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12/07/2024 | FRANCE | N°23PA01731

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 12 juillet 2024, 23PA01731


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 26 avril 2022 par lequel la présidente de la Sorbonne Université a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de licenciement sans préavis ni indemnités à compter du 2 mai 2022.



Par un jugement n° 2214163/5-3 du 22 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cour :



Par une

requête et des mémoires, enregistrés le 24 avril 2023, le 20 juin 2023, le 28 septembre 2023, le 20 octobre 2023 et le 5 décembre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 26 avril 2022 par lequel la présidente de la Sorbonne Université a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de licenciement sans préavis ni indemnités à compter du 2 mai 2022.

Par un jugement n° 2214163/5-3 du 22 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 avril 2023, le 20 juin 2023, le 28 septembre 2023, le 20 octobre 2023 et le 5 décembre 2023, M. B..., représenté par Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2214163/5-3 du 22 février 2023 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 avril 2022 par lequel la présidente de la Sorbonne Université a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de licenciement sans préavis ni indemnités à compter du 2 mai 2022 ;

3°) de mettre à la charge de la Sorbonne Université le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé dans sa réponse aux moyens tirés de l'irrégularité de procédure entachant la décision attaquée et de la disproportion entre la sanction prononcée et les faits reprochés ;

- la décision attaquée n'est pas suffisamment motivée ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, la commission consultative paritaire étant irrégulièrement composée ;

- elle a été prise en méconnaissance de ses droits de la défense et du principe du contradictoire faute de communication de son entier dossier ;

- elle a été prise en violation des principes protégés par le paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 méconnaît le principe d'égalité de traitement entre agents contractuels ainsi que les droits de la défense et est contraire à la constitution ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation ;

- la sanction prononcée est disproportionnée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 juillet 2023 et le 19 octobre 2023, l'établissement Sorbonne Université, représenté par Me Bellanger, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement d'une somme de 3 000 euros soit mis à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique,

- les observations de Me Sanchez pour M. B...,

- les observations de Me Bellanger pour Sorbonne Université,

- et les observations de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., docteur en mathématiques recruté par l'établissement public Sorbonne Université en qualité d'attaché temporaire d'enseignement et de recherche pour la période du 1er septembre 2021 au 31 août 2022, a fait l'objet, après une mesure de suspension conservatoire, de la sanction disciplinaire de licenciement sans indemnités ni préavis à compter du 2 mai 2022 par arrêté du 26 avril 2022. M. B... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient le requérant, le Tribunal a suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce que la commission consultative paritaire étant irrégulièrement composée alors même qu'ils n'ont pas statué sur le moyen tiré du défaut de quorum et de tirage au sort, dès lors qu'ils ont considéré le moyen comme inopérant, faute pour M. B... d'avoir été privé d'une garantie par les conditions dans lesquelles cette commission a émis son avis.

3. Le jugement attaqué a également suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction en litige, compte tenu de ses motifs sur les circonstances de l'espèce et la nature des faits reprochés à l'intéressé et considérés comme établis.

Sur la légalité de l'arrêté du 26 avril 2022 :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :

4. En premier lieu, la circonstance que la décision attaquée a visé, entre autres textes, le code de la fonction publique entré en vigueur le 1er mars 2022, soit postérieurement aux faits reprochés à M. B... est, par elle-même, sans incidence sur sa légalité externe.

5. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe n'impose que l'avis de la commission consultative paritaire soit annexé à une décision prononçant un licenciement pour motif disciplinaire, et le fait de n'avoir mentionné que la " consultation " de cette commission et pas " l'avis " rendu par celle-ci n'entache pas la régularité de ladite décision.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2.2 de l'arrêté du 27 septembre 2018 de création, de composition, d'organisation et de fonctionnement de la commission consultative paritaire de Sorbonne Université : " " La commission consultative paritaire de Sorbonne Université est composée ainsi à partir du 6 décembre 2018 : / - Sept représentantes ou représentants de l'administration titulaires et sept représentantes ou représentants de l'administration suppléants, désignés par la Présidente ou le Président de l'université. / - Sept représentantes ou représentants des personnels titulaires et sept représentantes ou représentants des personnels suppléants (...) ". Ce même article précise ensuite que les sept représentants sont répartis en trois titulaires et trois suppléants pour les personnels de catégorie A, deux titulaires et deux suppléants pour les personnels de catégorie B, ainsi que deux titulaires et deux suppléants pour les personnels de catégorie C. L'article 3.9 de ce même arrêté dispose par ailleurs que : " Lorsque l'organisation syndicale candidate ne peut désigner dans ce délai tout ou partie de ses représentantes ou représentants sur le ou les sièges auxquels elle a droit, ces sièges demeurent non attribués. Il est procédé à un tirage au sort parmi la liste des électrices ou des électeurs à la commission, éligibles au moment de la désignation et appartenant au niveau de la catégorie à représenter ".

7. L'article 3 du règlement intérieur de la commission consultative paritaire de Sorbonne Université du 15 avril 2019 dispose par ailleurs que : " La commission consultative paritaire siège en formation restreinte à chaque catégorie au sens de l'article 13 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée pour l'examen de questions individuelles. / Seuls les membres siégeant représentant le niveau de catégorie de l'agente ou de l'agent dont la situation est soumise à l'examen de la commission et les membres siégeant représentant le niveau de catégorie supérieure ainsi qu'un nombre égal de membres de l'administration sont convoqués. / Lorsque l'agente ou l'agent dont la situation est soumise à l'examen de la commission appartient à la catégorie A, les représentantes ou représentants de cette catégorie siègent avec leurs suppléantes ou suppléants qui ont alors voix délibérative. (...) Il est fait application de la procédure de tirage au sort prévue au deuxième alinéa de l'article 3.9 de l'arrêté du 27 septembre 2018 portant sur la création et la composition de la commission consultative paritaire de Sorbonne Université lorsque lors de l'examen d'une situation individuelle la composition en vigueur de la commission ne permet pas de réunir le quorum exigé. ". L'article 8 du même règlement dispose que : " La commission ne délibère valablement que si les trois quarts au moins de ses membres ayant voix délibérative sont présents lors de l'ouverture de la réunion. / Le quorum susmentionné se calcule sur le nombre total des représentantes ou représentants en exercice de l'administration et du personnel (...) ". Enfin, aux termes de l'article 10 du règlement précité : " La commission émet ses avis à la majorité des membres présents ayant voix délibérative. Seuls les membres siégeant représentant le niveau de catégorie de l'agente ou de l'agent dont la situation est soumise à l'examen de la commission et les membres siégeant représentant le niveau de catégorie supérieure ainsi qu'un nombre égal de membres de l'administration sont appelés à délibérer. (...). "

8. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, du procès-verbal de la séance de la commission consultative paritaire qui s'est tenue le 20 avril 2022 pour émettre un avis sur la sanction envisagée à l'encontre de M. B..., agent de catégorie A, qu'ont participé au vote quatre représentants des personnels de catégorie A et 5 représentants de l'administration, le quorum étant, en application des dispositions précitées, des trois quarts de 12 titulaires et suppléants, soit de 9 votants. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en l'absence de quorum, la commission consultative ayant émis un avis sur la sanction était irrégulièrement composée et que, par suite, la décision attaquée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière.

9. Si M. B... soutient que la composition de la commission consultative paritaire aurait été irrégulière compte tenu de la présence de certains membres n'étant pas impartiaux à son égard, il ne l'établit pas en se bornant à faire état des difficultés, exprimées pendant les débats par certains de ces membres, à apprécier les circonstances de l'affaire soumise à cette commission.

10. Si M. B... allègue ensuite ne pas avoir pu consulter l'intégralité des pièces de son dossier administratif et que n'y figurait pas le dépôt de plainte de Mme C... ainsi que le rapport synthétique, il ressort des pièces du dossier que le requérant a eu communication de ces pièces lors de son entretien préalable le 5 avril 2022, soit 15 jours avant la réunion de la commission consultative paritaire, et qu'il a donc été en mesure d'en prendre connaissance et de préparer sa défense sur ces éléments.

11. Si les témoignages recueillis dans l'entourage professionnel et amical de M. B... et de Mme C... ont été communiqués au requérant anonymisés, afin de les protéger du risque de pressions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que ce faisant ses droits de la défense auraient été méconnus, dès lors que l'ensemble des pièces et témoignages ainsi anonymisés ont été soumis au débat contradictoire et que leur teneur était confortée par des éléments non anonymisés versés au dossier.

12. Ainsi que l'a exactement considéré le Tribunal, aucun texte n'impose la convocation d'un agent contractuel de l'établissement public Sorbonne Université devant la commission consultative paritaire amenée à émettre un avis sur une sanction disciplinaire le concernant.

13. Enfin, M. B... ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que la commission consultative paritaire ne disposant d'aucun pouvoir de décision et se bornant à émettre un avis destiné à l'autorité compétente sur le principe et, le cas échéant, le quantum de la sanction disciplinaire qu'elle envisage de prononcer, elle ne constitue ni une juridiction, ni un tribunal au sens des stipulations de cet article 6, paragraphe 1.

En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée

14. Pour infliger au requérant la sanction de licenciement sans préavis, ni indemnités, la présidente de Sorbonne Université a relevé que, entre les mois d'octobre et décembre 2021, celui-ci a commis à l'encontre de Mme C... " des actes de violences physiques et morales accompagnés de messages menaçants ; des actes de filature sur le campus Pierre et Marie Curie ; des menaces d'interrompre son doctorat ; de l'avoir isolé de ses collègues et rendu difficile tout travail collaboratif avec elle du fait de l'isolement qu'il lui a imposé. ".

15. M. B... reprend en appel les moyens tirés de ce que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis, de ce que la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait en ce qui concerne son pouvoir hiérarchique sur Mme C..., sans apporter en appel d'élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges sur ces moyens. Par suite, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.

16. Compte tenu de la gravité des faits commis par M. B... et de leurs conséquences sur l'ensemble du service dans lequel ils se sont en partie déroulés, la sanction prononcée par la présidente de Sorbonne Université ne revêt pas, dans les circonstances de l'espèce, un caractère disproportionné.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 avril 2022 par lequel la présidente de Sorbonne Université a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de licenciement sans préavis ni indemnités à compter du 2 mai 2022.

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Sorbonne Université, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme que Sorbonne Université demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de Sorbonne Université présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à Sorbonne Université.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Paris, chancelier des universités

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juillet 2024

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

B. AUVRAY

La greffière,

L. CHANALa République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA01731


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01731
Date de la décision : 12/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : LERAT

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-12;23pa01731 ?
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