Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 février 2024 par lequel le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2405087 du 9 avril 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 mai 2024, Mme B..., représentée par Me Aucher, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 avril 2024 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 février 2024 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police d'une part, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour avec mention "travail" dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le refus d'examen de sa demande de délivrance d'un titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire sont entachés d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Le préfet de police a produit un mémoire en défense enregistré le 10 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Julliard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., ressortissante congolaise née le 8 août 1993, a déposé une demande de protection internationale qui a été rejetée par une décision du 29 juin 2023 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision du 16 novembre 2023 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Par un arrêté du 7 février 2024, le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 9 avril 2024 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. L'arrêté en litige vise les textes dont il fait application, notamment l'article
L. 611-1 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il rappelle l'identité de l'intéressée, mentionne que Mme B... a déposé une demande de protection internationale et que sa demande a été rejetée par l'OFPRA puis par la CNDA. Il indique en outre que Mme B... n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. L'arrêté attaqué précise ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, le préfet de police n'étant pas tenu de mentionner tous les éléments de la situation personnelle de Mme B.... Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté.
4. En deuxième lieu, Mme B... soutient qu'en prenant l'arrêté en litige, le préfet de police n'a pas pris en compte des éléments de sa situation personnelle ni n'a examiné le fait qu'elle aurait pu prétendre à un titre de séjour sur un autre fondement que l'asile. Toutefois, l'intéressée, qui a sollicité son admission au séjour en qualité de demandeure d'asile le 10 février 2023 et dont la demande a été rejetée le 7 février 2024, pouvait à tout moment présenter ses observations et une demande de titre sur un autre fondement. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle en aurait été empêchée de quelque manière. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. Mme B... soutient qu'elle réside en France de manière stable, paisible et continue, qu'elle est mère d'un enfant né le 6 février 2024 et qu'elle ne pourra bénéficier d'un traitement pour lutter contre le virus de l'immunodéficience humaine en République démocratique du Congo. Toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit Mme B... n'établit pas avoir présenté de demande de titre de séjour en qualité d'étrangère malade. Par ailleurs, elle ne résidait en France que depuis un an à la date de l'arrêté attaqué, la durée de sa présence sur le territoire français s'expliquant par l'examen de sa demande d'asile par l'OFPRA et la CNDA et par le délai d'instruction de son dossier par le préfet de police et elle ne justifie d'aucune intégration dans la société française. Par ailleurs, elle ne pas fait état d'obstacle à la poursuite de sa vie familiale avec son fils, âgé d'un jour à la date de l'arrêté litigieux, en République démocratique du Congo. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet de police n'a pas, pour les mêmes motifs, commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de Mme B....
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. ".
8. Si Mme B... soutient qu'elle souffre d'une grave maladie, qu'aucun traitement ne lui sera accessible en République démocratique du Congo, son pays d'origine, elle n'a pas déposé de demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'établit ni qu'elle souffre de cette maladie ni qu'elle ne pourra pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Elle n'apporte à l'appui de sa demande aucun élément ni aucune pièce permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par ailleurs, en se bornant à produire un certificat médical du 23 octobre 2023 indiquant que ses symptômes sont ceux retrouvés dans les états de stress post-traumatiques et que son état médical correspond aux faits relatés, elle n'apporte pas d'élément suffisant pour établir qu'elle serait en danger de mort dans son pays d'origine alors au demeurant que sa demande d'asile, qui reposait sur les mêmes faits, a été rejetée en dernier lieu par la CNDA. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que le préfet de police aurait, en prenant la décision litigieuse l'éloignant à destination de la République démocratique du Congo ou de tout autre pays dans lequel elle établit être légalement admissible, méconnu les stipulations précitées.
9. En dernier lieu, le préfet de police n'a pas, pour les mêmes motifs, commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision fixant le pays de destination sur la situation personnelle de Mme B....
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 novembre 2022. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi, par voie de conséquence, que ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative doivent donc être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience publique du 10 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Marianne Julliard, présidente de la formation de jugement,
- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,
- Mme Mélanie Palis De Koninck, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 octobre 2024.
La présidente-rapporteure,
M. JULLIARD,
L'assesseure la plus ancienne,
M-I LABETOULLELe greffier,
E. MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA02084 2