Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 juin 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2315945/2-2 du 13 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrés les 12 et 22 janvier 2024, M. B..., représenté par Me Lisita, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2315945/2-2 du 13 novembre 2023 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 15 juin 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer durant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour, dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée a été prise en méconnaissance des articles L. 423-21 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 juin 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun moyen n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 26 juillet 2002, est entré en France le 1er septembre 2010 selon ses déclarations. Par un arrêté du 15 juin 2023, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il a sollicité le 22 mars 2021 sur le fondement de l'article L. 423-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... relève appel du jugement du 13 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui justifie par tout moyen avoir résidé habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans avec au moins un de ses parents se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...). ". Aux termes de l'article L. 412-5 de ce code : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, (...). ". Enfin, aux termes de l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".
3. En l'espèce, d'une part, il ressort des pièces du dossier, en particulier du bulletin n° 2 de son casier judiciaire, que M. B... a été condamné le 29 janvier 2021 par le président du tribunal judiciaire de Paris à une peine de 70 heures de travaux d'intérêt général pour des faits de violation de domicile. Il ressort des mêmes pièces qu'il est également connu des services de police, notamment pour des faits de vol par ruse, effraction ou escalade et de détention, offre ou cession de stupéfiants, commis en 2019 et 2020. Si M. B... soutient qu'il s'agit d'erreurs de jeunesse et qu'il a changé de vie, il ne conteste pas la matérialité de ces faits délictueux. Dans ces conditions, eu égard à la gravité et au caractère répété des faits reprochés, et alors même que la commission du titre de séjour a rendu un avis favorable à la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé le 8 mars 2023, le préfet de police, en refusant de délivrer à M. B... le titre de séjour sollicité au motif qu'il représente une menace pour l'ordre public, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
4. D'autre part, M. B... ne peut utilement soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le préfet de police ne s'est pas fondé sur la circonstance que le requérant ne remplissait pas les conditions posées par ces dispositions mais sur celle qu'il représente une menace pour l'ordre public. Par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant.
5. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... réside en France depuis 2010, date de son inscription à l'école élémentaire et a ensuite été scolarisé au collège avant de suivre un cursus professionnel, en obtenant en juillet 2020 le brevet d'études professionnelles " Métiers des services administratifs ", puis le baccalauréat professionnel, spécialité " gestion-administration ". Si le requérant établit que son père et son frère sont présents en France, il ne justifie pas de la nécessité de demeurer auprès d'eux. En outre, il résulte de ce qui a été exposé au point 3 du présent arrêt que la présence en France de M. B... constitue une menace réelle et actuelle pour l'ordre public. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de police n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation, d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- Mme Irène Jasmin-Sverdlin, première conseillère,
- M. François Doré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2024.
La rapporteure,
I. C...Le président,
I. LUBEN
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA00230 2