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27/06/2024 | FRANCE | N°23PA00311

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 27 juin 2024, 23PA00311


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.



Par un jugement n° 2005989 du 30 novembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 22 janvier 2023, M

. et Mme A..., représentés par Me Bovis, avocat, demandent à la Cour :



1°) d'annuler le jugement n° 2005989 du 30 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.

Par un jugement n° 2005989 du 30 novembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 22 janvier 2023, M. et Mme A..., représentés par Me Bovis, avocat, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2005989 du 30 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2013 ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont insuffisamment répondu au moyen tiré de la violation des dispositions issues des articles L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales ;

- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

- la proposition de rectification ne leur a pas été régulièrement notifiée ; l'année 2013 est, par conséquent, prescrite ;

- la proposition de rectification n'est pas suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne la reprise des crédits d'impôts.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

- le montant de 49 260 euros qualifié de revenus d'origine indéterminée par l'administration fiscale correspond en réalité à des revenus fonciers ;

- les intérêts d'emprunt correspondant à des acquisitions de biens produisant des revenus locatifs sont déductibles ;

- les intérêts d'emprunt de leur habitation principale sont déductibles ;

- la réalité des dépenses de travaux correspondant à leurs biens immobiliers loués est prouvée et ses dépenses sont donc également déductibles ;

- les dépenses de copropriété de ces biens immobiliers loués sont également justifiées et déductibles ;

- les primes d'assurance et taxes foncières sont déductibles à hauteur de 7 243 euros ;

- la déduction de 20 euros par local au titre des frais de gestion prévue au I-1° de l'article 31 du code général des impôts doit être admise, pour un total de 640 euros ;

- les dépenses d'hébergement pour personnes dépendantes ou âgées dans le besoin, les pensions alimentaires versées et la demi-part supplémentaire liée à la situation d'invalidité de leur fille sont déductibles de leur revenu global ;

- le déficit foncier antérieur de 15 275 euros, reportable sur l'année 2013, doit être déduit des impositions dès lors que l'administration ne motive pas le rejet de ce déficit foncier.

Sur les pénalités :

- la majoration qui leur a été appliquée conformément à l'article 1729 a. du code général des impôts n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot ;

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle (ESFP) au titre des années 2013 à 2015. L'examen des crédits bancaires du foyer fiscal par l'administration fiscale, au titre de l'année 2013, a révélé un montant de crédits excédant le montant des revenus déclarés. L'administration fiscale a formulé une demande de justifications dans le cadre de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales le 26 septembre 2016 qui a été suivie, en l'absence de réponse des contribuables et pour les crédits correspondant à cette demande de justification, de leur imposition selon les procédures d'office prévues aux articles L. 69 et L. 73-3°du livre des procédures fiscales. Par une proposition de rectification du 1er décembre 2016, l'administration a mis à la charge des requérants des impositions supplémentaires en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux ainsi que des pénalités pour manquement délibéré. Par un jugement n° 2005989 du 30 novembre 2022 dont M. et Mme A... interjettent régulièrement appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.

Sur la régularité du jugement :

2. Tout d'abord, il ressort du point 6 du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments de la demande, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification du 1er décembre 2016 au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne la reprise des crédits d'impôts.

3. Par ailleurs, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre les rappels d'imposition contestés dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, M. et Mme A... ne peuvent utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, M. et Mme A... soutiennent que la proposition de rectification du 1er décembre 2016 ne leur a pas été régulièrement notifiée et qu'ils n'ont pas pu en prendre connaissance, celle-ci ayant été retournée au service, sans dépôt d'avis de passage, avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse ".

5. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification en date du 1er décembre 2016 a été envoyée au 4 rue Ordener à Paris 18ème, adresse que les requérants avaient mentionnée sur leur dernière déclaration des revenus 2015 souscrite le 31 mai 2016. Le pli a été retourné au service vérificateur avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse " et avec l'avis de passage du 7 décembre 2016. Si les requérants affirment qu'il y a eu une défaillance du service postal qui était connue de l'administration fiscale dès lors que de précédents courriers avaient été régulièrement présentés à cette adresse, il résulte de l'instruction que M. et Mme A... s'étaient vu notifier au 4 rue Ordener l'avis d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle en date du 20 juillet 2016 avec présentation le 22 juillet 2016 et retrait le 29 juillet 2016. Par la suite, l'administration leur a adressé le 17 août suivant, à cette même adresse, un courrier de convocation à un entretien, retourné au service avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse ", et a en conséquence, le 23 août 2016, transmis ce courrier à une autre adresse connue des requérants, située 40 rue Désiré Clément à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), courrier également retourné au service avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse ". Aussi, dans ces conditions, alors que les requérants ne justifient ni avoir informé l'administration d'un changement d'adresse au motif que l'adresse déclarée du 4 rue Ordener à Paris 18ème aurait cessé d'être celle de leur résidence principale, ni avoir demandé aux services postaux de réexpédier le courrier à une nouvelle adresse, et qu'en outre aucune erreur des services postaux n'est établie, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'administration ne leur aurait pas régulièrement notifié la proposition de rectification susmentionnée du 1er décembre 2016. Au demeurant, l'administration a également adressé aux requérants par voie électronique le 21 décembre 2016 la proposition de rectification à l'adresse courriel communiquée par M. et Mme A... dans leur déclaration pour les informer de l'envoi de la proposition de rectification et leur demander confirmation de leur adresse postale, alors que M. A... avait adressé le 10 novembre 2016 un courriel au service des impôts par l'intermédiaire de cette adresse. Par suite, le moyen doit être écarté.

6. En second lieu, les appelants font valoir que la proposition de rectification du 1er décembre 2016 n'est pas suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne la reprise des crédits d'impôts.

7. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". De même, aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La notification de redressement prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une notification de redressement doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. Toutefois les exigences posées par ces dispositions ne s'appliquent pas aux procédures de taxation d'office conduites en application de l'article L. 56 du même livre et soumises aux seules exigences de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales au titre duquel la proposition de rectification doit ainsi indiquer les bases ou éléments qui ont servi au calcul des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales en litige notifiées selon les procédures d'évaluation et de taxation d'office.

8. L'administration est tenue d'indiquer, dans la proposition de rectification, les textes dont elle fait application lorsque cette mention est indispensable pour éclairer le contribuable. En l'espèce, la proposition de rectification précise qu'ils ont bénéficié d'une restitution d'un crédit d'impôt de 9 020 euros, remise en cause en application de la procédure de rectification contradictoire, " constitutive principalement de dépenses relatives à votre habitation principale ", et mentionne dans un tableau les différents crédits d'impôt concernés (prélèvements forfaitaires, dépenses environnementales et intérêts d'emprunt) ainsi que leur montant puis indique que M. et Mme A... n'ayant pas justifié de leurs dépenses au stade du contrôle, lesdites dépenses ont été rejetées et le crédit d'impôt initialement accordé a été repris. Les motifs énoncés, portant sur le fondement en droit et en fait du redressement, étaient, nonobstant l'absence de mention des dispositions du code général des impôts applicables, suffisamment précis pour mettre les requérants en mesure de comprendre le rehaussement effectué et d'y répondre utilement. Par suite le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

S'agissant de la prescription du droit de reprise :

9. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu (...) le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ". L'article L. 189 dudit livre dispose : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...) ".

10. M. et Mme A... soutiennent que l'année 2013 est prescrite en raison du défaut de notification régulière de la proposition de rectification. Or, il résulte des motifs énoncés au point 5 du présent arrêt que la proposition de rectification en date du 1er décembre 2016 a été régulièrement notifiée aux intéressés avant l'expiration du délai de reprise le 31 décembre 2016, et a ainsi régulièrement interrompu ce délai en faisant courir un nouveau délai de même durée. Par suite le moyen doit être écarté.

S'agissant de la charge de la preuve :

11. En vertu de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. L'article R. 193-1 du même livre précise que, dans ces cas, le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. En outre, s'agissant des impositions en litige établies selon la procédure de rectification contradictoire, la charge de l'exagération des redressements notifiés leur incombe également en l'absence d'observations présentées dans le délai de trente jours de la notification de la proposition de rectification, en application de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne la requalification des revenus d'origine indéterminée en recettes locatives :

12. Les requérants font valoir qu'au cours de l'année 2013, ils étaient propriétaires de trente-deux biens immobiliers intégralement financés par des emprunts bancaires, précisent que ces biens étaient loués et qu'ils ont généré un revenu net foncier de 39 063 euros sur lequel ils ont imputé un déficit foncier antérieur de 15 725 euros. S'ils soutiennent que les crédits non identifiés relevés par l'administration fiscale d'un montant de 49 260 euros ne constituaient pas des revenus d'origine indéterminée mais des recettes locatives des biens mis en location, ils n'apportent aucun élément au soutien de leurs allégations, alors au demeurant que le montant des revenus d'origine indéterminée fixé par l'administration n'a pas été contesté.

En ce qui concerne les charges déductibles des revenus fonciers :

13. En se bornant à avancer, à hauteur d'appel, des montants de charges déductibles non justifiées par aucune pièce nouvelle, et à indiquer que les justificatifs complémentaires seront fournis, les requérants, qui n'ont produit aucun justificatif annoncé avant la clôture de l'instruction et supportent la charge de la preuve, ne remettent pas en cause l'appréciation portée à bon droit par les premiers juges quant à la déductibilité des dépenses en litige de leurs revenus fonciers taxés d'office, et auxquels l'administration a en outre appliqué un montant de déduction forfaitaire à titre de réalisme économique. En tout état de cause, les intéressés ne démontrent pas qu'ils auraient dû bénéficier de la déduction de différentes charges de leurs revenus fonciers.

14. Ainsi, M. et Mme A... considèrent que les intérêts d'emprunt, les dépenses de travaux, les charges de copropriété, les frais de gestions fixés à 20 euros par local et les sommes correspondant aux primes d'assurance et taxes foncières sont justifiés et donnent droit à une déduction au titre des revenus fonciers. Ils précisent également que les charges locatives supportées ont généré un déficit foncier au titre de l'année 2013.

15. Aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ". Aux termes de l'article 28 du code général des impôts : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété ". Aux termes du 3° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales " peuvent être évalués d'office (...) les revenus fonciers des contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes de justifications mentionnées au deuxième alinéa de l'article 16 ". Aux termes de l'article 31 du code général des impôts : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; (...) a quater) Les provisions pour dépenses, comprises ou non dans le budget prévisionnel de la copropriété, prévues à l'article 14-1 et au I de l'article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, supportées par le propriétaire, diminuées du montant des provisions déduites l'année précédente qui correspond à des charges non déductibles ; (...) d) Les intérêts de dettes contractées pour la conservation, l'acquisition, la construction, la réparation ou l'amélioration des propriétés, y compris celles dont le contribuable est nu-propriétaire et dont l'usufruit appartient à un organisme d'habitations à loyer modéré mentionné à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, à une société d'économie mixte ou à un organisme disposant de l'agrément prévu à l'article L. 365-1 du même code ; (...) e) Les frais de gestion, fixés à 20 € par local, majorés, lorsque ces dépenses sont effectivement supportées par le propriétaire, des frais de rémunération des gardes et concierges, des frais de procédure et des frais de rémunération, honoraire et commission versés à un tiers pour la gestion des immeubles ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que les dépenses mentionnées au I de l'article 31 du code général des impôts précité ne peuvent être déduites du revenu foncier brut que dans la mesure où les charges alléguées sont dûment justifiées, se rapportent à des immeubles dont les revenus sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers, sont effectivement supportées par le propriétaire et sont engagées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. Les dépenses de réparation, d'entretien ou d'amélioration doivent notamment, pour être admises en déduction, avoir été effectuées par le propriétaire et avoir été réellement payées au cours de l'année d'imposition. Il appartient au contribuable de justifier de la réalité, de la consistance et, par suite, du caractère déductible de ces charges en produisant des pièces justificatives, qui peuvent être constituées de factures, de plans, de photographies et de tous autres éléments permettant d'établir avec précision la nature, le montant et la réalité des charges supportées. Par ailleurs, seuls peuvent être admis en déduction les intérêts des dettes directement engagées pour les finalités qu'elles prévoient.

S'agissant des dépenses de réparation et d'entretien :

16. Tout d'abord, en se bornant à produire plusieurs centaines de tickets de caisse émis notamment par les enseignes Castorama, Animalis, Conforama, Leroy Merlin et Brico Dépôt pour l'achat de fournitures diverses, de petits matériels ou matériaux, parfois uniquement identifiés par des références peu explicites, dont la grande majorité ne fait état d'aucune adresse de chantier ou de livraison et n'établissent ni la nature des travaux en vue desquels les dépenses ont été engagées, ni le bien au titre duquel elles ont été exposées, M. et Mme A... n'établissent pas avec précision la réalité des charges qu'ils auraient supportées en vue de la réparation et de l'entretien de l'un des trente-deux logements dont ils assurent la gestion. Si, sur certains tickets de caisse a été apposé un tampon mentionnant le nom des requérants ainsi qu'une adresse située au 40 rue Désiré Clément à Conflans-Sainte-Honorine, aucun élément ne permet d'attester que ledit tampon a été apposé par le vendeur. Enfin, si M. et Mme A... produisent également des factures délivrées par des professionnels du bâtiment comme Entreprise A Mendes, Entreprise Jabri, Montillo et SARL Charbonniers Réunis libellées à leur nom, ils ne démontrent pas que ces dépenses ont été effectivement réalisées, aucun paiement n'a été constaté au débit des comptes bancaires des intéressés pour les dépenses en litige dont au demeurant les intéressés ont contesté pour certaines des entreprises concernées la réalité des factures présentées lors de l'examen des relevés bancaires.

S'agissant des charges de copropriété :

17. M. et Mme A... se bornent à produire des copies des appels de charges de copropriété émis par les gestionnaires de leurs différents biens au cours de l'année 2013, lesquels font apparaitre une situation essentiellement débitrice des intéressés. Les comptes de copropriété font, toutefois, apparaître des règlements partiels que le service a accepté de prendre en compte au stade de la réclamation. Les intéressés, qui ne versent aux débats aucune autre pièce de nature à établir le versement effectif des sommes appelées à ce titre au cours de l'année vérifiée, ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que des charges supplémentaires de copropriété devraient venir en déduction de leur revenu foncier imposable.

S'agissant des frais de gestion par local :

18. S'agissant des frais de gestion, fixés à 20 euros par local et déductibles au titre de l'article 31 précité, les requérants sont fondés à solliciter la prise en compte de ces frais de gestion à raison des trente-deux locaux qu'ils mettent en location, soit à hauteur de 640 euros. Toutefois, il n'y a pas lieu de décharger les requérants à hauteur de la prise en compte de la somme de 640 euros dès lors que cette somme est inférieure à la déduction forfaitaire de 30 %, d'un montant de 46 061 euros, déjà admise par l'administration fiscale.

S'agissant des assurances et taxes foncières :

19. Tout d'abord, M. et Mme A... invoquent la déduction des primes d'assurances payées au cours de l'année 2013 et produisent des documents de l'assureur MATMUT avec des montants en euros pour justifier de primes d'assurance. Toutefois, il apparaît que certains échéanciers concernent un logement déclaré en " résidence principale ", qui ne peut être pris en compte au titre des dispositions mentionnées au point 15. Par ailleurs, si les autres échéanciers mentionnent des " propriétaires non occupants ", ils ne permettent pas d'identifier les biens concernés et ne sauraient à eux-seuls apporter la preuve de la réalité de ces charges alors même que les intéressés n'apportent dans la présente instance aucun élément susceptibles de démontrer qu'ils ont effectivement dépensé lesdites sommes.

20. Par ailleurs, ils ne sont pas fondés à revendiquer la prise en compte, comme charge déductible des revenus fonciers perçus en 2013 le montant de la taxe foncière à laquelle les différents biens mis en location ont été assujettis au titre de la même année, dès lors que ces taxes, payables au plus tard avant la fin de l'année au titre de laquelle elles ont été appelées, n'ont pas été payées.

S'agissant des intérêts des emprunts :

21. Les requérants soutiennent que l'administration fiscale aurait dû déduire de leurs revenus fonciers, les intérêts des emprunts souscrits pour l'achat des trente-deux immeubles. A l'appui de leur demande, ils produisent douze attestations de banque ou tableaux d'amortissement et les attachent à un de leurs immeubles. Toutefois, à défaut de produire les offres de prêt relative à ces emprunts, ces documents ne permettent pas d'établir que les sommes auraient été affectées, aux biens mis en location. Par ailleurs, l'attestation du CIC qui mentionne des intérêts d'emprunt versés en 2013 pour un montant de 11 697,67 euros, fait référence à un emprunt de 256 420 euros pour " une maison ancienne habitation principale ". Or, conformément aux dispositions de l'article 31 du code général des impôts seuls les intérêts des dettes contractées pour l'acquisition d'immeubles destinés à procurer des revenus fonciers sont déductibles du revenu brut foncier. Enfin, ils n'apportent aucune preuve du paiement effectif des intérêts des emprunts au cours de l'année concernée, les seules pièces produites par les requérants ne permettent pas d'établir l'effectivité des paiements d'intérêts au cours des années en cause.

En ce qui concerne les charges déductibles du revenu global :

22. Les appelants demandent la déduction, de leur revenu global de l'année 2013, de la somme de 9 760 euros au titre des pensions alimentaires versées au profit de leurs ascendants sans ressources.

23. Aux termes de l'article 156 II-2° du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : (...) II. des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : (...) 2°. (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 (...) du code civil (...) ". Aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ". L'article 208 du même code dispose : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit ".

24. Il résulte de ces dispositions que, si les contribuables sont autorisés à déduire du montant total de leurs revenus, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, les versements qu'ils font à leurs parents privés de ressources, il incombe à ceux qui ont pratiqué ou demandé à pratiquer une telle déduction de justifier, devant le juge de l'impôt, de l'importance des aliments dont le paiement a été rendu nécessaire par le défaut de ressources suffisantes de leurs ascendants.

25. M. et Mme A... ont déduit, au titre de leurs revenus imposables pour chacune des années contrôlées, une somme de 9 760 euros correspondant à l'aide qu'ils soutiennent avoir versée pour subvenir au besoin des parents de Mme A... se trouvant dans un état d'indigence. Toutefois, ils ne justifient, ainsi qu'il leur revient de le faire et comme le fait valoir l'administration en défense, par aucun document de la réalité de versements intervenus dans l'intérêt des parents de Mme A... ni, a fortiori, du montant effectif de ceux-ci. Par suite, l'administration était fondée à réintégrer les montants de 9 760 euros qui avaient été déduits sur le fondement du 2° du II de l'article 156 du code général des impôts par M. et Mme A... au titre de la pension alimentaire versée à des ascendants, dans les revenus imposables des requérants au titre de chaque année d'imposition en litige.

Sur les pénalités :

26. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Il résulte des dispositions de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales que la charge de la preuve du bien-fondé de l'application des majorations pour manquement délibéré repose sur l'administration.

27. Les requérants font valoir qu'étant profanes de l'immobilier et ne disposant que de revenus modestes, ils ne disposaient pas des compétences techniques et financières pour gérer leur trente-deux biens immobiliers et qu'ils " se sont vite retrouvés en état de détresse psychologique, incapables de faire face à la fois à leurs échéances financières, mais également incapables d'effectuer en temps et en heure leurs différentes déclarations fiscales " et par suite en situation de surendettement.

28. Il résulte de l'instruction que les intéressés se sont constitué depuis 2005 un patrimoine immobilier comportant trente-deux biens destinés à la location et qu'ils ont effectué les démarches afin de s'enregistrer auprès des Caisses d'allocations familiales de Paris, de la Haute-Marne, des Yvelines, du Calvados et de l'Essonne en tant que propriétaires-bailleurs pour treize de leurs biens, ce qui établit leur pleine et entière connaissance et conscience de la nature des revenus qu'ils escomptaient en tirer. Ces différents éléments permettent d'établir l'intention des requérants de soustraire à l'impôt une partie substantielle de leurs revenus. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du manquement délibéré des requérants à leurs obligations fiscales et, par suite, du bien-fondé de l'application de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts.

29. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Par suite, leurs conclusions aux fins d'annulation et de décharge doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (pôle contrôle fiscal et affaires juridiques - SCAD).

Délibéré après l'audience du 7 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 27 juin 2024.

La rapporteure,

S. BOIZOTLe président,

S. CARRERELa greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00311 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00311
Date de la décision : 27/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : BOVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-27;23pa00311 ?
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