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31/01/2025 | FRANCE | N°24PA01900

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 5ème chambre, 31 janvier 2025, 24PA01900


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 20 mars 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 2304833 du 6 novembre 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour :



Par une requête enregistrée le 25 avril 2024, M. B..., représenté par Me Si...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 20 mars 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 2304833 du 6 novembre 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 avril 2024, M. B..., représenté par Me Singh, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée ou familiale ", ou, à titre subsidiaire, " salarié ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'erreurs de fait ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ; le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ; cette décision est entachée d'une erreur de fait en mentionnant qu'il n'a présenté aucun contrat de travail ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours est dépourvue de base légale ; elle est entachée d'incompétence ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par une ordonnance du 26 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 octobre 2024 à 12h00.

Un mémoire du préfet de la Seine-Saint-Denis a été enregistré le 29 octobre 2024.

Par une décision du 21 mars 2024, la présidente de la cour administrative d'appel de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lellig, rapporteure ;

- et les observations de Me Singh, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien né le 15 avril 2003, fait appel du jugement du 6 novembre 2023 du tribunal administratif de Montreuil qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mars 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments soulevés par M. B..., ont suffisamment motivé leur jugement, en particulier leur réponse au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

3. En second lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le requérant ne peut donc utilement se prévaloir de la dénaturation des faits du dossier qui entacherait le jugement attaqué du tribunal administratif pour en demander l'annulation pour irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., entré en France en février 2019, a été confié aux services de l'aide sociale à compter du 15 juillet 2019, entre l'âge de seize ans et celui de dix-huit ans. Il a demandé, le 25 mars 2022, dans l'année suivant son dix-huitième anniversaire, un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... justifie avoir effectué un stage de formation " collecteur composteur - faiseur de terre " du 12 octobre 2020 au 6 février 2021 au sein du centre de formation continue de l'association Halage. Il a ensuite conclu avec cette association, organisme de formation professionnelle continue, un contrat de formation professionnelle de " collecteur composteur - faiseur de terre " du 6 avril 2021 au 23 juillet 2021. Durant cette formation, M. B... a obtenu le 30 avril 2021 un certificat d'aptitude à la conduite en sécurité des engins de chantier à proximité des réseaux. Par ailleurs, M. B... bénéficie, depuis le 16 mai 2022, d'un contrat à durée déterminée d'insertion à hauteur de 26 heures par semaine en qualité d'employé polyvalent des espaces verts au sein de l'association Halage. Il participe également depuis le 30 novembre 2022 à un stage de formation en " entretien courant du matériel des espaces verts " en vue de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle en qualité de " jardinier paysagiste ". Les différentes pièces versées au dossier témoignent du sérieux et de l'assiduité de M. B.... Par ailleurs, la cohérence de son parcours atteste du caractère réel et sérieux de sa formation et de sa volonté d'intégration professionnelle. Enfin, à la date de la décision contestée, il restait à M. B... trois mois de formation à effectuer en vue de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle agricole en qualité de " jardiner paysagiste ". Dans ces conditions, et quand bien même l'intéressé ne serait pas dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, le préfet de la Seine-Saint-Denis a, dans les circonstances de l'espèce, entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

6. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de l'intéressé, que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à M. B... une carte de séjour temporaire. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais d'instance :

7. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle par décision du 21 mars 2024. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Singh, avocat de M. B..., d'une somme de 1 500 euros, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2304833 du 6 novembre 2023 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 20 mars 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de titre de séjour de M. B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Singh une somme de 1 500 euros au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Barthez, président de chambre,

- Mme Milon, présidente assesseure,

- Mme Lellig, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 janvier 2025.

La rapporteure,

W. LELLIGLe président,

A. BARTHEZ

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24PA01900 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01900
Date de la décision : 31/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Wendy LELLIG
Rapporteur public ?: Mme DE PHILY
Avocat(s) : SINGH

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-31;24pa01900 ?
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