Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les salaires mis à sa charge au titre de l'année 2018.
Par un jugement n° 2211809/1 du 23 janvier 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 mars et 18 septembre 2024, la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine, représentée par la SCP Waquet, Farge, Hazan, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2211809/1 du 23 janvier 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses et des intérêts de retard correspondants ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la rémunération de son directeur général n'entre pas dans le champ de la taxe sur les salaires en vigueur jusqu'au 31 août 2018, dès lors qu'il n'est pas salarié et qu'il n'est pas affilié obligatoirement aux assurances sociales du régime général ;
- elle n'entre pas plus dans le champ de la taxe sur les salaires en vigueur à compter du 1er septembre 2018 dès lors qu'il n'est pas à la charge d'un régime obligatoire d'assurance maladie comme le prévoit l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 4 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Segretain,
- les conclusions de M. Perroy, rapporteur public,
- et les observations de Me Hazan, représentant la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine.
Considérant ce qui suit :
1. La Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle lui ont été assignés des rappels de taxe sur les salaires pour un montant en droits de 77 109 euros au titre de l'année 2018. La Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine relève appel du jugement du 23 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe litigieuse.
En ce qui concerne la période du 1er janvier au 31 août 2018 :
2. D'une part, aux termes de l'article 231 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige jusqu'au 31 août 2018 : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés (...) sont soumises à une taxe égale à 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale (...). Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés (...) / 3 a. Les conditions et modalités d'application du 1 sont fixées par décret. Il peut être prévu par ce décret des règles spéciales pour le calcul de la taxe sur les salaires en ce qui concerne certaines professions, notamment celles qui relèvent du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale. (...) ". Aux termes de l'article 53 bis de l'annexe III au même livre : " Doivent acquitter la taxe sur les salaires visée à l'article 231 du code général des impôts (...) les organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles énumérés ci-après : (...) Caisses de crédit agricole mutuel ; (...). "
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige : " I.- La contribution est assise sur le montant brut des traitements, indemnités, émoluments, salaires, allocations, pensions y compris les majorations et bonifications pour enfants, des rentes viagères autres que celles visées au 6 de l'article 158 du code général des impôts et des revenus tirés des activités exercées par les personnes mentionnées aux articles L. 311-2 et L. 311-3. (...) ". Aux termes de l'article L. 311-2 du même code, dans sa version applicable au litige : " Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat ".
4. La Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine, qui doit acquitter la taxe sur les salaires en vertu des dispositions précitées du code général des impôts et de l'annexe III à ce code, soutient que les rémunérations versées à son directeur général du 1er janvier au 31 août 2018 doivent être exclues de l'assiette de cette taxe. D'une part, il résulte des travaux parlementaires de l'article 13 de la loi du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013, dont est issu l'article 231 du code général des impôts dans sa version applicable, que le législateur a entendu rendre l'assiette de la taxe sur les salaires identique à celle de la contribution sociale généralisée, sous réserve des seules exceptions mentionnées à la première phrase du 1 de cet article 231. D'autre part, il ressort des dispositions combinées des articles L. 136-2 et L. 311-2 du code de la sécurité sociale que sont inclus dans l'assiette de la contribution sociale généralisée les revenus tirés des activités exercées par les personnes travaillant à quelque titre que ce soit pour un employeur, notamment comme mandataire social comme le précise l'article L. 311-3 du même code, quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat, le régime de sécurité sociale auquel ces personnes sont affiliées étant à cet égard sans incidence. Dans ces conditions, les revenus tirés de l'activité exercée par la personne travaillant à titre de mandataire social comme directeur général de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine du 1er janvier au 31 août 2018, dont la Caisse requérante ne fait au demeurant pas valoir qu'ils n'étaient alors pas soumis à la contribution sociale généralisée, entraient dans le champ de l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale, et par suite de l'article L. 136-2 du même code, et étaient dès lors soumis à la taxe sur les salaires en vertu de l'article 231 du code général des impôts au titre de cette période.
En ce qui concerne la période du 1er septembre au 31 décembre 2018 :
5. Aux termes de l'article 231 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige à compter du 1er septembre 2018 : " Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés sont soumises à une taxe au taux de 4,25 %. Les sommes prises en compte sont celles retenues pour la détermination de l'assiette de la contribution prévue à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale (...). Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés (...) ". Aux termes de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige : " Il est institué une contribution sociale sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement à laquelle sont assujettis : / 1° Les personnes physiques qui sont à la fois considérées comme domiciliées en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie (...) ". L'article L. 111-2-2 du même code dispose : " Sous réserve des traités et accords internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés et des règlements européens, sont affiliées à un régime obligatoire de sécurité sociale dans le cadre du présent code, quel que soit leur lieu de résidence, toutes les personnes : 1° Qui exercent sur le territoire français : a) Une activité pour le compte d'un ou de plusieurs employeurs, ayant ou non un établissement en France ; b) Une activité professionnelle non salariée ; (...) ".
6. Le directeur général de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine entre dans le champ du 1° de l'article L. 111-2-2 du code de la sécurité sociale au regard de la nature de son activité. Il est, en conséquence, affilié à un régime obligatoire de sécurité sociale en application de ces mêmes dispositions et, par suite, à la charge d'un régime obligatoire français d'assurance maladie au sens du 1° de l'article L. 136-1 du même code. Ses revenus d'activité perçus entre le 1er septembre et le 31 décembre 2018 étaient dès lors soumis à la contribution sociale généralisée et, par voie de conséquence, entraient dans le champ de la taxe sur les salaires due au titre de cette période.
7. Il résulte de ce qui précède que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par la requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Aquitaine
et au ministre chargé du budget et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction des vérifications nationales et internationales.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- Mme Bories, présidente assesseure,
- M. Segretain, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2024.
Le rapporteur,
A. SEGRETAINLa présidente,
S. VIDAL
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre chargé du budget et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA01428 2