La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/11/2024 | FRANCE | N°23PA02635

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 19 novembre 2024, 23PA02635


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 31 mars 2021 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé la société Media Presse à procéder à son licenciement pour motif disciplinaire et la décision implicite de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion rejetant son recours hiérarchique reçu le 2 juin 2021 contre cette décision.



Par un jugement n° 2126040/3-2 du 13 avril 2023, le tribunal administr

atif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 31 mars 2021 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé la société Media Presse à procéder à son licenciement pour motif disciplinaire et la décision implicite de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion rejetant son recours hiérarchique reçu le 2 juin 2021 contre cette décision.

Par un jugement n° 2126040/3-2 du 13 avril 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 14 juin 2023 et les 18 janvier, 14 février et 12 avril 2024, M. B..., représenté par Me Millet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 13 avril 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 31 mars 2021 de l'inspectrice du travail et la décision implicite de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion rejetant son recours hiérarchique reçu le 2 juin 2021 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande formée devant le tribunal administratif n'était pas tardive ;

- la décision du 31 mars 2021 a été signée par une autorité incompétente ;

- la matérialité des faits reprochés n'est pas établie dès lors que les faits mentionnés dans la pétition du 5 novembre 2020 ont finalement été démentis par douze des vingt-et-un signataires, que cette pétition procède d'une cabale menée contre lui par un délégué syndical avec lequel il entretient une relation conflictuelle ; en outre, la plupart des témoignages recueillis par la société Média Presse ont été écartés par l'inspectrice du travail eu égard à la valeur probante douteuse ; il produit trente-huit attestations réfutant les propos sexistes et racistes qui lui sont imputés ; à tout le moins, les signatures apposées sur la pétition n'ont pas été recueillies avec le consentement libre et éclairé de leurs auteurs ;

- les décisions contestées sont entachées d'une erreur d'appréciation dès lors que, eu égard à son ancienneté et à son absence d'antécédents disciplinaire, les seuls faits qu'il a effectivement commis ne présentent pas une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

- elles sont entachées d'un détournement de procédure dès lors que le véritable motif du licenciement est économique et non disciplinaire ; en tout état de cause, la concomitance entre la baisse du chiffre d'affaires de la société Média Presse et sa politique de réduction drastique de ses effectifs, d'une part, et l'engagement de la procédure de licenciement à son encontre d'autre part, génère un doute quant à la réalité des motifs invoqués par l'employeur et ce doute, en application des dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail, doit profiter au salarié.

Par des mémoires enregistrés les 18 janvier, 12 février et 4 mars 2024, la société Média Presse, représentée par Me Clerc conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris était irrecevable pour tardiveté, le délai de recours contentieux à l'encontre de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique étant expiré à la date de la saisine du tribunal ;

- la décision du 31 mars 2021 a été signée par une autorité compétente ;

- les décisions ne sont entachées d'aucune erreur de fait, les faits reprochés à l'intéressé ayant été confirmés par le rapport de contre-enquête établi dans le cadre du recours hiérarchique formé par M. B... et les trente-huit attestations nouvellement produites en appel n'ayant aucune valeur probante ;

- M. B... n'a pas été licencié pour un motif économique.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 février 2024, la ministre du travail, de la santé et des solidarités conclut au rejet de la requête.

Elle se réfère à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la décision n° 2019-89 du 28 octobre 2019 relative à la localisation et à la délimitation des unités de contrôle et des sections d'inspection du travail de l'unité départementale de Paris ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- les observations de Me Millet, représentant M. B...,

- et les observations de Me Clerc-Kaczmarek, représentant la société Média Presse.

Une note en délibéré a été présentée pour M. B... le 21 octobre 2024.

Une note en délibéré a été présentée pour la société Média Presse le 22 octobre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté le 24 décembre 1993 en qualité de porteur de presse par la société Delta Diffusion. Son contrat de travail a été transféré à la société Mediapost à compter du 1er octobre 2005, puis à la société Média Presse. Depuis le 6 avril 2016, M. B... occupait les fonctions de chargé de secteur portage sur le site du centre de Paris dans le 17ème arrondissement, puis à compter du 23 juin 2020, sur le site de Bercy dans le 12ème arrondissement de Paris. En outre, M. B... exerçait les mandats de délégué syndical et de représentant syndical au sein du comité social et économique (CSE). Par un courrier du 28 janvier 2021, reçu le 1er février 2021, la société Média Presse a sollicité de l'inspectrice du travail l'autorisation de le licencier pour motif disciplinaire. Par une décision du 31 mars 2021, l'inspectrice du travail de la section TR 36 de l'unité de contrôle transports de l'unité départementale de Paris a accordé l'autorisation sollicitée. Par une décision implicite, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion a rejeté le recours hiérarchique formé par M. B... contre cette décision. Par un jugement du 13 avril 2023, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la compétence du signataire de la décision du 31 mars 2021 :

2. Aux termes de l'article L. 2421-3 du code du travail : " Le licenciement envisagé par l'employeur d'un membre élu à la délégation du personnel au comité social et économique titulaire ou suppléant ou d'un représentant syndical au comité social et économique ou d'un représentant de proximité est soumis au comité social et économique, qui donne un avis sur le projet de licenciement dans les conditions prévues à la section 3 du chapitre II du titre Ier du livre III. (...) / La demande d'autorisation de licenciement est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans lequel le salarié est employé. Si la demande d'autorisation de licenciement repose sur un motif personnel, l'établissement s'entend comme le lieu de travail principal du salarié. (...) ".

3. Aux termes de l'article 1er de la décision du 28 octobre 2019 relative à la localisation et à la délimitation des unités de contrôle et des sections d'inspection du travail de l'unité départementale de Paris, publiée au recueil des actes administratifs spécial n° IDF-041-2019-10 du 30 octobre 2019 : " L'unité départementale de Paris comprend 13 unités de contrôle (...) composées de 128 sections d'inspection du travail (...). La répartition des compétences entre les sections d'inspection de l'unité départementale de Paris s'effectue selon les règles suivantes : (...) c) Chaque section a compétence pour le contrôle de tous les établissements de l'ensemble des secteurs professionnels au sein d'un territoire délimité par rues, à l'exception : des établissements de transports routiers relevant de la compétence des sections de l'UC Transports. Ces établissements sont ceux dont les activités relèvent des codes NAF suivants : (...) " autres activités de poste et de courrier (NAF 53. 20Z) (...). La compétence des sections de l'UC Transports s'étend à toutes les activités des entreprises de transports routiers exercées dans leur périmètre géographique, à l'exception de celles décrites aux points a) et b) ". Aux termes de l'article 2 de cette même décision : " La délimitation de l'unité de contrôle Transports est fixée comme suit : Le nombre de sections d'inspection du travail de l'UC Transports est fixé à 6. La délimitation de ces 6 sections d'inspection du travail est fixée comme suit : (...) Section TR -6 : " Cette section est compétente pour le contrôle, dans les 11ème, 12ème et 20ème arrondissements, de l'ensemble des établissements de transport routiers, (...), tels que définis à l'article 1er ".

4. Il résulte des dispositions précitées de la décision du 28 octobre 2019 de la directrice régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile de France, relative à la localisation et à la délimitation des unités de contrôle et des sections d'inspection du travail de l'unité départementale de Paris, que la sixième section de l'unité de contrôle Transports est compétente pour le contrôle de l'établissement de la société Média Presse qui exerce l'activité de portage de presse et qui est situé dans le 12ème arrondissement de Paris. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que par un arrêté n° 75-2021-03-01-004 du 1er mars 2021 de la responsable de l'unité départementale de Paris, de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Ile-de-France, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 75-2021-090 du 1er mars 2021, Mme C... D..., inspectrice du travail et signataire de la décision contestée, a été affectée à l'unité de contrôle relative aux transports, au sein de la 6ème section (TR 6) compétente. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 31 mars 2021 ne peut qu'être écarté.

Sur la matérialité des faits reprochés :

5. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

6. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la demande d'autorisation de licenciement en date du 28 janvier 2021, que la société Média Presse reprochait à M. B... une " déviance verbale " caractérisée par la prolifération de propos déplacés, humiliants à connotation raciste et sexuelle, une pression constante sur les porteurs de presse, l'intéressé agissant de manière excessivement autoritaire, intrusive et hostile envers les porteurs ainsi que la non-prise en compte des remarques des porteurs et l'absence de transmission à sa hiérarchie des anomalies qui lui étaient signalées. Il ressort de la lecture de la décision du 31 mars 2021, que pour accorder l'autorisation de licenciement sollicitée, l'inspectrice du travail, qui n'a examiné que le premier grief présenté par la société Média Presse, a considéré que si des témoignages étaient contradictoires et que le doute devait profiter au salarié concernant certains propos à caractère raciste ou sexuel, il ressortait toutefois de témoignages ou des déclarations de M. B... reconnaissant les faits que ce dernier avait tenu des propos à caractère raciste à l'encontre d'un salarié ainsi que des propos à connotation sexuelle à l'égard d'une salariée et à plusieurs reprises à l'égard d'une troisième salariée.

7. Il ressort des pièces du dossier qu'une pétition datée du 5 novembre 2020, signée par vingt-et-un salariés, porteurs ou agents polyvalents, du centre de Bercy sur un total de trente-et-un salariés, a été adressée à la direction de la société Média Presse dénonçant les agissements de M. B... depuis son arrivée dans le centre de Bercy en qualité de chargé de secteur portage, consistant à instaurer un " climat de suspicion et d'accusation sur des prétendus vols " alors qu'il s'agissait de simples erreurs, à faire des plaisanteries " douteuses, sexistes et parfois racistes ", à crier " sans raison ", à avoir une attitude provocatrice et irrespectueuse et à procéder à un " harcèlement téléphonique " envers des porteurs afin qu'ils se rendent sur site avant l'heure de leurs convocations, d'une part, et demandant à la direction de mettre fin à ces agissements à l'origine d'une altération de leurs conditions de travail et d'une atteinte à leur santé et à leur dignité, d'autre part. A la suite de cette pétition, l'employeur a procédé à une enquête interne menée par le responsable des ressources humaines, un membre du CSE et un préventeur en risques professionnels, consultant externe à la société, lesquels ont entendus, lors d'entretiens individuels, M. B... et trente-trois salariés, c'est-à-dire l'intégralité des salariés affectés sur le site de Bercy, et trois des supérieurs hiérarchiques de l'intéressé. Il ressort des résultats de cette enquête interne et de l'enquête contradictoire menée le 8 mars 2021 par l'inspectrice du travail, qui a auditionné huit salariés, que M. B... a appelé à plusieurs reprises l'un des porteurs, d'origine tunisienne, en utilisant le terme de " harissa " malgré que celui-ci lui avait demandé de cesser de le surnommer ainsi. Si M. B... a nié avoir tenu ces propos devant l'inspectrice du travail, il a reconnu ces agissements, le 4 décembre 2020, devant la cellule d'enquête interne. En outre, il ressort des déclarations devant la cellule d'enquête interne et devant l'inspectrice du travail le 19 mars 2021 d'une salariée, alors âgée de 80 ans et qui exerçait les fonctions de porteur et nourrissait un chat sur le site de Bercy, ainsi que des témoignages de deux salariés, ayant assisté aux faits, que M. B... l'a questionnée à plusieurs reprises, lorsqu'elle venait le saluer avant de prendre son service, sur la santé de sa chatte, faisant ainsi des allusions à connotation sexuelle à double sens alors même que l'intéressée lui avait fait part de sa gêne et qu'un salarié était intervenu en lui faisant remarquer le caractère déplacé de telles allusions. L'intéressée a déclaré que sa seule échappatoire était de se réfugier dans sa voiture pour éviter de côtoyer M. B.... Enfin, ce dernier a reconnu devant l'inspectrice du travail avoir prononcé des propos à connotation sexuelle à l'encontre d'une troisième salariée mais a précisé que cette dernière aurait ri de cette plaisanterie.

8. Pour contester ces faits, M. B... soutient que les signatures apposées sur la pétition du 5 novembre 2021 n'ont pas été recueillies avec le consentement libre et éclairé de l'ensemble des signataires, que certains signataires se sont par la suite rétractés, que cette pétition trouve son origine dans une rivalité syndicale et qu'il fait l'objet d'une cabale syndicale fomentée par un syndicat concurrent. Il ressort du tableau de synthèse des auditions établi dans le cadre de l'enquête interne à la société que huit des vingt-et-un signataires auditionnés ont admis ne pas avoir lu la pétition, l'avoir mal lue ou ne l'avoir lue que très rapidement et que cette pétition était portée par un représentant d'un syndicat concurrent à celui de M. B... dans un contexte de rivalité syndicale et/ou personnelle. Toutefois, les décisions en litige ne sont pas fondées sur cette pétition, qui a seulement eu pour effet la mise en œuvre d'une enquête interne à la société, mais sur les résultats de cette enquête interne et de l'enquête de l'inspectrice du travail menée contradictoirement. Dans ces conditions, les vices entachant la pétition du 5 novembre 2021 et la circonstance qu'un représentant d'un syndicat concurrent serait à l'origine de celle-ci sont sans incidence sur l'appréciation de la matérialité des faits commis par M. B.... Il ressort des déclarations recueillies dans le cadre de l'enquête interne à la société que si des signataires de la pétition ont déclaré ne pas avoir été témoins de propos sexistes ou racistes de la part de M. B..., ils ont cependant dénoncé son autoritarisme et son manque de respect à leur égard, agissements également dénoncés dans la pétition. Ainsi, et alors qu'en tout état de cause, ces témoignages n'ont pas été retenus pour établir la matérialité des propos sexistes et racistes reprochés à l'intéressé, ces salariés ne sauraient être regardés, comme le soutient le requérant, comme s'étant rétractés devant la cellule d'enquête interne. En outre, s'il est établi qu'une rivalité syndicale voire personnelle existait entre M. B... et un salarié de l'entreprise, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait été victime d'une cabale syndicale. Par ailleurs, M. B... produit trente-huit attestations rédigées par des collègues, dont trois femmes, qui mentionnent qu'il n'a jamais tenu de propos racistes ou sexistes. Toutefois, ainsi que le fait valoir sans être contredite la société Média Presse en défense, vingt-huit de ces attestations ont été établies par des salariés, notamment les trois collègues féminines évoquées, qui n'ont pas travaillé sur le site de Bercy avec l'intéressé ou, à tout le moins, qui n'ont jamais travaillé avec lui depuis sa promotion en tant que chargé de secteur portage, que ce soit sur le site du 17ème arrondissement ou celui de Bercy. Dans ces conditions, ces attestations, émanant de personnes qui n'étaient pas présentes au moment des faits reprochés à M. B..., ne sont pas de nature à remettre en cause la matérialité de ces faits.

9. Il ressort des points 7 et 8 que la matérialité des faits reprochés à M. B... est établie et que ces faits, qui sont fautifs, sont de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire à son endroit. Dans ces conditions, la seule circonstance que la société Média Presse ait connu une diminution de son chiffre d'affaires et une baisse importante de ses effectifs au titre de 2020, soit quelques mois avant les décisions en litige, ne saurait faire regarder la demande de licenciement de M. B... comme étant fondée sur un motif économique.

Sur la gravité des faits commis par M. B... :

10. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date des décisions contestées, M. B... disposait d'une ancienneté de vingt-sept ans dans la société Média Presse, que nombre de ses anciens et anciennes collègues ayant travaillé avec lui, avant qu'il ne soit promu chef de secteur portage, ont témoigné, ainsi qu'il a déjà été dit, des bonnes relations de travail qu'il entretenait avec ses collèges, qu'aucun écart de comportement antérieur n'a été signalé et qu'il n'avait pas d'antécédents disciplinaires. S'il ressort des témoignages recueillis par l'inspectrice du travail qu'une certaine familiarité de langage régnait entre les salariés du centre de Bercy, cette circonstance n'est pas de nature à minimiser la gravité des propos humiliants, à connotation raciste et sexiste, tenus par M. B... à l'égard de trois subordonnés, propos qui ont été réitérés malgré les protestations sans équivoque de deux salariés concernés et de l'intervention d'un témoin, et qui ont eu des répercussions sur les conditions de travail des intéressés, notamment sur celles de la personne âgée de 80 ans, particulièrement vulnérable du fait de son âge. Au vu de l'ensemble de ces éléments et eu égard aux fonctions de chef de secteur portage de l'intéressé, qui a bénéficié de formations relatives aux risques psychosociaux et au bien-être au travail les 19 décembre 2016 et 7 octobre 2020, les faits commis par M. B... sont, dans ce contexte, constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante de nature à justifier son licenciement.

11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Média Presse, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B... au titre des frais liés à l'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la ministre du travail, et de l'emploi et à la société Média Presse.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Menasseyre, présidente de la formation de jugement,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 novembre 2024.

La rapporteure,

V. Larsonnier La présidente,

A. Menasseyre

La greffière,

N. Couty

La République mande et ordonne à la ministre du travail et de l'emploi en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA02635 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02635
Date de la décision : 19/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MENASSEYRE
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : MILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-19;23pa02635 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award