Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de sa reconduite et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement no 2217099 du 20 novembre 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 20 décembre 2023, M. C..., représenté par Me Carro, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil no 2217099 du 20 novembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 octobre 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour a été prise en violation des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en considérant que le requérant représentait une menace à l'ordre public, sans prendre en compte sa vie privée et familiale ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision d'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour qui la fonde ;
- cette décision a été prise en violation des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision de refus de départ volontaire est insuffisamment motivée ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant interdiction de retour est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision a été prise en violation des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 25 octobre 2022, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée le 9 février 2022 par M. C..., ressortissant camerounais né le 5 mai 1986, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de sa reconduite et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par un jugement n° 2217099 du 20 novembre 2023 dont le requérant relève appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la requête présentée par M. C... tendant à l'annulation de cet arrêté.
En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de séjour :
2. D'une part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " Enfin, selon l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire (...) ".
4. M. C... soutient qu'il est entré en France le 7 septembre 2015 sous couvert d'un visa de court séjour, qu'il y réside depuis lors et y est bien intégré, qu'il vit avec une compatriote titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valide jusqu'au 27 juillet 2023, le couple ayant donné naissance à une fille le 14 septembre 2018 et s'étant déclaré uni par un pacte civil de solidarité le 13 février 2020. Le requérant fait également valoir qu'il s'occupe des trois enfants français de sa compagne, nés respectivement le 8 mars 2009, le 31 août 2011 et le 25 juillet 2012. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, qui est sans emploi, contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille et des enfants de sa compagne. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. C... a fait l'objet de deux signalements sur le fichier de traitement d'antécédents judiciaires pour des infractions commises le 9 septembre 2020 de vol et violence aggravée par trois circonstances, suivie d'incapacité n'excédant pas 8 jours, ces infractions étant liées à une plainte déposée par sa compagne. Si M. C... fait valoir que ces faits n'ont donné lieu à aucune condamnation, que sa compagne a retiré sa plainte et qu'il n'a commis aucune autre infraction postérieurement à celles-ci, il est constant que le requérant ne conteste pas la matérialité des faits qui lui sont reprochés, alors, au demeurant, que l'attestation a été rédigée par sa compagne postérieurement à l'édiction de l'arrêté litigieux. Il suit de là que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de l'absence de contribution à l'entretien et à l'éducation de sa fille et des enfants français de sa compagne et des faits constitutifs d'infractions commis par M. C..., le préfet de la Seine-Saint-Denis a pu rejeter la demande d'admission exceptionnelle au séjour du requérant, sans méconnaître les stipulations et dispositions citées aux points 2 et 3, ni entacher sa décision d'une erreur manifeste de ses conséquences sur la situation de l'intéressé.
En ce qui concerne la légalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français :
5. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés, d'une part, de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de ce que ladite décision aurait été prise en violation des articles L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés, le requérant ne pouvant utilement, du reste, invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la décision d'obligation de quitter le territoire français.
En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
6. En premier lieu, la décision attaquée mentionne les stipulations et dispositions qui en constituent le fondement et est motivée par la menace à l'ordre public que représente le requérant. En conséquence, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision sera écarté.
7. En second lieu, l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " (...) l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) ".
8. Comme cela a été exposé au point 4, le comportement de M. C... est constitutif d'une menace pour l'ordre public. Par suite, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
9. En premier lieu, le requérant n'établissant pas que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et lui refusant un délai de départ volontaire seraient illégales, l'exception d'illégalité de ces décisions soulevées à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans doit être écartée.
10. En deuxième lieu, la décision attaquée vise l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique, notamment, que le requérant est uni par un pacte civil de solidarité avec une compatriote en situation régulière, père d'une enfant mineure âgée de 4 ans mais qu'il ne justifie d'aucun obstacle l'empêchant de mener une vie privée et familiale normale au Cameroun et qu'il est connu des services de police pour avoir commis des infractions. Elle comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
11. En troisième lieu, M. C..., qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, n'a justifié d'aucune circonstance humanitaire faisant obstacle au prononcé d'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français. Pour fixer à deux ans la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à l'encontre de M. C..., le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur le fait que le requérant ne justifiait pas de l'ancienneté de liens personnels et familiaux en France et que son comportement constituait une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, au regard de ce qui a été dit ci-dessus, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en fixant à deux ans la durée de cette interdiction.
12. En dernier lieu, compte tenu des motifs exposés au point 4 ci-dessus, les moyens tirés d'une méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un délai de deux ans sur la situation personnelle de M. C... ne pourront qu'être écartés.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation, d'injonction tout comme celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- M. Stéphane Diémert, président-assesseur,
- Mme Irène Jasmin-Sverdlin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2024.
La rapporteure,
I. D...Le président,
I. LUBEN
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA05294