Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.
Par un jugement n° 2326557/8 du 14 février 2024, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 février 2024, Mme B..., représentée par Me Megherbi, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 14 février 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 2 novembre 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " salarié ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,
- et les observations de Me Megherbi, avocat de Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante algérienne née en 1989, a sollicité, le 15 juin 2022, son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 2 novembre 2023, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée. Mme B... fait appel du jugement du 14 février 2024 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de certificat de résidence :
2. En premier lieu, si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne prévoit pas de modalités d'admission exceptionnelle au séjour semblables à celles figurant à l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
3. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que même si le préfet de police s'est fondé sur les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser l'admission exceptionnelle au séjour de Mme B..., il doit toutefois être regardé comme ayant exercé en réalité son pouvoir discrétionnaire de régularisation d'une ressortissante algérienne au regard de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels. En l'espèce, si la requérante justifie, par les pièces produites en appel comme en première instance, qu'elle a séjourné régulièrement en France entre 2012 et 2020 et qu'elle y exerce une activité salariée d'assistante administrative dans divers centres de santé depuis près de six ans à la date de l'arrêté attaqué, ces circonstances ne sauraient toutefois faire regarder le préfet de police comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant son admission exceptionnelle au séjour au titre de son pouvoir de régularisation dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressée a séjourné régulièrement en France essentiellement pour y suivre des études entre novembre 2012 et novembre 2018, qu'elle est célibataire et sans charge de famille en France et qu'elle a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 22 ans. Par suite, ce moyen doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Compte tenu de la situation professionnelle et personnelle de Mme B... exposée au point 3, le rejet de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2024.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,
B. AUVRAY
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 24PA00885