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29/07/2024 | FRANCE | N°23PA00168

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 3ème chambre, 29 juillet 2024, 23PA00168


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'ordonner, avant dire droit, une mesure d'expertise, et de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), ou à défaut l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), à lui verser la somme de 369 758,61 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa prise en charge par l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière en décembre 2014.



Par un jugement

n° 2108396/6-2 du 15 novembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'ordonner, avant dire droit, une mesure d'expertise, et de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), ou à défaut l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), à lui verser la somme de 369 758,61 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa prise en charge par l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière en décembre 2014.

Par un jugement n° 2108396/6-2 du 15 novembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires enregistrés les 12 janvier 2023, 28 décembre 2023, 2 février 2024 et 16 février 2024, M. A..., représenté par Me Maupeu, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 novembre 2022 ;

2°) d'ordonner, avant dire droit, une mesure d'expertise ;

3°) de condamner l'AP-HP, ou à défaut l'ONIAM, à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de provision, dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ;

4°) de mettre à la charge de l'AP-HP, ou à défaut de l'ONIAM, les dépens ainsi que la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la responsabilité pour faute de l'AP-HP est engagée ; les manquements commis par les services de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière en ce qui concerne les délais d'injection et la surveillance de l'administration de Calciparine présentent un lien de causalité directe avec la survenue d'un hématome le 29 décembre 2014 ;

- l'hématome compressif à l'origine de ses séquelles a été tardivement diagnostiqué ; des examens précoces auraient dû être réalisés afin de le détecter ;

- l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière a manqué à son devoir d'information ; il n'a reçu aucun élément sur son état de santé, les traitements envisagés et les risques encourus ;

- à titre subsidiaire, ses préjudices doivent être réparés par la solidarité nationale, dès lors que le dommage qu'il subit est directement imputable à des actes de soins, que la survenue d'un hématome compressif a eu des conséquences anormales et graves, et que le risque de complications graves avec atteinte neurologique séquellaire d'un membre inférieur en cas de traitement par Calciparine est exceptionnel ;

- il y a lieu d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise, dès lors que les deux expertises déjà réalisées présentent des contradictions et que ses préjudices n'ont pas été évalués avec une précision suffisante.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 décembre 2023, l'AP-HP, représentée par Me Tsouderos, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

La clôture de l'instruction a été fixée au 26 mars 2024.

Vu :

- le code de la santé publique,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Maupeu, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 20 octobre 1952, s'est vu diagnostiquer en janvier 2014 une glomérulonéphrite extra-membraneuse de type 1, idiopathique, qui a d'abord fait l'objet d'un traitement néphroprotecteur, adapté aux antécédents d'hypertension et de diabète de l'intéressé. Il a été hospitalisé à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière du 19 au 21 septembre 2014, en raison d'une aggravation de son état de santé. Un protocole de traitement " Ponticelli " a été mis en œuvre. M. A... a été ensuite hospitalisé à deux reprises en novembre 2014, dans le même hôpital, du fait d'un érysipèle ; des antibiotiques lui ont été administrés et son traitement contre le diabète a dû être adapté. Le 13 décembre 2014, il a été à nouveau hospitalisé, et des germes infectieux ont été retrouvés. Son traitement antibiotique a été modifié, et les médicaments contre la glomérulonéphrite extra-membraneuse ont été revus ou supprimés. L'insuffisance rénale et les œdèmes se sont aggravés, et un traitement anticoagulant a été mis en place par Calciparine, en prévention d'une maladie thromboembolique veineuse. Si l'évolution de la maladie infectieuse a été favorable, l'insuffisance rénale de M. A... est demeurée, et il a été hospitalisé en néphrologie du 27 décembre 2014 au 7 janvier 2015. Il y a été notamment traité par Calciparine en vue d'obtenir une anticoagulation curative. Fin décembre 2014, un hématome compressif du psoas droit a été diagnostiqué, accompagné d'un déficit sensitivomoteur. Le traitement anticoagulant a alors été arrêté, mais l'intéressé a conservé des séquelles du fait de l'atteinte du nerf crural droit, avec un déficit moteur persistant du quadriceps.

2. Le 10 novembre 2015, M. A... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) d'Île-de-France, qui a ordonné une expertise, confiée à un infectiologue et à un médecin polyvalent. Après le dépôt du rapport d'expertise, le 15 septembre 2016, la commission s'est estimée incompétente par des avis des 15 décembre 2016 et 20 février 2018, considérant notamment que le dommage subi n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier une réparation par la solidarité nationale. Le 21 août 2018, M. A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris d'ordonner une nouvelle expertise. Le médecin néphrologue désigné par une ordonnance du 19 décembre 2018 a déposé son rapport le 20 juin 2019. M. A... relève appel du jugement du 15 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce qu'une nouvelle expertise soit ordonnée, ou, à titre subsidiaire, à ce que l'AP-HP ou l'ONIAM soient condamnés à lui verser la somme totale de 369 758,61 euros en réparation des préjudices subis.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur la responsabilité de l'AP-HP :

En ce qui concerne les fautes médicales invoquées :

3. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".

4. Il résulte de l'instruction, notamment des deux rapports d'expertise déposés les 15 septembre 2016 et 20 juin 2019, que l'administration à M. A... d'un traitement anticoagulant par Calciparine, en décembre 2014, était indiquée en vue de permettre la prévention du risque thromboembolique, chez un patient atteint d'un syndrome néphrotique et dont l'insuffisance rénale contre-indiquait l'emploi d'autres anticoagulants plus modernes. En revanche, il résulte de l'instruction que des manquements dans les modalités d'administration et de surveillance de ce traitement ont été commis par les services de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Ainsi, alors que des injections à intervalles précis de huit heures et des contrôles réguliers devaient être effectués afin de vérifier l'anticoagulation obtenue et de détecter un éventuel surdosage, aucun contrôle n'a été retrouvé par les experts le 25 décembre 2014, après un changement de posologie décidé la veille ; par ailleurs, le 28 décembre 2014 au matin, une injection a été probablement anticipée d'environ une heure trente ; en outre, le 29 décembre 2014 à 6 heures, la première injection de la journée a été réalisée environ douze heures après la précédente, effectuée la veille à 17 heures 52 ; enfin, le contrôle sanguin prévu après la première injection du 29 décembre 2014 a été réalisé prématurément, soit deux heures après l'injection au lieu des quatre heures recommandées. Comme l'ont relevé les premiers juges, M. A... est par suite fondé à soutenir que sa prise en charge par les services de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière a été fautive en ce qui concerne la gestion du traitement par Calciparine qui lui a été administré.

5. Il résulte également de l'instruction que M. A... a été victime d'un hématome du psoas droit qui a, par effet compressif, atteint le nerf crural droit. Cette atteinte neurologique a conduit à un déficit sensitivomoteur du quadriceps, dommage dont l'intéressé demande réparation. Or, les premières douleurs engendrées par cet hématome sont survenues dans la nuit du 28 au 29 décembre 2014, les symptômes cliniques de l'hématome ayant été relevés par les infirmières le 29 décembre 2014, notamment en ce qui concerne le déficit sensitivomoteur, et un scanner a permis le diagnostic précis le matin du 30 décembre 2014. Il résulte de l'instruction, notamment du second rapport d'expertise, et au regard en outre de cette chronologie des faits, qu'aucun lien direct ne peut être établi entre les manquements relevés au point 4 du présent arrêt et la survenue de l'hématome. Ainsi, aucune phase d'hypocoagulation n'a été détectée dans les heures précédant la constitution de l'hématome, le contrôle sanguin réalisé prématurément le 29 décembre 2014, dont le résultat était satisfaisant, étant sans incidence à cet égard dans la mesure où les premières douleurs liées à l'hématome ont été signalées dans la nuit du 28 au 29 décembre. Par ailleurs, comme l'ont relevé les premiers juges, les résultats des contrôles effectués étaient, depuis deux jours, dans les zones thérapeutiques attendues, alors que, jusqu'au 27 décembre 2014, l'anticoagulation obtenue était insuffisante. Si les premiers experts, désignés par la CCI d'Île-de-France, laquelle mentionne dans son avis la formation d'un hématome spontané, ont évoqué une perte de chance de 80 % d'éviter le dommage, ils ont reconnu l'absence de lien direct et certain entre le dommage et les manquements dans la gestion du traitement anticoagulant, et relevé l'absence d'études épidémiologiques permettant de préciser une perte de chance d'éviter un risque hémorragique, soulignant que le taux de 80 % proposé découlait de ce que ledit risque était très important au-delà des zones thérapeutiques décidées ; or, comme il vient d'être dit, les contrôles effectués n'ont pas montré de surdosage ou d'écart avec les zones thérapeutiques attendues, la seconde expertise ajoutant que le résultat du contrôle biologique effectué était également dans la zone thérapeutique attendue le jour de l'expression clinique de l'hématome, le 29 décembre 2014. Cette dernière expertise relève que la seule éventualité que l'horaire d'injection de l'anticoagulant ait pu être avancée d'une heure trente la veille de cette expression clinique ne suffit pas à entraîner un risque de surdosage significatif et par suite un lien de causalité direct et certain avec la formation d'un hématome, alors en outre que les risques de complications hémorragiques sous Calciparine sont fréquents en l'absence même de surdosage. Il s'ensuit que les manquements relevés au point 4 du présent arrêt ne peuvent être regardés comme étant à l'origine des dommages subis par M. A... du fait de la survenue d'un hématome du psoas droit.

6. M. A... soutient enfin que l'hématome qui l'a affecté a été diagnostiqué, le matin du 30 décembre 2014, avec un retard de vingt-quatre heures. Il indique à cet égard, s'appuyant sur un avis non-contradictoire qu'il a recueilli en 2024 auprès d'un médecin anesthésiste spécialisé dans le domaine des expertises judiciaires, que, dès lors que les premières douleurs sont apparues dans la nuit du 28 au 29 décembre, et que le déficit sensitivomoteur a été signalé dans la matinée du 29 décembre 2014, un électromyogramme précoce aurait dû être immédiatement réalisé et un avis chirurgical aurait dû être sollicité. Toutefois, cet avis n'évoque qu'une éventualité, sans mentionner de recommandations ou de règles de l'art qui auraient été méconnues, et les deux premières expertises n'ont relevé aucun manquement des services de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière quant au délai dans lequel la survenue d'un hématome du psoas a été diagnostiquée. M. A... n'est donc pas fondé à invoquer la commission d'une faute médicale du fait d'un retard de diagnostic.

En ce qui concerne le défaut d'information :

7. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. (...) / En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. ". Et aux termes de l'article L. 1111-4 du même code : " (...) Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. (...) ".

8. Il résulte de ces dispositions que doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui, soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risques graves, quelle que soit leur fréquence. En cas de manquement à cette obligation d'information, si l'acte de diagnostic ou de soin entraîne pour le patient, y compris s'il a été réalisé conformément aux règles de l'art, un dommage en lien avec la réalisation du risque qui n'a pas été porté à sa connaissance, la faute commise en ne procédant pas à cette information engage la responsabilité de l'établissement de santé à son égard, pour sa perte de chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'opération. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction, compte tenu de ce qu'était l'état de santé du patient et son évolution prévisible en l'absence de réalisation de l'acte, des alternatives thérapeutiques qui pouvaient lui être proposées ainsi que de tous autres éléments de nature à révéler le choix qu'il aurait fait, qu'informé de la nature et de l'importance de ce risque, il aurait consenti à l'acte en question.

9. Il résulte de l'instruction, notamment des deux expertises réalisées en 2016 et 2019, qu'il n'existe au dossier aucun élément établissant qu'une information adaptée aurait été portée à la connaissance de M. A... et qu'il aurait consenti aux soins de manière éclairée, en particulier en ce qui concerne les risques d'un traitement anticoagulant. Toutefois, il résulte de l'instruction que ce traitement était indiqué dans la situation de l'intéressé, en vue d'éviter un risque thromboembolique lié à son insuffisance rénale, et qu'il n'existait pas d'alternative thérapeutique à la Calciparine, cette insuffisance rénale contre-indiquant l'emploi d'autres anticoagulants plus modernes. M. A..., qui ne se prévaut d'aucune alternative thérapeutique, n'a donc pas perdu de chance de se soustraire au risque survenu en renonçant à l'opération s'il avait été correctement informé.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la responsabilité pour faute de l'AP-HP n'est pas engagée du fait des dommages subis par M. A..., imputables à la survenue spontanée d'un hématome du psoas.

Sur la réparation au titre de la solidarité nationale :

11. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " (...) II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. (...) ".

12. Il résulte de ces dispositions que l'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation des dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la double condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état et que leur gravité excède le seuil défini à l'article D. 1142-1 du code de la santé publique. La condition d'anormalité du dommage prévue par les dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible.

13. D'une part, il résulte de l'instruction, notamment des rapports d'expertise et des écritures de premières instances de l'ONIAM, non contredites par M. A..., qu'en l'absence de traitement anticoagulant, l'intéressé aurait été exposé à un risque thromboembolique majeur du fait de la gravité de son atteinte rénale. Par suite, les soins prodigués au requérant, qui est atteint d'un déficit moteur persistant du quadriceps, et dont le taux de déficit fonctionnel permanent a été fixé à 20 % par la seconde expertise, n'ont pas entrainé de conséquences notablement plus graves que celles auxquelles il aurait été probablement exposé en l'absence d'administration d'un traitement anticoagulant.

14. D'autre part, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, les dommages subis par M. A... sont imputables à la survenue d'un hématome compressif, lequel a lésé le nerf crural droit. Il s'agit donc d'une complication d'origine hémorragique, ayant eu des conséquences neurologiques, et non, comme soutenu par l'appelant, d'une complication directement neurologique. Or, il résulte de l'instruction, notamment du rapport de la seconde expertise, ordonnée par le tribunal administratif, que les complications hémorragiques sont l'évènement iatrogène le plus fréquent, et que ces dernières surviennent lors d'un traitement par Calciparine dans environ 10 % des cas. Dès lors, la survenance du dommage ne présentait pas une probabilité faible en l'espèce. Par suite, le dommage subi par M. A... ne peut être regardé comme anormal au sens des dispositions précitées du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique. Il s'ensuit qu'aucune indemnisation ne peut être mise à la charge de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale.

15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise dans la mesure où les deux rapports d'expertise, demandées par la CCI d'Île-de-France et par le tribunal administratif, ne présentant pas d'éléments contradictoires quant aux questions de faits auxquelles ils répondent et ayant été soumis au débat contradictoire, permettent d'apprécier le bien-fondé des demandes indemnitaires, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes, et que ses conclusions d'appel doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'AP-HP ou de l'ONIAM, qui ne sont pas les parties perdantes au cours de la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) et à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juillet 2024.

La rapporteure,

G. C...Le président,

I. LUBENLa greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23PA00168


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00168
Date de la décision : 29/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : TSOUDEROS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-29;23pa00168 ?
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