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12/07/2024 | FRANCE | N°22PA03074

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 12 juillet 2024, 22PA03074


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée Otico a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer le remboursement du crédit d'impôt recherche et du crédit d'impôt innovation qu'elle a sollicité au titre de l'année 2017.



Par un jugement no 1809504 du 12 mai 2022, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 juillet 2022

et 17 octobre 2022, la société Otico, représentée par la SELARL Bayet et associés, demande à la Cour :





1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Otico a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer le remboursement du crédit d'impôt recherche et du crédit d'impôt innovation qu'elle a sollicité au titre de l'année 2017.

Par un jugement no 1809504 du 12 mai 2022, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 juillet 2022 et 17 octobre 2022, la société Otico, représentée par la SELARL Bayet et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 mai 2022 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la restitution du crédit d'impôt recherche et du crédit d'impôt innovation sollicitée au titre de l'année 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce que qu'a retenu l'administration, les dépenses de personnel afférentes aux techniciens étaient éligibles aux crédits d'impôt recherche et innovation dès lors que ces salariés collaborent étroitement avec des chercheurs et ont réalisé des tâches dans le cadre de projets de recherche ;

- la décision du 26 juin 2019 par laquelle l'administration a admis l'éligibilité des dépenses de personnel relatives à M. A... et M. B... au titre des crédits d'impôt recherche des années 2014 à 2016 constitue une prise de position formelle opposable à l'administration sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 29 septembre 2022 et 21 octobre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Zeudmi Sahraoui.

Considérant ce qui suit :

1. La société Otico, qui exerce une activité de fabrication d'articles en caoutchouc, a déposé, le 19 mars 2018, une demande de remboursement d'un crédit d'impôt recherche (CIR) et d'un crédit d'impôt innovation (CII) au titre de l'année 2017 pour un montant de 206 587 euros. Par une décision du 6 septembre 2018, l'administration a fait droit à la demande de la société à hauteur de 194 758 euros. La société Otico demande l'annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant au remboursement du surplus de ces crédits d'impôt pour dépenses de recherche et d'innovation, soit 11 829 euros.

Sur la demande de restitution des crédits d'impôt recherche et innovation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 quindecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) / II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : / (...) / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. / (...) / k) Les dépenses exposées par les entreprises qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité et définies comme suit : / (...) / 2° Les dépenses de personnel directement et exclusivement affecté à la réalisation des opérations mentionnées au 1° ; (...) ". Aux termes de l'article 49 septies G de l'annexe III au même code : " Le personnel de recherche comprend : / 1. Les chercheurs qui sont les scientifiques ou les ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. Sont assimilés aux ingénieurs les salariés qui, sans posséder un diplôme, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise. / 2. Les techniciens, qui sont les personnels travaillant en étroite collaboration avec les chercheurs, pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche et de développement expérimental. / Notamment : / Ils préparent les substances, les matériaux et les appareils pour la réalisation d'expériences ; / Ils prêtent leur concours aux chercheurs pendant le déroulement des expériences ou les effectuent sous le contrôle de ceux-ci ; / Ils ont la charge de l'entretien et du fonctionnement des appareils et des équipements nécessaires à la recherche et au développement expérimental. / Dans le cas des entreprises qui ne disposent pas d'un département de recherche, les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt sont exclusivement les rémunérations versées aux chercheurs et techniciens à l'occasion d'opérations de recherche. ".

3. Pour l'application des dispositions précitées, peuvent être qualifiés de techniciens de recherche les salariés qui réalisent des opérations nécessaires aux travaux de recherche ou de développement expérimental éligibles au crédit d'impôt recherche, sous la conduite d'un ou plusieurs chercheurs qui les supervisent. N'y fait pas obstacle la circonstance que ces salariés ne disposeraient pas d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle dans le domaine scientifique.

4. Il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet, et compte tenu, le cas échéant, de tous éléments produits par l'une ou l'autre des parties, qu'une entreprise remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 244 quater B du code général des impôts.

5. Il résulte de l'instruction que l'administration a estimé que les dépenses de personnel afférentes à sept salariés n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche et au crédit d'impôt innovation dès lors que ceux-ci occupaient des emplois d'ouvriers et d'agent de maîtrise et que la société n'avait produit ni curriculum vitae ni diplôme. Le ministre fait par ailleurs valoir en défense qu'il n'est pas établi que ces salariés aient travaillé en étroite collaboration avec des chercheurs sur des projets de recherche et que leur intervention était indispensable à la réalisation des travaux de recherche.

6. La société Otico soutient que ces salariés ont réalisé des tâches dans le cadre de projets de recherche, notamment des essais d'injection, des tâches de montage moule/maintenance dans le cadre du projet n° 1, des essais de moulage courroies dans le cadre du projet n° 3, et ont travaillé en étroite collaboration avec des chercheurs. Toutefois, la société requérante se borne à produire à l'appui de ses allégations un tableau, établi pour les besoins de la cause, mentionnant les tâches réalisées, les projets de recherche concernés et le nom du chercheur sous la direction duquel ces missions auraient été accomplies ainsi que des tableaux retraçant le nombre d'heures réalisées et le rapport de présentation des projets de recherche. Ces éléments ne sont pas suffisants pour considérer que les sept salariés concernés ont réalisé des opérations nécessaires aux travaux de recherche sous la conduite de chercheurs. La société Otico ne peut utilement se prévaloir de l'avis rendu le 18 octobre 2018 par l'expert du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, qui porte sur les crédits d'impôt recherche et innovation au titre de l'année 2015. Dès lors, la société Otico n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration n'a pas tenu compte, pour le remboursement du CIR et du CII au titre de l'année 2017, des dépenses de personnel afférentes aux sept salariés concernés.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) ". La garantie prévue par l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ne peut être invoquée que pour contester l'établissement ou le rehaussement d'une imposition.

8. La décision refusant d'accorder le crédit d'impôt recherche ne constituant pas un rehaussement d'imposition, la société Otico ne peut, en tout état de cause, se prévaloir de l'existence d'une prise de position formelle contenue dans la décision du 26 juin 2019 par laquelle l'administration a admis l'éligibilité des dépenses de personnel afférentes à deux salariés au titre des crédits d'impôt recherche et innovation, d'ailleurs au titre des années 2014 à 2016.

9. Enfin, la société Otico ne soulève aucun moyen relatif à la prise en compte, par l'administration, des dépenses engagées pour la réalisation d'opération de recherche confiées à des organismes agréés pour leur montant réel et non pour le double de ce montant.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Otico n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la restitution des crédits d'impôt recherche et innovation au titre de l'année 2017.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la société Otico et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par la société Otico est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Otico et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France (Pôle contrôle fiscal et affaires juridiques service du contentieux d'appel déconcentré).

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure ;

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juillet 2024.

La rapporteure,

N. ZEUDMI SAHRAOUILe président,

B. AUVRAY

La greffière,

L. CHANA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03074


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03074
Date de la décision : 12/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : SELARL BAYET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-12;22pa03074 ?
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