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28/11/2024 | FRANCE | N°23PA00713

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 28 novembre 2024, 23PA00713


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la convention d'occupation domaniale à fin d'exercice d'une activité commerciale de vente de produits alimentaires conclue entre M. C... A... et la Ville de Paris le 26 février 2020, et de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 650 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de son éviction de l'emplacement en cause.



Par un jugement n° 2006682 du 16 décembre 2022, le

tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la convention d'occupation domaniale à fin d'exercice d'une activité commerciale de vente de produits alimentaires conclue entre M. C... A... et la Ville de Paris le 26 février 2020, et de condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 650 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de son éviction de l'emplacement en cause.

Par un jugement n° 2006682 du 16 décembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés les 19 février et 12 avril 2023,

Mme D... B..., représentée par Me Colmant, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2006682 du 16 décembre 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler convention d'occupation domaniale conclue le 26 février 2020 entre la Ville de Paris et M. C... A... ;

3°) de condamner la Ville de Paris à lui verser une somme de 650 000 euros en réparation du préjudice subi ;

4°) de mettre à la charge de la Ville de Paris la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable dès lors qu'elle n'est pas tardive ;

- le jugement attaqué est irrégulier car insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'omissions à statuer et d'une contradiction de motifs ;

- il est entaché d'erreurs de droit, d'une erreur de fait et d'erreurs manifestes d'appréciation au regard de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 et dès lors que la Ville de Paris n'a pas sollicité auprès de l'attributaire de la convention la communication de pièces justificatives.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2024, la Ville de Paris, représentée par

Me Falala conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

La requête a été communiquée à M. C... A... qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/123/CE du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'ordonnance n° 2017-582 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stéphane Diémert ;

- les conclusions de M. Jean-François Gobeill, rapporteur public ;

- et les observations de Me Colmant pour Mme B..., et de Me Falala pour la Ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a bénéficié d'une autorisation d'occuper à Paris (XVIème arrondissement) un emplacement situé sur la place du Trocadéro afin d'y exercer une activité commerciale de vente de produits alimentaires, délivrée le 11 janvier 2018 et pour la période du 1er janvier au 30 novembre 2018. En avril 2018, en application de l'ordonnance n° 2017-582 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques, la Ville de Paris a lancé une procédure d'appel à propositions pour l'attribution d'emplacements durables destinés à une exploitation économique sur le domaine public parisien, incluant notamment l'emplacement susmentionné. Mme B..., s'étant portée candidate, a reçu le 23 novembre 2018 un courrier l'informant que sa proposition n'avait pas été retenue. Après avoir, par un courrier du 26 décembre 2018 reçu le 14 janvier 2019, demandé à la Ville de Paris la communication des motifs du rejet de sa candidature, Mme B... a été informée de ce que son offre était moins diversifiée et moins qualitative que celle du candidat retenu, et que son projet avait obtenu la note de 58/90 et celui du candidat le mieux classé une note de 73/90, ce qui la classait ainsi en 5ème position sur les 13 offres reçues. Elle a alors demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de la convention d'occupation domaniale conclue entre M. C... A... et la Ville de Paris le

26 février 2020, et la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 650 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice. Par un jugement du 16 décembre 2022, dont Mme B... relève appel devant la Cour, le tribunal administratif de Paris a rejeté ces conclusions.

Sur l'irrégularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le tribunal administratif de Paris, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés par Mme B... à l'appui de ses moyens, a répondu de façon suffisamment motivée au point 6 de son jugement, notamment au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation de son dossier de candidature, au soutien duquel elle a fait valoir la circonstance que l'attributaire de la convention d'occupation domaniale n'a pas procédé à la commercialisation des produits dans les conditions présentées dans son dossier de candidature. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit donc être écarté.

3. En second lieu, si la requérante soutient que le jugement attaqué est entaché d'omissions à statuer dès lors que les premiers juges se seraient abstenus de se prononcer sur la question du kiosque et sur les moyens tirés de la méconnaissance des principes d'égalité de traitement entre les candidats et de transparence des procédures, d'une part, et ainsi que cela a été rappelé au point précédent, il n'appartient pas au tribunal administratif de répondre à tous les arguments présentés par Mme B.... Or, l'ensemble de son argumentaire autour de l'occupation du kiosque a été développé au soutien du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation soulevé devant les premiers juges. D'autre part, il ressort du point 3 du jugement attaqué que les premiers juges ont manifestement répondu au moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement entre les candidats. De troisième part, il ne ressort pas des écritures de première instance que Mme B... aurait explicitement, ou implicitement, soulevé le moyen tiré de la méconnaissance du principe de transparence des procédures. Dans ces circonstances, Mme B... ne peut utilement soutenir que le jugement attaqué est entaché d'omissions à statuer. Il y a lieu, par suite, d'écarter le moyen.

4. La requérante soutient enfin que le jugement attaqué est entaché d'erreurs de droit, d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation. Ces moyens tendent en réalité à critiquer, non la régularité du jugement, mais son bien-fondé, et seront examinés à ce titre.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. Aux termes de l'article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sauf dispositions législatives contraires, lorsque le titre mentionné à l'article L. 2122-1 permet à son titulaire d'occuper ou d'utiliser le domaine public en vue d'une exploitation économique, l'autorité compétente organise librement une procédure de sélection préalable présentant toutes les garanties d'impartialité et de transparence, et comportant des mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester. (...) ".

6. En premier lieu, Mme B... soutient que la procédure d'appel à proposition de la Ville de Paris est irrégulière au regard de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 instituant une procédure de mise en concurrence soumise à l'obligation de publicité dès lors qu'elle ne comportait pas une présentation précise des critères appréciés pour retenir une offre de candidature. Toutefois, il ressort des dispositions citées au point précédent, qui sont issues de l'ordonnance n° 2017-562 du

19 avril 2017 transposant ladite directive en droit interne et dont la requérante ne soutient pas que cette transposition serait incomplète ou incompatible avec les objectifs de la directive, que la procédure de sélection en matière de titre d'occupation domaniale permettant une exploitation commerciale est mise en œuvre librement par l'autorité compétente. Ainsi, et en tout état de cause, il n'appartenait pas à la Ville de Paris de procéder à une présentation extrêmement précise des critères de sélection, lesquels ont par ailleurs été mentionnés de manière détaillée dans la notice d'explication versée au dossier de première instance. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

7. En deuxième lieu, Mme B... soutient qu'il appartenait à la Ville de Paris de solliciter auprès de M. A..., attributaire de la convention en litige, la communication de justificatifs permettant d'apprécier la réalité de son projet. Si l'article 5.2.2 du règlement de consultation habilite la Ville de Paris à réclamer toute pièce qui lui serait nécessaire pour l'appréciation des offres, il ne ressort toutefois pas de l'instruction, et notamment de l'extrait du projet de M. A... tel que produit en première instance que la Ville de Paris aurait dû procéder à un contrôle de la capacité de l'intéressé à honorer la commercialisation des produits proposés dans les conditions précisées dans son offre. Par ailleurs, la circonstance, à supposer établie, que M. A... n'aurait pas ultérieurement procédé à cette commercialisation relève de l'exécution de la convention conclue entre la Ville de Paris et l'intéressé, et est donc sans incidence sur la régularité de la procédure d'attribution de l'emplacement en litige. Il y a lieu, par suite, d'écarter le moyen tiré de l'erreur de droit et de l'erreur de fait.

8. En dernier lieu, si Mme B... soutient que le jugement est entaché d'une contradiction de motifs en ce que les premiers juges ont retenu, d'une part, que son offre était moins diversifiée et qualitative que celle proposée par M. A..., et d'autre part, l'absence d'incidence sur la légalité de la convention du fait de l'absence de commercialisation de l'ensemble des produits présentés par M. A... dans son dossier de candidature, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que de tels motifs ne procèdent pas d'une contradiction dès lors que, comme que cela a été relevé au point précédent, la circonstance, à supposer établie, que M. A... n'aurait pas commercialisé l'ensemble des produits présentés dans son dossier de candidature relève du respect de ses engagements vis-à-vis de la Ville de Paris, et donc du contentieux de l'exécution de la convention, et non de la légalité de la procédure de sélection. Par suite, le moyen tiré de la contradiction de motif ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la convention d'occupation domaniale conclue le 26 février 2020 entre M. A... et la Ville de Paris. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'indemnisation.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme B..., qui succombe dans la présente instance, en puisse invoquer le bénéfice. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge le versement à la Ville de Paris de la somme que cette dernière réclame sur le même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Ville de Paris fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la Ville de Paris.

Copie en sera adressé à M. C... A....

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- M. Stéphane Diémert, président-assesseur,

- Mme Irène Jasmin-Sverdlin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 novembre 2024.

Le rapporteur,

S. DIÉMERTLe président,

I. LUBEN

La greffière,

C. POVSELa République mande et ordonne au préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00713


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00713
Date de la décision : 28/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. GOBEILL
Avocat(s) : FALALA

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-28;23pa00713 ?
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