Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 par lequel la préfète du Val-de-Marne l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 2110732 du 29 novembre 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 décembre 2022, Mme B... C..., représentée par Me Saligari, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que les parties n'ont pas été convoquées à l'audience, contrairement à ce que mentionne le jugement ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- la préfète n'a pas procédé à un examen complet et sérieux de sa situation ;
- son droit à être entendue a été méconnu ;
- la décision est entachée d'un défaut de base légale dès lors qu'elle a été prise aux visas de dispositions qui n'étaient plus en vigueur, et qui ne lui étaient pas applicables ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 611-1 4°), L. 541-1 et L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle viole les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire sur laquelle elle se fonde ;
- elle viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée à la préfète du Val-de-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par une décision du 20 mars 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a admis Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bruston a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante angolaise née le 8 juillet 1984, est entrée en France en 2020 selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 26 octobre 2020, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 26 août 2021. Par un arrêté du 2 novembre 2021, la préfète du Val-de-Marne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 29 novembre 2022 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. L'avis d'audience reproduit les dispositions des articles R. 731-3 et R. 732-1-1. Il mentionne également les modalités selon lesquelles les parties ou leurs mandataires peuvent prendre connaissance du sens des conclusions du rapporteur public, en application du premier alinéa de l'article R. 711-3 ou, si l'affaire relève des dispositions de l'article R. 732-1-1, de la décision prise sur la dispense de conclusions du rapporteur public, en application du second alinéa de l'article R. 711-3. L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience. Toutefois, en cas d'urgence, ce délai peut être réduit à deux jours par une décision expresse du président de la formation de jugement qui est mentionnée sur l'avis d'audience. ". Et aux termes de l'article R. 711-2-1 du même code : " Les parties ou leur mandataire inscrits dans l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 peuvent être convoqués à l'audience par le moyen de cette application. Les parties qui ont accepté l'usage du téléservice mentionné à l'article R. 414-2 pour une affaire peuvent être convoquées au moyen de ce téléservice à l'audience à laquelle elle sera appelée. Les dispositions de l'article R. 611-8-6 sont applicables. ".
3. Mme C... soutient que le jugement est irrégulier dès lors que les parties n'ont pas été convoquées à l'audience. Toutefois, contrairement à ce qu'affirme la requérante, la préfète de Seine-et-Marne a été régulièrement convoquée à l'audience du 23 novembre 2022 à 9 heures 30 par un courrier versé dans l'application " Télérecours " le 14 novembre 2022, dont elle a accusé lecture le 15 novembre 2022, et son avocat, lequel au demeurant était présent à l'audience, a été averti le 18 novembre 2022. En revanche, ainsi que le fait valoir la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du dossier de première instance, que Mme C... ait été régulièrement convoquée à cette audience, ni même son conseil, le courrier de convocation qui lui aurait été adressé ne figurant pas au dossier, en dépit de la mention " avis d'audience " figurant sur l'application " Télérecours ". Aucun avis de mise à disposition de ce courrier, ni aucun accusé de lecture ne figurent au dossier. Dans ces conditions, Mme C... doit être regardée comme n'ayant pas été convoquée à l'audience du 23 novembre 2022, à laquelle elle était d'ailleurs absente, de même que son conseil. Par suite, en omettant de convoquer la requérante à l'audience, le tribunal administratif de Melun a entaché son jugement d'irrégularité. Mme C... est ainsi fondée à en demander l'annulation.
4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Melun, tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 novembre 2021 de la préfète du Val-de-Marne.
Sur la demande présentée par Mme C... devant le tribunal :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. En premier lieu, la décision contestée, qui vise le 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que la demande d'asile présentée par Mme C... a été rejetée par une décision du 26 octobre 2020 du directeur général de l'OFPRA, confirmée par une décision du 26 août 2021 de la CNDA, et relève que la mesure d'éloignement qui lui est opposée ne contrevient pas aux stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle comporte ainsi l'exposé des considérations de droit et de fait qui la fondent. Par suite, la préfète, qui n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments de fait caractérisant la situation de Mme C..., a suffisamment motivé sa décision.
6. En deuxième lieu, il ne ressort ni de cette motivation, ni d'aucune autre pièce du dossier qu'avant d'obliger Mme C... à quitter le territoire français, la préfète du
Val-de-Marne aurait omis de procéder à un examen particulier de sa situation personnelle.
7. En troisième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de ses arrêts C-166/13 Sophie Mukarubega du 5 novembre 2014 et C-249/13 Khaled Boudjlida du 11 décembre 2014, que le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Ce droit n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement. Il résulte également de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt C-383/13
M. A..., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013, que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
8. Lorsqu'il présente une demande d'asile, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande d'asile, il pourra faire l'objet d'un refus de titre de séjour et, lorsque la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui a été définitivement refusé, d'une mesure d'éloignement du territoire français. Il lui appartient, lors du dépôt de sa demande d'asile, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles et notamment celles de nature à permettre à l'administration d'apprécier son droit au séjour au regard d'autres fondements que celui de l'asile. Il lui est loisible, tant au cours de l'instruction de sa demande, qu'après que l'OFPRA et la CNDA ont statué sur sa demande d'asile, de faire valoir auprès de l'administration toute information complémentaire utile.
9. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été entendue par l'OFPRA, puis par la CNDA dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile et pouvait faire valoir à tout moment auprès de la préfecture les éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle. En outre, l'intéressée n'établit ni même n'allègue qu'elle aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ou qu'elle aurait été empêchée de présenter ses observations avant que ne soit prise la mesure d'éloignement litigieuse. Ainsi, la préfète, qui n'était pas tenue d'inviter Mme C... à formuler des observations avant l'édiction de cette mesure, ne l'a pas privée de son droit à être entendue.
10. En quatrième lieu, Mme C... soutient que la décision attaquée est entachée d'un défaut de base légale dès lors qu'elle a été prise aux visas et au regard de dispositions qui n'étaient plus en vigueur et qui ne lui étaient pas applicables, notamment les articles R. 742-2, L. 314-11 et L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, nonobstant la mention de ces articles dans leur version antérieure au 1er mai 2021, il ressort des termes de l'arrêté en litige que celui-ci a été pris au motif que la demande d'asile de Mme C... a été définitivement rejetée par l'OFPRA puis la CNDA, de sorte que l'intéressée ne disposait plus du droit au maintien sur le territoire. Ainsi, la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise non pas en application des textes susmentionnés dans leur version antérieure au 1er mai 2021, mais en application des dispositions du 4°) de l'article L. 611-1 du même code, lequel est régulièrement visé dans sa version applicable à la décision en litige. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale dont serait entachée la décision en litige doit être écarté.
11. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 541-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 541-2 de ce code : " L'attestation délivrée en application de l'article L. 521-7, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la Cour nationale du droit d'asile statuent. ". Aux termes de l'article R. 542-1 du même code : " En l'absence de recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin à la notification de cette décision./ Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci. ". Enfin, aux termes de l'article R. 542-4 dudit code : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 542-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français. ".
12. Il résulte des dispositions citées au point 2 que l'étranger qui demande l'asile a le droit de se maintenir sur le territoire français à ce titre jusqu'à la notification régulière de la décision de l'OFPRA ou, si un recours a été formé devant elle, jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la CNDA ou, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification régulière de cette ordonnance.
13. Il ressort des pièces du dossier, notamment du relevé d'informations de la base de données " Telemofpra " versé au dossier par la préfète du Val-de-Marne en première instance, que la demande d'asile de Mme C... a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 26 octobre 2020, confirmée par une décision de la CNDA du 26 août 2021. Ainsi, en application des dispositions de l'article L. 542-1 précité, le droit de Mme C... de se maintenir sur le territoire français a pris fin à la date de lecture de la décision de la CNDA, soit le 26 août 2021, et non à la date de sa notification comme le soutient la requérante. En outre, selon les indications figurant sur la fiche " Telemofpra ", qui font foi jusqu'à preuve du contraire, la décision de l'OFPRA du 26 octobre 2020 a été notifiée à la requérante le 17 novembre 2020, et la décision de la CNDA du 26 août 2021 lui a été notifiée le 13 septembre 2021. Enfin, à supposer même que la notification de la décision de la CNDA n'aurait pas été régulière au regard des dispositions de l'article R. 532-54 qui prévoit, notamment, une information de la personne intéressée du caractère positif ou négatif de la décision de la CNDA dans une langue qu'elle comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'elle la comprend, cette circonstance est sans incidence sur la fin du droit de l'intéressée au maintien sur le territoire en application des dispositions de l'article L. 542-1 précité. Par suite, la préfète du Val-de-Marne pouvait légalement, par son arrêté du 2 novembre 2021, obliger Mme C... à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 précité. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 611-1 4°), L. 541-1 et L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté.
14. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, les tribunaux des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
15. Mme C... se prévaut de la durée de son séjour en France et de ce que sa fille est née sur le territoire français le 8 juin 2020. Elle soutient par ailleurs qu'il existe des risques de persécution pour sa fille, comme pour elle, en cas de retour en Angola. Toutefois, d'une part, la requérante n'était présente en France que depuis deux ans à la date de la décision en litige. Par ailleurs, alors qu'elle ne justifie d'aucune insertion professionnelle sur le territoire, elle ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'elle poursuive normalement, avec son enfant mineur, sa vie privée et familiale à l'étranger, en particulier en Angola où elle n'établit, ni même n'allègue, qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales, et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 36 ans. En outre, la mesure d'éloignement n'a ni pour objet ni pour effet de séparer l'intéressée de sa fille. Enfin, Mme C..., qui se borne à faire état d'opinions politiques qui lui seraient imputées à raison de son appartenance à une organisation non gouvernementale pour le développement de la culture et des droits de l'homme, n'établit pas qu'elle ou sa fille seraient susceptibles d'être personnellement exposées à des traitements dégradants ou inhumains, alors que leurs demandes d'asile ont été définitivement rejetées. Par suite, en obligeant Mme C... à quitter le territoire français, la préfète du Val-de-Marne n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
16. En dernier lieu et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de Mme C....
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
17. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination doit, en conséquence, être écarté.
18. En second lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...). Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
19. Mme C..., dont la demande d'asile a été rejetée par une décision du
26 octobre 2020 du directeur général de l'OFPRA, confirmée par une décision du 26 août 2021 de la CNDA, n'apporte aucun élément permettant de considérer qu'elle ou sa fille encourrait dans le cas d'un retour dans son pays d'origine, de manière suffisamment personnelle, certaine et actuelle, des menaces quant à sa vie ou sa personne ou des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces stipulations et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écarté.
20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2110732 du 29 novembre 2022 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente,
- Mme Bruston, présidente assesseure,
- Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2024.
La rapporteure,
S. BRUSTONLa présidente
M. HEERS
La greffière,
A. GASPARYANLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 22PA05510 2