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04/07/2024 | FRANCE | N°23PA02327

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 8ème chambre, 04 juillet 2024, 23PA02327


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2022 par lequel le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois.



Par jugement n° 2224371/8 du 1er février 2023

, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2022 par lequel le préfet de police de Paris a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois.

Par jugement n° 2224371/8 du 1er février 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 mai 2023, M. A..., représenté par Me Singh, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er février 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2022 du préfet de police de Paris ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de Paris de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais d'appel et la somme de 1 500 euros au titre des frais de première instance, à verser à Me Singh sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de la renonciation par son conseil à la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

S'agissant de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration et est entachée d'un vice de procédure et d'une erreur de fait dès lors que l'incomplétude de son dossier ne résulte que du fait de l'administration ;

- le préfet, en considérant qu'il avait été confié à l'aide sociale à l'enfance à l'âge de dix-sept ans et un mois et qu'il ne justifiait pas avoir été confié à ce service jusqu'à sa majorité, a entaché sa décision d'une erreur de fait ;

- le préfet, en exigeant la production d'un jugement du tribunal pour enfants le confiant à l'aide sociale à l'enfance, a ajouté une condition à la loi et a entaché sa décision d'une erreur de droit ;

- le préfet, en examinant sa demande de titre de séjour au regard des dispositions des articles L. 422-1, L. 435-3 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a commis une erreur de droit dès lors que ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dès lors que son comportement n'est pas constitutif d'une menace à l'ordre public ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article ;

-elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2023, le préfet de police de Paris conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 5 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Collet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant algérien né le 2 mars 2002 et entré en France le 7 juin 2018 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant ou de salarié. Par un arrêté du 18 novembre 2022, le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois. Par jugement du 1er février 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu de manière suffisamment précise et circonstanciée à l'ensemble des moyens soulevés devant eux, le bien-fondé des réponses qu'ils ont apportées au regard des pièces versées au dossier étant, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. En premier lieu, la décision en litige vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, la décision mentionne que M. A..., né le 2 mars 2002, de nationalité algérienne et entré en France le 7 juin 2018, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 422-1 et L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle précise que, s'agissant de la demande de titre de séjour " étudiant ", l'intéressé ne poursuit pas d'études supérieures en France qui lui auraient permis de bénéficier de la dispense de présentation d'un visa long séjour et que, dans le cas de l'espèce, le préfet n'avait pas retenu, au titre de son pouvoir d'appréciation, à titre exceptionnel et gracieux, d'instruire favorablement cette demande de titre de séjour. De même, la décision mentionne que, s'agissant de la demande de titre de séjour " salarié ", M. A... ne justifie pas avoir été placé à l'aide sociale à l'enfance jusqu'à sa majorité et relève en outre que l'intéressé ayant été condamné le 25 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris à 300 euros d'amende pour outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique et étant connu défavorablement des services de police pour des faits de vol en mars 2022, sa présence constituait une menace à l'ordre public et que, par suite, l'intéressé ne pouvait prétendre à la délivrance du titre de séjour sollicité. Enfin, la décision précise que M. A... n'atteste pas de l'intensité d'une vie privée et familiale établie sur le territoire français à l'étranger, qu'il ne justifie pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger où résident ses parents et que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, et alors que le préfet n'était pas tenu de viser les dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien dès lors que l'intéressé n'a pas sollicité son admission au séjour sur ce fondement, la décision en litige comporte l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté.

5. En deuxième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile constituent des dispositions spéciales régissant le traitement par l'administration des demandes de titres de séjour, en particulier les demandes incomplètes, que le préfet peut refuser d'enregistrer. Dans ces conditions, M. A... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que celles-ci ne sont pas applicables à sa demande. En tout état de cause, et alors qu'il ressort des pièces du dossier que l'administration a sollicité le 10 juin 2022 des pièces aux fins de compléter le dossier de l'intéressé, le préfet de police de Paris n'a pas rejeté la demande de l'intéressé au motif de l'incomplétude de sa demande. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision en litige serait entachée d'un vice de procédure ainsi que d'une erreur de fait pour ce motif doivent être écartés.

6. En troisième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de la décision contestée que le préfet de police de Paris n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A... avant de lui refuser la délivrance du titre de séjour sollicité.

7. En quatrième lieu, M. A... soutient que le préfet de police de Paris a entaché sa décision d'une erreur de fait en considérant qu'il avait été pris en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance à l'âge de dix-sept ans et un mois alors qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'attestation de prise en charge du 27 mai 2021 établie par le responsable du pôle administratif du secteur éducatif auprès des jeunes majeurs à la ville de Paris que l'intéressé a été pris en charge à compter du 1er août 2018, soit à l'âge de seize ans et cinq mois. Toutefois, cette erreur est sans incidence sur la légalité de la décision contestée dès lors qu'il ressort des termes mêmes de cette dernière ainsi que des écrits du préfet en défense, qu'il aurait pris la même décision s'il ne l'avait pas commise.

8. En cinquième lieu, contrairement à ce que soutient M. A..., il ne ressort pas des termes de la décision contestée que le préfet de police de Paris, qui a relevé que l'intéressé alléguait avoir été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, aurait ajouté une condition à la loi en exigeant que l'intéressé produise, aux fins de vérification de cette allégation, la production d'un jugement du tribunal pour enfants. Par suite le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

9. En sixième lieu, M. A... soutient que le préfet de police de Paris, en examinant sa situation au regard des dispositions des articles L. 422-1, L. 435-3 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a commis une erreur de droit dès lors que ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens. Toutefois, il n'apporte à l'appui de ce moyen, déjà soulevé devant le tribunal administratif, aucun élément nouveau de droit ou de fait susceptible de remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges alors qu'il ressort par ailleurs des termes de la décision contestée que le préfet a également fait usage de son pouvoir de régularisation. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par ces derniers aux points 16, 18, 19, 20 et 22 du jugement attaqué.

10. En septième lieu, si les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle et fixent les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ces stipulations ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir de refuser à un ressortissant algérien la délivrance d'un certificat de résidence lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.

11. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à M. A... la délivrance d'un certificat de résidence, le préfet de police de Paris a considéré que son comportement était constitutif d'une menace à l'ordre public dès lors que l'intéressé avait été condamné le 25 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris à une amende de 300 euros pour des faits d'outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique et qu'il était défavorablement connu des services de police pour des faits de vol commis en mars 2022. Il ressort également du rapport d'identification dactyloscopique concernant l'intéressé que M. A... a fait l'objet de nombreux autres signalements pour des faits de vol en réunion sans violence commis les 20 juin 2018 et 3 juillet 2018, des faits de recel de biens provenant d'un vol commis le 18 juillet 2018, des faits d'usage illicite de stupéfiants commis le 2 août 2018, des faits de vol en réunion sans violence et vol simple commis les 13, 23 et 27 janvier 2019, des faits de vol en réunion sans violence et de détention non autorisée de stupéfiants commis le 17 février 2019, des faits de vol en réunion sans violence et de vol commis dans un véhicule affecté au transport de voyageurs commis les 13 et 14 avril 2019, des faits de vol aggravé par deux circonstances avec violence commis le 20 juillet 2019, des faits de vol en réunion sans violence et de vol dans un lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs commis le 5 septembre et le 27 novembre 2019, des faits de détention illicite de stupéfiants et de transport sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitant de catégorie D commis le 5 février 2021, des faits de vol en réunion sans violence commis le 7 mai 2021 et des faits de vol aggravé par deux circonstances avec violences commis le 3 août 2021. Si M. A... fait valoir devant la cour que les faits pour lesquels il a été condamné sont de faible gravité et que ceux pour lesquels il a été signalé n'ont donné lieu à aucune condamnation ni d'aucune poursuite pénale, il n'en conteste pas la matérialité ni l'imputabilité. De même, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la situation de vulnérabilité psychologique et psychique dans laquelle il se trouve serait à l'origine des faits qui lui sont reprochés ni qu'elle en serait un élément explicatif. Dans ces conditions, au égard au nombre important de faits qui lui sont reprochés, à leur nature et à leur réitération, s'agissant en particulier des faits de vol, et alors que les derniers faits commis ont eu lieu seulement huit mois avant l'édiction de la décision en litige, c'est à juste titre et sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation que le préfet de police de Paris a refusé à M. A... la délivrance d'un certificat de résidence au motif que son comportement était constitutif d'une menace à l'ordre public.

12. En huitième lieu, aux termes de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

13. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui soutient être arrivé en France le 7 juin 2018, a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance à compter du 1er août 2018 et a été placé jusqu'à sa majorité en application d'un jugement du tribunal des enfants du 1er mars 2019. Il ressort également des pièces du dossier que l'intéressé bénéficie depuis le 26 août 2020 d'un contrat jeune majeur, renouvelé jusqu'au 1er mars 2023, qu'il a suivi, à compter du 25 juin 2020, une formation à temps partiel au sein de l'Espace dynamique d'insertion de Villejuif pour une durée d'un an et qu'il a intégré en parallèle le dispositif " Prépa Apprentissage Next Level " à compter du 5 février 2021, pour une durée de 400 heures. Toutefois, en dépit de ses efforts, M. A... ne justifie d'aucune insertion professionnelle, la préparation du certificat d'aptitude professionnelle en peinture et application de revêtement à laquelle il était inscrit à compter de septembre 2022 n'ayant pas été poursuivie et l'intéressé ne justifiant, à la date de la décision en litige, que d'une inscription au programme d'accompagnement vers une insertion professionnelle " Teame 75 " organisée par la " Plateforme i " du 26 septembre 2022 au 1er décembre 2022. De même, si M. A... soutient qu'il aurait noué des liens forts dans la société française, avec ses camarades, ses professeurs, ses maîtres de stage, ses docteurs, son employeur, ses collègues, dans son centre de formation et lors de ses expériences professionnelles, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de cette allégation. Par ailleurs, l'intéressé, qui est célibataire et sans charge de famille en France n'est pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents ainsi que sa fratrie. En outre, le requérant n'établit pas, par la seule production du compte-rendu de consultation d'orientation du 29 novembre 2022, postérieur à la décision contestée mais se référant à un état de fait antérieur, le climat de violences familiales dont il se prévaut pour justifier de son isolement en Algérie. Enfin, ainsi qu'il a été dit au point 11, M. A..., qui n'est présent sur le territoire français que depuis quatre ans, a fait l'objet de très nombreux signalements et a été condamné pour des faits d'outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique. Dans ces conditions, et quand bien même les troubles cognitifs et la pathologie psychiatrique dont souffre l'intéressé et pour lesquels il bénéficie d'un suivi médical en France, sont susceptibles d'expliquer les difficultés qu'il rencontre dans la construction de son projet professionnel, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de police de Paris n'a pas porté, eu égard aux objectifs poursuivis par la mesure, une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

14. En neuvième lieu, ainsi qu'il a été dit au point précédent, M. A... ne justifie pas d'une intégration particulière dans la société française. En outre, s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été hospitalisé du 11 novembre au 22 novembre 2021 et du 12 juillet au 8 août 2022 en raison d'épisodes psychotiques et qu'il souffre d'une schizophrénie paranoïde continue nécessitant un traitement médicamenteux à base d'Akineton, d'Hydroxyzine, de Xeplion et de Largactil, associé à un suivi médical en psychiatrie, en psychologie et dans un centre de soin, d'accompagnement et de prévention en addictologie compte tenu de son addiction au cannabis et aux cachets, toutefois, et quand bien même l'Akineton ne serait pas disponible en Algérie, la seule production d'un certificat médical établi le 19 mai 2023 par le psychiatre qui le suit au centre médico-psychologique du GHU Paris Psychiatrie et Neurosciences, postérieur à la décision en litige mais révélant une situation antérieure et indiquant de manière imprécise et non circonstanciée que l'interruption du traitement pourrait avoir des conséquences sérieuses sur l'état de santé de M. A..., ne suffit pas à établir que le préfet de police de Paris, en lui refusant la délivrance du titre de séjour sollicité, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

15. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. A... dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

16. En deuxième lieu, par un arrêté n° 2022-01166 du 3 octobre 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Paris le même jour, le préfet de police de Paris a donné délégation à M. B..., attaché principal d'administration de l'Etat, placé sous l'autorité de la cheffe de la division de la rédaction et des examens spécialisés, au sein du service de l'administration des étrangers de la préfecture de police de Paris, pour signer tous arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de son signataire doit être écarté.

17. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 11, 13 et 14, le moyen tiré de ce que le préfet de police de Paris, en obligeant M. A... à quitter le territoire français, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle, doit être écarté.

En ce qui concerne la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

18. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 (...) sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées ".

19. La décision en litige vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier les articles 3 et 8 ainsi que l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle précise en outre, après avoir relevé que M. A... avait été condamné le 25 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris à une amende de 300 euros pour des faits d'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique et qu'il était connu défavorablement des services de police pour des faits de vol en mars 2022, que l'autorité administrative peut décider que l'étranger est obligé de quitter le territoire français si son comportement constitue une menace à l'ordre public. Ainsi, le préfet de police de Paris a suffisamment énoncé les considérations de droit et de fait fondant sa décision refusant d'accorder au requérant un délai de départ volontaire. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision en litige doit être écarté.

20. En deuxième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni des termes de la décision contestée que le préfet de police de Paris n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A... avant de lui refuser l'octroi d'un délai de départ volontaire.

21. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) ".

22. Ainsi qu'il a été dit au point 11, le comportement de M. A... est constitutif d'une menace à l'ordre public. Dès lors, le préfet pouvait, pour ce seul motif, lui refuser l'octroi d'un délai de départ volontaire. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police de Paris aurait méconnu les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

23. En quatrième lieu, dès lors que le comportement de M. A... est constitutif d'une menace à l'ordre public, et compte tenu de la situation personnelle de l'intéressé telle que rappelée aux points 13 et 14, le préfet de police de Paris, en lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle du requérant.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

24. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. A... dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

25. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". De même, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".

26. Ainsi qu'il a été dit au point 14, et à supposer même que l'intéressé ne pourrait bénéficier d'un suivi approprié à son état de santé dans son pays d'origine, M. A... n'établit pas que l'interruption de son traitement l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants au sens des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

27. En dernier lieu, pour les mêmes motifs qu'exposés au point précédent et dès lors que l'intéressé n'établit pas la situation d'isolement dont il se prévaut dans son pays d'origine, le préfet de police de Paris, en fixant l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. A....

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

28. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 (...), l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

29. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. A... dirigées contre la décision prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

30. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les (...) décisions d'interdiction de retour (...) prévues aux articles L. 612-6 (...) sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées ".

31. Il ressort des termes mêmes des dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

32. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

33. La décision prononçant à l'encontre de M. A... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trente-six mois vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en particulier ses articles 3 et 8 ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 612-6. Il ressort également des termes de cette décision que le préfet de police de Paris a, pour fixer la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français, considéré que, eu égard à la durée de la présence de M. A... en France, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et compte tenu de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français, la durée de l'interdiction de retour d'une durée de trente-six mois ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au regard de sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, la décision comporte l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement. Par suite le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.

34. En troisième lieu, il ressort du point 22 que le préfet de police de Paris pouvait légalement refuser d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire. Il s'ensuit, qu'en application des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet pouvait assortir sa décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

35. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 13, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

36. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 11, 13 et 14, le moyen tiré de ce que le préfet de police de Paris, en prononçant à l'encontre de M. A... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle doit être écarté.

37. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Menasseyre, présidente,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- Mme Collet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

La rapporteure,

A. Collet La présidente,

A. Menasseyre

La greffière,

N. Couty

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA02327


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA02327
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MENASSEYRE
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SINGH

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-04;23pa02327 ?
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