Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'illégalité de la décision du 8 août 2017 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande tendant au bénéfice de congés bonifiés pour se rendre en Guadeloupe du 28 juin au 2 septembre 2018.
Par un jugement n° 2101277/6 du 10 mai 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté la requête de Mme B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 6 juillet 2023, et un mémoire enregistré le 19 juin 2024, Mme B..., représentée par Me Clavier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 10 mai 2023 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme totale de 20 000 euros en indemnisation de ses préjudices ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 8 août 2017 lui refusant le bénéfice d'un congé bonifié a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Melun devenu définitif ;
- cette illégalité fautive lui ouvre droit à réparation ;
- son préjudice financier s'élève à 5 000 euros, dont ses frais de transport pour la Guadeloupe à l'été 2018 pour un montant de 2 865 euros, des frais de garde d'enfants de 440 euros, ainsi que la perte de soixante-cinq jours de congés, de quinze jours compensateurs de congés payés et de la prime de vie chère de 40 % de son salaire ;
- son préjudice moral, joint à celui de son époux, doit être réparé à hauteur de 15 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que l'illégalité fautive de la décision du 8 août 2017 n'ouvre pas droit à réparation.
Par une ordonnance du 2 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le décret n°78-399 du 20 mars 1978 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bories,
- et les conclusions de M. Perroy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... B... épouse A... est surveillante pénitentiaire, affectée au centre pénitentiaire du sud-francilien. Elle a demandé à bénéficier d'un congé bonifié pour se rendre en Guadeloupe du 28 juin au 2 septembre 2018. Par une décision du 8 août 2017, le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande. L'exécution de cette décision a été suspendue par le juge des référés du tribunal administratif de Melun par une ordonnance n°1709748 du 9 janvier 2018. Par un jugement n°1709759 du 5 juillet 2019, le tribunal a annulé la décision du 8 août 2017. Par un jugement n°2101277 du 10 mai 2023, dont Mme B... relève appel, le tribunal a rejeté sa requête indemnitaire tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de la décision du 8 août 2017.
2. Il est constant que le tribunal administratif de Melun, par son jugement du 5 juillet 2019, devenu définitif, a annulé la décision du 8 août 2017 par laquelle le ministre de la justice a rejeté sa demande de congés bonifiés pour la période du 28 juin au 2 septembre 2018, compte tenu de l'erreur de fait dont elle était entachée. Une telle illégalité, fautive, est susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat à raison des préjudices causés de manière directe et certaine par la faute commise.
3. Toutefois, d'une part, l'exécution de la décision du 8 août 2017 ayant été suspendue par une ordonnance du juge des référés du 9 janvier 2018, elle n'a jamais produit d'effet. D'autre part, il résulte de l'instruction que l'administration pénitentiaire s'est conformée à l'injonction prononcée par le juge des référés et a réexaminé la demande de Mme B..., en lui proposant, par un courrier du 8 février 2018, trois périodes de départ en congés compatibles avec l'organisation du service dont elle dépend durant la période estivale 2018. L'intéressée a refusé ces propositions par un courrier du 8 mars 2018. Dans ces conditions, les préjudices invoqués par Mme B..., et tenant à la circonstance qu'elle n'a pas pu bénéficier d'un congé bonifié en Guadeloupe aux mois de juillet et août 2018, sont sans lien de causalité avec l'illégalité fautive de la décision du 8 août 2017.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa requête.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE:
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... épouse A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- Mme Bories, présidente assesseure,
- M. Magnard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 décembre 2024.
La rapporteure,
C. BORIES
La présidente,
S. VIDALLa greffière,
C. ABDI-OUAMRANE
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA02965 2