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15/11/2024 | FRANCE | N°23PA01261

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 15 novembre 2024, 23PA01261


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme F... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté daté du 5 janvier 2021 par lequel la ministre de la culture a nommé Mme A... C... cheffe du département des antiquités orientales de l'établissement public du musée du Louvre, à compter du 11 janvier 2021.



Par un jugement n° 2104595 du 26 janvier 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et des mémoires, enregistrés les 27 mars 2023, 4 juin 2023, 31 juillet 2023, 5 avril 2024 et 26 avril 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté daté du 5 janvier 2021 par lequel la ministre de la culture a nommé Mme A... C... cheffe du département des antiquités orientales de l'établissement public du musée du Louvre, à compter du 11 janvier 2021.

Par un jugement n° 2104595 du 26 janvier 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 27 mars 2023, 4 juin 2023, 31 juillet 2023, 5 avril 2024 et 26 avril 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, Mme D..., représentée par Me Crusoé, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 26 janvier 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté daté du 5 janvier 2021 par lequel la ministre de la culture a nommé Mme A... C... cheffe du département des antiquités orientales de l'établissement public du musée du Louvre, à compter du 11 janvier 2021 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas démontré que le jugement contesté aurait été régulièrement signé ;

- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

- la décision par laquelle la candidature de Mme C... a été retenue a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 1er du décret n° 86-1370 du 30 décembre 1986 et est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît le principe d'égal accès à l'emploi public.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2024, la ministre de la culture conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du patrimoine ;

- le décret n° 86-1370 du 30 décembre 1986 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le décret n° 2009-1393 du 11 novembre 2009 ;

- le décret n° 2013-788 du 28 août 2013 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Crusoé, représentant Mme D....

Une note en délibéré, enregistrée le 30 octobre 2024, a été présentée pour Mme D... et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., conservatrice en chef du patrimoine, exerçant les fonctions de directrice des musées de Châlons-en-Champagne, a fait acte de candidature, le 5 septembre 2020, à l'emploi de cheffe du département des antiquités orientales de l'établissement public du musée du Louvre. Par un arrêté de la ministre de la culture du 5 janvier 2021, Mme A... C... a été nommée à ce poste à compter du 11 janvier 2021. Le recours gracieux exercé par Mme D... contre cette décision a été rejeté. Par la présente requête, Mme D... relève régulièrement appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette nomination.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement contesté a été signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative qui dispose que " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement, " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions (...) ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : 1° (...) les directeurs d'administration centrale (...) ".

4. D'une part, en application du décret n° 92-1338 du 22 décembre 1991, le musée du Louvre est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de la culture. Aux termes de l'article 1er du décret n° 2009-1393 du 11 novembre 2009, l'administration centrale du ministère de la culture comprend notamment la direction générale des patrimoines et de l'architecture et aux termes de l'article 3 de ce décret, cette direction contribue, pour ce qui la concerne, à la politique et à la gestion des ressources humaines et exerce la tutelle des organismes relevant de son périmètre. D'autre part, l'arrêté attaqué du 5 janvier 2021 a été signé par M. E... B..., qui a été nommé directeur général des patrimoines par un décret du 14 novembre 2018 publié au Journal officiel de la République française du 15 novembre 2018 et tenait sa compétence du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement pour signer les nominations aux emplois de chef de grand département des musées nationaux, tels que définis par les dispositions des articles R. 421-2 et R. 422-2 du code du patrimoine, auquel appartient le département des antiquités orientales du musée du Louvre. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit ainsi être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 442-3 du code du patrimoine : " Les grands départements sont dirigés par des professionnels, au sens de l'article L. 442-8, nommés dans les conditions définies à l'article 1er du décret n° 86-1370 du 30 décembre 1986 fixant les dispositions statutaires applicables à certains emplois de la direction générale des patrimoines et de l'architecture. Ils portent le titre de chef de grand département. " Aux termes de l'article L. 442-8 du même code : " Les activités scientifiques des musées de France sont assurées sous la responsabilité de professionnels présentant des qualifications définies par décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 86-1370 du 30 décembre 1986 fixant les dispositions statutaires applicables à certains emplois de la direction générale des patrimoines : " Peuvent être nommés à l'emploi de responsable de musée national ou de musée classé les membres du corps de la conservation des musées de France et les fonctionnaires détachés dans ce corps. / Peuvent être nommés à l'emploi de chef de grand département des musées nationaux, des professionnels au sens de l'article 6 de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, disposant d'une expérience au moins égale à celle des conservateurs en chef du patrimoine. / Sans préjudice des dispositions particulières aux musées nationaux ayant le statut d'établissement public, ces chefs de grand département sont nommés pour une durée de trois ans renouvelable par arrêté du ministre chargé de la culture. ". Aux termes de l'article 2 du décret n° 2013-788 du 28 août 2013 portant statut particulier du corps des conservateurs du patrimoine : " Les conservateurs du patrimoine exercent des responsabilités scientifiques et techniques visant notamment à inventorier, récoler, étudier, classer, conserver, entretenir, enrichir, mettre en valeur et faire connaître le patrimoine. Ils participent à la conception et à la mise en œuvre des politiques publiques dans ces domaines. Ils peuvent être chargés de missions de recherche, de publication et d'enseignement ainsi que de la conception et de la direction de projets de conservation-restauration de biens culturels et de présentation au public de tels biens. / Ils exercent notamment leurs fonctions dans des services déconcentrés, des services de l'administration centrale, des services à compétence nationale ou des établissements publics. / Ils peuvent se voir confier des missions d'expertise scientifique, de contrôle scientifique et technique ou d'appui administratif portant sur l'ensemble du territoire ou sur une zone géographique déterminée. / Ils ont vocation à exercer des fonctions de direction des établissements ou services assurant les missions mentionnées au premier alinéa du présent article. ". Et aux termes de l'article 4 du même décret : " Les conservateurs en chef et les conservateurs généraux du patrimoine peuvent, en outre, être chargés des fonctions d'encadrement supérieur, de coordination ainsi que de conseils ou d'études comportant des responsabilités particulières. Ils peuvent être chargés, par arrêté du ministre de la culture, de missions d'inspection générale. ".

6. D'une part, il ne résulte pas des dispositions précitées, en particulier celles de l'article 1er du décret du 30 décembre 1986, qui ne retiennent pas, comme condition pour accéder à l'emploi de chef de grand département d'un musée national, l'expérience acquise en qualité de conservateur en chef, mais seulement l'expérience minimale requise pour accéder à un tel grade, que les emplois de chef de grand département des musées nationaux ne puissent être occupés que par des conservateurs du patrimoine ayant atteint le grade de conservateur en chef. La circonstance que Mme C... ait été nommée dans ce grade à compter du 1er janvier 2021 par un arrêté du 28 juin 2021 est par suite inopérant et le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'ensemble des documents relatifs à la procédure de sélection des candidats à l'emploi de chef du département des antiquités orientales que Mme C..., titulaire d'un doctorat en histoire de l'art et archéologie obtenu après un cursus suivi en archéologie orientale, a occupé des fonctions de collaboratrice scientifique et technique au sein du département des antiquités orientales en 2006 et 2007 avant de débuter sa carrière de conservatrice au sein de l'institut national du patrimoine et exercé, dans le cadre d'une mobilité, les fonctions de conseillère pour les musées en qualité d'adjointe du chef de service au sein de la direction régionale des affaires culturelles

d'Ile-de-France. Préalablement à sa nomination, elle exerçait la fonction de conservateur des collections mésopotamiennes du musée du Louvre depuis 2011, cette fonction lui conférant une expertise et une expérience certaine dans le domaine des antiquités orientales. Elle a également occupé des fonctions de conception, de pilotage de projets, en particulier celui de la rénovation du musée de Mossoul et a exercé des fonctions d'encadrement notamment à cette occasion ou en assurant le commissariat d'expositions en France au Louvre-Lens, en 2016 et en 2018 et à l'étranger en 2020, contrairement à ce que soutient Mme D.... Au travers de ce parcours, elle a ainsi acquis une connaissance approfondie du fonctionnement de l'établissement public du Louvre tant sur le plan administratif et financier que dans sa dimension culturelle. Mme C... a par ailleurs participé à des fouilles archéologiques en Irak, en Arabie Saoudite et en Ouzbékistan entre 2012 et 2015. Elle dispense des enseignements en France et à l'étranger depuis 2007, en particulier en archéologie orientale au sein de l'école du Louvre et participe à des travaux de recherches, son expertise en antiquité orientale étant reconnue par ses diverses publications et sa participation à des colloques ou conférences. Dans ces conditions, quand bien même Mme D... peut se prévaloir de son grade de conservatrice du patrimoine en chef et de compétences scientifiques et managériales certaines, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en retenant que Mme C... disposait d'une expérience minimale égale à celle d'un conservateur en chef du patrimoine compte tenu de son parcours professionnel et en la nommant au poste de cheffe du département des antiquités orientales du musée du Louvre, la ministre de la culture ait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ou de droit.

8. En dernier lieu, Mme D... fait valoir que le principe d'égal accès à un emploi public a été méconnu dans la mesure où Mme C... a présenté un projet de service qui n'était pas exigé pour candidater et qui contenait des informations nécessairement recueillies à l'occasion de ses précédentes fonctions au Louvre, la présentation de ce projet ayant été déterminante pour retenir sa candidature ainsi qu'il ressort d'un courriel du président du Louvre du 14 décembre 2020. Mme D... ne conteste pas l'impartialité du jury de sélection qui ne comprenait au demeurant aucun agent du département des antiquités orientales du musée et qui a apprécié les mérites respectifs des candidats à partir de huit critères-clés tels que notamment le parcours de formation, l'expertise dans le domaine d'intervention des antiquités orientales, les compétences techniques, scientifiques et managériales ou encore l'expérience professionnelle et la motivation. En l'absence de dispositions législatives ou règlementaires fixant, de manière limitative, la liste des pièces constitutives du dossier de candidature au poste de directeur de grand département des musées nationaux, il était loisible aux candidats de communiquer aux membres du jury de sélection les documents qu'ils estimaient utiles à leur candidature. Par suite, Mme C... a pu joindre ce projet de service qui était nécessairement enrichi de son expérience professionnelle au sein du musée du Louvre. Ce projet qui n'a pas été le seul élément pris en compte pour apprécier sa candidature, compte tenu de la grille de critères-clés apprécié par le jury de sélection, a ainsi été présenté en complément de sa lettre de motivation à occuper ce poste en lui permettant d'exposer plus longuement les enjeux de ce département des antiquités orientales, les orientations du service qu'elle entendait mettre en œuvre et les moyens venant à leur soutien. Toutefois, les autres candidats n'ont pas été privés d'exposer leurs motivations respectives par écrit ou oralement à l'occasion de leurs entretiens respectifs avec le jury de sélection. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que la présentation du projet de service ait constitué un critère distinct pris en compte indépendamment des critères mentionnés, alors qu'il ressort des comptes-rendus d'entretien que la quotation attribuée à Mme C... au titre de l'expérience professionnelle était supérieure à celle de Mme D... et a pu être retenue pour départager leurs candidatures, qui, au terme des entretiens avec le jury de sélection, avaient obtenu la même quotation globale. Par suite, il ne ressort pas de cette seule circonstance que le principe d'égal accès aux emplois publics aurait été méconnu. En dernier lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le directeur des patrimoines, qui a soumis la proposition faite par le jury de sélection au ministre, ait à cette occasion exercé une influence dans le choix de Mme C....

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation et celles tenant aux frais liés à l'instance doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... D... et à la ministre de la culture.

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Lemaire, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 15 novembre 2024.

La rapporteure,

C. LORIN

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA01261


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01261
Date de la décision : 15/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : AARPI ANDOTTE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-15;23pa01261 ?
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