Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la délibération du 10 mars 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a fixé la liste des candidats admis à l'examen professionnel pour l'accès au grade de brigadier de police au titre de l'année 2021 en tant qu'il n'y figure pas, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 4 mai 2021.
Par un jugement n° 2110316/5-2 du 20 juillet 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé la délibération du 10 mars 2021 en tant que M. B... ne figure pas parmi les admis à l'examen de brigadier de police, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux, et a enjoint au ministre de l'intérieur de prendre les mesures nécessaires pour reconstituer sa carrière en le nommant, le cas échéant, brigadier de police.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 19 septembre 2023, le ministre de l'intérieur et des
outre-mer demande à la cour d'annuler ce jugement du 20 juillet 2023 du tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- il est justifié de la compétence du signataire de la délibération du jury en litige ;
- le jury était régulièrement composé ;
- il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir de contrôler les notes attribuées par un jury de concours ;
- en tout état de cause, la délibération du jury n'est pas entachée d'erreur de fait, dès lors que l'intéressé n'a pas obtenu la note minimale pour être admis à l'examen professionnel.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Laporte, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 11 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'arrêté du 15 janvier 2010 fixant le contenu et les modalités des examens professionnels pour l'accès au grade de brigadier de police ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bories,
- les conclusions de M. Perroy, rapporteur public,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., gardien de la paix, s'est présenté à la session 2021 de l'examen professionnel pour l'accès au grade de brigadier de police. Par une délibération du 10 mars 2021, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a fixé la liste des candidats admis à cet examen, parmi lesquels ne figurait pas M. B.... Il a formé un recours gracieux le 4 mai 2021. Le silence gardé par le ministre de l'intérieur et des outre-mer a fait naître une décision implicite de rejet. Le ministre relève appel du jugement du 20 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la délibération du 10 mars 2021 en tant que le nom de M. B... ne figure pas parmi les admis ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux et qu'il l'a enjoint à prendre des mesures nécessaires pour reconstituer la carrière du requérant en le nommant, le cas échéant, brigadier de police.
2. Pour prononcer l'annulation des décisions en litige, le tribunal a, sur le fondement de l'article R. 612-6 du code de justice administrative et en l'absence de production de mémoire en défense, regardé le ministre comme ayant acquiescé aux faits invoqués par le requérant et admis les moyens du requérant qui faisait valoir, d'une part, l'absence de justification de la composition régulière du jury et, d'autre part, une erreur de fait entachant la notation de l'une des épreuves de l'examen professionnel.
3. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 15 janvier 2010 fixant le contenu et les modalités des examens professionnels pour l'accès au grade de brigadier de police : " Le ministre de l'intérieur nomme, par arrêté, les membres du jury. Le jury comprend : - le directeur général de la police nationale ou son représentant, président ; - le directeur central du recrutement et de la formation de la police nationale ou son représentant, vice-président ; - le directeur des ressources et des compétences de la police nationale ou son représentant ; - cinq représentants des directions actives autres que la direction des ressources et des compétences de la police nationale et la direction centrale du recrutement et de la formation de la police nationale ; - un représentant de la préfecture de police ; - un représentant du corps de commandement de la police nationale ; - des fonctionnaires du corps d'encadrement et d'application de la police nationale au moins titulaires du grade de brigadier de police. Des correcteurs et examinateurs qualifiés sont désignés pour participer à la notation des diverses épreuves. Ils participent aux délibérations du jury avec voix consultative pour l'attribution des notes se rapportant aux épreuves qu'ils ont corrigées ".
4. Il ressort de l'arrêté du 30 juin 2020 fixant la composition du jury de l'examen professionnel pour l'accès au grade de brigadier de police-session 2021 et de l'arrêté modificatif du 21 août 2020 que le ministre de l'intérieur a fixé la composition de ce jury conformément aux dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 15 janvier 2010, contrairement à ce que soutient M. B... en défense, qui ne remet pas en cause les fonctions et affectations de ces différentes personnalités ainsi désignées pour faire partie du jury. Par suite, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la composition du jury était irrégulière.
5. En second lieu, il n'appartient pas au juge administratif de contrôler l'appréciation faite par un jury de la valeur des candidats. Il lui appartient en revanche de vérifier que le jury a formé cette appréciation sans méconnaître les normes qui s'imposent à lui et que les notes qui ont été attribuées ne l'ont pas été sur le fondement d'autres considérations que la seule valeur des prestations des candidats.
6. M. B... fait valoir que la note de 0/40 qu'il a obtenue à l'épreuve de rédaction d'un procès-verbal est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation. Il soutient à ce titre qu'il a, contrairement à l'appréciation portée par le notateur qui avait relevé que l'heure d'interpellation n'avait pas été précisée à la première page et que, si elle avait été mentionnée plus tard, elle était erronée, avoir précisé l'heure correcte d'interpellation dans son devoir et que l'erreur sur l'endroit où cette heure devait figurer ne pouvait pas être sanctionnée par la note de 0. Toutefois, par ce moyen, il doit en réalité être regardé comme contestant l'appréciation souveraine du jury, alors que par ailleurs, en tout état de cause, la fiche relative aux " éléments de correction et de notation des procès-verbaux et de la note de renseignement " n'avait qu'un caractère indicatif pour les correcteurs. Par suite, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est également fondé à soutenir que le tribunal a, à tort, estimé qu'une erreur de fait entachait d'illégalité les décisions contestées.
7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé la délibération du 10 mars 2021 par laquelle il a fixé la liste des candidats admis à l'examen professionnel pour l'accès au grade de brigadier de police au titre de l'année 2021 en tant que M. B... n'y figure pas ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux et a enjoint au ministre de prendre les mesures nécessaires pour reconstituer la carrière de l'intéressé. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. B... au titre de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 20 juillet 2023 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant ce tribunal ainsi que ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- Mme Bories, présidente assesseure,
- M. Magnard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 octobre 2024.
La rapporteure,
C. BORIESLa présidente,
S. VIDAL
La greffière,
C. ABDI-OUAMRANE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA04122 2