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05/06/2024 | FRANCE | N°23PA03561

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 7ème chambre, 05 juin 2024, 23PA03561


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 25 avril 2022 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour.



Par un jugement n° 2210015 du 13 juin 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et mémoire, enregistrés les 4 août et 9 octobre 2023, Mme A... demande à l

a Cour :



1°) d'annuler le jugement n° 2210015 du 13 juin 2023 du Tribunal administratif de Montreuil ;



2°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 25 avril 2022 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2210015 du 13 juin 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et mémoire, enregistrés les 4 août et 9 octobre 2023, Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2210015 du 13 juin 2023 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 avril 2022 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir ;

4°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de sa situation administrative et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté est entaché d'une incompétence de son signataire ;

- cet arrêté a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'éloignement l'expose, ainsi que ses enfants, à des risques pour leur vie en cas de retour dans son pays.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

La demande d'aide juridictionnelle de Mme A... a été rejetée par décision du 21 novembre 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris. Le recours contre cette décision a été rejetée par une décision de la présidente de la Cour en date du 11 janvier 2024.

Par ordonnance du 15 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 février 2024 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante nigériane née le 28 juin 1987, est entrée en France le 20 septembre 2009, selon ses déclarations. Elle a donné naissance à un enfant le 29 juin 2011, lequel a été reconnu par un ressortissant français. Mme A... a bénéficié, à compter du 13 février 2012, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", puis d'une carte de résident en qualité de parent d'enfant français. Par un jugement du 16 mai 2019, le Tribunal judicaire de Créteil a annulé la reconnaissance de paternité faite par M. D..., en raison de son caractère frauduleux. Par un arrêté du 12 octobre 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a retiré l'ensemble des titres de séjour qui avaient été délivrés à l'intéressée. Par un arrêté du 25 avril 2022, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer le titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " qu'elle a sollicité le 17 novembre 2021. Mme A... relève appel du jugement du 13 juin 2023 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 25 avril 2022 :

2. En premier lieu, par un arrêté n° 2022-0219 du 7 février 2022, régulièrement publié au bulletin d'informations administratives du même jour, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné délégation à M. F... E..., sous-préfet du Raincy, à l'effet de signer les décisions prises en matière de police des étrangers, lorsqu'elles concernent des ressortissants résidant dans l'arrondissement du Raincy. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'attestation d'abonnement à la fourniture d'énergie établie à la date du 10 mars 2022, de l'avis d'échéance de loyer pour le mois de mai 2022 ainsi que de l'acte de naissance de son enfant né le 8 septembre 2022, qu'à la date de la décision attaquée, Mme A... résidait dans la commune de Neuilly-sur-Marne. Dès lors que cette commune est située dans l'arrondissement du Raincy, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté comme manquant en fait.

3. En second lieu, Mme A... reprend en appel les moyens tirés de ce que la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, que cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie privée et familiale et de ce que la décision d'éloignement l'expose, ainsi que ses enfants, à des risques pour leur vie, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ces moyens par les premiers juges. Par suite, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.

4. Il ressort des pièces du dossier que, par un jugement du 16 mai 2019 devenu définitif, le tribunal de grande instance de Créteil a annulé la reconnaissance de paternité souscrite par anticipation, le 3 mars 2011, par M. D..., ressortissant français, au bénéfice de l'enfant de la requérante né le 19 juin 2011, et dit que cet enfant n'était pas Français, aux motifs que M. D... a reconnu au moins six enfants nés de six mères différentes de nationalité nigériane ou congolaise. En outre, M. D... et Mme A... disposent d'un domicile séparé et les déclarations des intéressés relatives aux circonstances de leur rencontre n'ont pas permis d'attester de cette relation. Il est constant que le second prénom de l'enfant né le 19 juin 2011 n'est autre que le nom de famille du père des quatre autres enfants de la requérante, nés en 2012, 2013, 2017 et 2021. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis apporte des éléments précis et concordants permettant d'établir que Mme A... a volontairement bénéficié de la reconnaissance de paternité frauduleuse de son enfant dans le but d'obtenir un titre de séjour.

5. Par ailleurs, Mme A... fait valoir qu'elle vit en France depuis 2009 et qu'elle a bénéficié de titres de séjour entre 2012 et 2021. Or, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, ces titres de séjour ont été obtenus par fraude à la reconnaissance de paternité effectuée par un ressortissant français, au profit de son fils né le 29 juin 2011, qui a été annulée par une décision du tribunal de grande instance de Créteil du 16 mai 2019. Si la requérante soutient vivre en concubinage avec M. B..., compatriote et père de ses quatre enfants nés en 2012, 2013, 2017 et 2021, celui-ci est également en situation irrégulière sur le territoire français. Mme A... se prévaut également de la présence en France de ses cinq enfants ainsi que de la scolarisation des quatre aînés respectivement en classe de CM2, CE2 et moyenne section de maternelle. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que ses enfants ne pourraient pas poursuivre leur scolarité au Nigéria. Ainsi, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale de Mme A... se reconstitue dans son pays d'origine, où peuvent l'accompagner son époux et ses enfants et où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-deux ans. Enfin, pour son intégration professionnelle, les pièces produites se résument à deux bulletins de salaire pour l'année 2015, quatre bulletins de salaire pour l'année 2016, quatre bulletins de salaire pour l'année 2020 et sept bulletins de salaire pour l'année 2021, tous indiquant des montants de salaire nettement inférieur au montant du salaire minimum de croissance. Ces documents ne permettent pas de regarder Mme A... comme justifiant d'une insertion professionnelle intense et stable sur le territoire national. Dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme A..., une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale / (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

7. Toutefois, cette décision n'apparaît pas davantage contraire à l'intérêt supérieur de ses enfants, compte tenu de l'absence d'obstacle à la reconstitution de la cellule familiale au Nigeria où les enfants pourront poursuivre leur scolarité. Dans ces conditions, ce moyen doit être écarté.

8. Enfin, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Desvigne Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2024

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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23PA03561


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03561
Date de la décision : 05/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : AZOUGACH

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-05;23pa03561 ?
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