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02/10/2024 | FRANCE | N°23PA04988

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 3ème chambre, 02 octobre 2024, 23PA04988


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Les Lilas français a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 février 2023 par lequel le maire de la commune des Lilas ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme A... portant sur la surélévation, la modification des façades et de l'aspect extérieur, le ravalement et l'isolation thermique par l'extérieur d'une maison située 41 rue du Coq français, ainsi que la décision rejetant implicitement son recours graci

eux, et de mettre à la charge de la commune des Lilas la somme de 3 000 euros au titre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Les Lilas français a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 février 2023 par lequel le maire de la commune des Lilas ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme A... portant sur la surélévation, la modification des façades et de l'aspect extérieur, le ravalement et l'isolation thermique par l'extérieur d'une maison située 41 rue du Coq français, ainsi que la décision rejetant implicitement son recours gracieux, et de mettre à la charge de la commune des Lilas la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que de la condamner aux entiers dépens.

Par une ordonnance n° 2307503 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2023, la SCI Les lilas français, représentée par Me Ingelaere et Me Blanco, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2307503 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable du 8 février 2023 ;

3°) de mettre à la charge de la commune des Lilas le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a à tort rejeté sa demande comme irrecevable alors qu'elle justifie d'un intérêt à agir, sa parcelle étant mitoyenne de celle des travaux projetés, qui lui occasionneront une perte d'ensoleillement, créeront des ouvertures en vis-à-vis de la façade Est de sa construction et présenteront un danger pour la solidité du mur mitoyen ;

- il n'est pas justifié que l'arrêté attaqué a été compétemment signé ;

- les travaux litigieux ne pouvaient bénéficier des dispositions dérogatoires du PLU concernant la surélévation de bâtiments existants dès lors que le projet n'est pas dans la continuité directe de l'assiette de la maison existante, et dès lors ces travaux devaient se voir appliquer les règles relatives à l'implantation des constructions en limite séparative ;

- le projet méconnait les règles du PLU sur l'aspect extérieur des bâtiments dès lors que les fenêtres sont en saillie par rapport à la toiture et constituent dès lors des éléments dépassant du volume de ladite toiture ;

- la décision de non-opposition méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que le projet présente des risques pour la sécurité publique compte tenu du risque lié au phénomène de retrait : gonflement des argiles qui implique la réalisation d'études préalables et dès lors qu'il a été constaté que le mur qui soutenait l'échafaudage était en mauvais état ;

- la déclaration préalable de travaux est entachée de fraude dès lors que la pétitionnaire a attesté avoir qualité pour déposer ladite déclaration alors que les murs situés entre les parcelles n°63 et 66 ne lui appartiennent pas et sont la propriété de la société Romrol ;

- le dossier était incomplet dès lors qu'il aurait dû comporter un permis de démolir, dont l'absence a faussé l'appréciation des services instructeurs.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2024, la commune des Lilas, représentée par Me Saint-Supéry, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de

4 000 euros soit mis à la charge de la SCI Les Lilas français sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la SCI Les Lilas français ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à Mme A..., qui n'a pas présenté de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Degardin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Sautereau, avocate de la commune des Lilas.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 8 février 2023 le maire de la commune des Lilas a pris un arrêté de non-opposition à la déclaration préalable de travaux déposée le 9 janvier précédent par Mme A..., en vue de la réalisation de travaux de ravalement des façades, de remplacement des fenêtres existantes et de surélévation de la maison dont elle est propriétaire, implantée sur le territoire de cette commune, sur la parcelle cadastrée section I n° 64. Par courrier du 5 avril 2023 le gérant de la SCI Les lilas, propriétaire de plusieurs lots dans l'immeuble sis sur la parcelle mitoyenne cadastrée n° 63, a demandé au maire de retirer son arrêté de non-opposition du 8 février 2023. Dans le silence de la commune, cette société a saisi le 22 juin 2023 le tribunal administratif de Montreuil de deux demandes tendant respectivement à l'annulation et à la suspension de l'arrêté du 8 février 2023. Par ordonnance du 28 juillet 2023 le juge des référés de ce tribunal a rejeté la demande en référé pour défaut d'intérêt à agir de son auteur. La société a déposé une nouvelle demande en référé, rejetée pour le même motif le 10 octobre 2023. Entretemps, par une ordonnance du 5 octobre 2023 prise sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président de la deuxième chambre de ce tribunal, statuant sur la demande d'annulation de l'arrêté du 8 février 2023, a rejeté cette demande comme irrecevable en retenant également le défaut d'intérêt à agir de la SCI Les lilas français. Cette société relève appel de cette ordonnance.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article L600-1-2 du code de l'urbanisme " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation " ;

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous les éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. Il en va de même lorsque le requérant est un syndicat de copropriétaires.

4. Pour établir son intérêt à agir contre l'arrêté de non -opposition aux travaux concernant la parcelle cadastrée section I n° 64, la SCI Les Lilas, dont il n'est pas contesté qu'elle a la qualité de voisine immédiate, soutient notamment que la façade Est de la construction située sur la parcelle cadastrée n° 63, dont elle possède des lots, comporte plusieurs ouvertures donnant sur le terrain d'assiette du projet, cadastré n° 64, et qu'ainsi la surélévation de la construction existant sur cette parcelle entraînera nécessairement une perte d'ensoleillement, notamment le matin quand le soleil se lève à l'Est. Toutefois, il ressort de la simulation des conditions d'ensoleillement de cet immeuble une fois réalisés les travaux litigieux, telle qu'elle a été produite en première instance et complétée en appel par d'autres simulations réalisées à d'autres heures de la journée, que lesdits travaux n'occasionneront pas de perte d'ensoleillement notable dans l'immeuble sis sur la parcelle n° 63, outre qu'en tout état de cause la société requérante ne conteste pas ne posséder que certains lots de cet immeuble et ne donne aucune indication de nature à établir que ces lots donneraient sur la façade Est et seraient, du fait de leur situation, susceptibles d'être concernés par la perte d'ensoleillement alléguée.

5. De même, si la SCI Les Lilas fait également état de ce que le projet prévoit la création de deux nouvelles ouvertures, contrairement à ce qu'elle soutient, celles-ci, qui au demeurant seront créées sur une façade comportant déjà des ouvertures, ne se situeront pas davantage que ces fenêtres préexistantes, en vis-à-vis direct de la façade Est de la construction dont elle possède des lots ; il n'est ainsi en rien établi que les deux ouvertures à créer dans la toiture modifieraient substantiellement les conditions de visibilité sur la façade Est de la construction édifiée sur la parcelle 63, ainsi d'ailleurs que sur la façade en fond de parcelle, ni, dès lors, qu'elles aggraveraient les conditions de jouissance de l'immeuble en cause. De plus, la requérante n'établit pas davantage que les lots qu'elle possède dans cet immeuble édifié sur le terrain cadastré n° 63 seraient, du fait de leur situation au sein de celui-ci, directement concernés par les vis-à-vis dont elle fait état.

6. Enfin, les autorisations d'urbanisme étant délivrées sous réserve des droits des tiers, la SCI Les Lilas ne peut utilement faire valoir que les travaux autorisés, entraînant la réalisation d'une extension sur un mur mitoyen de sa propriété, comporteraient un risque pour la sécurité de celle-ci. Par suite, elle n'établit pas que le projet autorisé serait de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien et ne justifie pas, dès lors, d'un intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté litigieux.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Les Lilas n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

8. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance. Dès lors, les conclusions présentées à ce titre par la SCI Les Lilas doivent être rejetées.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Les Lilas le paiement à la commune des Lilas de la somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Les Lilas est rejetée.

Article 2 : la SCI Les Lilas versera à la commune des Lilas une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Lilas et à la commune des Lilas.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Marianne Julliard, présidente de la formation de jugement,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

- Mme Mélanie Palis De Koninck, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 octobre 2024

La rapporteure,

M-I. C...La présidente,

M. B...

Le greffier,

E. MOULINLa République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23PA04988


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA04988
Date de la décision : 02/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : SYMCHOWICZ & WEISSBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-02;23pa04988 ?
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