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07/06/2024 | FRANCE | N°23PA05406

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 07 juin 2024, 23PA05406


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par une première requête n° 2119665, Mme Meslier a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler le titre de perception d'un montant de 39 559,53 euros émis à son encontre le 4 juin 2021 relatif à un trop-perçu de rémunération ainsi que la décision du 2 septembre 2021 rejetant son recours administratif préalable obligatoire formé contre ce titre et, d'autre part, de la décharger de l'obligation de payer la somme correspondante.



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r une seconde requête n° 2119707, Mme Meslier a demandé au tribunal administratif de Paris de condam...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête n° 2119665, Mme Meslier a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler le titre de perception d'un montant de 39 559,53 euros émis à son encontre le 4 juin 2021 relatif à un trop-perçu de rémunération ainsi que la décision du 2 septembre 2021 rejetant son recours administratif préalable obligatoire formé contre ce titre et, d'autre part, de la décharger de l'obligation de payer la somme correspondante.

Par une seconde requête n° 2119707, Mme Meslier a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros, à parfaire, en réparation des préjudices subis du fait de l'émission à son encontre le 4 juin 2021 de ce titre de perception, augmentée des intérêts au taux légal courant à compter de la date de réception de sa réclamation indemnitaire préalable et de la capitalisation des intérêts.

Par un jugement commun nos 2119665 et 2119707 du 3 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a déchargé Mme Meslier de l'obligation de payer la somme de 1 844,43 euros mise à sa charge par le titre de perception émis le 4 juin 2021, a annulé ce titre et la décision du 2 septembre 2021 rejetant le recours administratif préalable introduit par Mme Meslier, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance et a rejeté le surplus des conclusions de la requête n° 2119665 ainsi que la requête n° 2119707.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique qui n'a pas été communiqué, enregistré les 29 décembre 2023 et 29 février 2024, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1, 2 et 3 du jugement rendu par le tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande de première instance de Mme Meslier enregistrée sous le n° 2119665.

Il soutient que :

- c'est à tort que les juges de première instance ont déchargé Mme Meslier de l'obligation de payer la somme de 1 844,33 euros et ont retenu que le titre de perception du 4 juin 2021 était insuffisamment motivé ;

- la somme de 1 844,33 euros correspond à la part de contribution sociale généralisée (CSG) déductible et non à des cotisations auprès d'un organisme de mutuelle, la mention figurant sur le titre de perception constituant une simple erreur de plume ;

- l'objet figurant sur le titre de perception portant la mention " indu sur rémunération issu de paye de mars 2021 " ne signifie pas que le versement indu est intervenu en mars 2021 mais seulement qu'il a été constaté à l'occasion des opérations de paie de ce mois ;

- le titre de perception mentionne expressément les bases de la liquidation et les éléments des calculs effectués par l'administration conformément aux dispositions de l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- l'addition des montants figurant sur le titre de perception en tant que " reste à recouvrer " correspondant à une somme totale de 39 559,53 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 février 2024, Mme Meslier, représentée par Me Colliou, conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a limité la décharge de l'obligation de payer à la somme de 1 844,43 euros ;

2°) d'annuler le titre de perception d'un montant de 39 559,53 euros émis à son encontre le 4 juin 2021 et la décision rejetant son recours préalable obligatoire formé contre ce titre ;

3°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme mise à sa charge ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens soulevés par le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire ne sont pas fondés ;

- l'administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en lui versant des sommes d'un montant supérieur à celui auquel elle pouvait prétendre ;

- elle est fondée à solliciter la réduction de la moitié du montant de la somme dont le paiement est réclamé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lorin,

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme Meslier, secrétaire administrative au sein de la direction de l'alimentation du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, a sollicité son admission à la retraite et a en conséquence été radiée des cadres à compter du 26 janvier 2020. Elle a toutefois continué à percevoir son traitement jusqu'à la fin du mois de février 2021. Un titre de perception a été émis le 4 juin 2021 en vue de recouvrer le trop-perçu de rémunération dont elle avait bénéficié entre le 27 janvier 2020 et le 28 février 2021 à hauteur de la somme 39 559,53 euros. Mme Meslier a contesté ce titre et a parallèlement formé une demande indemnitaire tendant à obtenir réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'émission de ce titre. A la suite du rejet de ces deux demandes, elle a saisi le tribunal administratif de Paris. Par la présente requête, le ministre chargé de l'agriculture relève régulièrement appel du jugement du 3 novembre 2023 en tant que le tribunal administratif a fait droit partiellement à la demande de Mme Meslier en la déchargeant de l'obligation de payer une somme de 1 844,43 euros et en annulant le titre de perception en litige et la décision du 2 septembre 2021 rejetant le recours administratif formé par l'intéressée. Par la voie de l'appel incident, Mme Meslier demande régulièrement à la Cour de réformer ce jugement en tant qu'il a limité la décharge de l'obligation de payer à cette somme.

Sur l'appel principal :

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Pour décharger Mme Meslier de l'obligation de payer la somme de 1 844,43 euros, le tribunal administratif a relevé que le titre de perception mentionnait qu'elle correspondait à des cotisations de mutuelle alors qu'il résultait de l'instruction que l'intéressée s'acquittait directement de ses cotisations auprès de son organisme de mutuelle au cours de la période couverte par le titre. Le ministre chargé de l'agriculture soutient que cette somme ne correspond pas à des contributions auprès d'un organisme de mutuelle mais à la contribution sociale généralisée (CSG) déductible due par l'intéressée, le titre comportant une erreur de plume sur la désignation de cette somme. Toutefois, alors, d'une part, que le titre mentionne clairement que la somme de 1 844,43 euros se rapporte à la mutuelle et précise que la somme due au titre de la CSG s'élève à un autre montant de 1 418,28 euros, et, d'autre part qu'il résulte de l'instruction que Mme Meslier s'acquittait de sa contribution directement auprès d'un organisme de mutuelle, il n'établit ni l'erreur de plume dont il se prévaut, ni que Mme Meslier était redevable de cette somme.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 : " Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation ". Tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

4. Le titre de perception émis à l'encontre de Mme Meslier le 4 juin 2021 comporte comme objet " indu sur rémunération issu de paye de mars 2021 c. détail infra ". Le ministre chargé de l'agriculture fait valoir que l'objet de ce titre ne doit pas s'entendre comme se rapportant à un versement intervenu au mois de mars mais comme le constat à cette période d'un indu de traitement pour la période comprise entre le 27 janvier 2020 et le 28 février 2021. Il fait valoir également que l'addition des " restes à recouvrer " correspond au total de la somme réclamée. Toutefois, ni le titre de perception, ni le détail des sommes à payer annexé à ce titre, ne permettent de comprendre clairement que l'indu dont le remboursement est réclamé se rapporte précisément à la période du 27 janvier 2020 au 28 février 2021, en l'absence de toute indication en ce sens. Les montants qui y figurent ne permettent pas davantage de comprendre les éléments de calcul de l'administration permettant de mettre à la charge de Mme Meslier la somme totale de 39 559,53 euros. Aucune mention ne précise poste par poste la période concernée ainsi que les composantes des sommes dont le paiement global est réclamé. Par suite, le titre en litige ne répond pas aux exigences de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 qui permettent au débiteur d'être informé des bases et des éléments de calcul sur lesquels l'administration se fonde pour mettre une somme à sa charge.

5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre chargé de l'agriculture n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a déchargé Mme B... la somme de 1 844,43 euros, a annulé le titre de perception émis le 4 juin 2021, ensemble la décision du 2 septembre 2021 rejetant le recours administratif formé par l'intéressée et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions d'appel incident :

6. Mme Meslier fait valoir que la faute commise par l'administration doit conduire à la réduction à hauteur de la moitié de la somme dont le remboursement lui est réclamé. Il résulte de l'instruction que postérieurement à sa radiation des cadres, Mme Meslier a continué à percevoir son traitement auquel elle ne pouvait plus prétendre. Ces versements indus se sont prolongés sur une période de treize mois et résultent d'une carence exclusivement imputable à l'administration dans la gestion de sa situation, alors même que Mme Meslier avait été admise à faire valoir ses droits à la retraite et radiée des cadres à compter du 26 janvier 2020 par un arrêté du 16 octobre 2019. L'erreur ainsi commise n'a pas été rectifiée avant qu'elle n'en informe

elle-même l'administration par lettre recommandée du 22 février 2021, après avoir tenté en vain de joindre les services du ministère par téléphone ou par courriels. Mme Meslier est ainsi fondée à soutenir que ces carences et défaillances commises par les services du ministère sont, en l'espèce, constitutives d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Compte tenu des démarches répétées que Mme Meslier a dû entreprendre de bonne foi pour obtenir la régularisation de sa situation et de la durée pendant laquelle cette carence s'est prolongée sans que l'erreur soit décelée par l'administration, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi en accordant à Mme Meslier une réduction à hauteur de 15 % de la somme dont elle reste redevable.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire est rejetée.

Article 2 : La somme mise à la charge de Mme Meslier au titre du trop-perçu de rémunération dont elle est redevable sera réduite à hauteur de 15 % du montant dû.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Mme Meslier au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions incidentes présentées par Mme Meslier sont rejetées pour le surplus.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... Meslier et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le7 juin 2024.

La rapporteure,

C. LORIN

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA05406


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA05406
Date de la décision : 07/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SELARL ENARD-BAZIRE-COLLIOU AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-07;23pa05406 ?
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