Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de de Paris d'annuler l'arrêté du 1er mars 2023 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.
Par un jugement n° 2307965 du 26 septembre 2023, le tribunal a rejeté sa requête.
Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2023, M. B..., représenté par Me Ndiaye, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er mars 2023 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen e sa situation administrative et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour le temps de ce réexamen ;
4°) mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure faute de saisine de la commission du titre de séjour ;
- l'arrêté est entaché d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
Par un mémoire enregistré le 24 avril 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête de M. B... en soutenant qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Dubois a été entendu lors de l'audience publique.
1. M. B..., ressortissant mauritanien né le 1er janvier 1974 à Ghabou, a sollicité auprès du préfet de police la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 1er mars 2023, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 26 septembre 2023 par lequel tribunal administratif de Paris a rejeté le recours pour excès de pouvoir formé contre cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. En faisait valoir que le jugement attaqué méconnait les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, M. B... doit être regardé comme invoquant en réalité la méconnaissance des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative imposant la motivation des jugements rendus par les tribunaux administratifs. Toutefois, le tribunal administratif de Paris, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par le requérant, a cité les textes dont il a fait application et précisé les motifs de fait et de droit retenus. Il a ainsi motivé son jugement de manière à permettre aux parties d'en critiquer le bien-fondé. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait insuffisamment motivé doit être écarté.
Sur la légalité de l'arrêté :
3. En premier lieu, M. B... reprend en appel, sans apporter d'éléments de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le tribunal, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 1er mars 2023 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 du jugement.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 (...) ". En vertu du 4° de l'article L. 432-13 du même code, la commission du titre de séjour instituée dans chaque département, dont l'organisation est prévue à l'article
L. 432-14, doit être saisie pour avis par l'autorité administrative dans le cas prévu à l'article L. 435-1.
5. D'une part, si M. B... soutient que à la date de l'arrêté attaqué, il résidait de manière habituelle depuis plus de dix ans en France, il ne l'établit pas, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, dès lors notamment qu'il ne produit pour démontrer sa présence en France pour l'année 2013 qu'un avis d'imposition d'un montant nul, un relevé bancaire non mouvementé du mois de janvier et une facture d'un magasin d'électroménager du mois de juin. Pour l'année 2014, M. B... n'a produit en première instance qu'un avis d'imposition d'un montant nul, une facture de téléphone mobile et un relevé de compte non mouvementé. Pour l'année 2015, il n'a de même produit qu'un relevé de non-imposition, deux courriers commerciaux et une attestation de fin de mission d'intérim au nom d'un certain B... mais comportant un numéro de sécurité sociale différent de celui figurant sur les autres fiches de paye produites par l'intéressé. Alors même que les premiers juges ont, à juste titre, relevé que ces documents ne permettaient pas de tenir pour établis sa résidence habituelle en France pour les années en cause, le requérant ne verse en cause d'appel aucun autre document pour ces années. Dans ces conditions, faute d'établir la réalité d'une résidence habituelle d'au moins dix années à la date de l'arrêté attaqué, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police était tenu de saisir la commission du titre de séjour en application des dispositions précitées.
6. D'autre part, en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans l'arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
7. En l'espèce, M. B..., célibataire et sans charge de famille en France n'établit pas, ainsi qu'il a été dit plus haut, qu'il résiderait de manière habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Comme l'ont justement relevé les premiers juges, les fiches de paie dont M. B..., qui ne dispose d'aucune qualification ou diplôme particulier, se prévaut au soutien de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, attestent seulement d'une activité professionnelle discontinue auprès d'employeurs différents du secteur de l'hôtellerie. Ainsi, il ne fournit au titre de l'année 2017 qu'une fiche de paie du mois de novembre. Relativement à l'année 2018, ne sont produites des fiches de paie que pour les mois de janvier à mars puis de septembre à novembre. Au titre de l'année 2020, ne sont fournies des fiches de salaire que pour les mois de janvier et février. S'agissant de l'année 2021, les fiches de paie ne concernent que des vacations accomplies lors des mois d'août, d'octobre, de novembre et de décembre. Dans ces conditions, et alors même que les fiches de paie produites au titre des années 2022 et 2023 attestent d'une activité professionnelle davantage continue auprès de deux employeurs différents, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le refus d'admission exceptionnelle au séjour qui lui a été opposé serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. En dernier lieu, si à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. B... fait valoir qu'elle doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 7 que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dans ces conditions, le moyen d'exception d'illégalité ainsi invoqué ne peut qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et de l'outre-mer et à M. A... B....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Vinot, présidente de chambre,
M. Marjanovic, président-assesseur,
M. Dubois, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 28 juin 2024.
Le rapporteur,
J. DUBOISLa présidente,
H. VINOT
La greffière,
A. MAIGNAN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA04488