Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté n° 2023/666 du 20 février 2023, par lequel le maire de Nouméa l'a révoqué de ses fonctions sans suspension des droits à pension.
Par un jugement n° 2300189 du 13 juillet 2023, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, un mémoire en réplique et des pièces complémentaires, enregistrés les 8 septembre 2023, 30 janvier 2024, 29 avril 2024, 30 avril 2024 et 12 juillet 2024, M. C..., représenté par Me Laubreaux, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 13 juillet 2023 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) d'annuler l'arrêté n° 2023/666 du 20 février 2023, par lequel le maire de Nouméa l'a révoqué de ses fonctions sans suspension des droits à pension ;
3°) d'enjoindre à la commune de Nouméa de lui verser la rémunération qu'il aurait dû percevoir depuis sa révocation, soit depuis le 1er avril 2023 ;
'4°) de condamner la commune de Nouméa à lui verser une somme de 1 000 000 francs CFP à titre de " dommages et intérêts " ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Nouméa une somme de 300 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que l'arrêté prononçant sa révocation a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pas été régulièrement convoqué devant le conseil de discipline, que cette convocation n'a pas été faite dans le délai de quinze jours et qu'il n'a pu préparer utilement sa défense.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 20 décembre 2023 et 19 février 2024, la commune de Nouméa, représentée par Me Charlier, conclut à l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires présentées par M. C..., au rejet du surplus de sa requête et à ce que soit mise à la charge de celui-ci une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions indemnitaires présentées par le requérant ne sont pas recevables dès lors qu'elles n'ont pas été précédées d'une demande préalable et qu'elles constituent des conclusions nouvelles en appel ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 ;
- le code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ;
- la délibération n° 486 du 10 août 1994 ;
- la délibération n° 65/CP du 17 novembre 2008 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Auvray, président-rapporteur ;
- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique ;
- les observations de M. C... ;
- les observations de Me Kukuryka, pour la commune de Nouméa.
Deux notes en délibéré ont été enregistrées les 7 et 15 octobre 2024, présentées par
M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... a été nommé le 1er octobre 2016 dans le cadre d'emploi des sapeurs-pompiers professionnels des communes de Nouvelle-Calédonie et a été titularisé le
22 octobre 2017 par le maire de la commune Nouméa. Par une décision du 20 février 2023, ce maire a prononcé la révocation de l'agent sans suspension des droits à pension. M. C... relève appel du jugement du 13 juillet 2023 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Nouméa à l'encontre des conclusions indemnitaires présentées par M. C... :
2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) ".
3. Si M. C... demande, pour la première fois en appel, la condamnation de la commune de Nouméa à lui verser la somme de 1 000 000 francs CFP à titre de " dommages et intérêts ", il ne résulte pas de l'instruction que ses conclusions aient été précédées d'une demande préalable d'indemnisation adressée à l'administration. Dès lors, la commune de Nouméa est fondée à soutenir qu'en l'absence de demande préalable, les conclusions indemnitaires présentées par le requérant sont irrecevables.
Sur la légalité de la décision du 20 février 2023 :
4. D'une part, aux termes de l'article 1-1 de la délibération du 17 novembre 2008 portant statut particulier du cadre des sapeurs-pompiers de Nouvelle-Calédonie : " Les sapeurs-pompiers de Nouvelle-Calédonie sont soumis, lorsqu'ils sont recrutés par : / 1° un maire, aux dispositions du statut général des fonctionnaires des communes et de leurs établissements publics ; / 2° le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, aux dispositions du statut général des fonctionnaires des cadres territoriaux ". Aux termes de l'article 76 de la délibération n° 486 du 10 août 1994 portant création du statut général des fonctionnaires des communes de Nouvelle-Calédonie : " 1. Le pouvoir disciplinaire appartient au Maire. / 2. Les sanctions disciplinaires à l'exception de l'avertissement et du blâme sont prononcées après avis du conseil de discipline. ". Aux termes de l'article 77 de cette délibération : " 1. Les autres sanctions disciplinaires sont prononcées après avis du conseil de discipline. (...) ". Aux termes de l'article 79 de cette délibération : " 1. Le fonctionnaire a le droit d'obtenir, aussitôt que l'action disciplinaire est engagée, la communication intégrale de son dossier et de tous documents annexes. / 2. Il peut présenter devant le conseil de discipline des observations écrites ou verbales, citer des témoins et se faire assister d'un défenseur de son choix. / 3. Le droit de citer des témoins appartient également à l'Administration. ".
5. D'autre part, aux termes de l'article 651 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie : " Les actes sont portés à la connaissance des intéressés par la notification qui leur en est faite. / La notification faite par acte d'huissier de justice est une signification. / La notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l'aurait prévue sous une autre forme. ". Aux termes de l'article 653 de ce code : " La date de la signification d'un acte d'huissier de justice, sous réserve de l'article 647-1, est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile, à résidence ou, dans le cas mentionné à l'article 659, celle de l'établissement du procès-verbal ". Aux termes de l'article 655 dudit code : " Si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. / L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification. / La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire. / La copie ne peut être laissée qu'à condition que la personne présente l'accepte et déclare ses noms, prénoms et qualité. / L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise. ".
6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le courrier du 11 janvier 2023 portant convocation de M. C... à la réunion du conseil de discipline du 9 février 2023 a été signifié par voie d'huissier le 17 janvier 2023 au 9 rue Georges Clemenceau à Nouméa et qu'en l'absence de M. C..., l'acte a été remis par l'huissier à M. B..., cousin de M. C..., qui était présent, a déclaré que l'intéressé résidait à cette adresse et qu'il était absent momentanément et a accepté de prendre cet acte. M. C... soutient que cette notification était irrégulière dès lors que cette adresse est celle de sa mère, qu'il n'avait pas communiqué cette adresse à l'administration et que, au moment où cette convocation a été faite, il résidait à l'Île des Pins et que l'administration avait connaissance de cette nouvelle adresse. S'il n'est pas contesté par la commune de Nouméa que l'intéressé a résidé, à compter du 1er octobre 2022, à l'Ile des Pins, celle-ci conteste avoir été informée par l'agent de ce changement d'adresse. Le requérant, qui ne produit aucune pièce de nature à démontrer qu'il avait porté à la connaissance de la commune sa nouvelle adresse, se borne à soutenir que le 7ème adjoint au maire de la commune de Nouméa, rencontré à l'occasion d'un mariage à l'Île des Pins le 14 octobre 2022 ainsi que ses collègues étaient informés de ce qu'il vivait sur cette île. S'il fait valoir qu'il a informé oralement sa hiérarchie de sa nouvelle adresse, il ne produit aucune pièce à l'appui de ses allégations. La commune de Nouméa a pu, après avoir constaté que l'adresse située avenue Paul Emile Victor à Dumbéa n'était plus celle de l'intéressé, lui notifier par voie d'huissier la convocation devant le conseil de discipline au 9 rue Georges Clemenceau, adresse que l'intéressé avait mentionnée sur un certificat médical d'arrêt de travail établi le 31 mai 2022 ainsi que sur la requête en référé présentée devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 6 octobre 2022 et qui constituait ainsi la dernière adresse connue de l'administration. Enfin, si le requérant soutient qu'au moment de la signification de sa convocation, son cousin avait informé l'huissier qu'il résidait à l'Île des Pins et qu'il a lui-même, au cours d'une conversation téléphonique avec cet huissier, indiqué sa nouvelle résidence, la seule attestation établie par M. B... n'est pas suffisante pour contredire les mentions portées sur le procès-verbal dressé par l'huissier le 17 janvier 2023, étant au surplus relevé que l'intéressé avait joint à sa requête reçue le 19 avril 2023 par le tribunal administratif l'arrêté contesté qui, pris le 20 février 2023, lui avait été signifié par exploit d'huissier le 24 février 2023 à la même adresse et avait, de la même façon, été remis à son cousin, M. B.... Dès lors, M. C... doit être regardé comme ayant régulièrement reçu le 17 janvier 2023, la notification de la convocation à la réunion du conseil de discipline, étant de surcroît relevé qu'il ressort des mentions portées sur le procès-verbal de la séance du 9 février 2023 que M. C... s'est présenté devant le conseil de discipline assisté d'un avocat.
7. En deuxième lieu, M. C... soutient qu'il n'a pas disposé du temps nécessaire pour préparer utilement sa défense dès lors qu'il n'a pas été convoqué devant le conseil de discipline quinze jours au moins avant la tenue de la réunion de ce conseil. Toutefois, aucune disposition applicable aux agents relevant de la fonction publique communale de Nouvelle-Calédonie ne fixe de délai entre la date de convocation et la date à laquelle le conseil de discipline doit se réunir. M. C..., qui, ainsi qu'il a été dit au point précédent, doit être regardé comme ayant régulièrement reçu sa convocation le 17 janvier 2023 à la réunion du conseil de discipline du 9 février 2023, a disposé d'un délai suffisant pour préparer utilement sa défense.
8. Enfin, contrairement à ce que soutient le requérant, les faits qui lui étaient reprochés étaient décrits de manière précise dans le courrier du 11 janvier 2023 le convoquant devant le conseil de discipline et l'invitant par ailleurs à consulter son dossier administratif.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 février 2023 prononçant sa révocation sans suspension des droits à pension. Les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Nouméa au même titre.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Nouméa en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au maire de la commune de Nouméa.
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Laforêt, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre2024.
Le président-rapporteur,
B. AUVRAYL'assesseur le plus ancien,
P. HAMON
La greffière,
L. CHANA
La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA03999 2