Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Akka Technologies, en qualité de société mère de l'intégration fiscale comprenant la société Akka Informatique et Systèmes a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer l'annulation de l'avis de mise en recouvrement d'un montant de 1 113 238 euros et la restitution d'une créance de crédit d'impôt recherche déclaré au titre de l'année 2011 d'un montant de 329 651 euros.
Par un jugement n° 2112023/1 du 8 décembre 2022, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 2 février, 6 mars et 24 novembre 2023, la société Akka Technologies, représentée par Me Emmanuel Glaser, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 décembre 2022 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) de prononcer la restitution sollicitée devant ce tribunal pour un montant de 329 651 euros au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement du tribunal est irrégulier dès lors que ce dernier a dénaturé ses écritures et qu'il a méconnu son office alors que l'absence de contestation par l'administration des pièces jointes à son mémoire en réplique du 4 mai 2022 équivalait à un acquiescement aux faits conduisant à prononcer la restitution sollicitée ;
- le jugement est entaché d'erreurs de droit et de fait ;
- la restitution demandée doit être prononcée au regard de la jurisprudence Takima, dès lors qu'il est démontré que la différence entre le montant total des dépenses éligibles au crédit d'impôt recherche de la société Akka Informatique et Systèmes et le montant des dépenses engagées pour quatre projets externes de recherche et développement doit être retenu dans la base du crédit d'impôt recherche.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 août 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 29 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 21 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Topin,
- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,
- et les observations de Me Glaser, représentant la société Akka Technologies ainsi que les explications de M. A... expert mandaté par la société Akka Technologies.
Considérant ce qui suit :
1. La société Akka Technologies, en qualité de société mère de l'intégration fiscale comprenant notamment la société Akka Informatique et Systèmes, a initialement déclaré un crédit d'impôt recherche d'un montant total de 10 752 236 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011. A l'issue de la vérification de la comptabilité de la société Akka Informatique et Systèmes, l'administration a partiellement remis en cause le crédit d'impôt recherche déclaré par cette société au titre de l'année 2011, pour un montant de 1 113 238 euros correspondant notamment aux recherches effectuées pour le compte de donneurs d'ordre. La société Akka Technologies relève appel du jugement du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a rejeté sa demande de restitution de la créance de crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2011 d'un montant de 329 651 euros.
2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce, : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...)
/ II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : / (...) d bis) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à des organismes de recherche privés agréés par le ministre chargé de la recherche, ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions. (...) / d ter) (...) Les dépenses mentionnées aux d et d bis entrent dans la base de calcul du crédit d'impôt recherche dans la limite globale de 2 millions d'euros par an. Cette limite est portée à 10 millions d'euros pour les dépenses de recherche correspondant à des opérations confiées aux organismes mentionnés aux d et d bis, à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 entre l'entreprise qui bénéficie du crédit d'impôt et ces organismes (...) III. Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d'impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu'elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. Il en est de même des sommes reçues par les organismes ou experts désignés au d et au d bis du II, pour le calcul de leur propre crédit d'impôt. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes reçues par les organismes de recherche privés agréés mentionnés au d bis du II de l'article 244 quater B du code général des impôts pour la réalisation d'opérations de recherche qui leur sont confiées par des entreprises entrant elles-mêmes dans le champ des bénéficiaires du crédit d'impôt recherche constituent, pour ces entreprises donneuses d'ordre, des dépenses éligibles à ce crédit. S'agissant des organismes de recherche sous-traitants, ils ne peuvent inclure les dépenses exposées pour réaliser de telles opérations dans la base de calcul de leur crédit d'impôt recherche, même lorsque ces dépenses ne seraient pas effectivement prises en compte dans l'assiette du crédit d'impôt recherche de l'entreprise donneuse d'ordre, soit par l'effet des règles de plafonnement prévues à ce même d bis et au d ter du même II, soit du fait d'une renonciation volontaire au bénéfice du crédit d'impôt auquel cette dernière pourrait prétendre. En revanche, ces dispositions n'imposent pas à ces organismes de recherche de déduire de l'assiette de leur crédit d'impôt la fraction des sommes facturées à des donneurs d'ordre pour la réalisation d'opérations de recherche pour le compte de ces derniers qui excèderait le montant des dépenses de recherche éligibles afférentes à ces mêmes opérations.
3. Il résulte de l'instruction que l'administration a déduit du crédit d'impôt recherche propre de la société Akka Informatique et Systèmes déclaré au titre de l'année 2011 la totalité des sommes facturées aux donneurs d'ordre relativement à quatre projets de recherche et de développement, éligibles au crédit d'impôt recherche pour leur propre compte, dénommés " IHM Tactile ", " Open Wis ", " recherche biométrique " et " Sitools " pour un montant total de 3 507 785 euros selon la proposition de rectification et s'élevant, à l'issue du contrôle, selon la société requérante non contredite, à 3 611 093 euros à la suite de la réponse de l'administration aux observations du contribuable du 8 février 2017 conduisant à la prise en compte des facturations internes. La société requérante fait valoir que, sur le montant total facturé aux donneurs d'ordre, les dépenses de recherche et développement représentent 2 525 571 euros et qu'elle est par conséquent en droit de voir la base de son crédit d'impôt recherche rehaussé de la différence de 1 085 522 euros. La société requérante produit, pour la première fois en appel, le détail des dépenses de recherche et développement engagées par la société Akka Informatique et Systèmes au titre des projets " OpenWis ", " Ihm Tactile ", " recherche biométrique " et " Sitools " tel que déclaré par cette société pour l'année 2011 au titre du crédit d'impôt recherche et dont le montant n'est pas remis en cause par l'administration, qui n'a pas répliqué. Par suite, la société Akka Technologies justifie ainsi de ce que la différence entre le montant total facturé aux donneurs d'ordre et le montant des dépenses de recherche et de développement correspondant à ces quatre projets a, à tort, été déduit de la base de son propre crédit d'impôt recherche. Elle est par suite fondée à obtenir la restitution de 329 651 euros au titre du crédit d'impôt recherche de la société Akka Informatique et Systèmes pour l'année 2011.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, que la société Akka Technologies est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a refusé de prononcer la restitution sollicitée. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la société Akka Technologies au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 8 décembre 2022 est annulé.
Article 2 : L'Etat restituera à la société Akka Technologies la somme de 329 651 euros au titre du crédit d'impôt recherche de la société Akka Informatique et Systèmes pour l'année 2011.
Article 3 : L'Etat versera à la société Akka Technologies la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Akka Technologies et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction des vérifications nationales et internationales.
Délibéré après l'audience du 12 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Topin, présidente assesseure,
- Mme de Phily, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juin 2024.
La rapporteure,
E. TOPINLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA00464 2