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04/10/2024 | FRANCE | N°23PA01529

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 5ème chambre, 04 octobre 2024, 23PA01529


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 28 avril 2021 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire enregistré devant la commission de recours des militaires le 22 décembre 2020 à l'encontre de la décision du 18 décembre 2020 par laquelle lui a été refusée la prolongation de son affectation à Djibouti dans le cadre du plan annuel de mutation outre-mer et étranger pour l'année 2021.





Par un jugement n° 2113104 du 17 février 2023, le tribunal administratif de Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 28 avril 2021 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire enregistré devant la commission de recours des militaires le 22 décembre 2020 à l'encontre de la décision du 18 décembre 2020 par laquelle lui a été refusée la prolongation de son affectation à Djibouti dans le cadre du plan annuel de mutation outre-mer et étranger pour l'année 2021.

Par un jugement n° 2113104 du 17 février 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 avril 2023, M. A..., représenté par Me Maumont, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 28 avril 2021 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire ;

3°) d'enjoindre au ministre des armées de le rétablir dans ses fonctions et prérogatives dont il a été privé et de procéder à la reconstitution de sa carrière, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Paris est entaché d'omission à statuer faute de répondre à tous les moyens exposés en première instance ;

- ce jugement est entaché de dénaturation des faits, en ce qu'il nie la réalité de sa relation avec une ressortissante djiboutienne ;

- la décision du 28 avril 2021 refusant sa prolongation d'affectation à Djibouti est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il remplissait toutes les conditions réglementaires pour que son affectation soit prolongée, qu'il disposait d'un avis favorable du commandant d'unité, qu'il vit en couple avec une ressortissante djiboutienne depuis deux ans avec laquelle il avait un projet professionnel après sa radiation des cadres et que ses compétences étaient en adéquation avec le poste qu'il occupait à Djibouti ;

- l'administration ne démontre pas l'intérêt du service ni que ses concurrents disposaient d'un meilleur profil que le sien ;

- la décision est constitutive d'une sanction déguisée et d'un détournement de pouvoir ;

- la décision est entachée d'une rupture d'égalité, dès lors que son successeur avait déjà occupé le poste à Djibouti entre 2015 et 2018.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2024, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- l'arrêté n° 290 du 20 juillet 2009 relatif à la politique d'emploi du personnel militaire de la marine relevant de la direction du personnel militaire de la marine ;

- l'instruction n° 91/ARM/DPMM/PM2 du 26 juin 2020 relative à l'emploi outre-mer et à l'étranger des équipages de la flotte et des marins des ports ;

- le code de justice administrative

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dubois ;

- les conclusions de Mme de Phily, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Maumont, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., premier maître de la marine nationale, affecté à la base navale de Djibouti depuis le 14 juillet 2018, a sollicité le 14 juin 2020, dans le cadre du plan annuel de mutation (PAM) pour l'année 2021, une prolongation de son affectation à Djibouti pour une durée d'un an. Par courrier du 18 décembre 2020, la direction du personnel militaire de la marine du ministère des armées a fixé la liste des marins affectés à Djibouti dans le cadre du plan annuel de mutation outre-mer et à l'étranger 2021. Constatant que son nom ne figurait pas sur la liste, M. A... a formé devant la commission des recours des militaires un recours administratif préalable obligatoire enregistré le 22 décembre 2020 contre cette décision, d'une part, en tant qu'elle désigne le marin devant le remplacer à la fin de son affectation et, d'autre part, en tant qu'elle rejette implicitement sa demande de prolongation d'affectation. Par décision du 28 avril 2021, la ministre des armées a rejeté son recours. M. A... relève appel du jugement n° 2113104 du 17 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. En se bornant à soutenir que le jugement " ne répond pas à l'ensemble des griefs soulevés par le requérant en première instance " et à affirmer que " le jugement attaqué est par ailleurs entaché d'illégalité en rejetant les conclusions du PM A... suivant cette motivation " sans autre précision quant aux " griefs " sur lesquels le tribunal aurait omis de statuer ou auxquels il aurait insuffisamment répondu, le requérant n'assortit pas son moyen d'omission à statuer ou d'insuffisance de motivation des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ou même la portée.

Sur la légalité de la décision du ministre des armées du 28 avril 2021 rejetant son recours préalable obligatoire dirigé contre la décision du 18 décembre 2020 refusant le maintien de son affectation à Djibouti :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 4121-5 du code de la défense : " Les militaires peuvent être appelés à servir en tout temps et en tout lieu. / Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les mutations tiennent compte de la situation de famille des militaires, notamment lorsque, pour des raisons professionnelles, ils sont séparés : 1° De leur conjoint ; 2° Ou du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité, lorsqu'ils produisent la preuve qu'ils se soumettent à l'obligation d'imposition commune prévue par le code général des impôts. / La liberté de résidence des militaires peut être limitée dans l'intérêt du service. / Lorsque les circonstances l'exigent, la liberté de circulation des militaires peut être restreinte ". Aux termes de l'article 1.2 de l'arrêté n° 290 du 20 juillet 2009 relatif à la politique d'emploi du personnel militaire de la marine relevant de la direction du personnel militaire de la marine : " 1. La politique d'emploi du personnel militaire est élaborée par l'état-major de la marine, en liaison avec la DPMM [direction du personnel militaire de la marine]. Elle vise : - à garantir l'armement des formations de la marine par du personnel en nombre suffisant et avec les compétences requises (...) ; - à accroître les compétences détenues par les marins par la succession des emplois tenus et des formations suivies et à offrir des perspectives de carrière et d'épanouissement professionnel ; - à disposer d'une marge de manœuvre pour pouvoir traiter de manière adaptée les différentes situations personnelles et professionnelles des marins (...) ". Aux termes de l'article 1.6 du même arrêté : " (...) 3. La durée des affectations outre-mer est fixée par instruction ". Aux termes de l'article 1.7 de cet arrêté : " Les durées des affectations peuvent être prolongées ou réduites : - par la DPMM, pour les besoins du service (...) ; - éventuellement à la demande de l'intéressé, après examen et accord par la DPMM. / Les modalités d'application de cet article font l'objet d'une instruction, qui précise également la durée maximale de prolongation ou de réduction d'affectation ". Aux termes du point 1.5 de l'instruction n° 91/ARM/DPMM/PM2 du 26 juin 2020 relative à l'emploi outre-mer et à l'étranger des équipages de la flotte et des marins des ports : " Les affectations outre-mer ont une durée de trois ans, sauf cas particuliers (...). Le séjour est prolongeable à quatre ans à titre exceptionnel (...) Affectation (...) A terre (...) Zone géographique (...) Djibouti (...) Durée (...) Trois ans (...) Prolongation (...) Possible à 4 ans sur demande motivée du commandant pour raison de service et agrément DPMM (...) ". Aux termes du point 5.1 de la même instruction : " Un marin affecté OME [outre-mer et étranger] peut demander à prolonger son affectation via le DIPP [dossier individuel de préparation du plan annuel de mutation] ".

4. Au soutien de sa demande d'annulation de la décision du ministre refusant de faire droit à sa demande de maintien d'affectation sur la base navale de Djibouti de juillet 2021 à juillet 2022, M. A... fait valoir qu'il remplissait les conditions prévues par l'instruction précitée du 26 juin 2020 et qu'à la date de la décision il vivait en concubinage avec une ressortissante de nationalité djiboutienne depuis deux ans avec laquelle il souhaitait vivre à Djibouti et y mener un projet professionnel postérieurement à sa radiation des cadres par limite d'âge prévue pour février 2023. Il se prévaut également de ses qualités professionnelles et de sa manière de servir depuis de nombreuses années ainsi que d'un avis très favorable à sa demande de prolongation d'activité du commandant d'unité soulignant que son maintien sur la base navale de Djibouti serait favorable dans le cadre du prochain plan annuel de mutation. Il affirme encore qu'il ne serait pas démontré que son successeur sur le poste disposerait de meilleures qualités professionnelles que les siennes. Toutefois, il ressort des motifs de la décision du ministre des armées qu'elle a été prise au motif que, compte tenu de la date de sa radiation des cadres fixée au 21 février 2023, la prolongation d'activité sollicitée pour une année de juillet 2021 à juillet 2022 n'aurait pas permis à l'administration, en termes de gestion des ressources humaines, d'assurer utilement son employabilité lors de son retour en France pour une durée de sept mois maximum à compter du 15 juillet 2022. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre des armées aurait entaché son appréciation d'une erreur manifeste en refusant de faire droit à la demande de maintien d'affectation de M. A....

5. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point précédent, il ressort des pièces du dossier que la mesure contestée par M. A... a été prise pour tenir compte, à l'approche de la date à laquelle son lien avec le service serait rompu par atteinte de la limite d'âge, de son employabilité lors de son retour en France. Prise pour un motif tenant à l'intérêt du service, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision de refus de maintien d'affectation sur la base navale de Djibouti aurait pour objet de sanctionner M. A.... Celui-ci n'est dès lors pas fondé à soutenir que cette décision constituerait une sanction déguisée ou qu'elle serait entachée de détournement de pouvoir.

6. En dernier lieu, la seule circonstance que le successeur de M. A... sur le poste qu'il occupait à Djibouti ait déjà occupé le poste à Djibouti entre 2015 et 2018 ne saurait en elle-même caractériser une rupture d'égalité.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa requête de première instance, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées et des anciens combattants.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Barthez, président de chambre,

- M. Delage, président assesseur,

- M. Dubois, premier conseiller.

Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 4 octobre 2024.

Le rapporteur,

J. DUBOISLe président,

A. BARTHEZ

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre des armées et des anciens combattants en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA01529 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01529
Date de la décision : 04/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Jacques DUBOIS
Rapporteur public ?: Mme DE PHILY
Avocat(s) : CABINET MDMH

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-04;23pa01529 ?
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