La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2024 | FRANCE | N°23PA05249

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 31 décembre 2024, 23PA05249


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Paris Heure a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les métaux précieux, les bijoux et les objets d'art, de collection et d'antiquité qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2015 au

31 décembre 2017 ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 1909016/2-1 du 1er juin 2021, ce tribunal a fait droit à sa demande.



Par un a

rrêt n° 21PA03755 du 10 novembre 2022, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le ministre de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Paris Heure a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les métaux précieux, les bijoux et les objets d'art, de collection et d'antiquité qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2015 au

31 décembre 2017 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1909016/2-1 du 1er juin 2021, ce tribunal a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 21PA03755 du 10 novembre 2022, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie contre ce jugement.

Par une décision n° 470249 du 12 décembre 2023 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur un pourvoi présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 6 juillet 2021, le 15 septembre 2022 et le 29 janvier 2024 le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1909016/2-1 du 1er juin 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de remettre à la charge de la société Paris Heure les impositions en litige.

Il soutient que les montres d'occasion que la société Paris Heure achète auprès de particuliers en vue de leur revente et dont la valeur est supérieure à 5 000 euros constituent des bijoux au sens du 2° du 1 de l'article 150 VI du code général des impôts, alors même qu'elles ne seraient pas constituées de métaux précieux, ainsi que des objets de collection au sens de ce même article, et entrent en conséquence dans le champ d'application de la taxe sur les métaux précieux.

Par des mémoires en défense enregistrés le 11 août 2021 et le 13 mars 2024, la société Paris Heure, représentée par Me Ohana, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- seules les montres d'une valeur supérieure à 5 000 euros et qui constituent des objets ouvragés, précieux par la matière ou par le travail, destinés à être portés à titre de parure, y compris lorsqu'ils ne sont pas composés de métaux précieux, constituent des bijoux relevant de la taxe en litige ;

- les montres qu'elle vend ne sont pas utilisées comme parures, comme il appartient à l'administration de l'établir, mais pour leur fonction initiale de montres.

Par un mémoire enregistré le 29 février 2024 M. A... B..., représenté par Me Mispelon, demande à la Cour :

1°) d'admettre son intervention au soutien de la société Paris Heure

2°) de rejeter la requête du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt à intervenir dans le litige ;

- le juge de cassation ne s'est pas prononcé sur la qualification des montres au regard de la définition qu'il a donnée des bijoux au sens de la taxe sur les métaux précieux ;

- une montre n'est pas une parure et ne peut être qualifiée de bijou compte tenu de sa fonction première.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique,

- les observations de Me Ohana pour la société Paris Heure,

- et les observations de Me Mispelon pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Paris Heure, qui exerce une activité d'achat et de revente de montres-bracelets de luxe d'occasion, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale l'a assujettie à des rappels de taxe sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d'art, de collection et d'antiquité au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, assortis de l'amende de 25 % prévue à l'article 1761 du code général des impôts en cas d'infraction aux articles 150 VI à 150 VM du même code. Par un arrêt n° 21PA03755 du 10 novembre 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie contre le jugement du 1er juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé la société Paris Heure de ces impositions, en droits et pénalités. Par une décision n° 470249 du 12 décembre 2023 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur un pourvoi présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Sur l'intervention de M. B... :

2. Est recevable à former une intervention devant le juge de l'impôt toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige. En l'espèce, eu égard à la nature et à l'objet du présent litige, M. B... justifie, par la nature de son activité professionnelle semblable à celle de la société Paris Heure, d'un intérêt de nature à le rendre recevable à intervenir devant le juge de l'impôt. Son intervention au soutien des conclusions de la société Paris Heure doit, dès lors, être admise.

Sur le bien-fondé des taxes en litige :

3. Aux termes d'une part de l'article 150 VI du code général des impôts : " I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices professionnels, sont soumises à une taxe forfaitaire dans les conditions prévues aux articles 150 VJ à 150 VM les cessions à titre onéreux ou les exportations, autres que temporaires, hors du territoire des Etats membres de l'Union européenne : / (...) 2° De bijoux, d'objets d'art, de collection ou d'antiquité. (...) ". Les bijoux, au sens et pour l'application de ces dispositions, s'entendent des objets ouvragés, précieux par la matière ou par le travail, destinés à être portés à titre de parure, y compris lorsqu'ils ne sont pas composés de métaux précieux.

4. Aux termes d'autre part de l'article 150 VJ du même code : " Sont exonérées de la taxe : (...) / 4° Les cessions ou les exportations des biens mentionnés au 2° du I de l'article 150 VI lorsque le prix de cession ou la valeur en douane n'excède pas 5 000 €. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 150 VK de ce code : " I. - La taxe est supportée par le vendeur ou l'exportateur. Elle est due, sous leur responsabilité, par l'intermédiaire établi fiscalement en France participant à la transaction ou, en l'absence d'intermédiaire, par l'acquéreur lorsque celui-ci est un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée établi en France ; dans les autres cas, elle est due par le vendeur ou l'exportateur. (...) ".

5. Il résulte de l'instruction, et notamment des termes de la proposition de rectification du 30 novembre 2018, que la totalité des acquisitions retenues par l'administration fiscale, effectuées par la société Paris Heure auprès de particuliers, concernent des montres d'occasion fabriquées par des marques prestigieuses, achetées à un prix compris entre 5 200 et 45 000 euros, et que ces montres, compte tenu de leurs caractéristiques, sont destinées à être portées à titre de parure. Ces montres constituent, dès lors, des bijoux au sens du 2° du I de l'article 150 VI du code général des impôts, quand bien même elles ne seraient pas composées de métaux précieux. Par suite, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour prononcer la décharge des droits de taxe sur les métaux précieux, les bijoux et les objets d'art, de collection et d'antiquité qui ont été réclamés à la société Paris Heure au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, ainsi que des pénalités correspondantes, le Tribunal a considéré que les opérations de cessions de montres en litige n'avaient pas porté sur des bijoux et que, par suite, elles n'entraient pas dans le champ d'application de ladite taxe.

6. Il appartient dès lors à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Paris Heure devant le tribunal administratif de Paris et la Cour.

Sur les autres moyens :

7. Dès lors que les cessions sur lesquelles a été appliquée la taxe en litige ont porté sur des montres qui sont toutes des bijoux au sens et pour l'application du 2° du I de l'article 150 VI du code général des impôts, la circonstance que lesdites montres ne constitueraient pas des objets de collection, au sens de ces mêmes dispositions, est sans incidence sur le bien-fondé de la taxe en litige.

8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête, que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, et que soient remises à la charge de la société Paris Heure les rappels de taxe sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d'art, de collection et d'antiquité au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017 dont le Tribunal a prononcé la décharge, ainsi que l'amende de 25 % prévue à l'article 1761 du code général des impôts.

Sur les frais de l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans le présent litige, la somme que la société Paris Heure demande en application de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de M. B... est admise.

Article 2 : Le jugement n° 1909016/2-1 du 1er juin 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 3 : Les rappels de taxe sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d'art, de collection et d'antiquité au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017 ainsi que l'amende de 25 % prévue à l'article 1761 du code général des impôts, dont le Tribunal a prononcé la décharge, sont remis à la charge de la société Paris Heure.

Article 4 : Les conclusions de la société Paris Heure présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics, à la société à responsabilité limitée Paris Heure et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Laforêt, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

B. AUVRAY

La greffière,

L. CHANALa République mande et ordonne au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA05249


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA05249
Date de la décision : 31/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : AVOCATS DSOB

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-31;23pa05249 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award