La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/10/2024 | FRANCE | N°23PA03310

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 21 octobre 2024, 23PA03310


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision implicite par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé contre la délibération du 25 mars 2022 de la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française rejetant sa demande d'autorisation préalable à fin d'accéder à une f

ormation en vue d'acquérir l'aptitude professionnelle pour l'exercice des fonctions d'agent privé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision implicite par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé contre la délibération du 25 mars 2022 de la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française rejetant sa demande d'autorisation préalable à fin d'accéder à une formation en vue d'acquérir l'aptitude professionnelle pour l'exercice des fonctions d'agent privé de sécurité.

Par un jugement n° 2200439 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 juillet 2023 et le 17 juillet 2024, M. A..., représenté par Me Nougaro, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 mai 2023 du tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'annuler la décision implicite résultant du silence gardé par la commission nationale d'agrément et de contrôle du conseil national des activités privées de sécurité sur son recours administratif préalable obligatoire formé contre la délibération du 25 mars 2022 de la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française ;

3°) de mettre à la charge du conseil national des activités privées de sécurité la somme de 300 000 F CFP (2 515 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'il n'est pas justifié de la nature des fichiers qui ont été consultés dans le cadre de l'enquête administrative et que ne sont visés par cette décision ni l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ni les éléments permettant de s'assurer de ce que la consultation de ces fichiers a été réalisée par un agent spécialement habilité par le représentant de l'Etat territorialement compétent ; ce vice de procédure est de nature à porter atteinte aux droits de la défense, au principe de liberté d'accès aux documents administratifs ainsi qu'à l'obligation d'information de l'administration vis-à-vis des usagers ;

- la décision contestée ne pouvait légalement se fonder sur le jugement du 11 mars 2022 du tribunal correctionnel de Papeete qui n'était pas définitif ;

- la commission nationale d'agrément et de contrôle du conseil national des activités privées de sécurité ne pouvait tenir pour établis des faits qui n'avaient pas fait l'objet de décision définitive du juge pénal sans méconnaître la présomption d'innocence ;

- ces faits ne pouvaient, dans ces conditions, être regardés comme s'imposant au juge administratif ;

- la matérialité des faits qui lui étaient reprochés a été remise en cause par le jugement du 11 mars 2022 du tribunal correctionnel de Papeete qui l'a relaxé d'une partie de ces faits et par l'arrêt de la cour d'appel de Papeete du 15 septembre 2022 qui a ordonné l'exclusion au bulletin n° 2 du casier judiciaire de sa condamnation prononcée par le tribunal correctionnel de Papeete ;

- en considérant que la relaxe prononcée par le tribunal correctionnel de Papeete et l'exclusion d'inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire n'étaient pas de nature à remettre en cause la matérialité des faits qui lui étaient reprochés au motif que seuls les faits reconnus par le juge pénal s'imposaient à eux, les premiers juges ont méconnu le principe de la présomption d'innocence ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que, s'il a connu des difficultés personnelles en 2021, il a toujours fait preuve d'un véritable engagement et investissement sur le plan professionnel et que les faits reprochés sont isolés.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 juin 2024, le conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me Claisse, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 500 euros soit mis à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 9 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2022-448 du 30 mars 2022 ;

- le décret n° 2022-449 du 30 mars 2022 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,

- et les observations de Me Coquillon, représentant le conseil national des activités privées de sécurité.

Considérant ce qui suit :

1. Par une demande du 28 février 2022, M. A... a sollicité auprès de la délégation territoriale de Polynésie française du conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) la délivrance d'une autorisation à fin d'accéder à une formation en vue d'acquérir l'aptitude professionnelle pour l'exercice des fonctions d'agent privé de sécurité. Par une délibération du 25 mars 2022, la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française a rejeté sa demande. Par une lettre en date du 20 mai 2022, reçue le 8 juin 2022, M. A... a saisi la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS d'un recours administratif qui a été implicitement rejeté. Par un jugement du 9 mai 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la nature du recours administratif exercé par M. A... :

2. Aux termes de l'article 8 du décret du 30 mars 2022 relatif aux modalités d'organisation, de fonctionnement et d'exercice des missions du Conseil national des activités privées de sécurité : " (...) Le présent décret entre en vigueur le 1er mai 2022, à l'exception des dispositions de la section 2 du chapitre II du titre III du livre VI du code de la sécurité intérieure, dans leur rédaction résultant du présent décret, qui sont applicables à compter du 1er septembre 2022. / Les recours administratifs préalables formés devant la Commission nationale d'agrément et de contrôle à l'encontre des décisions des commissions d'agrément et de contrôle territorialement compétentes intervenues avant le 1er mai 2022 restent régis par les dispositions du titre III du livre VI du code de la sécurité intérieure dans leur rédaction antérieure au présent décret. (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 633-3 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 30 mars 2022 relative aux modalités d'organisation, de fonctionnement et d'exercice des missions du conseil national des activités privées de sécurité et du décret du 30 mars 2022, et qui est désormais abrogé : " Tout recours contentieux formé par une personne physique ou morale à l'encontre d'actes pris par une commission d'agrément et de contrôle est précédé d'un recours administratif préalable devant la Commission nationale d'agrément et de contrôle, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux ".

4. L'institution d'un recours administratif, préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale. Elle est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité, qu'elle soit expresse ou implicite.

5. La délibération du 25 mars 2022 de la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française rejetant la demande de M. A... étant intervenue avant le 1er mai 2022, il résulte des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 30 mars 2022 que la situation de M. A... est régie par les dispositions de l'article L. 633-3 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 30 mars 2022 et de ce décret et que, par suite, son recours administratif formé le 8 juin 2022 à l'encontre de cette délibération constitue un recours administratif préalable obligatoire, ce qui au demeurant n'est pas contesté par les parties. Par suite, la décision implicite de la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS rejetant ce recours administratif s'est substituée à la délibération du 25 mars 2022 de la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française et doit être regardée comme fondée sur les mêmes motifs que cette délibération.

En ce qui concerne le refus d'autorisation :

6. Aux termes de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure : " Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611-1 : / 1° S'il a fait l'objet d'une condamnation à une peine correctionnelle ou à une peine criminelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent, pour des motifs incompatibles avec l'exercice des fonctions ; / 2° S'il résulte de l'enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l'Etat territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat et sont incompatibles avec l'exercice des fonctions susmentionnées (...) ". Aux termes de l'article L. 612-22 du même code : " L'accès à une formation en vue d'acquérir l'aptitude professionnelle est soumis à la délivrance d'une autorisation préalable, fondée sur le respect des conditions fixées aux 1°, 2°, 3°, 4° et 4° bis de l'article L. 612-20 (...) ".

7. Aux termes de l'article R. 40-23 du code de procédure pénale : " Le ministre de l'intérieur (direction générale de la police nationale et direction générale de la gendarmerie nationale) est autorisé à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel, dénommé " traitement d'antécédents judiciaires ", dont les finalités sont celles mentionnées à l'article 230-6 ".

8. Il résulte des dispositions des articles L. 612-20 et L. 612-22 du code de la sécurité intérieure citées au point 6 que lorsqu'elle est saisie d'une demande d'autorisation préalable en vue d'acquérir une aptitude professionnelle ou l'accès à une formation professionnelle pour l'exercice de la profession d'agent privé de sécurité, l'autorité administrative compétente procède à une enquête administrative. Cette enquête, qui peut notamment donner lieu à la consultation du traitement automatisé de données à caractère personnel mentionné à l'article R. 40-23 du code de procédure pénale, vise à déterminer si le comportement ou les agissements de l'intéressé sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat, et s'ils sont ou non compatibles avec l'exercice des fonctions d'agent privé de sécurité. Pour ce faire, l'autorité administrative procède, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, à une appréciation globale de l'ensemble des éléments dont elle dispose. A ce titre, si la question de l'existence de poursuites ou de sanctions pénales est indifférente, l'autorité administrative est en revanche amenée à prendre en considération, notamment, les circonstances dans lesquelles ont été commis les faits qui peuvent être reprochés au pétitionnaire ainsi que la date de leur commission.

9. Il ressort des termes de la délibération du 25 mars 2022 qu'après avoir diligenté une enquête administrative le 7 juillet 2021, la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française s'est fondée, pour refuser à M. A... la délivrance d'une autorisation préalable en vue d'accéder à une formation lui permettant d'exercer les fonctions d'agent privé de sécurité, sur sa mise en cause, le 17 janvier 2021, pour des faits de violences sans incapacité en présence d'un mineur par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire, et le 27 avril 2021, pour des faits de dégradation volontaire du bien d'autrui causant un dommage léger ainsi que sur sa condamnation, le 11 mars 2022, à trois mois d'emprisonnement assortis de sursis probatoire pendant deux ans. La commission a estimé que ces faits récents révélaient un comportement de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes, laquelle constitue la mission principale susceptible d'être confiée à un agent privé de sécurité, et traduisaient de la part de l'intéressé une absence de maîtrise de soi alors qu'il est attendu de la part des agents privés de sécurité un comportement exemplaire, et que, par suite, ils révélaient un comportement incompatible avec l'exercice de la profession, bien que le casier judiciaire de M. A... n'en comportait pas la mention. Ces motifs, ainsi qu'il a été dit au point 5, doivent être regardés comme fondant la décision implicite de la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS rejetant le recours administratif préalable obligatoire de M. A....

10. En premier lieu, aux termes de l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés : " I.- Sont autorisés par arrêté du ou des ministres compétents, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, les traitements de données à caractère personnel mis en œuvre pour le compte de l'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale : " I. - Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, aux articles L. 114-1, L. 114-2, L. 211-11-1, L. 234-1 et L. 234-2 du code de la sécurité intérieure et à l'article L. 4123-9-1 du code de la défense, les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l'exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par : / (...) 5° Les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'Etat.(...) ".

11. Si M. A... entend soulever le moyen tiré de ce que la nature et l'identification des fichiers consultés dans le cadre de l'enquête administrative diligentée le 7 juillet 2021 par la commission locale d'agrément et de contrôle de Polynésie française ne sont pas précisées par la décision en litige, ce moyen, déjà développé dans sa demande de première instance, n'est pas assorti en appel d'éléments nouveaux. Par suite, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 5 du jugement, d'écarter ce moyen repris en appel par M. A....

12. En deuxième lieu, il ne résulte ni des dispositions de l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, citées au point 10, ni d'aucune autre disposition légale ou réglementaire que l'administration aurait été tenue de viser dans sa décision l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978, et de mentionner les éléments de nature à permettre à l'intéressé d'identifier, notamment par son numéro de matricule, l'agent ayant procédé à la consultation du traitement des antécédents judiciaires et de vérifier, notamment par le visa de l'arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française portant habilitation de l'agent concerné, si celui-ci était dûment habilité à procéder à cette consultation. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige serait, pour ce motif, entachée d'illégalité. Si M. A... fait valoir que l'absence de ces mentions porterait atteinte aux droits de la défense, au principe de liberté d'accès aux documents administratifs ainsi qu'à l'obligation d'information de l'administration vis-à-vis des usagers, cette allégation n'est pas assortie de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

13. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un jugement du tribunal correctionnel de Papeete du 11 mars 2022, M. A... a été condamné à une peine de trois mois d'emprisonnement assortie d'un sursis probatoire d'une durée de deux ans pour des faits de violence sans incapacité en présence d'un mineur par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire commis le 17 janvier 2021, à une amende de 10 000 F CFP pour des faits de dégradation volontaire du bien d'autrui causant un dommage léger, commis le 27 avril 2021 et a été relaxé pour les faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, commis le 30 avril 2021. Par un arrêt du 6 octobre 2022, la cour d'appel de Papeete, saisie d'un appel portant sur ce seul point, a annulé le jugement du tribunal correctionnel de Papeete du 11 mars 2022 en tant qu'il n'a pas fait droit à la demande de dispense d'inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire de M. A....

14. M. A... se prévaut de sa relaxe par le jugement du 11 mars 2022 pour les faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, commis le 30 avril 2021. Toutefois, il ressort de la délibération du 25 mars 2022 que l'administration ne s'est pas fondée sur ces faits pour refuser de lui accorder l'autorisation sollicitée. Il s'ensuit que cette relaxe n'a aucune incidence sur la matérialité et l'appréciation des faits qui lui sont reprochés et, par suite, sur la légalité du refus qui lui est opposé.

15. Les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée, s'imposent à l'administration comme au juge administratif. Il ressort de l'arrêt de la cour d'appel de Papeete du 6 octobre 2022, ainsi qu'il a été dit au point 13, que les conclusions d'appel de M. A... étaient limitées à la contestation du jugement du tribunal correctionnel de Papeete du 11 mars 2022 en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande de dispense d'inscription au bulletin n° 2 de son casier judiciaire. Il s'ensuit que le jugement du 11 mars 2022 en tant qu'il constate la matérialité des faits commis par M. A... les 17 janvier et 27 avril 2021 était devenu définitif à la date de la décision implicite rejetant son recours administratif préalable obligatoire et que ces constatations s'imposaient à l'administration. Dans ces conditions, pour rejeter la demande de l'intéressé, l'administration pouvait se fonder sur sa condamnation par le tribunal correctionnel de Papeete le 11 mars 2022 ainsi que sur les faits commis les 17 janvier et 30 avril 2021 dont elle avait pris connaissance à l'issue de l'enquête administrative diligentée dès le 7 juillet 2021 et sur lesquels elle pouvait se fonder, en application du 2° de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure, sans méconnaître le principe de la présomption d'innocence. M. A... ne conteste pas la matérialité de ces faits.

16. Le requérant soutient que les faits commis les 17 janvier et 30 avril 2021 sont intervenus dans le cadre d'un conflit familial et que les difficultés personnelles auxquelles il a été confronté en 2021 ont cessé depuis la séparation du couple. Toutefois, et à supposer même que ces faits aient présenté un caractère isolé, compte tenu de leur nature, de leur gravité et eu égard à leur caractère particulièrement récent à la date de la décision en litige, ces faits de violence doivent être regardés comme remettant en cause la capacité de l'appelant à conserver son sang-froid en toutes circonstances et à intervenir avec le calme requis dans les situations parfois tendues et conflictuelles auxquelles un agent de sécurité est susceptible d'être confronté. Dans ces conditions, et même si l'intéressé justifie du suivi de formations dans le domaine de la sûreté aéroportuaire et de la sécurité, la commission nationale du CNAPS n'a pas, en estimant, pour rejeter la demande d'autorisation de formation sollicitée, que l'intéressé ne remplissait pas les conditions pour exercer une activité privée d'agent de sécurité, entaché sa décision d'erreur d'appréciation.

17. Enfin, la circonstance, au demeurant postérieure à la décision en litige, que la cour d'appel de Papeete a, par un arrêt du 6 octobre 2022, jugé que la condamnation prononcée le 11 mars 2022 par le tribunal correctionnel de Papeete ne figurerait pas sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire de M. A... n'a pas pour objet, ni pour effet de remettre en cause la matérialité des faits constatés par le tribunal correctionnel de Papeete le 11 mars 2022 et retenus par l'administration et, par suite, n'a pas d'incidence sur la légalité de la décision en litige.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le conseil national des activités privées de sécurité, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse à M. A..., qui au demeurant a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, la somme qu'il sollicite au titre des frais exposés dans l'instance. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

20. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme que le conseil national des activités privées de sécurité demande sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le conseil national des activités privées de sécurité sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au conseil national des activités privées de sécurité.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Menasseyre, présidente,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2024.

La rapporteure,

V. Larsonnier La présidente,

A. Menasseyre

Le greffier,

P. Tisserand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA03310 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03310
Date de la décision : 21/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MENASSEYRE
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : NOUGARO

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-21;23pa03310 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award