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26/06/2024 | FRANCE | N°22PA01837

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 2ème chambre, 26 juin 2024, 22PA01837


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'ordonner, avant dire droit, la communication par le Centre national de gestion (CNG) des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière de l'intégralité du dossier administratif relatif à sa scolarité à l'École des hautes études en santé publique (EHESP) entre 2017 et 2019, d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2019 par lequel la directrice générale du CNG des praticiens

hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière a pronon...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'ordonner, avant dire droit, la communication par le Centre national de gestion (CNG) des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière de l'intégralité du dossier administratif relatif à sa scolarité à l'École des hautes études en santé publique (EHESP) entre 2017 et 2019, d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2019 par lequel la directrice générale du CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière a prononcé son licenciement à compter du 1er janvier 2020, d'annuler la décision implicite du ministre des solidarités et de la santé rejetant son recours hiérarchique dirigé contre cet arrêté ainsi que la décision du 29 mai 2020 du CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière rejetant son recours gracieux, d'enjoindre à l'EHESP de réunir à nouveau le jury de l'examen de fin de formation aux fins de réexaminer sa notation et de prendre une nouvelle décision le concernant dans des conditions de délai et d'astreinte à déterminer par le tribunal.

Par un jugement nos 2012393/2-1 et 2016589/2-1 du 22 février 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 avril 2022 et 3 juillet 2023, M. C..., représenté par Me Hélène Coulaud, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 février 2022 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'ordonner avant-dire droit la communication par le CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et l'EHESP de l'intégralité de son dossier administratif et de son dossier scolaire de 2017 à 2020, a minima la communication des pièces lui permettant " de vérifier ses allégations et d'établir sa conviction " ;

3°) d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2019 de la directrice générale du CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, la décision du 29 mai 2020 de cette dernière rejetant son recours gracieux contre cet arrêté ainsi que la décision implicite de rejet par le ministre des solidarités et de la santé de son recours hiérarchique ;

4°) d'enjoindre à l'EHESP de réunir à nouveau le jury de l'examen de fin de formation aux fins de réexamen de sa notation du stage de professionnalisation et de sa notation définitive et de se prononcer à nouveau sur la validation de sa formation en qualité de D3S ;

5°) d'enjoindre au CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière de prendre une nouvelle décision suite à la nouvelle évaluation du jury de fin de formation de l'EHESP, en cas de validation de sa formation ;

6°) d'enjoindre au ministre de la santé de faire réexaminer sa situation par le CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et de prendre une nouvelle décision sur la validation de sa formation en qualité de D3S, en assortissant cette injonction d'un délai et d'une astreinte en considération des circonstances de l'espèce ;

7°) de mettre à la charge du CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et de l'EHESP la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'omission de statuer et n'est pas suffisamment motivé ;

- les premiers juges ont commis une erreur de fait et ont dénaturé ses écritures ;

- ils ont entaché leur jugement d'erreur d'appréciation de l'utilité des pièces demandées pour la solution du litige ;

- ils ont méconnu le principe du caractère contradictoire de l'instruction au sens de l'article L. 5 du code de justice administrative ;

- ils ont inversé la charge de la preuve et ont commis une erreur d'appréciation ;

- l'intégralité des dossiers administratif et de scolarité détenus par le CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et l'EHESP doit lui être communiquée ;

- la composition du jury de fin de formation est entachée d'irrégularité, faute de remplacement de l'un de ses membres, absent ;

- la composition et la tenue de la commission de notation de stage sont également irrégulières ;

- le jury de fin de formation a été partial ;

- la notation du stage de professionnalisation en établissement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les principes d'égale admissibilité et d'égal accès aux emplois publics et de non-discrimination ont été méconnus.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 novembre 2022, le CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucune autre pièce, en sus de celles déjà adressées à M. C..., ne pouvait être communiquée et que les moyens soulevés par celui-ci ne sont pas fondés.

La requête de M. C... a été communiquée au ministre de la santé et de la prévention ainsi qu'à l'EHESP, qui n'ont pas présenté de mémoires en défense.

Par une ordonnance du 5 février 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 mars 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 2007-1930 du 26 décembre 2007 ;

- l'arrêté du 29 octobre 2008 fixant les modalités du cycle de formation théorique et pratique des élèves-directeurs et élèves directrices d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jayer,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public,

- et les observations de Me Coulaud, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., admis à la session 2016 du troisième concours d'accès au cycle de formation des élèves-directeurs d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux (DS3) B... des Hautes Etudes en Santé Publique (EHESP), a été nommé élève DS3 par un arrêté du 26 janvier 2017 de la directrice générale du Centre national de gestion (CNG) des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière. À l'issue de sa scolarité au sein de l'EHESP, le jury de l'examen de fin de formation de la promotion 2017-2018 a décidé, par une délibération du 14 décembre 2018 entérinée par un arrêté du 18 décembre suivant de la directrice générale du CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, de ne pas valider sa formation, mais l'a autorisé en revanche à prolonger sa scolarité pendant un an. Au terme de cette prolongation, le jury de l'examen de fin de formation de la promotion 2018-2019 a décidé, par délibération du 13 décembre 2019, de ne pas le titulariser à la suite de quoi, par un arrêté du 20 décembre suivant, la directrice générale du CNG, a prononcé son licenciement à compter du 1er janvier 2020. M. C... relève appel du jugement du 22 février 2022 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté, de la décision du 29 mai 2020 du CNG des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière rejetant son recours gracieux ainsi que de la décision implicite du ministre des solidarités et de la santé rejetant son recours hiérarchique formé le 26 février 2020.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le tribunal a, au point 3 du jugement, rejeté les conclusions avant-dire droit du requérant tendant à ce que la communication de l'intégralité de son dossier administratif et relatif à sa scolarité à l'EHESP entre 2017 et 2019 soit ordonnée. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer sur ces conclusions manque en fait et doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

4. En l'espèce, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments développés par le requérant à l'appui de ses conclusions et moyens, ont indiqué de manière suffisamment précise au point 3 de leur jugement, les motifs pour lesquels la demande de communication de pièces complémentaires devait selon eux être écartée. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé.

5. En troisième lieu, les moyens tirés de ce que les premiers juges auraient dénaturé des pièces du dossier et de ce que le jugement serait entaché d'erreurs de droit, de fait et d'appréciation relèvent du bien-fondé du jugement et sont sans influence sur sa régularité.

6. En dernier lieu, il revient au juge de l'excès de pouvoir, avant de se prononcer sur une requête assortie d'allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l'administration en défense, de mettre en œuvre ses pouvoirs généraux d'instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, en particulier en exigeant de l'administration compétente la production de tout document susceptible de permettre de vérifier les allégations du demandeur.

7. En l'espèce, si M. C... avait sollicité en première instance la communication par le CNG et l'EHESP de ses dossiers administratif et scolaire, il ressort de la motivation du jugement attaqué que les premiers juges ont estimé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier, à supposer que certaines d'entre elles existent réellement, que l'administration aurait été en possession de pièces précisément désignées, autres que celles qui avaient été déjà communiquées au requérant. S'estimant ainsi suffisamment informés, ils ont écarté la demande de communication comme étant sans intérêt pour la solution du litige. Dès lors qu'il n'est pas établi que des pièces, précisément désignées, en possession du CNG et de l'EHESP, non déjà détenues par M. C... ou dont celui-ci ignorait le contenu, et autres que celles communiquées les 28 mai et 23 juin 2020 ainsi que le 12 novembre 2021, leur auraient permis de former leur conviction, les premiers juges n'ont pas méconnu leur office ni les dispositions de l'article L. 5 du code de justice administrative relatives au caractère contradictoire de l'instruction des affaires en ne faisant pas usage de leurs pouvoirs d'instruction et n'ont ainsi pas entaché leur jugement d'irrégularité.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

8. D'une part, aux termes de l'article D. 451-11 du code de l'action sociale et des familles : " Le certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement ou de service d'intervention sociale atteste des compétences nécessaires pour conduire l'action d'un ou plusieurs établissements ou services du champ de l'action sociale, médico-sociale ou sanitaire. " ; l'article D. 451-12 du même code énonce que : " Le certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement ou de service d'intervention sociale est structuré en domaines de compétences et peut être obtenu par la voie de la formation ou, en tout ou partie, par la validation des acquis de l'expérience. / Il est délivré par le directeur B... des hautes études en santé publique au nom de l'Etat. ".

9. D'autre part, aux termes du premier alinéa de l'article 37 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière dans sa version alors en vigueur : " La titularisation des agents nommés dans les conditions prévues à l'article 29, aux a et c de l'article 32 et à l'article 35 est prononcée à l'issue d'un stage dont la durée est fixée par les statuts particuliers ". Aux termes du I de l'article 4 du décret du 26 décembre 2007 portant statut particulier du corps des directeurs d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux de la fonction publique hospitalière dans sa version alors en vigueur : " Sont nommés personnels de direction de classe normale les élèves directeurs ayant suivi un cycle de formation théorique et pratique tenant lieu du stage prévu à l'article 37 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, d'une durée de vingt-quatre mois, organisé par l'Ecole des hautes études en santé publique, et ayant satisfait aux épreuves d'un examen de fin de formation. Les modalités de cette formation et de cet examen sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " Les candidats admis au cycle de formation sont nommés élèves directeurs par le directeur général du Centre national de gestion. (...) Les élèves directeurs qui ont satisfait aux épreuves de fin de formation sont de plein droit titulaires du certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement ou de service d'intervention sociale, et sont inscrits, par ordre alphabétique, sur une liste d'aptitude. (...) / Les élèves directeurs qui n'ont pas satisfait aux épreuves de l'examen de fin de formation sont, par arrêté du directeur général du Centre national de gestion, soit licenciés s'ils n'avaient pas déjà la qualité de fonctionnaire, soit remis à la disposition de leur administration d'origine. ".

10. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 29 octobre 2008 fixant les modalités du cycle de formation théorique et pratique des élèves directeurs et élèves directrices d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux : " Le cycle de formation est validé par des épreuves dont les modalités sont fixées de la manière suivante : / la moyenne des notes obtenues aux contrôles continus exprimée de 0 à 20, coefficient 4 ; - une note de stage de professionnalisation en établissement exprimée de 0 à 20, coefficient 3 ; - une note de séminaire interprofessionnel de santé publique exprimée de 0 à 20, coefficient 1 ; - une note de mémoire par l'Ecole des hautes études en santé publique exprimée de 0 à 20, coefficient 2. / La date, la fréquence, la durée et les modalités de ces différentes épreuves sont déterminées par le directeur de l'école. Un total de 100 points minimum est nécessaire pour l'admission définitive. Nul ne peut être déclaré admis si l'une des notes attribuées est inférieure à 5 sur 20. " L'article 5 du même arrêté prévoit que " Le jury établit, par ordre de mérite, la liste des élèves directeurs et élèves directrices qui ont satisfait à l'examen de fin de session de formation. ".

11. Il résulte de ces dispositions que le jury de l'examen de fin de formation des élèves DS3 se prononce à l'issue d'une période de formation et de stage. S'agissant non d'un concours ou d'un examen mais d'une procédure tendant à l'appréciation de la manière de servir qui doit être faite en fin de stage, cette appréciation peut être censurée par le juge de l'excès de pouvoir en cas d'erreur manifeste.

12. La délibération du jury de l'examen de fin de formation, qui forme avec la décision de licenciement une opération complexe, constitue une décision faisant grief au stagiaire non titularisé, susceptible de recours pour excès de pouvoir par voie d'action ou par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre la décision de licenciement. Dès lors et ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, en invoquant l'irrégularité de la délibération du jury, de la composition et de la tenue de la commission de notation de stage, l'erreur manifeste qu'aurait commise l'administration dans l'appréciation de ses mérites et les conditions de déroulement de son stage, ainsi que l'atteinte portée aux principes de l'égale admissibilité et de l'égal accès aux emplois publics et au principe de non-discrimination, le requérant doit être regardé comme soulevant, par voie d'exception, l'illégalité de la délibération du jury de fin de formation, seul moyen opérant de sa requête.

13. En premier lieu, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 29 octobre 2008 susvisé : " Le jury de l'examen de fin de formation comprend : - le directeur général de l'offre de soins ou son représentant ; / le directeur général du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière ou son représentant ; / - un membre de l'inspection générale des affaires sociales ; / - le directeur B... des hautes études en santé publique ou son représentant ; / - un professeur B... des hautes études en santé publique, proposé par le directeur de l'école ; / - un membre de l'enseignement supérieur ; / - trois membres du corps des directeurs d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux de la fonction publique hospitalière. Les membres du jury sont nommés par arrêté du directeur général du centre national de gestion. Le jury est présidé par le directeur général de l'offre de soins. En cas d'absence ou d'empêchement, la présidence est assurée par le directeur général du centre national de gestion précité. Le secrétariat est assuré par l'Ecole des hautes études en santé publique. ".

14. Il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal établi par le jury d'examen et il n'est pas contesté, que le membre de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) désigné par arrêté du 25 novembre 2019 de la directrice générale du CNG était " absent, excusé " lors de la délibération du 13 décembre 2019 du jury de l'examen de fin de formation, réduit à huit membres sur les neuf prévus par les dispositions précitées. S'il est constant que la composition du jury était ainsi irrégulière, cette circonstance n'est pas, à elle-seule, de nature à entacher d'irrégularité la composition du jury dès lors qu'il n'est pas sérieusement contesté que l'administration a eu connaissance de l'empêchement de ce membre du jury dans un délai trop court pour envisager, en remplacement, la nomination d'un autre membre de l'IGAS. En tout état de cause, les huit autres membres du jury étant présents sans qu'il soit prévu par les dispositions applicables ni ne ressorte des pièces du dossier qu'une voix prépondérante aurait été accordée à la présidente du jury d'examen, et dès lors qu'aucune disposition légale ou réglementaire ni principe général du droit n'impose qu'un tel jury comporte un nombre pair de membres, une telle irrégularité n'a pu avoir d'influence sur le sens de la délibération prise au visa de la proposition de la commission de notation de stage, ni privé l'intéressé d'une garantie.

15. En deuxième lieu, si M. C... soutient que la délibération du jury ne fait pas apparaître de commentaires ou motivation à partir de la fiche d'appréciation de 2019 de la commission de notation du stage long intervenant en amont de la délibération contrairement à celle de 2018, et en déduit qu'il n'est pas certain que cette fiche soit réellement celle à partir de laquelle le jury s'est prononcé le 13 décembre 2019, fait valoir, en conséquence, que la preuve que cette commission se serait tenue dans des conditions régulières n'est pas rapportée, les circonstances qu'il invoque ne sont pas établies par les pièces du dossier alors même que, comme l'ont relevé les premiers juges, le CNG produit la fiche litigieuse revêtue du nom et de la signature de ses trois membres qui mentionne la note proposée, ainsi que l'appréciation portée sur les stages effectués par le requérant en 2019.

16. En troisième lieu, la seule circonstance qu'un membre d'un jury d'examen professionnel connaisse un candidat ne suffit pas à justifier qu'il s'abstienne de participer aux délibérations qui concernent ce candidat. En revanche, le respect du principe d'impartialité exige que s'abstienne de participer, de quelque manière que ce soit, aux interrogations et aux délibérations qui concernent un candidat, un membre du jury qui aurait avec celui-ci des liens, tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, qui seraient de nature à influer sur son appréciation.

17. En l'espèce, M. C... soutient que le jury était partial au motif que le responsable de la filière, dont l'influence a été prépondérante, aurait dû s'abstenir de siéger dans le jury de fin de formation du 13 décembre 2019 après avoir siégé dans celui de l'année précédente. Il expose également que celui-ci était animé d'un parti pris contre les élèves issus du 3ème concours, au surplus ayant précédemment exercé comme lui dans le secteur privé et, ainsi, d'une hostilité et animosité personnelles avérées à son encontre depuis le début de sa scolarité. En se bornant à faire état d'allégations non établies par les pièces du dossier alors mêmes que, contrairement à l'année précédente, ledit responsable ne faisait pas partie des membres de la commission de notation de stage long, et dès lors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que, dans un contexte de prolongement de stage et compte-tenu des préconisations du jury d'examen de l'année précédente relatives au suivi particulier devant être apporté aux stages de l'intéressé, ce responsable aurait excédé les limites de son rôle et de ses obligations, le requérant n'établit pas la réalité de l'aversion et de la partialité invoquées alors qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que la note obtenue à la suite de ses stages aurait été fondée sur des éléments étrangers à ses mérites. Par suite, le moyen doit être écarté.

18. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 11, l'appréciation portée par le jury de fin de formation, appelé à se prononcer en vue de la titularisation des élèves DS3 à l'issue d'une période de formation et de stage, ne peut être censurée qu'en cas d'erreur manifeste. Plusieurs motifs peuvent fonder un refus de titulariser un stagiaire à l'issue d'un stage, notamment l'insuffisance professionnelle, ou encore, une manière de servir jugée non satisfaisante compte tenu du comportement général de l'intéressé dans ses relations de travail.

19. Il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, que la note de 7/20 qui a été attribuée à M. C... à l'épreuve de stage de professionnalisation - en ce incluse l'appréciation du mémoire - ne serait pas justifiée, dès lors qu'à l'issue du premier stage de trois mois effectué au sein de l'Ehpad de Créon, son maître de stage a relevé que, pour avoir manifesté des difficultés à accepter la prolongation du stage, il avait eu du mal à s'intégrer et mis du temps à s'investir dans cette reconduction et, qu'en dépit de sa détermination à mener à bien les dossiers confiés et de son intérêt pour le bien-être des résidents, subsistaient des interrogations sur le temps consacré à ses missions, une insuffisance de participation à la vie institutionnelle ainsi qu'aux différents groupes de travail, l'absence de création de véritables relations professionnelles avec l'équipe administrative étant également relevée. Si l'appréciation du second stage de quatre mois effectué au sein du centre hospitalier d'Agen-Nerac a été satisfaisante, il ne ressort pas des pièces de dossier que le jury lui aurait donné une importance insuffisante, sachant qu'il pouvait légitimement manifester de plus grandes exigences dans le cadre d'une prolongation de scolarité. Par ailleurs, si le requérant invoque des carences et défaillances de la part de l'EHESP s'agissant de l'organisation matérielle des stages et de l'accompagnement qualifiés d'insuffisants, de telles allégations ne sont pas étayées, alors même qu'il ressort de ses propres écritures que les exigences du jury ont été suivies par la mise en œuvre de rencontres téléphoniques tripartites mensuelles entre lui-même, ses maîtres de stages et le responsable de la filière.

20. En définitive la moyenne totale obtenue par M. C... tenant compte de l'ensemble des résultats obtenus à l'issue de sa scolarité à l'EHESP a été de 9,1/20 alors que celle des 82 élèves de la promotion 2018/2019 s'est élevée à 14,1/20 et celle du dernier admis à 11,3/20. Il n'est en définitive pas établi qu'elle ne reflèterait pas sa manière de servir, dès lors que son comportement au cours de sa première phase de scolarité à l'EHESP en 2017/2018 a été marqué par d'importants et nombreux retards dans la restitution de tâches confiées, que ne sauraient expliquer des contingences matérielles ni les contraintes familiales et personnelles dont s'est prévalu l'intéressé, d'une façon parfois nonchalante et inappropriée. Les courriels versés aux débats révèlent par ailleurs que le requérant a pu faire preuve de maladresse dans ses propos, sources de malentendus et de situations tendues, notamment avec les services administratifs. Sans que soit opposables la pétition de soutien émanant des élèves de sa promotion ainsi que la lettre de soutien d'un de ses premiers maîtres de stage, il s'en infère, qu'en refusant de le titulariser, le jury d'examen de fin de formation n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

21. En dernier lieu, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral ou de discrimination, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence de tels agissements. Il incombe ensuite à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que ceux-ci sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ou toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

22. En se bornant à se prévaloir de ce qu'il aurait fait l'objet de discrimination parce qu'étant de double nationalité et le plus âgé de la promotion 2018-2019 des élèves DS3 issu du 3ème concours après avoir exercé dans le secteur privé, alors qu'il résulte au demeurant des pièces du dossier que trois autres élèves étaient issus de ce concours dans la promotion 2018-2019, M. C... ne soumet pas d'éléments de fait susceptible de faire présumer une atteinte au principe de l'égalité de traitement des personnes et de non-discrimination.

23. S'il évoque, en outre, diverses circonstances relatives au déroulement de l'année

2018-2019, telles que le choix unilatéral par le responsable de formation des D3S d'un établissement ne présentant pas les conditions minimales exigibles pour la réalisation d'un stage de professionnalisation de janvier à mars 2019, la fixation unilatérale par celui-ci d'un ensemble d'objectifs, de lieux et de maîtres de stages, la communication très tardive par l'EHESP du rapport d'évaluation du stage dans l'Ehpad de Créon, la survalorisation selon lui de ce stage court de formation du début d'année, l'exigence vis-à-vis de lui seul, qui plus est à une date tardive, d'un écrit supplémentaire au rapport de stage de professionnalisation, sans communication des attendus du jury final, le contenu inapproprié des questions posées par ce jury et, plus généralement, un manquement de la part de l'administration à son obligation de loyauté, outre ainsi qu'il a été dit au point 19 que la réalité de tous les dysfonctionnements invoqués quant au déroulement de la période de stage n'est pas établie, le CNG apporte la preuve en tout état de cause que les modalités d'organisation de l'année de prolongation de la formation pratique du requérant étaient justifiées par les nécessités de la formation, adaptées aux lacunes de l'intéressé en termes de compétences et à son comportement inadapté tels que relevées par le jury l'année précédente, et répondaient aux préconisations de ce dernier dans un contexte de redoublement. En tout état de cause, il résulte de ce qui a été dit au point 20 que le jury de l'examen de fin de formation s'est uniquement fondé, pour prendre la décision en litige, sur la manière de servir de M. C.... Le moyen doit, dès lors, être écarté.

24. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner la production de pièces complémentaires, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

25. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. C... doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge des défendeurs, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, à l'École des hautes études en santé publique et à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Topin, présidente assesseure,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juin 2024.

La rapporteure,

M-D JAYERLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA01837 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01837
Date de la décision : 26/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : COULAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-26;22pa01837 ?
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