Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée Meg Editique et système a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des intérêts de retard et de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour les périodes du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 et du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017.
Par un jugement n° 2004700 du 25 mai 2023 le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 18 juillet 2023 et le 9 novembre 2023, la société Meg Editique et système, représentée par Me Dillemann, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des intérêts de retard et de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour les périodes du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 et du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le taux de retard de 0,40 % par mois appliqué jusqu'au 13 décembre 2017 est bien supérieur au préjudice financier résultant du retard de paiement, ainsi qu'en atteste la circonstance que le législateur est intervenu pour réduire ce taux de moitié par la loi de finances rectificative pour 2017 ; il y a ainsi lieu d'appliquer le taux de 0,20 % par mois à l'ensemble des rectifications ;
- sa mauvaise foi n'est pas démontrée ; les retards de déclaration sont imputables aux difficultés financières qu'a connues la société et non à sa mauvaise foi ; sa bonne foi est attestée par les régularisations spontanées auxquelles elle a procédé ;
- le vérificateur n'avait émis aucune observation lors de la vérification menée en mai 2015 portant sur les périodes du 1er juillet 2011 au 30 juin 2014, ce qui vaut prise de position formelle sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;
- sa mauvaise foi ne saurait être davantage retenue en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déduite par anticipation.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 25 septembre et 21 novembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la société requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dubois ;
- les conclusions de Mme de Phily, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Dillemann, pour la société Meg Editique et système.
Considérant ce qui suit :
1. La société Meg Editique et système, qui exerce une activité de conseil en systèmes et logiciels informatiques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er juillet 2014 au 30 juin 2017. Par une proposition de rectification du 11 juillet 2018, l'administration fiscale lui a notifié, selon la procédure de rectification contradictoire de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis des intérêts de retard et de la majoration pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts. Les impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement le 15 novembre 2018 pour un montant de 571 853 euros. La réclamation formée le 12 décembre 2018 par la société relativement aux seuls intérêts de retard et pénalités pour manquement délibéré a été rejetée par une décision du 5 juin 2020. La société Meg Editique et système relève appel du jugement n° 2004700 du 25 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de décharge des intérêts de retard et des pénalités pour manquement délibéré mis à sa charge.
Sur les intérêts de retard :
2. Aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " I. - Toute créance de nature fiscale, dont l'établissement ou le recouvrement incombe aux administrations fiscales, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. A cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code. (...) ". Le taux de l'intérêt de retard, fixé à 0,40 % par mois par le III de cet article jusqu'au 31 décembre 2017, a été ramené à 0,20 % par mois par l'article 55 de la loi du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, dont le III précise que ce nouveau taux s'applique aux intérêts courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020.
3. D'une part, il résulte de l'instruction que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société Meg Editique et système ont été assortis des intérêts de retard au taux de 0,40 % par mois pour les intérêts courant à compter du 1er août 2016, date à laquelle ils ont commencé à courir, et au taux mensuel de 0,20 % pour ceux courant à compter du 1er janvier 2018, conformément aux dispositions citées au point précédent du III de l'article 55 de la loi du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017. Par suite, et ainsi que l'ont estimé les premiers juges, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle pouvait bénéficier, sur l'ensemble de la période, du taux légal de 0,20 %. D'autre part, si la société requérante soutient que le taux de 0,40 % appliqué pour la période courant du 1er août 2016 au 1er janvier 2018 serait supérieur au préjudice financier causé au Trésor public du fait du retard de paiement, le niveau de ce taux n'était toutefois pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié. Dès lors et à le supposer invoqué, le moyen tiré de ce que l'application d'un tel taux revêtait le caractère d'une sanction devant donner lieu à l'application rétroactive de la loi pénale plus douce, c'est-à-dire du taux de 0,20 %, doit être écarté.
Sur les pénalités de l'article 1729 du code général des impôts :
4. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
5. En premier lieu, pour justifier du caractère délibéré des omissions déclaratives relevées lors de la vérification de comptabilité, l'administration fiscale a relevé que la société Meg Editique et système, d'une part, avait déduit par anticipation la taxe sur la valeur ajoutée se rapportant à des prestations de service, alors qu'elle n'avait pas procédé au règlement des factures correspondantes émises par ses fournisseurs, d'autre part, s'était abstenue de reverser au Trésor des sommes au titre de la taxe sur la valeur ajoutée collectée et non déclarée. Ces omissions ont été réitérées sur plusieurs exercices et pour des montants importants, conduisant à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour des montants de 106 398 euros au titre de la période du 1er juillet 2015 au 31 décembre 2016 et 270 952 euros au titre de la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017. Si la société requérante, pour attester de sa bonne foi, fait valoir qu'elle a procédé à des régularisations de ses omissions déclaratives et informé l'administration de celles-ci par deux courriers des 23 mars et 23 décembre 2015, il résulte de l'instruction que ces régularisations n'ont été que partielles, ont porté sur des périodes bien antérieures à la date de ces courriers, notamment les années 2012 et 2014, et n'ont, pour certaines d'entre elles, été initiées que postérieurement à la réception par la société d'un avis de vérification. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration ne rapporterait pas la preuve qui lui incombe de ce que les inexactitudes et omissions qui lui sont reprochées présentaient un caractère délibéré.
6. En second lieu, la société requérante ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions des articles L. 80 B du livre des procédures fiscales, de ce que l'administration fiscale n'aurait pas remis en cause, lors d'un contrôle antérieur mené en juin 2015 portant sur une période différente, certaines omissions déclaratives ou déductions anticipées, cette absence de rectification ne constituant pas une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Meg Editique et système n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Meg Editique et système est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Meg Editique et système et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Barthez, président de chambre,
- M. Dubois, premier conseiller,
- Mme Lellig, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la cour, le 13 décembre 2024.
Le rapporteur,
J. DUBOIS Le président,
A. BARTHEZ
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA03209 2