Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 16 juin 2023 par lequel le préfet de l'Aube lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2316825 du 21 aout 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 décembre 2023, M. A..., représenté par
Me Angliviel, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Aube du 16 juin 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai de
deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son avocat renonce au bénéficie de la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant, garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de l'Aube qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 novembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Saint-Macary a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant bangladais né le 9 février 1978 à Cumilla (Bangladesh), est entré en France le 17 mars 2022. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de
l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 novembre 2022, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 7 avril 2023. Par un arrêté du 16 juin 2023, le préfet de l'Aube lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".
3. La décision contestée, qui n'avait pas à viser l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, mentionne les éléments de fait propres à la situation personnelle de M. A... et vise les dispositions de l'article L. 611-1 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle fait application. Elle est, par suite, suffisamment motivée.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. A..., ressortissante bangladaise également, est suivie pour une hypertension artérielle, un diabète de type 2 et de l'asthme. Si le requérant soutient que ni le Ramipril, ni la Nicardipine, qui lui sont prescrits pour son hypertension, ne sont disponibles dans son pays d'origine, il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'ils ne seraient pas substituables, alors qu'il ressort de la liste des médicaments commercialisés au Bangladesh produite par l'intéressé que plusieurs traitements de l'hypertension y sont disponibles, de même, d'ailleurs, que des traitements du diabète et de l'asthme. Par ailleurs, en se prévalant de manière générale des défis auxquels est confronté le système de santé bangladais, M. A... ne justifie pas de ce que son épouse ne pourrait accéder de manière effective, dans son pays, à ces traitements. Dans ces conditions, aucun élément ne fait obstacle à ce que M. A... et son épouse reconstituent leur cellule familiale dans leur pays d'origine avec leurs deux enfants mineurs. Par suite, en prenant la décision contestée, le préfet de l'Aube n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de M. A....
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
7. Si M. A... soutient que la décision contestée aura pour effet d'interrompre la scolarité de ses enfants, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est pas même allégué qu'ils ne pourraient être scolarisés au Bangladesh. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
8. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du
tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, également être rejetées.
D É C I D E:
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de l'Aube.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Doumergue, présidente de chambre,
Mme Bruston, présidente-assesseure,
Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2024.
La rapporteure,
M. SAINT-MACARY
La présidente,
M. DOUMERGUE
La greffière,
E. FERNANDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA05329 2