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04/07/2024 | FRANCE | N°24PA01094

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 04 juillet 2024, 24PA01094


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2022 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.



Par une ordonnance du 9 août 2022, le président du Tribunal administratif de Paris a transmis le dossier de la requête de M. B... au Tribunal administratif de Melun.



Par un jugement n° 2207899 du 12 janvier 2024, la magistrate désignée par la présidente du Tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2022 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par une ordonnance du 9 août 2022, le président du Tribunal administratif de Paris a transmis le dossier de la requête de M. B... au Tribunal administratif de Melun.

Par un jugement n° 2207899 du 12 janvier 2024, la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2024, M. B..., représenté par Me Gozlan, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 janvier 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 11 juillet 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de lui délivrer, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de police, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que le juge d'appel était susceptible de procéder d'office à une substitution de base légale, la décision attaquée portant obligation de quitter le territoire français trouvant sa base légale, non dans les dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais dans celles du 2° du même article.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Desvigne-Repusseau a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 11 juillet 2022, le préfet de police a obligé M. B..., ressortissant marocain né le 3 juin 1991, à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. M. B... fait appel du jugement du 12 janvier 2024 par lequel la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée / (...) ".

3. La décision attaquée, qui vise les dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. B... " ne peut justifier d'un titre de séjour pour se maintenir sur le territoire français " et qu'il " ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français ". Ainsi, cette décision comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par ailleurs, l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser tous les éléments de la situation d'un ressortissant étranger en l'absence d'obligation en ce sens, et la motivation de la décision attaquée s'apprécie indépendamment du bien-fondé des motifs retenus par le préfet de police. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité / 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré ou, n'étant pas soumis à l'obligation du visa, entré en France plus de trois mois auparavant, s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour ou, le cas échéant, sans demander le renouvellement du titre de séjour temporaire ou pluriannuel qui lui a été délivré / (...) ".

5. Comme il a été dit au point 3, le préfet de police s'est fondé, pour prononcer à l'encontre de M. B... une obligation de quitter le territoire français, sur les dispositions précitées du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en relevant notamment que M. B... ne pouvait justifier être entré régulièrement en France. Or, le requérant justifie en appel comme en première instance être entré sur le territoire français le 29 septembre 2012 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ", valable du 26 septembre 2012 au 26 septembre 2013. Par suite, le préfet de police ne pouvait se fonder sur les dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée.

7. S'il ressort des pièces du dossier que M. B..., dont le visa a expiré le 26 septembre 2013, a séjourné régulièrement en France en qualité d'étudiant entre le 29 septembre 2012 et le 26 septembre 2016, il n'est toutefois pas établi que l'intéressé aurait demandé le renouvellement de son titre de séjour avant l'expiration de celui-ci. En effet, si le requérant fait valoir qu'il a tenté en vain d'obtenir un rendez-vous en préfecture afin d'y déposer une demande de titre de séjour, il ressort des pièces du dossier que les copies écrans du site internet de la préfecture du Val-de-Marne produites par le requérant tant en appel qu'en première instance font apparaître que ses tentatives avortées ont eu lieu en 2022 et concernent une demande d'admission exceptionnelle au séjour, de sorte qu'il n'est pas établi que le requérant aurait entrepris, en 2016, des démarches tendant à demander le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " étudiant ". Ainsi, en l'espèce, la décision attaquée trouve son fondement légal dans les dispositions du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui peuvent être substituées à celles du 1° du même article dès lors, en premier lieu, que, s'étant maintenu sur le territoire français plus de trois mois après son entrée sans avoir demandé le renouvellement de son dernier titre de séjour qui venait à expiration le 26 septembre 2016, M. B... se trouvait dans la situation où, en application des dispositions du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police pouvait décider de l'obliger à quitter le territoire français, en deuxième lieu, que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions. Par ailleurs, si M. B... justifie de sa présence en France depuis le 29 septembre 2012, soit depuis près de dix ans à la date de la décision attaquée, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans enfant à charge en France et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 21 ans et où réside sa mère. En outre, si le requérant fait valoir qu'il suit des études en France depuis son arrivée en 2012 et qu'il y a tissé des liens amicaux, les éléments versés en appel comme en première instance n'attestent toutefois pas d'une insertion particulière dans la société française. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation de M. B..., doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA01094


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01094
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : GOZLAN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-04;24pa01094 ?
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