titre gratuit dans le patrimoine de cette personne publique, lorsqu'ils n'ont pu être totalement amortis. Lorsque l'amortissement de ces biens a été calculé sur la base d'une durée d'utilisation inférieure à la durée du contrat, cette indemnité est égale à leur valeur nette comptable inscrite au bilan. Sauf disposition contraire, le point de départ de l'amortissement est la date d'achèvement des investissements et de mise en service de l'ouvrage.

11. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la société Autolib' a proposé au SMAVM l'introduction de nouveaux véhicules de type utilitaire dans le service Autolib', s'accompagnant d'une nouvelle offre commerciale destinée aux artisans. Par un courrier du

27 novembre 2014, le concédant a donné son accord sous plusieurs conditions, parmi lesquelles le déploiement du service dans l'ensemble des communes adhérentes, la liste des stations devant être arrêtée d'un commun accord avec la société, la possibilité de recharger les nouveaux véhicules sur l'ensemble des bornes de recharge existantes, l'accessibilité du service à l'ensemble des usagers d'Autolib' sans augmentation du tarif de leur abonnement, ou la possibilité de réserver ces nouveaux véhicules via l'application Autolib', et qu'il a fixé le tarif destiné spécialement aux artisans. Il résulte en outre de l'instruction que le SMAVM a présenté, dans ses rapports annuels d'activité, les véhicules Utilib' comme la version utilitaire de véhicules Autolib' et comme des véhicules mis à disposition par le SMAVM aux usagers d'Autolib'. Dans ces conditions, bien qu'il résulte également de l'instruction que le SMAVM n'a pas souhaité subventionner l'installation des bornes supplémentaires nécessaires, contrairement aux autres bornes de recharge, qu'il a exigé que les coûts inhérents à ce service ne soient pas pris en compte au titre du grand équilibre à la concession, que la société Autolib' tienne, pour cette nouvelle activité, une comptabilité analytique distincte, et que les véhicules Utilib' et les nouvelles bornes de charge aient une livrée spécifique, le service Utilib' ne saurait être regardé comme une activité connexe à la concession, telle que prévue par l'article 8.3 de la convention, mais comme une nouvelle offre venant améliorer le service public existant et faisant partie, à ce titre, du périmètre de la délégation de service public consentie à la société Autolib'. Les bornes de recharge implantées dans le cadre de ce nouveau service, qui ont d'ailleurs été remises au SMAVM, constituent ainsi des biens de retour, dont la société Autolib' est fondée à être indemnisée de la valeur nette comptable.

12. En deuxième lieu, les études nécessaires à la détermination de l'implantation des bornes de charge et de location dont la réalisation avait été décidée font partie du coût des travaux nécessaires à ces bornes, alors même qu'à la suite de ces études, certains des emplacements envisagés n'ont pas été retenus. Dès lors, la société Autolib' est fondée à être indemnisée au titre de la valeur nette comptable des études préalables à la détermination des emplacements des bornes qui n'ont finalement pas été retenus.

13. En troisième lieu, l'article 5.1.1.1 de la convention de délégation de service public prévoit que " Les bornes de charge comportent (...) un dispositif de détection de la présence d'un véhicule sur la place correspondante (...) ", que " Le câble et le connecteur sont protégés par une trappe verrouillable commandée depuis la borne principale ou par tout autre procédé (ex : RFID). Les bornes de charge sont équipées d'un connecteur de Type 3. La borne de charge située sur l'emplacement dédié aux véhicules non BLUECAR(r) est également équipée d'un connecteur type E/F permettant de répondre à l'alimentation des deux-roues ". Son article 5.1.1.2 précise que la " borne d'abonnement comprend un écran tactile, un scanner, une webcam et un micro, un lecteur RFID (...) ". Son article 5.2.2 énonce également que " Le Concessionnaire utilisera un logiciel de gestion de borne, qui est développé par une filiale du Groupe BOLLORE, afin de gérer l'ensemble des bornes des Stations et Espaces AUTOLIB'. Ce logiciel assure au minimum les fonctionnalités suivantes : / - Gérer les transactions entre les différentes bornes et le système central / - Echanger avec des véhicules / - Piloter les bornes de charge reliées à la borne de location / - Assurer la gestion technique à distance des différentes bornes et notamment la détection des pannes ou dysfonctionnements ". Enfin, l'article 5.2.6 de cette même convention prévoit encore que " Le Concessionnaire s'engage à utiliser un ensemble de technologies réseaux qui concourent à la collecte des informations à la date de Notification tel que par exemple les liaisons internet, les liaisons 3G et EDGE pour les bornes et les BLUECAR(r) ".

14. Il résulte des stipulations précitées, et plus généralement de l'ensemble de la convention de délégation de service public, que le service public Autolib' impliquait la réalisation de bornes de charge et des bornes de location " intelligentes ", permettant, notamment, la réservation, à distance, d'emplacements de stationnement, la détection des bornes disponibles ou des bornes ayant des problèmes de fonctionnement, ainsi que l'alimentation électrique de différents types de véhicules. Les équipements des bornes offrant ces fonctionnalités (lecteur RFID, antenne réseau, câbles CPL, PDA, batterie, radar de borne) étaient ainsi nécessaires au fonctionnement de ce service public. A cet égard, la circonstance qu'ils ne seraient pas réutilisables par le SMAVM n'est pas de nature à leur faire perdre leur qualité de biens de retour. Par ailleurs, et en tout état de cause, si l'article 8 de l'avenant n° 1 à la convention de délégation de service public rappelle que " les modems intégrés aux bornes " ne constituent pas des biens de retour, il résulte des termes de cet avenant que leur exclusion est liée à leur mode de commercialisation, ces équipements n'étant disponibles que par le biais d'une location, ce qui n'est pas le cas des équipements liées à l'intelligence des bornes. Dans ces conditions, et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que certains de ces équipements n'étaient pas nécessaires au fonctionnement du service public Autolib' tel que défini par la convention de délégation de service public, la société Autolib' est fondée à demander à être indemnisée au titre de la valeur nette comptable de ces biens.

15. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutient le SMAVM, il ne résulte pas de l'instruction, en particulier du fichier détaillant par station la valeur nette comptable des biens, que les factures n° 222 feraient déjà l'objet d'une demande d'indemnisation au titre de la valeur nette comptable directe correspondant à la station 78646-04. En outre, il résulte de ce qui a été dit au point 12 que les factures n° 233, qui se rapportent à des pré-études n'ayant pas donné lieu à l'implantation de station, pouvaient être comptabilisées comme des biens de retour.

16. En cinquième lieu, le SMAVM a produit un tableau initial de synthèse où figurent les factures qu'il refuse de prendre en charge, en ce qu'elles ne pourraient être rattachées avec certitude à une station Autolib' ou plus généralement à un bien de retour et la valeur nette comptable retenue au titre de ces factures et dont la société Autolib' demande l'indemnisation, dont il convient de déduire les factures n° 28 et 88, qu'il dit admettre, et auquel il convient d'ajouter les factures n° 181 et 19, contestées au contentieux. Si la société Autolib' soutient que la seule lecture des intitulés et descriptifs de ces factures permet de constater qu'elles se rattachent aux bornes, stations Autolib', espaces Autolib' ou travaux de génie civil sur les espaces et stations Autolib', l'absence d'identification des biens de retour correspondant ne permet pas au SMAVM de vérifier que les livraisons ou travaux correspondant ont bien été réalisés sur ces biens. Il résulte de l'instruction que seule la facture n° 181 peut être précisément rattachée à des stations Autolib', tandis que les factures n° 5, 10, 11, 12, 13, 19, 20, 21, 22, 24, 26, 27, 34, 35, 36, 37 non produite, 38, 39, 41, 42, 43, 44, 45, 48, 49, 50, 66, 67, 68, 69, 70, 72, 74, 78, 80, 81, 85, 86, 87, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 102, 103, 104, 105, 106, 107, 108, 109, 110, 111, 115, 122, 123, 124, 125, 126, 127, 130, 131, 133, 135, 137, 138, 139, 140, 141, 142, 143, 144, 145, 146, 147, 148, 151, 152, 153, 154, 155, 156, 157, 165, 166, 167, 168, 169, 170, 171, 172, 173, 174, 175, 176, 177, 181, 185, 188, 189, 190, 191, 192, 193, 194, 195, 196, 197, 198, 199, 200, 203, 204, 205, 209, 210 212, 213, 216, 217, 218, 219 et 220 ne peuvent pas l'être. Ces factures représentent une valeur nette comptable totale de 3 369 312,52 euros. Il y a également lieu d'exclure, pour les mêmes motifs, la prise en compte des factures n° 221, 223, 224, 225, 231 et 232, contestées par ailleurs par le SMAVM et dont la valeur nette comptable peut être évaluée à la somme de 101 516,50 euros.

17. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 10 que la seule circonstance qu'un écart existe entre la date de facturation de certains biens et la date de leur mise en service comptable n'est pas de nature à révéler que la valeur nette comptable de ces biens aurait été surestimée. Si le SMAVM fait plus précisément valoir que, s'agissant de la facture n° 33, elle correspond à une extension de station qui était par conséquent déjà en service, il résulte de l'instruction que cette facture correspond à des études réalisées par la société High Graph pour cette extension. Dès lors, il n'est pas anormal que la date de facturation, le 5 avril 2015, soit antérieure de plusieurs mois à la date de mise en service retenue, le 1er janvier 2016. Si le SMAVM critique également la date de mise en service du 1er janvier 2018 retenue pour les factures n° 195 et 199, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la facture n° 195 de la société Rutronik n'a pas à être prise en compte au titre des biens de retour. En revanche, il résulte de l'instruction que les factures n° 199 correspondent à la fourniture de plusieurs équipements de bornes par la société IER, échelonnés entre 2012 et 2017. La société Autolib' n'apporte aucun élément de nature à justifier la mise en service au 1er janvier 2018 retenue uniformément pour l'ensemble de ces factures. Il convient, dès lors, de retenir le montant de 67 217 euros, correspondant à l'impact, sur la valeur nette comptable, de ce décalage, calculé par le SMAVM et figurant dans le tableau de synthèse des écarts entre la date de facture et la date de début d'amortissement.

18. Il y a lieu de déduire de la somme de 16 516 716,25 euros demandée par la requérante les montants mentionnés aux points 16 et 17. Il en découle que la société Autolib' est fondée à être indemnisée à hauteur de 12 978 670,23 euros au titre de la valeur nette comptable des biens de de retour.

En ce qui concerne les coûts raisonnables de résiliation des contrats en cours conclus pour l'exécution de la concession :

S'agissant des coûts de licenciement :

19. En vertu des stipulations précitées du (v) de l'article 61 de la convention de délégation de service public du 25 février 2011, l'indemnisation à laquelle la société Autolib' peut prétendre sur leur fondement est conditionnée à la production des contrats concernés. Dès lors, à supposer même que les coûts de résiliation des contrats de travail entrent dans le champ de ces stipulations, le SMAVM est fondé à soutenir que la demande de la société Autolib' tendant au versement d'une somme de 10 020 645 euros, pour la résiliation des contrats de travail de ses 246 salariés, doit être rejetée en l'absence de production de ces contrats.

S'agissant des contrats passés avec des fournisseurs :

20. Les stipulations du (v) de l'article 61 de la convention du 25 février 2011 impliquent que seules les sommes effectivement versées par la société Autolib' à ses

co-contractants, à la suite de la résiliation des contrats conclus pour l'exécution de la concession du service public Autolib', puissent être regardées comme des coûts raisonnables de résiliation. Le caractère raisonnable de ces coûts doit être apprécié au regard, notamment, des obligations résultant de ces contrats et des règles d'ordre public s'y appliquant.

Quant à la société Geodis Logistics Ile-de-France :

21. Aux termes de l'article L. 145-4 du code de commerce : " La durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans. / Toutefois, le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration d'une période triennale, au moins six mois à l'avance, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par acte extrajudiciaire. Les baux conclus pour une durée supérieure à neuf ans, les baux des locaux construits en vue d'une seule utilisation, les baux des locaux à usage exclusif de bureaux et ceux des locaux de stockage mentionnés au 3° du III de l'article 231 ter du code général des impôts peuvent comporter des stipulations contraires (...) ".

22. La société Autolib' a conclu le 2 août 2013 avec la société Geodis Logistics

Ile-de-France un bail commercial d'une durée de neuf années pour la sous-location de locaux, à usage principalement d'entrepôts, situés boulevard Ney à Paris. Ce contrat a commencé à courir le 1er août 2013, avec la possibilité pour le sous-locataire de donner congé à l'issue de chaque période triennale sous un préavis de six mois. La somme de 725 165,50 euros au titre des loyers et charges restant dus d'août 2018 au 31 juillet 2019, dont la société requérante justifie du paiement à la société Geodis Logistics Ile-de-France, apparaît, dès lors, comme un coût raisonnable de résiliation. En revanche, la somme de 71 499,06 euros versée par l'intéressée au titre des travaux de remise en état réalisés sur ces locaux n'est pas directement liée à la résiliation anticipée du bail commercial, mais à l'usage que la société a fait de ces locaux et n'a, par suite, pas à être prise en charge par le SMAVM.

Quant à la société Portfolio Investissements :

23. La société Autolib' a conclu le 23 juin 2017 avec la société Portfolio Investissements un bail commercial pour la location de locaux commerciaux à destination d'agence commerciale, situés quai de la Mégisserie à Paris, pour une durée de six, neuf ou dix ans à compter du 1er mai 2017. L'article 2 du contrat stipule que le locataire renonce à la possibilité de donner congé à l'issue de la première période triennale. S'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 145-4 du code de commerce que la société Autolib' pouvait légalement renoncer à la résiliation du bail à l'issue de la première période triennale, dès lors que le bail a été conclu pour une durée supérieure à neuf ans, elle n'apporte aucun élément de nature à justifier l'intérêt qu'elle avait à signer un bail de dix ans au lieu de neuf, pour une période excédant la durée restante de la concession, et alors, au surplus, que la concession rencontrait de graves difficultés économiques. Dans ces conditions, elle est seulement fondée à demander à être indemnisée au titre des loyers et des charges restant dus jusqu'à l'échéance de la première période triennale, soit du 1er août 2018 au 30 avril 2020 inclus, correspondant à une somme de 217 124,27 euros, au vu du détail des loyers, charges et taxes produit par la requérante, et dont elle justifie du paiement.

Quant à la société Mount Vernon :

24. La société Autolib' a conclu le 31 octobre 2017 avec la société Mount Vernon deux baux commerciaux pour la location de locaux à destination de bureaux ou d'archivage à Vaucresson, pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 2016, avec possibilité de donner congé à l'expiration de chaque période triennale. Dans ces conditions, elle est fondée à demander à être indemnisée au titre des loyers et charges correspondant à la période du

1er août au 31 décembre 2018, pour un montant de 55 207,23 euros, dont elle justifie du versement. En revanche, dès lors que le service de navette mis en place pour ses salariés n'était en tout état de cause pas prévu par les contrats produits, elle n'est pas fondée à demander la somme de 20 991,67 euros au titre des charges de ce service sur cette même période.

Quant à la société Bluecar :

25. La société Autolib' a conclu le 1er octobre 2011 avec la société Bluecar un contrat de location de véhicules de quatre places, avec effet rétroactif au 1er juillet 2011, pour un loyer de 250 euros mensuel par véhicule, hors indexation.

26. En premier lieu, l'article 5.2 de ce contrat prévoit que : " Chacune des parties demeure libre de mettre fin à tout moment au présent Contrat cadre sous réserve d'en informer l'autre au moins un (1) mois à l'avance par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, lettre remise en mains propres contre récépissé ou tout acte extrajudiciaire. A la date de fin du Contrat Cadre, les locations en cours de Véhicules prendront fin et le locataire devra les restituer au loueur conformément aux dispositions figurant dans le présent Contrat ". Aux termes de l'article 5.3 du même contrat : " Sous réserve des dispositions de l'article 5.2 ci-dessus, la durée de location de chacun des Véhicules est d'1 (un) an ". L'annexe 2 à ce contrat, relative au modèle de procès-verbal de remise de véhicule, précise que la durée de location est d'un an, avec tacite reconduction, sauf dénonciation par l'une des parties sous préavis de quinze jours.

27. Il résulte de ces stipulations que la société Autolib' était redevable à la société Bluecar des loyers restants dus pour l'ensemble des véhicules Bluecar en cours de location à la date de résiliation de la concession, ainsi que, le cas échéant, pour la durée de location tacitement reconduite d'un an entre cette date et l'échéance du préavis de quinze jours qu'elle était tenue de donner. La société requérante justifie, par la production d'un tableau mentionnant le numéro de châssis de chacun des véhicules concernés, et la date d'échéance de leur contrat, qu'elle devait une somme de 5 967 067 euros au titre de 3 458 véhicules. Il résulte toutefois de l'instruction qu'ayant été informée, au plus tard, le 25 juin 2018 de la résiliation de la concession à compter de cette date, et compte tenu du délai de préavis de quinze jours qu'elle devait donner, elle ne peut prétendre à être indemnisée au titre des contrats ayant été tacitement reconduits à compter du 15 juillet 2018. Dès lors, il y a lieu de retenir une somme de

5 919 258 euros au titre de ces loyers, qu'elle justifie avoir versée à la société Bluecar. Si la société requérante demande également à être indemnisée au titre des 282 véhicules Utilib', elle ne justifie pas que le contrat produit lui permettait de louer des véhicules utilitaires, et, par suite, n'établit pas qu'elle devait à la société Bluecar une somme quelconque à ce titre.

28. En deuxième lieu, si la société Autolib' soutient avoir supporté des dépenses de remorquage des véhicules vers leur lieu de restitution en raison de la rupture brutale de la concession, elle ne justifie pas de l'existence de ces frais de transport, qui ne constituent pas, en tout état de cause, des coûts de résiliation. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à demander à être indemnisée à ce titre à hauteur de 165 228,56 euros.

29. En troisième lieu, il résulte de l'article 6.2.1. du contrat passé entre les sociétés Autolib' et Bluecar que l'entretien et la maintenance des véhicules étaient confiés au locataire pendant toute la durée du contrat. Dès lors, les réparations prises en charge par la société Autolib' afin de restituer les véhicules en état de marche, comme l'exigeait l'article 7.3 du contrat, ne présentent pas de lien direct avec la résiliation du contrat. Elle n'est, dès lors, pas fondée à demander à être indemnisée à hauteur de 2 705 772,32 euros à ce titre.

30. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...) / 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels (...). Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure (...) ".

31. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation, applicable aux relations contractuelles nouées entre la société Autolib' et ses fournisseurs, que l'existence d'une stipulation contractuelle de préavis ne fait pas obstacle à ce que la partie à l'origine de la rupture soit condamnée, sur un fondement délictuel, à indemniser le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture, dans l'hypothèse où ce préavis contractuel serait insuffisant au regard notamment de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties. Ce préjudice est évalué en considération de la marge brute escomptée durant la période de préavis qui n'a pas été exécutée.

32. Il résulte de ce qui précède que la société Autolib' n'avait en tout état de cause pas à verser à la société Bluecar, sur ce fondement, une indemnité correspondant au coût de six mois de stockage des véhicules électriques, à la valeur du stock de pièces détachées dédiées à la maintenance et au stockage de six mois de ce stock. Les sommes de 740 201,86 euros et 2 683 177,48 euros qu'elle demande à ce titre ne peuvent, dès lors, être regardées comme un coût raisonnable de résiliation du contrat concerné. Par ailleurs, si elle soutient avoir versé, sur ce même fondement, une somme de 431 935,59 euros au titre de la marge réalisée par la société Bluecar sur la maintenance des véhicules électriques pendant six mois, le contrat qu'elle a conclu avec la société Bluecar ne confie pas à cette dernière la maintenance des véhicules et elle ne justifie par ailleurs, et en tout état de cause, pas de la réalité et de l'ampleur de la relation commerciale nouée à ce titre avec la société Bluecar.

Quant à la société IER :

33. La société Autolib' a conclu avec la société IER deux contrats cadres pour une durée allant du 1er mars 2011 au 28 février 2023, l'un (2011/AUTOLIB/001), relatif à la fourniture de matériels (bornes d'abonnement, de location et de charges), des accessoires aux matériels et des services (prestations de fourniture, d'installation et de maintenance des matériels et accessoire), l'autre (2011/AUTOLIB/002), relatif à la mise en place du centre d'appel, de l'administration du parc, de la gestion de projet et de la fourniture, de la maintenance et du support par IER de différents outils et équipements informatiques utilisés par les usagers du service Autolib' et les " ambassadeurs " ayant pour mission d'assister les usagers du service Autolib'. Elle a en outre conclu avec cette société un contrat de maintenance itinérante pour la maintenance et la réparation des véhicules, pour une période allant du 1er janvier 2012 au

31 décembre 2013, renouvelée tacitement chaque année. Elle justifie avoir versé une somme de 4 841 829,38 euros à cette société le 28 décembre 2018.

34. Aux termes de l'article 14.1 du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001 : " (...) le présent Accord sera résilié de plein droit en cas de résiliation du contrat liant le Client et le Syndicat Mixte Autolib'. Dans ce cas, le Client s'engage à indemniser IER. Le Client remboursera à IER les coûts relatifs aux Matériels, ayant fait l'objet d'appels de livraison émis par le Client, fabriqués ou en cours de fabrication, aux stocks de Matériels, aux annulations de commandes auprès de ses fournisseurs ainsi que les coûts de main d'œuvre et de stock de pièces détachées, composants et produits consommables pour la production et la Maintenance des Matériels. L'indemnisation sera destinée à rembourser intégralement IER des coûts, dédits et pénalités de toute sorte qui lui sont réclamés du fait de la résiliation de l'Accord. Le Client indemnisera également IER de manière forfaitaire au titre du bénéfice non perçu par IER du fait de cette résiliation. Cette indemnisation est de quinze pour cent (15%) du prix de la Maintenance pendant une (1) année contractuelle et du prix des Matériels n'ayant pas fait l'objet d'appels de livraison et qui auraient dû l'être conformément à la Commande si l'Accord n'avait pas été résilié ". Aux termes de l'article 13.1 du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/002 : " (...) Le Client indemnisera également IER de manière forfaitaire au titre du bénéfice non perçu par IER du fait de cette résiliation. Cette indemnisation est de quinze pour cent (15%) du prix de la Maintenance pendant une (1) année contractuelle et du prix des Matériels n'ayant pas fait l'objet d'appels de livraison et qui auraient dû l'être conformément à la Commande afférente si l'Accord n'avait pas été résilié ". Enfin, aux termes de l'article 10.3 du contrat de maintenance itinérante : " En cas de résiliation du Contrat, sauf en cas de résiliation du Contrat résultant de l'inexécution par IER de ses obligations prévues au Contrat conformément aux dispositions de l'article 10.1, toutes les sommes versées à IER lui resteront entièrement acquises et AUTOLIB indemnisera IER des coûts de stockage, de main d'œuvre pour la réalisation des Prestations et plus généralement de tous les coûts liés aux investissements réalisés par IER pour l'exécution du Contrat, pour la partie de ces coûts non amortie dans le prix payé pour les Prestations, tel qu'IER pourra le justifier dans ses écritures. L'indemnisation sera destinée à rembourser intégralement IER des coûts, dédits et pénalités de toute sorte qui lui sont réclamés du fait de la résiliation du Contrat qui ne lui est pas imputable ".

35. Il résulte des stipulations des articles 14.1 du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001 et 10.3 du contrat de maintenance itinérante que la société IER ne pouvait pas être indemnisée spécifiquement au titre des coûts, dédits et pénalités de toutes sortes, ces préjudices étant réputés couverts, respectivement, par le remboursement des coûts relatifs aux matériels, aux stocks de matériels, aux annulations de commandes de la société IER auprès de ses fournisseurs et des coûts de main d'œuvre et de stock de pièces détachées, composants et produits consommables pour la production et la maintenance des matériels, et par l'indemnisation des coûts de stockage, de main d'œuvre pour la réalisation des prestations et de tous les coûts liés aux investissements réalisés par la société IER pour l'exécution du contrat, pour la partie non amortie de ces coûts.

36. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 31 que la société IER ne pouvait prétendre à être indemnisée, sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, des coûts liés au licenciement du personnel auquel elle a eu recours au titre du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001 et du contrat de maintenance itinérante, et de ce qui a été dit au point précédent qu'elle ne pouvait l'être au titre des coûts, dédits et pénalités de toutes sortes qui lui seraient réclamés. Si elle pouvait l'être au titre des coûts de main d'œuvre mentionnés à l'article 14.1 du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001, elle ne pouvait en revanche l'être sur le fondement de l'article 10.3 du contrat de maintenance itinérante, en l'absence de toute justification de ce que ces coûts n'auraient pas été amortis dans les prix payés pour les prestations.

37. Il résulte de l'instruction que la société IER a dû procéder à des licenciements économiques à la suite de la résiliation de ses contrats avec la société Autolib', mais aussi d'une forte érosion du chiffre d'affaires de ses autres activités, qui ont donné lieu à un plan de sauvegarde de l'emploi concernant trente-et-un salariés, dont dix-huit étaient affectés sur des prestations destinées à la société Autolib'. Les montants demandés par la société IER au titre des coûts de main d'œuvre relatifs aux congés payés, aux RTT et au treizième mois, ainsi que les charges patronales correspondantes, qui peuvent être évaluées à 10 121,47 euros, résultant de l'application d'un taux de 30 % à ces coûts, ne sont pas directement liés à la résiliation de son contrat avec la société Autolib'. En revanche, si le SMAVM conteste le caractère raisonnable du coût du plan de sauvegarde de l'emploi, il n'apporte aucun élément de nature à l'établir, alors que le caractère suffisant de ce plan devait être apprécié au regard des moyens du groupe auquel appartient la société IER. Dans ces conditions, déduction faite des montants mentionnés, il y a lieu de retenir un montant de 1 309 328,89 euros au titre de ce plan, auquel il convient d'ajouter les coûts de la taxe de revitalisation calculée pour dix-huit salariés, soit 80 918 euros. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que la cellule de reclassement aurait été mobilisée pour des salariés affectés sur des prestations pour la société Autolib', et les honoraires d'avocat ne constituent pas des coûts de main d'œuvre. Si, à la suite de la demande qui lui en a été faite, la société requérante a précisé que les salariés affectés aux prestations du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001, dont seuls les coûts de licenciement devaient être indemnisés, ne peuvent être distingués de ceux affectés aux prestations du contrat de maintenance itinérante, ces salariés étant mutualisés, il résulte des stipulations de l'article 8.2 de ce contrat qu'au moins douze techniciens étaient affectés aux prestations de ce dernier. Dans ces conditions, les coûts raisonnables de main d'œuvre que devait supporter la société Autolib' au titre du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001 doivent être évalués à un tiers du coût du licenciement des dix-huit salariés, soit 463 415,63 euros. Enfin, la société IER pouvait également être indemnisée du coût des contrats d'intérim postérieurs au mois de septembre 2018, les deux agents concernés n'ayant été dispensés d'activité qu'à la fin du mois de septembre 2018, soit 20 125,13 euros. Par suite, la société Autolib' est seulement fondée à demander à être indemnisée à hauteur de 483 540,76 euros au titre des coûts de main d'œuvre de la société IER, et non de 1 297 230 euros comme elle le demande.

38. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du bon de commande du 28 décembre 2011 produit, et du courrier du 27 novembre 2014 relatif aux bornes Utilib', qu'un total de 6 945 bornes de charge et 150 bornes d'abonnement ont été commandées par la société Autolib' à la société IER. Il n'est pas contesté que seules, respectivement, 6 474 et 103 de ces bornes avaient été livrées lors de la résiliation du contrat. Si la société IER pouvait prétendre, en application des stipulations précitées de l'article 14.1 du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001, au remboursement des coûts relatifs aux bornes de recharge et de location ayant fait l'objet d'appels de livraison par la société Autolib' et fabriquées ou en cours de fabrication, il ne résulte pas de l'instruction que les 471 bornes de charge et les 47 bornes d'abonnement non appelées étaient fabriquées ou en cours de fabrication. Dès lors, la société Autolib' n'est pas fondée à être indemnisée à hauteur de la somme de 1 737 647,12 euros qu'elle dit avoir versée à ce titre. En revanche, elle est fondée à être indemnisée à hauteur de 289 155,75 euros pour le bénéfice non perçu au titre des commandes de bornes non appelées, correspondant à 15 % du prix de ces bornes de, respectivement, 3 055 euros et 10 400 euros.

39. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 35 que la société IER n'était pas fondée à être indemnisée, au titre des coûts, dédits et pénalités de toutes sortes, de l'arrêt des contrats de location des véhicules mis à la disposition de ses agents de maintenance et de quarante licences OFCS. S'agissant, au surplus, de l'arrêt des contrats de location des véhicules, si les stipulations du (v) de l'article 61 de la convention de délégation de service public n'exigent pas la production des contrats passés par les fournisseurs de la société Autolib' avec des tiers, elles impliquent en revanche que la requérante justifie du bien-fondé des indemnités qu'elle a versées. En l'espèce, la seule production d'un tableau Excel ne permet pas de justifier des sommes que la société IER aurait été contrainte de verser en raison de l'arrêt des contrats de location des véhicules de service mis à la disposition de ses techniciens de maintenance, ni même de ce que la société Autolib' se serait assurée du bien-fondé de la demande présentée, pour ce motif, par la société IER. Par suite, cette dernière n'est pas fondée à demander à être indemnisée d'une somme de 91 124 euros à ce titre.

40. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que la société IER a demandé à être indemnisée des coûts liés aux investissements réalisés pour l'exécution du contrat-cadre 2011/AUTOLIB/001 et non amortis dans le prix payé pour les prestations. Les stipulations de l'article 14.1 de ce contrat-cadre ne prévoient toutefois pas le versement d'une telle indemnisation. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que les investissements au titre desquels la société IER a demandé à être indemnisée aient été engagés au titre du contrat de maintenance itinérante. Au surplus, la part des investissements non amortis dont la société IER demande l'indemnisation a été calculée sur la base d'un amortissement linéaire, et non d'un amortissement variable, lié à la quantité de prestations réalisées. Dans ces conditions, la société Autolib' n'était pas redevable d'une somme de 37 938,69 euros au titre de ces investissements, qui ne sauraient, par suite, être regardés comme un coût raisonnable de résiliation

41. En cinquième lieu, il résulte des stipulations des articles 14.1 et 13.1 des

contrats-cadre 2011/AUTOLIB/001 et 2011/AUTOLIB/002 que la société IER pouvait prétendre à l'indemnisation de l'équivalant de quinze pour cent du prix de la maintenance pendant une année contractuelle. Il ressort de la balance analytique produite par la société Autolib' que le chiffre d'affaires réalisé par la société IER au titre de ces deux contrats sur l'année 2017 a été respectivement de 2 748 995 euros et de 844 972 000 euros. La société Autolib' peut, dès lors, prétendre à une somme totale de 539 095,05 euros à ce titre, résultant de l'application d'un taux de quinze pour cent au chiffre d'affaires réalisé en 2017.

42. En dernier lieu, il ne résulte pas de l'instruction que la somme de 533 353 euros demandée par la société Autolib' au titre des prestations réalisées par la société IER postérieurement au 31 juillet 2018 présente un lien avec la résiliation des contrats conclus avec cette société. Ainsi que le fait valoir le SMAVM, ces prestations sont en outre couvertes par le protocole de sortie conclu le 25 juin 2018 avec la société Autolib', en contrepartie duquel les parties ont renoncé à porter, devant quelque juridiction que ce soit, toute réclamation, instance ou action, née ou à naître, à raison du différend relatif aux modalités d'arrêt techniques, financières et opérationnelles de l'activité d'exploitation d'Autolib', et qui a repoussé la date de restitution des biens de retour au 31 août 2018.

43. Il résulte de ce qui précède que le coût normal de résiliation des contrats conclus avec la société IER s'élève à un total de 1 311 791,56 euros.

Quant à la société Wifirst :

44. La société Autolib' a signé le 8 mars 2012 avec la société Wifirst un contrat pour la fourniture d'un service L3VPM lui permettant de raccorder ses espaces et stations à son système d'informations grâce aux liens ADSL fournis sur un réseau privé, avec effet rétroactif au 19 juillet 2011, pour une durée de cinq ans, tacitement renouvelable pour une durée d'un an, sauf dénonciation six mois avant sa date d'échéance. Ce contrat prévoit en outre en annexe que, s'agissant du raccordement de chacune des stations au L3VPN, un engagement de douze mois est associé à ces lignes, et qu'au-delà, le client pourra résilier quand il le souhaite. La société Autolib' a également signé le 16 juillet 2012 avec cette société un contrat pour disposer d'un accès alternatif à internet, pour une durée de trois ans, tacitement reconductible pour une durée indéterminée, sauf dénonciation six mois avant sa date d'échéance.

45. Aux termes de l'article 1212 du code civil : " Lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l'exécuter jusqu'à son terme (...) ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation qu'en cas de résiliation anticipée d'un contrat, la partie à l'origine de la résiliation ne doit pas la totalité du prix convenu pour les prestations faisant l'objet du contrat, en l'absence d'exécution du contrat, mais est redevable des dommages et intérêts dus en raison du préjudice causé par la résiliation du contrat.

46. Si la société Autolib' se prévaut de ce que la somme de 134 111 euros qu'elle demande à la société Wifirst ne correspondrait qu'à trois mois de prestations, il est constant que cette somme est dépourvue de lien avec le préjudice éventuellement subi par cette société en raison de la résiliation anticipée de son contrat et ne saurait, par suite, être regardée comme constituant un coût raisonnable de résiliation.

Quant à la société Polyconseil :

47. En admettant même que le devis du 30 avril 2015 de la société Polyconseil, pour l'exploitation du site internet Autolib', puisse être regardé comme un contrat au sens du (v) de l'article 61 de la convention de délégation de service public, ce devis ne fixe aucune durée des prestations ni n'exige aucun préavis pour y mettre fin. En outre, si la société Autolib' soutient que la somme de 19 750 euros qu'elle aurait versée à la société Polyconseil correspondrait à un préavis raisonnable, soit cinq mois de prestations, d'une part, elle ne justifie pas de la dépendance économique de la société Polyconseil à son égard par le versement d'une somme mensuelle de 3 950 euros, d'autre part et en tout état de cause, il résulte de ce qui a été dit au point 31 que la somme demandée ne correspond pas au préjudice qu'aurait subi la société Polyconseil en raison de la brutalité de la rupture de leurs relations commerciales. Au surplus, il résulte des écritures mêmes de la société Autolib' que la somme de 19 750 euros porte en réalité sur des prestations réalisées par la société Polyconseil d'août à décembre 2018, sans que la requérante ne précise à quel titre elles devraient être indemnisées par le SMAVM.

Quant à la société Bluecarsharing :

48. La société Autolib' a conclu le 22 février 2018 avec la société Bluecarsharing une convention d'assistance technique et les 28 et 30 mai 2013 deux contrats de licence relatifs à l'utilisation du système d'information et de l'infrastructure permettant la gestion informatisée du projet Autolib'. L'article 5 de la convention précise qu'elle est entrée rétroactivement en vigueur le 1er janvier 2015 et a été conclue pour une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction pour des périodes successives d'un an, sauf dénonciation moyennant un préavis de trois mois avant l'expiration de chaque période annuelle. L'article 16 du contrat de licence signé le 30 mai 2013 prévoit qu'il prend effet rétroactivement le 5 décembre 2011 et reste en vigueur pour la durée de la délégation de service public consentie par le syndicat mixte Autolib', ou d'une nouvelle délégation de service public qui serait consentie par le syndicat.

49. En premier lieu, contrairement à ce que soutient la société Autolib', il résulte de ce qui a été dit au point 31 qu'elle n'était pas tenue de verser, en application de l'article

L. 442-6 du code de commerce, une somme de 4 107 217 euros à la société Bluecarsharing au titre du plan de sauvegarde de l'emploi mis en place par cette société à la suite de la résiliation de la convention d'assistance technique, pas plus qu'une somme de 319 784 euros correspondant au chiffre d'affaires réalisé sur les cinq premiers mois de l'année par la société Bluecarsharing grâce au contrat de licence signé le 30 mai 2013.

50. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 45 que si la société Bluecarsharing pouvait prétendre à l'indemnisation des dommages et intérêts liés à la

non-exécution de la convention d'assistance technique jusqu'à son terme par la société Autolib', elle ne pouvait prétendre au paiement de prestations qu'elle n'a pas réalisées. Il s'ensuit que le montant que la société Autolib' soutient lui avoir versé à ce titre, égal au chiffre d'affaires réalisé par la société Bluecarsharing avec elle, au cours des cinq premiers mois de l'année 2018, ne correspond pas au préjudice éventuellement subi par la société Bluecarsharing. Dès lors, la somme de 2 127 168 euros dont la société requérante demande à être indemnisée pour ce versement ne constitue pas un coût raisonnable de résiliation.

51. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que la société Polyconseil a établi le

22 juin 2018 un devis pour la société Bluecarsharing, relatif à l'ensemble des actions à réaliser sur les systèmes informatiques pour assurer le bon déroulement de la fermeture du service Autolib', dont la société requérante demande à être indemnisée à hauteur de 275 175 euros. Toutefois, le montant de ce devis, qui se rapporte à des prestations non prévues aux contrats produits par la société Autolib', ne peut être pris en compte au titre des coûts raisonnables de résiliation des contrats en cours. Au surplus, il résulte de l'instruction que par le point 2 du protocole de sortie du 25 juin 2018, la société Autolib' s'est engagée à mener un processus d'arrêt progressif et raisonné du service, compte tenu, notamment, de la nécessité d'informer correctement les utilisateurs/abonnés et de limiter les désagréments subis par ces derniers et, par son point 5, à mettre en œuvre une procédure d'information des abonnés sur les opérations de fermeture des stations et de fin des abonnements. Dans ces conditions, la société Autolib' n'est pas fondée à demander à être indemnisée des dépenses engagées pour le bon déroulement de l'arrêt de son service, couvertes par ce protocole.

Quant à la société Bolloré :

52. La société de Quiberon, devenue la société Autolib' le 19 janvier 2011, a signé le 4 janvier 2010 avec la société Bolloré une convention d'assistance financière, fiscale, juridique, comptable, informatique, et en matière de ressources humaines, d'achats, d'immobilier, de communication, de stratégie et de sécurité, pour une durée d'un an tacitement renouvelable pour des périodes d'un an, sauf dénonciation par un préavis de trois mois avant l'expiration de chaque période annuelle. Si la société Autolib' demande à être indemnisée d'une somme de 300 000 euros au titre de la résiliation de ce contrat, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction qu'il aurait été conclu pour l'exécution de la convention de délégation de service public, l'objet de la société de Quiberon n'ayant été modifié que le 19 janvier 2011 afin de lui permettre d'assurer la gestion du service public Autolib'.

Quant à la société Whaller :

53. La société Autolib' a conclu le 7 janvier 2015 avec la société Whaller un contrat d'abonnement à une plateforme web " sociale et communautaire " permettant à la société Autolib' d'héberger et de gérer ses propres réseaux sociaux, clubs et communautés numériques. L'article 16.1 du contrat prévoit qu'il prend effet rétroactivement à partir du 15 septembre 2014 et qu'il s'achèvera à la date du 31 août 2017 minuit et qu'au-delà de cette période, il se renouvellera pour des périodes successives d'un an chacune, sauf dénonciation par l'une des parties avec un préavis de trois mois. Il résulte de ce qui a été dit au point 45 que la somme de 69 600 euros dont la société Autolib' demande le versement, qui correspond au coût de l'abonnement pendant un an, ne saurait être regardé comme un coût raisonnable de résiliation. En tout état de cause, il résulte de l'instruction que la société Whaller n'a demandé le paiement d'aucune somme à la suite de la résiliation de son contrat et qu'aucune indemnité ne lui a été versée par la société Autolib' à ce titre.

Quant à la société Direct énergie :

54. La société Autolib' a conclu le 12 septembre 2016 un contrat de fourniture d'électricité des stations Autolib' avec la société Direct énergie, prenant fin le 31 décembre 2018, avec possibilité de résiliation à tout moment sous réserve d'un préavis de dix jours en cas de cessation d'activité. Si elle fait valoir que la somme de 128 418 euros qu'elle réclame correspond à l'alimentation des bornes en électricité aux mois d'août et septembre 2018, nécessaire pour procéder aux opérations de réception des biens de retour, achevées le

17 septembre 2018, cette somme est dénuée de lien avec la résiliation du contrat passé avec la société Direct énergie. Au surplus, il résulte de l'article 7 du protocole de sortie du 25 juin 2018 que cette somme est couverte par ce protocole.

Quant à la société Bidel services :

55. La société Autolib' a conclu avec la société Bidel services un contrat portant sur le remorquage de véhicules " BlueUtility " et " BlueCar ", entré en vigueur rétroactivement à compter du 1er juillet 2017, pour une durée de trois ans. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que cette société n'a réclamé aucune indemnisation à la société Autolib' et que cette dernière ne lui a versé aucune indemnisation, les sommes de 5 125 euros et de 258 913 euros qu'elle réclame ne peuvent être regardées comme des coûts raisonnables de résiliation. Au surplus, d'une part, les prestations de remorquage de véhicules qui auraient été rendues nécessaires pour un montant de 5 125 euros du fait de la rupture brutale de la convention de délégation de service public ne sont pas établies et sont en tout état de cause dépourvues de lien avec la résiliation du contrat souscrit auprès de la société Bidel services, d'autre part, il résulte de ce qui a été dit au point 45 que la somme de 258 913 euros, correspondant à six mois du chiffre d'affaires de la société Bidel services, est dépourvue de lien avec le préjudice subi par cette société.

Quant à la société BRS :

56. La société Autolib' a signé le 8 novembre 2017 un contrat avec la société BRS pour des prestations de réparation de carrosseries des véhicules Bluecar et, à titre exceptionnel, de maintenance atelier, démontage/remontage de la batterie de traction des véhicules et démontage-remontage de moteur, entré en vigueur rétroactivement le 1er juillet 2017 pour une durée ferme de trois années. Si la société BRS lui a demandé, le 17 septembre 2018, une somme de 676 654 euros HT au titre de la rupture anticipée du contrat, il résulte de l'instruction que la société Autolib' ne lui a jamais versé cette somme, dont elle ne peut, par conséquent, prétendre à être indemnisée.

Quant à la société Bureau Veritas :

57. La société Autolib' a signé le 23 avril 2018 deux contrats avec la société Bureau Veritas, pour la vérification des installations électriques et de divers appareils dans l'atelier de maintenance et les bureaux de la société Autolib' et pour la vérification des installations électriques des stations Autolib', pour une durée ferme de quatre ans à compter du

23 avril 2018. D'une part, la somme de 54 240 euros provisionnée par la société Autolib' au titre de l'indemnisation de la rupture anticipée du contrat n'a pas été demandée par la société Bureau Veritas et ne lui a pas été versée, et elle ne correspond en tout état de cause pas à des dommages et intérêts qu'aurait subis la société Bureau Veritas, mais à six mois de prestation, lesquelles n'étaient pas dues en l'absence d'exécution. D'autre part, le versement à la société Bureau Veritas de la somme de 8 724 euros que la société Autolib' demande au titre de prestations de vérification des installations électriques en station pour le mois d'août 2018 n'est pas établi et cette somme est en outre dépourvue de lien avec la résiliation des contrats conclus avec cette société et couverte par le protocole de sortie signé le 25 juin 2018, s'agissant de prestations liées à la remise des biens de retour.

Quant aux locations de parkings :

58. La somme de 97 547 euros demandée par la société Autolib' au titre de la location, aux mois d'août et septembre 2018, de places de parking où sont localisées les stations Autolib' est dépourvue de lien avec la résiliation des contrats de location de places de parking passés avec les sociétés Indigo, Saemes, Levaparc, Spie Autocité, Interparking, Effia stationnement. Ces loyers, liés au délai d'enlèvement des bornes et stations, sont au surplus couverts par le protocole de sortie du 25 juin 2018.

Quant aux charges d'exploitation liées à l'arrêt du service :

59. Les sommes de 180 844 euros au titre des frais de remise en état des stations et parkings, de 75 970 euros au titre des frais d'entretien et de maintenance des stations, de

36 392 euros au titre des frais de remorquages des véhicules et de 15 517 euros au titre des frais d'expertise des véhicules, que la société Autolib' prétend avoir exposées au mois d'août 2018, ne constituent pas des coûts de résiliation de contrats. Au surplus, la société Autolib' ne justifie pas avoir exposé ces sommes.

Quant aux honoraires d'avocat :

60. La somme de 100 000 euros que la société Autolib' demande au titre des honoraires d'avocats qu'elle pourrait être amenée à exposer en cas de litige avec ses fournisseurs est purement éventuelle et ne peut, en l'état, être rattachée à un contrat conclu pour l'exécution du service public en particulier.

S'agissant des créances impayées :

61. La somme de 1 608 361 euros que la société Autolib' demande au titre de créances impayées de la part de ses clients est dépourvue de lien avec la résiliation des contrats qu'elle a conclus pour l'exécution de la délégation de service public. La société requérante ne précise d'ailleurs pas au titre de quels contrats elle demande cette indemnisation, ni même ne justifie de l'existence d'impayés.

S'agissant de la valeur nette comptable des immobilisations hors biens de retour :

62. La somme de 4 097 268 euros que la société Autolib' demande au titre de la valeur nette comptable d'actifs immobilisés hors biens de retour au 25 juin 2018, correspondant notamment à des licences informatiques/télécom et à des aménagements immobiliers et du mobilier du centre de réparation de Ney, est dépourvue de lien avec la résiliation des contrats qu'elle a passés pour l'exécution de la délégation de service public.

63. Il résulte de ce qui précède que la société Autolib' est fondée à être indemnisée à hauteur de 8 228 546,56 euros au titre des coûts raisonnables de résiliation des contrats passés pour l'exécution de la délégation de service public.

En ce qui concerne la compensation due au dépassement du seuil :

64. Aux termes de l'article 41 de la convention du 25 février 2011, relatif au plan d'affaires : " Les Parties ont conclu la présente Concession sur la base d'un Plan d'Affaires Conventionnel. / Elles ont également convenu d'actualiser régulièrement ce Plan d'Affaires Conventionnel au regard du " réalisé " et de s'accorder régulièrement sur le " ré-estimé " sous la forme d'un Plan d'Affaires Actualisé. / 41.1 - Plan d'Affaires Conventionnel / Il est convenu que le Plan d'Affaires Conventionnel, qui porte sur le déploiement total du service au sein du Périmètre de la Concession à la date de la signature du contrat, est une pièce contractuelle de référence. Il reflète les conditions permettant au Concessionnaire d'atteindre son objectif de rechercher le Grand Equilibre et de réaliser un bénéfice raisonnable sur la durée de la Concession. / Ce Plan d'Affaires figure en Annexe A8-4. / 41.2 - Tableau de Bord et Plan d'Affaires Actualisé / Le Concessionnaire s'engage à tenir un tableau de bord permettant de rapprocher les estimations du Plan d'Affaires Conventionnel par rapport aux données réelles. / Ce tableau de bord est notamment destiné à identifier à l'avance les risques de déséquilibre et de permettre aux Parties de résoudre les difficultés éventuelles au fil de l'eau dans le cadre du Comité de Suivi. / Ce tableau de bord sera utilisé chaque fois que nécessaire pour servir de base à la réalisation d'un Plan d'Affaires Actualisé. Ce Plan d'Affaires Actualisé comprendra une ré-estimation des données du Plan d'Affaires précédent. / Le Plan d'Affaire Actualisé résultera d'un accord entre les Parties. A défaut d'accord entre les Parties, le Comité de Suivi sera saisi par la Partie la plus diligente conformément à l'article 69 ci-après et, le cas échéant, le Comité de Conciliation conformément à l'article 70. / Le Plan d'Affaires Actualisé sera établi annuellement et chaque fois qu'il est nécessaire de tenir compte d'évènements nouveaux tels qu'une modification de périmètre, une dégradation notable de la situation financière due à des évènements imprévus, l'adhésion d'une nouvelle commune au Syndicat Mixte. / Le Plan d'Affaires Actualisé permettra notamment de faire apparaître, le cas échéant, une rupture du Grand Equilibre. Il devra alors permettre de prendre les dispositions nécessaires. / En outre, un Plan d'Affaires Actualisé sera élaboré tous les ans dans les mêmes conditions que le Plan d'Affaires Conventionnel et agréé avec le Concédant ".

65. Il résulte de l'instruction qu'après avoir transmis au SMAVM, par un courrier du 22 novembre 2016, le plan d'affaires actualisé de 2016, prévoyant un déficit cumulé de 179 336 000 euros à l'issue de la concession, la société Autolib' a saisi, compte tenu du refus du concédant d'agréer ce plan d'affaires, le comité de suivi, puis le comité de conciliation, en application de l'article 41.2 de la convention. Alors que le comité de conciliation était saisi, elle a également transmis au SMAVM, par un courrier du 11 décembre 2017, le plan d'affaires actualisé de 2017, anticipant un déficit cumulé de 293 687 000 euros à l'issue de la concession. Par une lettre du 25 mai 2018, elle a notifié au SMAVM le défaut d'intérêt économique de la concession.

66. Les stipulations combinées des articles 61 et 63 de la convention de délégation de service public du 25 février 2011 impliquent que la résiliation pour absence d'intérêt économique donne lieu à l'indemnisation du concessionnaire de l'éventuel dépassement, par le déficit constaté cumulé, du seuil de soixante millions d'euros prévu à l'article 63.2.2.

L'article 64 de la convention, relatif à la résiliation pour cas de force majeure, prévoit d'ailleurs une indemnité calculée dans les conditions identiques à celles applicables en cas de résiliation pour absence d'intérêt économique, confirmant que cette résiliation donne droit à l'indemnisation des pertes cumulées excédant le seuil de 60 millions d'euros. Cette interprétation est également corroborée par la motivation de la délibération 2010 030 du comité syndical autorisant la signature du contrat de délégation de service public, dont il résulte que les parties ont entendu limiter à 60 millions d'euros le risque financier supporté par le concessionnaire.

67. L'article 63.1 de la convention du 25 février 2011 implique, il est vrai, que des manquements graves du concessionnaire ne soient pas à l'origine du défaut d'intérêt économique de la concession pour qu'il puisse prétendre au versement de cette compensation financière. En l'espèce, il résulte de l'instruction, notamment du rapport de la chambre régionale des comptes d'Ile-de-France du 13 novembre 2019 relatif aux comptes et à la gestion de la société Autolib', que la méconnaissance, par cette dernière, de ses obligations contractuelles, et que ses choix de gestion, ont contribué au déficit de la concession. Il en va ainsi, notamment, de sa décision d'augmenter le parc de véhicules à partir de 2015, malgré sa sous-utilisation, de l'octroi à des abonnés, à compter de 2015 également, de réductions en contrepartie de leur participation à la régulation du parc automobile, de l'absence de recapitalisation de 10 millions d'euros de la société à la fin de l'année 2013, contrairement à ce qui était prévu par le plan d'affaires initial, de la forte hausse du coût du système informatique, passé de 15,6 millions d'euros dans le plan d'affaires initial à 62,2 millions d'euros dans le plan d'affaires actualisé de 2016 et de l'imputation des coûts d'amortissement sur la concession alors que ce système a été développé par des filiales du groupe auquel appartient la société Autolib'. Il résulte également de l'instruction que la société Autolib' n'a transmis qu'en 2014 son premier plan d'affaires actualisé, que ce plan, ainsi que celui de 2015, manquaient de transparence et faisaient preuve d'un optimisme injustifié quant à l'évolution du chiffre d'affaires de la concession.

68. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'augmentation du parc de véhicules, de 200 véhicules environ, est restée marginale, que les réductions commerciales octroyées aux usagers pour la régulation du parc automobile, si elles ont entraîné une perte de recettes de

6 millions d'euros par an à compter de l'année 2015, ont également permis de diminuer les charges de la concession dédiées à cette régulation, qu'une recapitalisation financière de la société de 10 millions d'euros à la fin de l'année 2013 n'aurait pas empêché d'importants frais financiers compte tenu des déficits cumulés de 104 871 000 euros à cette date et d'un besoin de financement de 64 871 000 euros, et de ce que les charges d'amortissement des investissement informatiques n'expliquent qu'une faible part du déficit de la concession. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que les mesures correctrices qui auraient pu être décidées en cas de présentation de plans d'affaires actualisés plus exploitables, même mises en œuvre plus tôt, auraient été de nature à faire recouvrer un intérêt économique à la concession, comme le montre le chiffrage des mesures envisagées par le rapport du comité de conciliation qui les évalue de 58 à 63 millions, à comparer aux 293 689 000 euros de pertes cumulées de la concession envisagés par le plan d'affaires actualisé de 2017. Il résulte surtout de l'instruction que le défaut d'intérêt économique de la concession est essentiellement dû à une prévision de chiffre d'affaires excessivement optimiste lors du lancement de la concession, le chiffre d'affaires constaté sur la période de 2011 à 2016, de 134 millions d'euros, ne représentant que 30,9 % du chiffre d'affaires prévisionnel de 433 millions d'euros, et les réductions de tarif n'ayant dans cet écart qu'une incidence marginale. Le retard de déploiement du service, dont les parties à la concession ont en tout état de cause convenu qu'il n'était pas imputable au concessionnaire, n'explique qu'en partie cet écart, lequel est principalement dû à un nombre de location de véhicules par abonné et à des temps de location nettement inférieurs à ceux initialement prévus et, dans une moindre mesure, à un nombre d'abonnés surestimé, comme le soulignent les rapports de la chambre régionale des comptes et du cabinet ErnstetYoung. Ainsi, alors que le plan d'affaires initial anticipait une moyenne de onze locations par jour des véhicules et un temps de trajet moyen de cinquante minutes, le nombre de locations a varié entre 2 en 2012 et 4,2 à son maximum en 2014 et 2015, et le temps de trajet s'est avéré de 41 minutes en 2012,

37 minutes en 2013 et moins de 35 minutes en 2017, impliquant une utilisation moyenne de chaque véhicule d'un peu plus de deux heures par jour, contre neuf heures initialement prévues. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que les manquements de la société Autolib', à supposer même qu'ils puissent être qualifiés de graves, soient à l'origine du défaut d'intérêt économique de la concession et de nature à empêcher l'intéressée de se prévaloir de la garantie prévue par les stipulations de l'article 63 de la convention tenant à la prise en charge, par le concédant, des pertes cumulées de la concession excédant le seuil de 60 millions d'euros.

69. Cette garantie implique cependant nécessairement que le concessionnaire mette à même le concédant d'exercer dans les meilleurs délais sa faculté de résilier la concession pour défaut d'intérêt économique.

70. Il résulte de l'instruction que par un courrier électronique du 22 avril 2013, la société Autolib' a transmis au SMAVM des prévisions sur la période 2011-2016 faisant apparaître un déficit cumulé de la concession de 187 714 000 euros à l'issue de cette période, ou de 161 776 000 euros si une révision tarifaire était appliquée, ces prévisions impliquant déjà le défaut d'intérêt économique de la concession, compte tenu du résultat net prévisionnel cumulé du plan d'affaires initial de 2017 à 2022, de seulement 79 711 000 euros. En l'absence de mesure correctrice, la société Autolib' aurait ainsi dû notifier au SMAVM, dès cette période, le défaut d'intérêt économique de la concession. Si le retard dans le déploiement du service Autolib' pouvait, il est vrai, occulter en partie le caractère insoutenable du modèle économique de la concession, cette circonstance ne pouvait en tout état de cause pas être prise en compte pour apprécier l'intérêt économique de la concession, en l'absence de prolongation de sa durée. Il résulte toutefois également des stipulations précitées de l'article 41 de la convention que le plan d'affaires actualisé devait être contractualisé entre les deux parties. A cet égard, il ne résulte pas de l'instruction que, malgré la transmission de données l'alertant des difficultés de la concession, le SMAVM ait réagi avant le 17 octobre 2013, en demandant, notamment, l'actualisation du plan d'affaires initial. En revanche, il est constant qu'il a demandé à cette date à la société Autolib' de produire un plan d'affaires actualisé, ce que l'intéressée a refusé par un courrier du 25 octobre 2013. Compte tenu des délais inhérents à l'élaboration de ce plan, il y a lieu de retenir que la société Autolib' aurait dû, au plus tard le 30 novembre 2013, notifier au concédant le défaut d'intérêt économique de la concession. En ne le faisant pas, elle l'a privé de la possibilité de décider, à cette date, la résiliation de la concession pour défaut d'intérêt économique.

71. Il résulte par ailleurs de l'instruction que le plan d'affaires actualisé produit le

7 juillet 2014 tablait sur un résultat net cumulé positif de 4,9 millions d'euros à l'issue de la concession, en incluant l'incidence financière des mesures préconisées par la société, comme une augmentation des tarifs de location, le paiement des réservations ou la possibilité pour les véhicules Autolib' d'emprunter les voies de bus, sans que ces mesures aient été agréées par le SMAVM, ni même, pour certaines d'entre elles, ne relèvent de ses prérogatives, et, sans qu'elles fassent l'objet d'un chiffrage permettant au syndicat d'en apprécier l'incidence sur les prévisions du plan d'affaires, alors que la société Autolib' a évalué, en 2016, à 92,5 millions d'euros sur l'ensemble de la concession, l'impact de la seule mesure relative au paiement des réservations. Le plan d'affaires actualisé présenté au titre de l'année 2015 était affecté des mêmes vices.

72. Si la société Autolib' soutient qu'à la suite de la transmission du plan d'affaires actualisé de 2016, le concédant a retardé, par son attitude, la notification du défaut d'intérêt économique de la concession, cette circonstance n'est pas, en l'espèce, de nature à impliquer la prise en charge par le SMAVM du déficit qu'elle a cumulé pendant cette période, compte tenu de l'alternative devant laquelle il a été brusquement placé, eu égard aux manquements de la société Autolib' rappelés aux points 70 et 71, de lui verser une compensation financière d'un montant total de 119 336 000 euros jusqu'à la fin de la concession ou de l'indemniser d'un montant comparable en cas de résiliation pour défaut d'intérêt économique de la concession, et sans que sa carence dans le pilotage de la concession ne puisse exonérer la société Autolib' de sa responsabilité.

73. Dès lors qu'en vertu des stipulations précitées de l'article 63.3 de la convention du 25 février 2011, la résiliation aurait pris effet après un délai d'un mois à compter de la réception de la notification du défaut d'intérêt économique de la concession, il résulte de ce qui précède que la société Autolib' peut prétendre à l'indemnisation du déficit cumulé de la concession excédant 60 millions d'euros jusqu'au 31 décembre 2013, soit 44 871 000 euros (104 871 000

- 60 000 000). Il résulte de l'instruction, d'une part, que ce montant inclut l'amortissement de la licence relative au développement du système d'exploitation dont la société Bluecarsharing est restée propriétaire et qui a été utilisé par d'autres systèmes d'autopartage mis en place par le groupe auquel appartiennent les deux sociétés, d'autre part, que ce montant s'élève à 3 467 000 euros au 31 décembre 2013, selon les plans d'affaires actualisés de 2016 et 2017. Le SMAVM n'indique pas en quoi cette somme ne devrait pas, pour ce montant, être comprise dans le déficit cumulé de la concession et il ne résulte pas de l'instruction, notamment des contrats de licence conclus entre les sociétés Autolib' et Bluecarsharing, qu'elle ne devrait pas y être comprise.

74. Il résulte de tout ce qui précède que le SMAVM doit verser à la société Autolib', au titre de la résiliation de la concession de service public, une somme de 66 078 216,79 euros (12 978 670,23 + 8 228 546,56 + 44 871 000).

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

75. La société Autolib' peut prétendre aux intérêts au taux légal sur la somme de 66 078 216,80 euros à compter de la réception de sa demande indemnitaire par le SMAVM, dès lors que cette demande est survenue postérieurement au délai d'un mois suivant la résiliation de la convention prévue par l'article 61 de la convention du 25 février 2011. Il résulte de l'instruction que l'intéressée a formé une demande préalable datée du 25 septembre 2018. En l'absence de preuve de la date de réception de cette demande, il y a lieu de retenir celle du

18 octobre 2018, date à laquelle il résulte de l'instruction, en particulier du courrier de réponse du SMAVM du 27 novembre 2018, que le concédant avait reçu cette demande.

76. La société Autolib' peut également prétendre à la capitalisation des intérêts dus sur cette somme le 18 octobre 2019, date à laquelle un an d'intérêts était dû, et à chaque échéance annuelle.

Sur les frais du litige :

77. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SMAVM une somme de 8 000 euros à verser à la société Autolib' en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Autolib' la somme que le SMAVM demande sur ce fondement. Enfin, dès lors que les communes de Bagneux, Cachan, Gennevilliers, Malakoff, Montreuil et Villejuif n'auraient pas eu qualité pour former tierce opposition contre le jugement attaqué, leurs conclusions présentées sur ce même fondement sont irrecevables et doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1919348 du 12 décembre 2023 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : Le syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole (SMAVM) est condamné à verser à la société Autolib' une somme de 66 078 216,80 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2018 et de la capitalisation des intérêts le 18 octobre 2019 et à chaque échéance annuelle.

Article 3 : Le SMAVM versera la somme de 8 000 euros à la société Autolib' en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Autolib', au syndicat mixte Autolib' et Vélib' métropole, à la Ville de Paris et à la commune de Bagneux, première dénommée, pour toutes les communes ayant présenté des observations communes, à la commune de Versailles et à la commune de Fontenay-sous-Bois.

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Doumergue, présidente de chambre,

Mme Bruston, présidente-assesseure,

Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 février 2025.

La rapporteure,

M. SAINT-MACARY

La présidente,

M. DOUMERGUE

La greffière,

E. FERNANDO

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24PA00645 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA00645
Date de la décision : 21/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: Mme Marguerite SAINT-MACARY
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : SELARL CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-21;24pa00645 ?
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