Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle la ministre des armées a implicitement rejeté sa demande de protection fonctionnelle, d'enjoindre à la même ministre de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 19 450 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par une ordonnance du 26 août 2019, la présidente de la 5ème section du Tribunal administratif de Paris a transmis le dossier de la requête de M. D... au Tribunal administratif de Melun.
Par des mémoires, enregistrés au greffe du Tribunal administratif de Melun, M. D... a demandé, en dernier lieu, à ce tribunal d'annuler la décision du 18 octobre 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de protection fonctionnelle, cette décision se substituant à la décision implicite de rejet initialement attaquée, d'enjoindre à la même ministre de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 25 890 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1907735 du 16 décembre 2022, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 février 2023 et 12 avril 2024, M. D..., représenté par Me Maumont, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 décembre 2022 ;
2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 18 octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre à la même ministre de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 28 890 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée n'est pas motivée ;
- elle est entachée d'erreur de fait, d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation au regard des articles 6 quinquies et 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, sa situation justifiant qu'on lui accordât le bénéfice de la protection fonctionnelle pour des faits de harcèlement moral ;
- l'Etat a commis une faute tirée, soit de son inaction à faire cesser la situation de harcèlement dont il a été victime, soit de la faute personnelle de M. A..., son sous-directeur, non dépourvue de lien avec le service, consistant à lui avoir fait subir une situation de harcèlement moral ;
- cette faute lui a causé un préjudice financier qui peut être évalué à 4 890 euros, un préjudice moral qui peut être évalué à 15 000 euros, un trouble dans ses conditions d'existence qui peut être évalué à 4 000 euros et, enfin, un préjudice résultant du refus abusif de lui accorder la protection fonctionnelle qui peut être évalué à 5 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- dès lors que le requérant sollicite en appel l'allocation d'une indemnité d'un montant supérieur à celui demandé en première instance sans justifier d'une aggravation des préjudices invoqués, ses conclusions indemnitaires sont, dans cette mesure, nouvelles et, par suite, irrecevables ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté par le ministre des armées a été enregistré le 30 mai 2024, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, qui est intervenue, en dernier lieu, le 23 mai 2024, et n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,
- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Chalon, substituant Me Maumont, avocate de M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., attaché principal d'administration de l'Etat, a été affecté, du 2 avril 2018 au 31 juillet 2019, au ministère des armées en qualité de chef du bureau MPSRA (mission prévention et sécurité routières dans les armées) à la sous-direction des transports, de l'impression et de la reprographie relevant du service parisien de soutien de l'administration centrale (SPAC) avant d'être muté dans un emploi de chargé de mission auprès du sous-directeur du pilotage opérationnel au sein du SPAC. S'estimant victime, avant sa mutation, de harcèlement moral de la part de son sous-directeur, M. A..., l'intéressé a sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle et a introduit une demande préalable indemnitaire auprès de la ministre des armées par un courrier du 12 avril 2019, reçu le 17 avril suivant. Une décision implicite de rejet est née le 17 juin 2019 du silence gardé pendant plus de deux mois par l'administration sur cette demande. Par une décision du 18 octobre 2019, notifiée le 23 octobre suivant, la ministre des armées a expressément rejeté la demande de protection fonctionnelle de M. D.... Celui-ci fait appel du jugement du 16 décembre 2022 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, notamment, à l'annulation de la décision de la ministre des armées du 18 octobre 2019 et à ce que l'Etat lui verse une indemnité de 25 890 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir / (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. La décision par laquelle l'autorité administrative rejette la demande de protection fonctionnelle présentée par un agent public, qui doit être regardée comme refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, au sens des dispositions précitées de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, doit être motivée.
4. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Si M. D... fait valoir que cette décision ne reprend pas les " observations du service parisien de soutien de l'administration centrale (SPAC) du 12 juillet 2019 " ni les " observations de la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD) transmises le 17 juillet 2019 " qu'elle vise et que ces observations n'ont pas été jointes à cette décision, cette circonstance est sans incidence sur le caractère suffisant de sa motivation dès lors qu'en indiquant que " les éléments produits par l'intéressé à l'appui de sa demande [de protection fonctionnelle] ne permettent pas de présumer un quelconque harcèlement moral, et ce alors qu'il ressort des éléments du dossier que M. D... a manqué à son devoir de loyauté à l'égard de son supérieur hiérarchique direct ", la décision attaquée comporte une motivation en fait qui lui est propre. Par ailleurs, la motivation de la décision attaquée s'apprécie indépendamment du bien-fondé des motifs retenus par la ministre des armées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée n'est pas motivée doit être écarté.
5. En second lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel / (...) ". Aux termes de l'article 11 de cette loi : " I.- A raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, le fonctionnaire ou, le cas échéant, l'ancien fonctionnaire bénéficie, dans les conditions prévues au présent article, d'une protection organisée par la collectivité publique qui l'emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire / (...) / IV.- La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté / (...) ".
6. D'une part, les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 citées au point précédent établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis. La mise en œuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre. Il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.
7. D'autre part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.
8. Pour justifier qu'il aurait été victime d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral, M. D... soutient, d'abord, qu'il a fait l'objet de la part de M. A... d'un ordre illégal tendant à transporter une somme en espèces d'un montant de 3 300 euros qui avait été recouvrée de manière irrégulière par M. Kerloc'h, chargé des fonctions de chef de bureau par intérim, à l'occasion d'un congrès international sur la sécurité routière dans les forces armées organisé en France en 2017, puis conservée par la suite dans le coffre-fort de M. A.... Ce dernier lui a demandé de rapporter cette somme en mains propres au secrétaire de la commission européenne de sécurité routière dans les forces armées lors de sa venue au congrès international devant se tenir en 2018 en Belgique, la commission européenne de sécurité routière devant ensuite virer cette somme à l'agent comptable du ministère des armées pour régularisation. Toutefois, le seul fait qu'il ait fait l'objet d'un ordre de son supérieur hiérarchique direct, à le supposer illégal, et qu'il ait refusé d'obéir en indiquant dans ce cas préférer ne pas se rendre en Belgique pour le congrès international sur la sécurité routière dans les forces armées et que son ordre de mission a, en conséquence, été annulé, ne saurait établir qu'il aurait fait l'objet de représailles de la part de son sous-directeur, les pièces du dossier ne faisant d'ailleurs pas apparaître que le sous-directeur aurait désigné une autre personne pour représenter la France à ce congrès.
9. M. D... soutient, ensuite, faire l'objet de la part de M. A... d'une remise en cause injustifiée de son travail et d'annulations régulières de réunions, et lui reproche l'immixtion dans ses responsabilités à l'occasion de l'établissement d'un compte-rendu d'entretien professionnel d'une personne placée sous sa responsabilité hiérarchique et l'attribution de tâches ne relevant pas de son niveau. Toutefois, d'une part, s'agissant de la remise en cause de son travail, l'intéressé se borne à faire référence à un projet de projection des moyens itinérants de la MPSRA en outre-mer qui avait reçu un accueil favorable du sous-directeur le 23 mai 2018 mais qui a indiqué, le 24 octobre 2018, que le projet ne serait finalement pas financé en 2019 et devait, en conséquence, être classé, et à un projet relatif aux fiches emplois de nuisance des personnels des moyens itinérants du bureau pour lequel M. A... a demandé au requérant le 15 novembre 2018 de justifier d'éléments démontrant la présence d'amiante dans le bâtiment de travail des personnels alors, que, selon lui, il avait déjà signé les fiches emplois de nuisance du personnel le 16 janvier 2018. Ces seuls faits ne sauraient caractériser, au regard des pièces du dossier, une remise en cause injustifiée de son travail ou une obstruction injustifiée dans ses dossiers ou être regardés, en tout état de cause, comme excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. D'autre part, l'annulation de seulement deux réunions les 16 novembre et 10 décembre 2018 ne saurait être regardée par elle-même comme caractérisant un agissement constitutif d'un harcèlement moral. Enfin, outre qu'il n'établit pas s'être vu attribuer des tâches ne relevant pas de son niveau, en se bornant à produire un commentaire littéral apposé par le sous-directeur sur l'entretien professionnel d'un agent placé sous sa responsabilité dans lequel il indique notamment que rien n'est prévu en matière de formation pour cet agent ce qui ne correspond pas aux objectifs de la sous-direction, que rien n'est renseigné en matière de mobilité géographique ou fonctionnelle malgré la circonstance que le compte-rendu fait état d'un souhait d'évolution professionnelle et indique également que " vous avez signé le CRE avant même que je vous adresse mon retour sur le projet de CREP, alors que j'avais appelé votre attention sur mon souhait de pouvoir le vérifier avant que vous procédiez à l'entretien : vous n'avez donc pas tenu compte de ma consigne ", le requérant n'établit pas l'existence d'une immixtion injustifiée de la part de son supérieur hiérarchique dans ses fonctions.
10. M. D... soutient aussi qu'il aurait fait l'objet de la part de M. A... de propos virulents notamment lors de son refus de se conformer à l'ordre illégal de transporter des fonds publics, de propos humiliants et dénigrants, plus particulièrement lors de réunions devant ses collègues ou subordonnés, d'humiliations, d'une animosité personnelle, de tentatives de déstabilisation et des pressions. Toutefois, d'une part, si M. D... fait valoir sans être contredit que le 7 septembre 2018, lors d'un entretien avec le sous-directeur pour évoquer le transport de la somme de 3 300 euros en Belgique, ce dernier lui aurait demandé, face à son refus d'obéir à cet ordre, de sortir de son bureau en lui indiquant qu'il ne voulait plus le voir et de préparer sa demande de mutation, ce seul fait n'apparaît pas disproportionné eu égard au contexte dans lequel il a été rendu possible. D'autre part, si le requérant produit un courriel de M. A... du 6 janvier 2019 dans lequel celui-ci lui demande de corriger un de ses travaux sur la forme, ce courriel ne dénote aucune agressivité ou animosité et ne comporte aucune demande excessive ou sans lien avec les fonctions de l'intéressé. Enfin, M. D... produit un témoignage d'un de ses subordonnés, M. Kerloc'h, qui fait état notamment d'une dégradation morale du requérant et d'une pression psychologique exercée par le sous-directeur qui le fustige au cours de réunions publiques, l'infantilise et qui serait à l'origine de remarques déplacées. Toutefois, ce témoignage, rédigé en des termes très généraux, ne se réfère à aucun fait précis et n'est pas probant alors que le second témoignage produit par l'intéressé de l'adjudant Closse, un autre de ses subordonnés, indique que M. Kerloc'h était à l'origine du recouvrement irrégulier de la somme de 3 300 euros lorsqu'il exerçait la fonction de chef du bureau par intérim et fait état d'une relation conflictuelle avec M. A... avant son départ du service en octobre 2018 tout en indiquant que le climat du bureau est redevenu agréable à la venue de M. D... jusqu'à la dégradation des relations entre ce dernier et M. A..., suite aux difficultés de gestion de la somme d'argent litigieuse. Par ailleurs, le nouveau témoignage de l'adjudant Closse, produit en appel, n'est pas suffisamment circonstancié en se bornant à indiquer qu'il a été le " témoin (...) d'un comportement non professionnel et irrespectueux de M. A... à l'égard de M. D... ". En outre, si l'adjudant Closse fait état dans son nouveau témoignage de ce que, après la mutation du requérant, il a fait l'objet de représailles de la part de M. A... en raison, notamment, de sa loyauté avec M. D..., cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence dès lors qu'elle est sans rapport avec les faits de harcèlement moral dont M. D... estime avoir été la victime. Il en va de même de la circonstance que, par une décision du 12 septembre 2023, prise à la suite d'un recours administratif préalable obligatoire formé par l'adjudant Closse, le ministre des armées a placé celui-ci en congé de longue maladie d'une durée de six mois, pour une sixième et septième périodes, au titre d'une affection liée au service au motif que l'intéressé est " fondé à soutenir qu'il existe un lien direct et certain, mais non nécessairement exclusif, entre son [trouble anxio-dépressif] et l'exercice de ses fonctions [au sein du SPAC entre 2017 et 2018] ".
11. M. D... soutient en outre qu'aucun objectif professionnel ne lui a été assigné pour l'année 2018 alors que son entretien professionnel devait avoir lieu en février 2019. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment de la réponse du chef du SPAC au recours hiérarchique formé par l'intéressé contre son évaluation professionnelle au titre de l'année 2018, et n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté que, si le requérant a rejoint son poste en avril 2018 et que ses objectifs n'ont été fixés par écrit que le 4 décembre 2018 à titre de régularisation, lesdits objectifs faisaient partie de ceux qui lui ont été fixés oralement à la suite de sa prise de poste en avril 2018 et qu'un entretien relatif à ces objectifs a eu lieu le 4 décembre 2018, au cours duquel l'intéressé n'a formulé aucune réserve, ni aucune observation. Si celui-ci fait état d'un retard dans la notification de son compte-rendu d'entretien professionnel, ce seul fait, alors qu'il ressort des écritures même de l'intéressé que celui-ci a pu présenter ses observations sur ce compte-rendu, ne saurait caractériser un abus de pouvoir de la part de sa hiérarchie.
12. M. D... soutient, encore, que M. A... a exercé sur lui des pressions aux fins de mutation dans un poste de chargé de mission, sans responsabilité, sans encadrement et en sureffectif, auprès du sous-directeur du pilotage opérationnel, mutation ayant pris effet à compter du 1er août 2019. Toutefois, aucune des pièces du dossier ne permet d'établir de manière suffisamment probante l'existence des pressions alléguées, en particulier de la part de M. A..., dont aurait fait l'objet l'intéressé avant sa demande de mutation. Du reste, il ressort des pièces du dossier que la demande de mutation présentée par M. D... le 8 juillet 2019 est motivée par " une impossibilité [pour celui-ci] de continuer à exercer [ses] fonctions de chef de bureau en raison d'une rupture de communication et de confiance avec [son] sous-directeur ", ce qui ne saurait traduire par elle-même que la demande de mutation aurait résulté de pressions de la part de M. A.... M. D... allègue, par ailleurs, que cette mutation constitue une sanction disciplinaire déguisée dès lors qu'il a subi une rétrogradation de ses responsabilités, passant du groupe 1 au groupe 3, entraînant une perte de rémunération de près de 150 euros et que sa mutation a été avancée au 1er aout 2019 alors qu'elle devait intervenir un mois plus tard, le 2 septembre 2019, dans un poste non pérenne dont les objectifs associés sont finalement devenus caducs suite à la décision de la ministre des armées de dissoudre le SPAC et qu'il a ainsi été placé en sous-activité au cours de la période du 4 au 23 septembre 2019, soit durant dix-neuf jours, et que depuis la restructuration de son service, il n'arrive pas à trouver un emploi. Toutefois, outre qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que la mutation de l'intéressé a été faite à sa demande, les difficultés qu'il a pu rencontrer dans son nouveau poste, en particulier après la restructuration de son service, sont en elles-mêmes sans lien avec la situation de harcèlement de la part de son ancien sous-directeur dont il s'estime victime.
13. M. D... soutient, enfin, que la situation de harcèlement dont il s'estime victime a été médicalement constatée puisqu'il a été placé en arrêt de travail à plusieurs reprises en raison d'un trouble anxio-dépressif du 21 février 2019 au 27 février 2019, du 30 mars 2019 au 5 avril 2019 et du 12 juillet 2019 au 28 juillet 2019. Toutefois, si le certificat du docteur C... en date du 29 mars 2019, qui fait référence à un trouble anxio-dépressif " réactionnel à des soucis professionnels ", peut être regardé comme attestant d'une souffrance de M. D... au travail, cet élément ne suffit pas, par lui-même, à établir que son état de santé découlerait d'un harcèlement moral à son encontre.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'apporte aucun élément factuel susceptible de faire présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral à son égard et qu'en refusant de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, la ministre des armées ne s'est pas fondée sur des faits matériellement inexacts, n'a pas commis d'erreur d'appréciation, ni d'erreur de droit.
15. Dans ces conditions, les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant doivent être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
16. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D..., n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu par suite de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par celui-ci.
Sur les conclusions indemnitaires :
17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 15 que la situation de harcèlement moral dont s'estime victime M. D... n'est pas établie. Dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'Etat a commis une faute tirée de son inaction à faire cesser la situation de harcèlement dont il dit être la victime ou d'une faute personnelle, non dépourvue de tout lien avec le service, de la part de M. A... consistant dans une situation de harcèlement moral. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, les conclusions indemnitaires de M. D... ne peuvent qu'être rejetées.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre des armées et des anciens combattants.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,
B. AUVRAY
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre des armées et des anciens combattants en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA00641